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Full text of "Correspondance politique de Dominique Du Gabre (évêque de Lodève), trésorier des armées à Ferrare (1552-1554), ambassadeur de France à Venise (1554-1557)"

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CORRESPONDANCE  POLITIQUE 


DE 


DOMINIQUE  DU  GABRE 

(1552-1557) 


CORRESPONDANCE  POLITIQUE 


DE 


DOMINIQUE  DU  GABRE 

(ÉVÊQUE  DE  LODÈVE) 

TRÉSORIER  DES  ARMÉES  A  FERRARE 

(1552  —  1554) 

AMBASSADEUR  DE  FRANCE  A  VENISE 

(1554  —  1557) 


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ALEXANDRE    YITALIS 

ASSOCIÉ   CORRESPONDANT    DE   LA    SOCIÉTÉ   DES   ANTIQUAIRES   DE   FRANCE 


PARIS 
FÉLIX  ALCAN,  ÉDITEUR 

108,    BOULEVARD    SAINT-GERMAIN,     108 

1903 
Tous  droits  réservés. 


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INTRODUCTION 


Exhumer  les  écrits  d'un  diplomate,  autrefois  éminent  dans  sa 
carrière,  mais  dont  le  nom  s'est  effacé,  peu  à  peu,  du  souvenir  de  la 
multitude,  recueillir  et  classer  son  œuvre  épistulaire ,  extraire  de 
cette  substance  la  vie  et  l'histoire  d'une  époque ,  telle  est  la  tâche 
que  de  nombreux  érudits  ont  entreprise,  avec  succès,  au  cours 
des  dernières  années,  et  que  nous  prétendons  nous  imposer  à  notre 
tour. 

C'est  ainsi,  par  exemple,  que  Monsieur  Tausserat-Radel  (1)  a  fait 
sortir  récemment  des  dépôts,  où  elles  reposaient  depuis  plusieurs 
siècles,  les  précieuses  dépêches  de  l'un  des  prédécesseurs  de 
Dominique  du  Gabre  à  l'ambassade  de  Venise,  l'évêque  de  Mont- 
pellier Guillaume  Pélicier  (2),  et  a  remis  en  lumière,  grâce  à  la 
publication  de  sa  correspondance,  précédée  d'une  magistrale  intro- 
duction, la  grande  figure  de  ce  prélat  si  distingué  (3). 

La  correspondance  de  Dominique  du  Gabre,  qui  fait  l'objet  de  la 
présente  publication,  constitue,  à  son  tour,  un  inventaire,  aussi  com- 
plet qu'il  nous  a  été  permis  de  le  dresser,  des  dépêches  du  presque 
immédiat  successeur  de  Pélicier. 

Elle  renferme  le  texte  des  lettres,  écrites  par  l'évêque  de  Lodève, 
durant  ses  fonctions  de  trésorier  du  Roi  en  résidence  à  Ferrare,  de 
1552  à  1554,  puis  de  celles,  qu'ambassadeur  à  Venise,  il  data  de  ce 
poste,  de  septembre  1554  à  la  fin  de  1557. 

l  M.  Alexandre  Tausserat-Radel,  sous-directeur  des  archives  du  ministère  des 
Affaires  étrangères. 

(2)  Guillaume  Pélicier.  né  vers  1490  à  Mauguio,  près  Montpellier  (Hérault: 
évêque  de  Montpellier  (1527-1568):  ambassadeur  à  Venise  1540-1542);  mort  le 
25  janvier  15G8  au  château  de  Montferrand ,  diocèse  de  Montpellier. 

(3)  Correspondance  politique  de  Guillaume  Pélicier,  ambassadeur  de  France  à 
Venise  ^1540-1542),  par  M.  Tausserat-Radel.  Paris.  Alcan.  1899,  in-octavo. 

2 


VI  INTRODUCTION 

Ce  recueil,  composé  de  dépêches  écrites  après  l'intervalle  de  dix 
années  (1542-1552),  qui  s'écoule  entre  la  mission  de  Pélicier  et  celle 
de  du  Gabre,  période  pour  laquelle  aucune  correspondance  n"a  été 
jusqu'ici  publiée,  apporte  une  contribution  précise  à  l'histoire  des 
relations  de  la  France  et  de  l'Italie  sous  le  règne  de  Henri  II. 

La  correspondance  de  du  Gabre  est,  en  effet,  abondante.  Elle  offre, 
à  tous  les  points  de  vue,  un  réel  intérêt  Elle  permet  de  suivre, 
comme  on  le  ferait  de  nos  jours  à  l'aide  d'un  journal,  le  récit  régu- 
lier des  opérations  militaires  qui  avaient  pour  principaux  théâtres  : 
Ferrare,  Parme,  Sienne,  La  Mirandole  ;  elle  nous  révèle  le  triste  état 
de  nos  finances  à  cette  époque  agitée,  et  la  légèreté  avec  laquelle  les 
dépenses  de  guerre  étaient,  trop  souvent,  engagées  ;  elle  nous  initie 
aux  événements  auxquels  le  prélat  fut  directement  mêlé,  nous 
dévoile  les  intrigues  dont  il  fut  le  témoin,  et  détermine  les  rôles 
joués  par  chacun  des  acteurs  dans  celle  émouvante  aventure. 

Elle  nous  fait  voir,  enfin,  combien,  après  avoir  sacrifié  sans  compter 
ses  hommes  et  son  argent,  au  profit  d'une  noble  cause,  la  France 
fut  mal  récompensée  de  sa  trop  généreuse  intervention ,  et  nous 
laisse  sur  cette  attristante  impression  qu'Elle  ne  recueillit,  hélas, 
pour  prix  de  ses  services,  que  l'ingratitude  et  l'abandon  de  ses  alliés 
de  la  veille. 

Il 

Il  n'existe  aucun  recueil  qui  contienne,  rassemblée  en  bloc,  l'en- 
tière correspondance  de  Dominique  du  Gabre. 

Les  dépôts  d'archives  que  nous  avons  explorés,  à  cet  égard,  ne 
conservent,  sur  les  négociations  auxquelles  cet  ambassadeur  a  été 
employé,  que  des  lettres  isolées,  et  il  nous  a  fallu,  pour  leur  donner 
une  cohésion  nécessaire,  pour  les  éditer  dans  un  ordre  chronolo- 
gique qui  fût  conforme  au  plan  généralement  adopté,  réunir,  en 
une  collection  unique,  des  séries  de  dépêches  disséminées  dans  les 
fonds  les  plus  divers 

Les  dépôts  qui  conservent  les  lettres  de  Dominique  du  Gabre. 
entières  ou  à  l'état  d'extraits,  originales  (1)  ou  sous  forme  de  copies, 
sont  nombreux. 

En  France,  la  Bibliothèque  nationale  possède  dans  le  Fonds 
français (2)  un  grand  nombre  de  lettres,  malheureusement  éparses, 

(1)  Les  lettres  originales  sont  celles  dont  l'ambassadeur  a  dicté  le  texte  à  son 
secrétaire,  et  au  lias  desquelles  il  a.  d'abord,  écril  de  sa  main  les  formules  de 
politesse,  puis  apposé  sa  signature  autographe. 

(2)  Les  volumes  de  ce  fonds,  qui  contiennent  des  lettres  de  du  Gabre,  portent 
les  cotes  suivantes  :  F.  Fr.  3111  -3125-3126-  15881—16079—20*53—20466-  J0  iliô  — 
20512-20525-2)  545-20641-20642-20643—20644—20645—20970-23236. 


tNTRODUCTION  VII 

qui  permettent,  dans  leur  ensemble,  de  suivre,  pas  à  pas,  le  prélat 
au  cours  de  sa  carrière,  et  de  se  rendre  exactement  compte  de  l'im- 
portance de  ses  missions. 

La  même  Bibliothèque  possède  aussi  quelques  lettres  conservées 
dans  le  Fonds  latin  (1). 

Les  archives  du  ministère  des  Affaires  étrangères  détiennent 
également  quelques  lettres  de  l'évêque,  et  certains  documents  se 
rapportant  à  la  période  qui  s'écoula  entre  le  rappel  de  du  Gabre  en 
France  et  l'arrvée  à  Venise  de  son  successeur  «  François  de 
Noailles»  (2). 

Enfin,  la  Bibliothèque  de  Grenoble  conserve  un  précieux  manus- 
crit (3)  qui  nous  a  fourni  un  nombre  inespéré  de  lettres.  C'est  un 
fort  volume  grand  in-octavo,  mesurant  trente  centimètres  sur  vingt- 
un,  couvert  en  parchemin  et  portant  sur  la  première  feuille  le  titre 
suivant  : 

((Lettres  et  Mémoires  de 

«Monsieur  du  Gabre,  évêque  de  Lodève,  ambassadeur  à  Venise; 
de  Messieurs  de  Lansac  et  de  la  Vigne,  ambassadeurs  à  la  Porte,  es 
années  1555-1556-1557,  avec  la  harangue  de  M.  de  Belièvre  à  la 
reine  Elizabeth  d'Angleterre  en  faveur  de  la  reine  d'Ecosse». 

Les  lettres  contenues  dans  ce  recueil  sont  toutes  des  copies  trans- 
crites sans  souci  de  l'ordre  chronologique. 

En  Italie,  les  Archives  de  l'État,  à  Modène  (4),  où  ont  été  versées 
en  1598  les  archives  de  Ferrare,  lors  de  l'annexion  de  cette  dernière 
ville  aux  États  Pontificaux,  nous  ont  fourni  quelques  lettres  de  du 
Gabre  adressées  au  duc  de  Ferrare. 

La  liste  des  ouvrages  que  nous  avons  dû  consulter  serait  trop 
longue  à  donner  ici  au  complet.  Il  convient,  cependant,  de  nommer 
le  recueil  de  Ribier  (5),  source  d'une  importance  capitale  pour 
l'étude  des  négociations  engagées  à  cette  époque  entre  la  France  et 
l'Italie,  Ribier  ayant  reproduit  un  nombre  considérable  de  lettres 
expédiées  par  les  principaux  agents  du  roi,  Messieurs  de  Lansac,  de 
Selve,  du  Gabre,  etc.  Toutefois,  pour  si  précieux  qu'il  soit  dans  son 
ensemble,  le  recueil  de  Ribier  ne  contient,  de  du  Gabre,  que  sept 
lettres,  se  rapportant,  presque  toutes,  à  son  ambassade  à  Venise. 

Quant  aux  autres  sources,  auxquelles  nous  avons  dû  puiser  aussi, 


(1)  F.  latin,  cote  17026,  correspondance  des  Évêques. 

(2)  Arch  du  ministère  des  Affaires  étrangères,  cote  Venise,  t.  vu. 

(3)  Bibliothèque  de  Grenoble,  N°  3i8. 

(4)  Arch.  de  Modène:  série  Cancelleria  Ducale,   Lettere  di  oratori  Esteri  in 
Italia-Francia  —  Buste  7  ed  8  et  série  dei  marchesi  Fieschi  di  Ferrara  —  Buste  2A. 

(5)  Ribier,   Lettres  et  mémoires  d'État  pour  servir  à   I  histoire   de  Henri  [I, 
2  vol.  in-4°.  Paris,  1666. 


VIII  INTRODUCTION 

nous  nous  réservons  de  les  indiquer  au  cours  de  cette  publication, 
et  nous  aurons  soin  de  renvoyer,  chaque  fois,  le  lecteur  aux 
ouvrages  et  aux  documents  qui  nous  ont  servi  de  guides  à  travers 
les  nombreux  problèmes  historiques  ou  biographiques  qu'une 
correspondance,  embrassant  une  période  aussi  longue,  ne  pouvait 
manquer  de  soulever. 


III 

C'est,  dans  cette  partie  de  la  vallée  de  l'Ariège,  autrefois  comprise 
dans  le  comté  de  Foix,  que  la  famille  du  Gabre  prit  anciennement 
naissance. 

La  petite  ville  de  Gabre  (I)  lui  donna  son  nom.  Nous  y  voyons, 
dès  le  treizième  siècle,  apparaître  un  de  ses  membres,  Fabre  du 
Gabre,  comme  représentant,  en  qualité  de  consul,  sa  communauté 
dans  un  procès  engagé  entre  la  commanderie  de  l'ordre  de  Saint- 
Jean,  établie  dans  ce  bourg,  et  les  habitants,  au  sujet  de  certains 
droit  seigneuriaux  (2). 

A  partir  de  l'époque  où  se  place  cet  épisode,  nous  perdons  trace 
des  du  Gabre  dans  la  région  pyrénéenne  (3),  puis,  un  demi-siècle 
plus  tard,  nous  les  retrouvons,  tout  à  coup,  dans  la  sénéchaussée  de 
Toulouse  (4);  mais,  soudain,  l'obscurité  s'épaissit  et,  pendant  un  long 
intervalle  de  deux  cents  ans  environ,  aucun  document  ne  vient  nous 
aider  à  préciser  l'histoire  de  la  famille.  C'est  seulement  vers  le  milieu 
du  xvie  siècle  qu'il  nous  est  permis  de  la  retrouver,  cette  fois  déii- 
nitivement  établie  dans  un  coin  fertile  et  riant  du  pays  toulousain. 

Dominique  du  Gabre  naquit  à  Grenade^ sur-Garonne  (5).  à  une  date 
que  l'histoire  ne  nous  a  pas  conservée  (6),  d'un  père  qui  avait  trouve 

(1)  Gabre  (Ariège),  arrondissement  de  Pamiers,  canton  de  Mas-d'Azil. 

(2)  Voir:  Monographie  d'une  famille  et  d'un  village,  par  M.  Elisée  de  Robkbt- 
Garils.  —  Toulouse,  Ed.  Privât,  îS'.f'.i  Cet  excellent  travail  reproduit  (Chap.  \ 
et  xi   le  texle  d'une  charte  de  1293  où  nous  avons  puise  ce  renseignement. 

(3)  M  de  Robert-Garils  [Op.  cit.,  p.  180}  nous  apprend  que  les  arrima  de 
Gabre  ont  presque  totalement  disparu  pendant  les  guerres  de  religion.  M.  Aristide 
de  Robert,  actuellement  maire  de  Gabre,  qui  a  bien  voulu  explorer,  sur  notre 
demande,  ses  archives  particulières  et  celles  de  la  commune  qu'il  administre, 
nous  informe  aussi  que  ses  recherches  a  l'égard  de-  origines  de  la  famille  du 
Gabre  sont  restées  infructueuses. 

(4)  L'Histoire  générale  <Ut  Languedoc  {t.  \.  p.  810,  édit.  Privât,  1888  .  dans  un 
extrait  des  Comptes  de  la  sénéchaussée  de  Toulouse,  pour  l'exercice  1336-1337, 
mentionne  un  maître  Raymond  du  Gabre. 

—  (5)  Grenade  sur-Garonne   (Haute-Garonne^,  chef-lieu  de  canton  de  1  arrondisse- 
ment d  •  Toulouse. 

(6)  Les  archives  de  celle  commune  ne  remontent  pas  au  delà  île  1584, 
(Renseignement  fourni  par  M.  Rumeau,  auteur  d'une  Monographie  de  Grenade- 
sur-Garonne;  Toulouse,  Regnault  et  tils,  1819). 


INTRODUCTION  IX 

fortune  au  greffe  de  la  ville  et  viguerie  de  Toulouse  (1).  C'est  dans 
la  ville  de  Grenade,  ainsi  que  dans  celle  de  Bussières-Buzet,  en  la 
vicomte  de  Villemur  (2),  que  s'étendaient  les  biens  patrimoniaux  de 
la  famille  (3). 

Les  du  Gabre,  tels  du  moins  que  les  documents  nous  apprennent  à 
les  connaître,  n'étaient  pas  dans  l'opulence  ;  leur  situation  était  celle 
de  gens  de  petite  noblesse,  aisés,  possédant  maison  de  ville  et 
quelques  modestes  domaines  pour  toute  fortune  (4).  Par  leurs  ma- 
riages, ils  étaient  alliés  avec  la  plupart  des  familles  nobles  de  la 
contrée  (5).  Ce  que  nous  savons  des  emplois  occupés  par  les  proches 
parents  de  Dominique  nous  indique  qu'ils  vivaient  étroitement 
dans  l'orbite  du  Parlement  de  Toulouse.  C'est  là  que  nous  ren- 
controns, en  1551,  un  Arnaud  du  Gabre  (6)  receveur  des  exploits  et 
amendes  de  la  Cour,  et  un  Georges  du  Gabre  (7)  conseiller  clerc  au 
même  Parlement,  propre  frère  de  notre  évêque,  qui  institua  ce 
dernier  son  légataire  universel  (8). 

Le  jeune  du  Gabre,  ne  se  sentant  aucune  disposition  pour  briguer 
la  survivance  de  son  père  dans  la  charge  de  greffier  de  la  ville  de 
Toulouse,  résolut  d'aborder  la  théologie  et  de  prendre  la  soutane. 
Doué  d'une  rare  intelligence  et  d'un  penchant  réel  pour  l'étude,  il 
conquit  rapidement  ses  premiers  grades  et  reçut  les  ordres  sacrés. 
Au  début  de  sa  carrière,  en  1546,  nous  le  rencontrons  à  Auch,  où  il 
occupe  les  fonctions  de  vicaire  général  (9)  auprès  du  cardinal  de 
Tournon  (10). 

(1)  Société  archéologique  du  Midi  de  la  France,  Bulletin  N°  13,  série  in-8°, 
pages  20  et  21. 

(2)  Ces  lieux  sont  situés  au  bord  du  Tarn,  à  moitié  chemin  entre  Gaillac  et 
Montauban.—  Villemur,  chef-lieu  de  canton,  arrondissement  de  Toulouse  (Haute- 
Garonne). 

1 3,  Dominique  du  Gabre  jouissait  de  ces  biens  en  1547.  Par  testament  en  date 
du  3  février  1547  (par  devant  Jean  Dabello ,  notaire  à  Auch),  il  en  disposa  en 
faveur  de  son  neveu  Raymond  du  Gabre.  (Communication  due  à  l'extrême  obli- 
geance de  M.  l'abbé  Galabert,  curé  d'Aucanville  ^Tarn-et-Garonne),  membre  de 
plusieurs  sociétés  savantes). 

Nous  aurions  voulu  retrouver  l'acte  de  donation  précité,  mais  les  minutes  de 
Dabello  ont  disparu,  ainsi  que  nous  l'affirme  M.  Odier,  notaire  à  Auch. 

(!)  Tous  les  biographes  de  du  Gabre  s'accordent,  sans  avoir  vérifié  ce  point, 
à  lui  attribuer  une  naissance  obscure.  Les  actes  sont  là  pour  rectifier  cette  erreur, 
et  nous  avons  tenu  à  rétablir  ici  la  stricte  vérité. 

(5)  Les  Puydorphille.  de  Capus,  de  Vaquiès,  du  Luc,  etc.  (Sommaires  d'actes 
intéressant  la  famille  du  Gabre,  communiqués  par  M.  l'abbé  Galabert). 

(6)  Bibliothèque  nationale.  Fonds  français  26103,  N°  675. 

(7)  Bibl.  nat.,  Cabinet  des  titres,  pièces  originales,  volume  1261  (Dossier  Gabre). 
(8j  Bibl.  nat.,  Cab.  des  titres,  etc.  tTestamenten  date  du  14  janvier  1545). 

(9)  Revue  de  Gascogne,  t.  xxxi.  p.  288.  «  Dominique  du  Gabre,  vicaire  général, 
fut  remboursé,  le  22  décembre  1546,  d'une  somme  de  95  livres  4  frs.  6  décimes, 
restant  due  sur  les  100  »  livres  qu'il  avait  prêtées  au  collège  des  Jésuites  d'Auch. 

(10)  François  de  Tournon,  cardinal  d'Ostie,   né  à  Tournon  en  1489,  mort  le 


X  INTRODUCTION 

Cette  circonstance  décide  de  son  avenir.  Le  vicaire  général  trouve 
dans  le  cardinal  un  ami  sûr.  et  un  protecteur  qui  s'entremet  volon- 
tiers auprès  du  Roi  pour  lui  obtenir,  coup  sur  coup,  d'importants 
bénéfices  et  de  hautes  dignités.  C'est  lui  qui  va  lui  faire  franchir 
rapidement  les  étapes  de  sa  carrière  ecclésiastique  et  qui,  dans 
quelques  années,  sera  l'auteur  de  son  élévation  au  poste  d'envoyé 
français  en  Italie. 

Dominique  du  Gabre  est  pourvu  de  la  commanderie  de  Bailleul, 
en  Normandie,  reçoit  la  charge  de  protonotaire  apostolique  en  cour 
romaine  ,  devient  premier  aumônier  du  Roi  à  la  cour  (1)  et  évêque 
de  Lodève  (2).  L'évêché  de  Lodève  lui  fut  attribué  à  la  suite  de  la 
cession  que  Guido  Ascanio  Sforza(3)lui  fit  de  ce  siège,  dont  il  venait 
d'être,  un  an  à  peine,  le  titulaire,  en  échange  de  la  commanderie  de 
Bailleul  et  du  prieuré  de  Saint-Saëns,  au  diocèse  de  Rouen  (4). 

Il  prit  possession  du  siège  de  Lodève  le  8  juin  1547(5);  mais, 
médiocre  observateur  des  devoirs  de  sa  charge,  il  ne  daigna  point 
s'astreindre  à  résider  continuellement  dans  son  modeste  diocèse  ; 
par  goût  autant  que  par  calcul,  il  s'arracha  à  l'engourdissement  de  sa 
ville  épiscopale,  et  alla  vivre  à  Paris.  Là,  en  effet,  tout  en  jouissant 
des  délices  de  la  Cour  de  Henri  II,  en  fréquentant  à  la  ville,  en 
étendant  ses  brillantes  relations,  en  demeurant  étroitement  rivé  à 
la  haute  personnalité  de  son  influent  protecteur,  il  pouvait,  mieux 
que  du  fond  de  sa  province,   assurer  son  avenir. 

Les  fréquentes  absences  de  du  Gabre  sont  manifestement  consta- 
tées par  les  procès-verbaux  des  sessions  des  États  de  Languedoc. 

22  avril  1562,  lut  employé  aux  plus  importantes  affaires  sous  François  I"  et 
Henri  II.  «  Les  Guises  le  firent  envoyer  comme  ambassadeur  à  Rome,  où  il  créa 
des  ennemis  à  Cliarles-Quinl.  Il  rentra  en  France  à  la  mort  de  Henri  II,  fut 
archevêque  d'Embrun  doll),  de  Bourges  (1525  .  d'Auch  (1531;,  de  Lyon  (15511, 
cardinal'(  1531)  et  ministre  d'Etat. 

(1)  Gallia  christiana,  t.  v.—  Ffsquet,  La  France  pontificale  idiocèse  de  Lodève. 
Collection  du  Languedoc  (Bénédictins),  vol.  41,  fol.  225.  —  Histoire  de  Saint- 
Germain-cles-Prés,  par  D.  Bouillard.  Paris,  1724,  page  190. 

(2)  Lodève,  chet-lieu  d'arrondissement  du  dép.  de  l'Hérault,  siège  d'un  évèclié 
sous  l'ancien  régime. 

(3)  Guido  Ascanio  Sforza,  né  à  Rome  en  1518,  de  Bosio,  comte  de  Santa  Fiore 
et  de  Constance  Farnèse,  bâtarde  de  Paul  III.  Ce  pape  le  lit  cardinal  à  I"  ans, 
évêque  de  Parme,  de  Lodève,  légat  de  Bologne  et  d'Emilie,  ambassadeur  en 
Hongrie,  etc.  Il  mourut  à  Cumedino,  province  de  Mantoue,  le  7  octobre  i 

(4)  FisyuET,  La  France  pontificale  (diocèse  de  Lodève),  p.  426. 

(5)  L'Histoire  de  la  VUle  de  Lodève,  par  Ernesl  Martin  i Montpellier,  Serre  et 
Roumégous,  1900,  2  vol.  in-8°),  apporte  à  cet  égard  (t.  n,  p.  3691  un  très  précis 
témoignage;  c'est  une  note  retrouvée  dans  le  livre  de  raison  de  la  famille  La 
Treilhe  de  Fozières,  ainsi  conçue:  «  Le  huictièsme  juin  de  l'an  mil  cinq  cents  xmi 
print  possession  de  Lodève,  Dominique  du  Gabre.  bien  désiré  ;  c'estoit  merveilhièa 
de  veoir  partant  du  cliasteau  du  Seigneur  de  Soubez  et  Casilhiac,  un  dimenge 
au  matin  ». 


INTRODUCTION  XI 

L'évêque  n'assiste  pas  à  la  session  de  1548  (I);  se  fait  représenter 
par  son  vicaire  au  concile  tenu  à  Narbonne  le  10  novembre  lool  (2), 
ainsi  qu'aux  États  de  Béziers  le  15  novembre  1552  (3  •  Par  exception, 
il  siège  aux  États  à  Beaucaire  en  loW  (4j,  et  à  Pézenas  en  1551  '•">>. 

Il  ne  perd  pas,  d'ailleurs,  entièrement  son  temps  ;  s'il  néglige  ses 
devoirs  spirituels,  il  soigne  ses  visées  politiques  ;  il  cherche  la  voie 
qui  doit  le  conduire  à  la  fortune.  Ses  vœux  vont  bientôt  être  exau- 
cés ;  vers  la  fin  de  1551,  le  Roi  décide  de  lui  confier  un  emploi  ;  il  le 
nomme  trésorier  général  des  armées  en  Italie,  avec  résidence  à 
Ferrare. 

Située  au  centre  d'une  plaine  fertile,  Ferrare  était,  sous  les  princes 
de  la  maison  d'Esté,  un  des  principaux  foyers  intellectuels  et 
politiques  de  l'Europe  (6).  A  l'inverse  de  Venise,  où  aboutissait  tout 
le  trafic  étranger  et  où  s'opéraient  les  transactions  commerciales  de 
l'Europe  avec  le  Levant,  Ferrare  était  dépourvue  de  négoce  ;  la  ville 
était  triste  et  peu  animée,  bien  que  sa  population  égalât  celle  de 
Rome;  son  Université,  seule,  lui  donnait  un  semblant  d'activité  et  de 
vie  (7).  Aucune  Cour  n'était,  cependant,  plus  brillante  que  celle  de 
Ferrare,  où  régnait  Hercule  II,  marié  à  la  fille  de  Louis  XII  et  d'Anne 
de  Bretagne,  la  sensible  Renée  de  France  (8),  si  accueillante  aux 
lettrés  et  aux  poètes  de  sa  patrie. 

A  l'époque  où  M.  de  Lodève  arriva  à  Ferrare,  Henri  II,  excité  par 
les  conseils  de  François  de  Guise  et  de  Charles,  cardinal  de  Lorraine, 
poursuivait  la  détestable  politique  à  laquelle  s'étaient  voués,  avant 
lui,  Charles  VIII,  Louis  XII  et  François  Ier,  politique  qui  consistait  à 
guerroyer,  sans  cesse,  en  Italie,  sous  prétexte  de  garder  un  pied  dans 
la  Péninsule.  L'Italie  était,  depuis  longtemps  déjà,  le  théâtre  où  se 
livraient,  du  nord  au  sud,  de  continuels  combats  entre  Français  et 
Impériaux,  sans  succès  pour  nos  armes,  mais  pour  le  plus  grand 
dommage  de  notre  prestige  et  aussi  de  nos  finances  qui  s'épuisaient 
chaque  jour  davantage  dans  cette  ruineuse  aventure. 

Les  événements  allaient  prendre  une  tournure  décisive,  lorsque 

(1)  États  au  Puy.  «Un  seul  évéque  y  assiste,  celui  de  Montpellier»,  (llist.de 
Languedoc  de  D.  Vaissette,  édit.  de  Toulouse,  1878,  t.  xi,  p.  291). 

(2)  Hist.  de  Languedoc,  ut  supra,  p.  296. 

(3)  Hist.  de  Languedoc,  ut  supra,  p.  309. 

(4)  Hist.  de  Languedoc,  ut  supra,  p.  291 . 

(5)  Hist .  de  Languedoc,  ut  supra,  p.  292. 

(6  Sur  Ferrare  pendant  le  rè^ne  d'Hercule  II,  voir  notamment  le  Bulletin  de  la 
Société  de  l'Histoire  du  Protestantisme  français,  N°  4,  15  avril  1872.  (Article  de 
M.  Jules  Bonnet  :  Clément  Marot  à  la  Cour  de  Ferrare;. 

(7)  E.  Rodocanachi,  Renée  de  France,  duchesse  de  Ferrare;  un  vol.  in-8".  Paris. 
Ollendort',  1896. 

(8)  Née  à  Blois  le  25  octobre  1510,  morte  à  Montarids  le  15  juin  1575. 


XII  INTRODUCTION 

du  Gabre  arriva  à  son  poste.  C'était  pendant  l'été  de  1551.  L'Empe- 
reur et  le  nouveau  pape  Jules  III  venaient  de  s'unir,  et  leurs  deux 
armées,  alliées,  avaient  envahi  le  duché  de  Parme  énergiquement 
défendu  par  les  troupes  françaises. 

En  raison  d'une  situation  aussi  grave,  c'était  bien  un  poste  de 
confiance  que  le  Roi  accordait  à  M  de  Lodève.  Les  fonctions  du  pré- 
lat devaient  y  être  complexes,  il  fallait,  pour  les  remplir  dignement, 
une  intelligence  supérieure,  un  tempérament  souple,  de  la  finesse 
et  du  tact.  Le  cùté  apparent  de  la  mission  consistait  à  régler  les 
dépenses  de  l'armée,  mais,  en  dehors  de  cette  partie  purement 
administrative  de  son  rôle,  l'envoyé  français  avait  un  autre  mandat 
à  accomplir.  Du  poste  d'observation  où  il  était  placé,  il  devait  re- 
cueillir toutes  les  informations  utiles,  les  transmettre  secrètement 

« 

au  Roi  ou  au  Connétable,  surveiller  les  opérations  de  guerre  dans  le 
Parmesan  et  le  Siennois  :  enfin,  il  devait,  par  sa  diplomatie,  conduire 
le  Pape  et  le  duc  de  Ferrare  à  entrer  dans  une  ligue  avec  la  France 
contre  les  Espagnols. 

A  peine  arrivé  à  Ferrare.  du  Cabre  s'initie  aux  événements  avec 
le  zèle  d'un  homme  qui  se  rend  compte  des  difficultés  de  la  situation. 
Il  s'efforce,  avant  tout,  de  plaire  au  Duc  de  s'insinuer  dans  ses 
faveurs,  puis  il  tente  de  s'entremettre  adroitement  auprès  de  lui 
pour  l'amener,  peu  à  peu.  à  conclure  le  traité  d'alliance  qu'il  avait 
mission  de  lui  faire  signer. 

Lorsque  le  moment  lui  parait  opportun,  du  Gabre  rédige,  eu  effet, 
un  projet,  mais  ses  clauses  secondent  en  apparence  les  intérêts  du 
Duc.  Elles  étonnent  au  premier  abord  (1). 

Ce  projet  (qui  servira  pourtant  un  jour  de  modèle  et  recevra 
sa  sanction  définitive  en  1555  attire  à  M.  de  Lodève  des  blâmes  el 
des  moqueries  :  on  le  soupçonne  de  complaisance  envers  le  Duc,  on 
l'accuse  presque  de  trahison  (2  . 

Du  Cabre  prend  l'alarme,  et  redoute  que  cette  affaire  ne  lui  vaille 
un  désaveu  ou  ne  lui  coûte  une  disgrâce  :  il  se  disculpe  auprès  du 
Roi  :  «  Sire,  lui  écrit-il.  je  vous  supplieray  tant  el  si  humblement 
que  je  puis  de  pardonner  ma  trop  grande  affection  qui  m'a  ainsi 
transporté  à  vouloir  bien  taire,  et  je  serai  doresnavant  plus  retenu 
en  telles  choses  etmettray  peine  en  aultre  endroit  <le  vous  taire  tant 
de  service  qu'il  effacera  toute  l'erreur  dont  on  me  veut  reprendre 

Il  prend  également  M.  de  Beauregard    \  h  témoinde  sa  déconvenue: 

(lï  Voir  à  l'Appendice  ce  document  reproduit  in  extenso  avec  les  curieuses 
annotations  de  M.  de  Lodève. 

(2)  Voir  à  l'Appendice  I»1  pamphlet  rédigé  par  Morvillers  à  propos  de  ce  projet 
d'alliance. 

(3)  Gabre  au  Roi;  de  Ferrare,  il  avril  1553.    Bibl.  nul.,  Fr.  20453,  toi.  161  . 
i)  M.  de  Beauregard,  conseiller  du  Roi,  secrétaire  des  finances 


INTRODUCTION  XIII 

«Je  ne  m'excuseray  jametz,  dit-il,  d'avoir  fait  fa ul te  en  cette  pra- 
tique pour  avoir  voulu  faire  advantage  à  M.  le  Duc,  car  s'il  est 
permis  de  le  dire  comme  de  le  faire  pour  le  service  de  son  prince,  je 
cuydois  l'avoir  bien  embarqué  et  surpris  avec  promesses  qui  ne 
costoient  rien  au  Roy,  et  si  vous  l'eussiez  prins  au  mot,  il  estoit 
bien  empesché  de  s'en  retirer»  (1). 

Heureusement  pour  du  Gâbre,  on  ne  lui  tient,  à  la  Cour,  aucune 
rigueur  de  cette  négociation  avortée;  sa  faveur  grandit  au  contraire. 
Le  Roi  le  comble  d'éloges,  il  lui  confie  bientôt  une  autre  mission, 
celle  de  réaliser  divers  biens  immobiliers  appartenant  à  la  reine 
et  d'en  verser  le  produit  au  Trésor  (2i.  •  Nous  ne  saurions  faire,  dit 
Henri  II,  meilleure  élection  pour  cet  effet,  que  des  personnes  desditz 
évêques  de  Lodève  et  sieur  de  Selves,  pour  la  bonne  et  entière 
confiance  que  nous  avons  de  leurs  personnes  et  de  leur  sens,  vertu, 
probité,  loyaulté,  expérience  et  bonne  diligence». 

Le  nuage  étant,  désormais,  complètement  dissipé,  du  Gabre  reste 
à  Ferrare  une  année  encore,  et  s'y  crée  de  solides  relations  ;  tous  ses 
instants  sont  pris  par  les  affaires  de  guerre,  que  les  embarras  des 
finances  françaises  et  les  exigences  croissantes  des  prêteurs  d'argent 
rendent  de  jour  en  jour  plus  difficiles  La  situation  du  Trésor  est  à 
ce  point  critique,  la  gêne  est  si  aiguë  que  Lodève  écrit  au  Connétable 
pour  lui  exposer  cette  lamentable  confidence  :  «  Vous  pouvez  faire 
estât  que  les  garnisons  du  Roy  n'auront  point  d'argent  de  ce  moys 
qui  sera  la  première  paye  qu'on  aura  faillie  »  (3). 

Cependant  ces  graves  soucis  ne  lui  font  point  négliger  ses  intérêts 
particuliers,  il  poursuit  maintenant  un  but:  quitter  la  résidence  de 
Ferrare  et  s'élever  jusqu'à  l'ambassade  de  Venise  dont  le  voisinage 
lattire.  Il  cherche  à  s'imposer  par  ses  mérites  ;  mais  il  fait  aussi 
étalage  de  zèle  ;  il  occupe  son  temps  à  régler  des  différends  intimes. 

Le  cas  de  la  duchesse  de  Ferrare  l'intéresse  et  l'excite  par  dessus 
tout.  Faire  rentrer  dans  le  giron  de  l'église  catholique  cette  prin- 
cesse du  sang  de  France,  qui  prête  une  oreille  attentive  à  l'austère 
voix  de  la  Réforme,  telle  est  la  tâche  délicate  que  l'évêque  prétend 
entreprendre.  Tentative  délicate  en  vérité  !  Il  s'agit  de  détruire  en 
quelques  pieux  entretiens  les  ravages  que,  jadis,  Marot  par  sa  verve 
badine,  puis  Calvin  par  son  dogmatique  apostolat,  avaient  produits 
dans  lame  naïve  de  la  duchesse. 


(1)  Gabre  à  M.  de  Beauregard  ;  de  Ferrare,   3  mai  15S3.    Bibl.  nat,  Fr.  20453, 
fol.  1691. 

(2)  Pouvoir  donné  à   Fontainebleau   le  28  novembre   1553.  (Ms  de  Grenoble- 

fol    19  . 

(3)  Gabre  au  Connétable;  de  Ferrare,  10  novembre  1553.  (Bibl.  nat..  Fr.  20453, 
fol.  185). 


XIV  INTRODUCTION 

A  la  fin  du  séjour  de  du  Gabre  à  Ferrare,  la  situation  est  plus 
grave  que  jamais  ;  Renée  est,  maintenant,  une  hérétique  militante: 
elle  raille  la  religion  catholique,  n'entend  plus  la  messe  et  prétend 
faire  partager  ses  idées  réformatrices  à  ses  deux  tilles. 

Le  roi  de  France  s'émeut,  il  envoie  à  Ferrare,  pour  réduire  la 
duchesse,  le  chef  même  de  l'Inquisition  du  royaume,  le  redouté 
Ory  (1),  mais  elle  reste  inébranlable,  ne  cède  ni  à  la  persuasion,  ni 
aux  menaces  ;  on  la  traîne  devant  le  Tribunal  d'Inquisition,  on  la 
jette  en  prison,  elle  refuse  d'abjurer  ses  nouvelles  croyances. 

Depuis  le  7  septembre,  elle  est  incarcérée  au  Palais  San  Francisco, 
lorsque  Lodève  entre  en  scène  ;  il  visite  la  prisonnière,  la  rassure, 
l'exhorte  à  la  conversion,  mais  elle  résiste,  se  montre  défiante, 
soupçonne  du  Gabre  d'être  «  tout  de  Monsieur  le  Duc»  (2).  Cela 
suffit  pour  qu'elle  ne  veuille  entendre  aucune  raison. 

Peu  à  peu,  du  Gabre  s'insinue  davantage,  il  se  montre  plus  élo- 
quent et  obtient  le  succès  qu'il  attendait;  la  duchesse  abjure,  entend 
la  messe  et  promet  de  communier  dès  que  sa  conscience  y  sera 
disposée. 

Tous  ces  événements  avaient  profondément  refroidi  les  rapports 
d'Hercule  et  de  Renée  ;  du  Gabre  veut  rétablir  l'union  dans  ce  nit- 
nage  ;  il  obtient  du  Duc  qu'il  ait  une  entrevue  avec  sa  femme  et 
reprenne  avec  elle  la  vie  commune. 

Tout  est  rentré  dans  l'ordre  à  Ferrare,  lorsque  le  Roi  fait  connaître 
à  M.  de  Lodève  qu'il  lui  conlie  la  char^r  d'ambassadeur  auprès  de 
la  République  de  Venise  (3)  en  remplacement  d'Odet  de  Selve  (i), 
transféré  à  l'ambassade  de  Rome. 

Pour  si  flatteuse  qu'elle  fût,  une  telle  fonction  était  loin  d'être 
purement  honorifique  ;  il  n'était,  peut-être,  aucun  poste  plus  con- 
voité à  cette  époque,  mais  il  n'en  existait  point  qui  exigeai  plus  de 
souplesse  et  de  tact  que  celui  d'ambassadeur  à  Venise. 

Cette  charge  élevée  avait  été  de  tout  temps  brillamment  occupée 
par  nos  agents;  on  avait  vu  s'y  succéder  :  l'évèque  de  Kioux.  Jean 


(1)  Le  docteur  Ory.  ancien  prieur  des  Frères  prêcheurs  de  Paris,  inquisiteur 
<lc  la  foi  en  France,  en  vertu  de  lettres  patentes  du  Roi  et  d'un  bref  du  Pape, 
fut,  à  diverses  reprises,  chargé  de  semblables  missions  par  l'Église  chaque  fois 
qu'il  s'agissait  de  combattre  l'hérésie  dans  les  nouveaux  foyers  où  elle  se  déclarait. 

(2)  Gabre  au  cardinal  de  Tournon  ;  de  Ferrare,  1er  septembre  1554.  Arrh.  de 
Modène). 

(3)  Dépèche  du  Roi  à  du  Gabre  :  de  f.ompiè-ne.  •">  septembre  1554  (Ms  de 
Grenoble,  toi.  82  r°).  Voir  cette  lettre  à  l'Appendice. 

l  Odel  de  Selve,  fils  de  Jean  de  Selve,  1er  Président  au  Parlement  de  Paris  et 
ambassadeur,  extraordinaire  en  Angleterre  sous  François  lor.  il  tut.  d'abord. 
conseiller  au  Parlement  de  Paris,  puis  successivement  ambassadeur  auprès  de 
Henri  Vlll   1546),  à  Venise  (1550),  à  Rome  (1584  :  rappelé  en  France  âpre-  la  inw 


INTRODUCTION  XV 

de  Pins  (1)  (1517-1522)  ;  l'évêque  de  Bayeux,  Canossa  (2)  (1525-1528); 
Févêque  d'Avranches,  Jean  de  Langeac  (3j  (lo.;S  1530  -,  Lazare  de 
Baïf  (4)  (1531-1533)  ;  l'évêque  de  Lavaur,  Georges  de  Selve  (5)  (1533- 
1537):  l'évêque  de  Bodez,  Georges  d'Armagnac  (6'  (1535-1539); 
Guillaume  Pélicier,  évèque  de  Montpellier  (1540-1542);  Jean  de 
Morvillers  (7),  évêque  d'Orléans  (1545  1550)  ;  Odet  de  Selve  (1550- 
1554);  tous  hommes  éminents,  diplomates  avisés  et  fins,  pour 
la  plupart  humanistes  et  lettrés,  qui  avaient  rendu,  tour  à  tour, 
autant  de  services  politiques  que  littéraires  à  leur  pays. 

La  succession  de  semblables  diplomates  aurait  paru  lourde  à  tout 
autre  que  du  Gabre.  Celui  ci  est  de  taille  à  l'accepter;  sa  réputation 
n'est  plus  à  faire.  Odet  de  Selve,  qu'il  va  remplacer,  s'est  porté 
garant,  un  an  auparavant,  de  ses  mérites.  Il  avait  écrit  ceci  au  Con- 
nétable :  «  S  il  vous  plait  de  vous  servir  de  M.  de  Lodève,  la  suffisance 
duquel  vous  congnoissez  et  que  vous  avez  employé  et  employez 
tous  les  jours  à  beaucoup  de  grandz  affaires,  vous  ny  mettrez 
poinct  un  apprentif,  car  il  scayt  de  toute  l'Italie  plus  que  moy  et  de 
ceulx  d'icy  tout  aultant  que  moy  pour  la  communication  que  nous 
en  avons  eue  toujours  ensemble»  (8). 

Le  nouvel  ambassadeur  reçoit  ses  instructions  vers  la  fin  de  sep- 

de  Vaucelles  (1556\  il  prit  part  aux  États  d'Orléans  1560)  et  mourut  en  1563.  Il 
était  frère  de  Lazare  de  Selve,  chargé  de  missions  diplomatiques  en  Suisse  .  de 
Georges  de  Selve,  évêque  de  Lavaur,  son  prédécesseur  aux  ambassades  de  Venise 
et  de  Rome  ;  de  Jean-Francisque  de  Selve,  panetier  du  Roi  :  de  François  de  Selve, 
évèque  de  Saint-Flour. 

(d)  Jean  de  Pins,  né  à  Toulouse,  conseiller  clerc  au  Parlement  de  cette  ville, 
ambassadeur  à  Rome  en  1519,  évèque  de  Rieux  en  1523,  ambassadeur  à  Venise, 
mort  le  1er  novembre  1537. 

(2  Louis  de  Canossa,  de  la  famille  noble  de  ce  nom,  évèque  de  Rayeux  (sept. 
1516),  mort  en  1532. 

(3)  Jean  de  Langeac,  comte  et  prévôt  de  Rrioude,  aumônier  du  roi,  abbé  de 
Saint-Gildas-au-Rois  (1505).  de  Saint-Lo  (1523).  de  Pibrac  ,  1525\  conseiller  du  roi 
(1526).  successivement  ambassadeur  en  Portugal,  Hongrie,  Ecosse,  Venise.  Suisse, 
Rome,  évêque  d'Avranches  (.1526;,  de  Limoges  fl533),  mort  le  27  juillet  1541. 

(4)  Lazare  de  Raïf,  savant  diplomate,  né  vers  la  fin  du  xv  siècle,  au  château 
de  Pins,  près  La  Flèche  (Sarthe),  ambassadeur  à  Venise,  conseiller  au  Parlement 
de  Paris  (27  mars  1533),  ambassadeur  en  Allemagne  <1539  .  mort  en  1547. 

(5)  Georges  de  Selve,  troisième  fils  du  Président  de  Selve,  né  en  1506,  mort  le 
15  avril  1542. 

^6)  Georges  d'Armagnac,  né  en  1505.  évèque  de  Rodez  1529^.  cardinal  (19  déc. 
1544  .  archevêque  de  Toulouse  (1547,  ambassadeur  à  Venise  et  à  Rome;  rappelé 
en  France  sous  Charles  IX.  il  devint  lieutenant  général  au  gouvernement  de 
Languedoc,  archevêque  d'Avignon  (1577   et  y  mourut  le  5  juin  1585. 

7  Jean  de  Morvillers,  né  à  Rlois  en  1507,  doyen  de  Rourges  et  d'Évreux, 
conseiller  au  grand  Conseil,  maître  des  requêtes,  ambassadeur  à  Venise,  évèque 
d'O'léans.  conseiller  au  Parlement,  le  23  janvier  1557,  garde  des  sceaux  en  1568, 
mort  à  Tours  le  23  octobre  1577. 

(8)  Ribl.  nat.,Fr.  20456,  fol.  83.  (De  Selve  au  Connétable;  Venise,  4  août  1553 ). 


XVI  INTRODUCTION 

tembre  (1),  prend  congé  de  la  Cour  de  Ferrare  et  gagne,  en  hâte,  sa 
résidence.  D'ailleurs,  le  temps  presse  de  se  mêler,  sans  perdre  une 
minute,  aux  graves  affaires  dont  il  reçoit  mission  de  s'occuper. 

Les  circonstances,  en  effet,  n'étaient  pas,  à  cette  heure,  exemptes 
de  difficultés.  La  lutte  continuait  plus  âpre,  plus  acharnée  que 
jamais  entre  le  roi  de  France  et  Charles-Quint;  nul  ne  pouvait  en 
entrevoir  la  fin  prochaine.  Ni  les  insuccès  éprouvés  par  les  troupes 
françaises,  ni  le  lent  épuisement  du  Trésor  ne  parvenaient  à  vaincre 
l'opiniâtreté  d'Henri  II  ;  rien  ne  pouvait,  d'autre  part,  réduire 
l'ambition  effrénée  de  l'Empereur.  Dans  ces  conditions,  il  était 
impossible  aux  plus  clairvoyants  de  conjecturer  auquel  des  deux 
monarques,  la  Péninsule,  sur  le  sol  de  laquelle  ils  se  mesuraient, 
si  furieusement,  appartiendrait  désormais. 

Les  positions  des  belligérants  étaient  solidement  acquises:  Naples 
et  Milan  obéissaient  à  l'Empereur;  le  Piémont  était  soumis  à  la 
France;  Sienne,  toujours  défendue  par  l'intrépide  Montluc,  persis- 
tait dans  sa  glorieuse  révolte.  Seule,  Venise  conservait,  au  milieu 
des  provinces  agitées,  une  impassible  neutralité. 

Telle  était,  à  grands  traits,  la  situation  en  Italie,  au  moment  où 
le  pape  Jules  III  (2),  pontife  gagné  à  la  cause  de  l'Empereur,  rendait 
le  dernier  soupir  après  un  règne  de  six  années. 

Son  successeur  immédiat,  Marcel  II  3),  n'ayant  occupé  que  quel- 
ques jours  le  trône  de  Saint-Pierre,  sa  mort  prématurée  remit  en 
question  l'élection  d'un  nouveau  pape.  Les  Français  et  les  Impé- 
riaux attachaient  une  importance  décisive  à  cet  événement,  car  le 
Sacré-Collège  étant  composé  par  fractions  égales  de  créatures  du 
Roi  et  de  l'Empereur,  de  son  choix  dépendrait,  peut-être,  le  sort  des 
armes,  suivant  que  le  nouveau  pontife  ferait  pencher  son  influence 
du  côté  de  l'un  ou  de  l'autre  des  ennemis  (4). 

La  France  ne  cachait  pas  ses  préférences  pour  le  cardinal  d'Esté 
et  le  soutenait  de  tout  son  appui  (5);  de  leur  côté,  les  Impériaux  se 
livraient  aux  plus  habiles  intrigues  pour  assurer  le  succès  d'un 
cardinal  dévoué  à  leur  politique.  Mais  l'accord  ne  parvint  pas  à   se 

(1)  Cliantereau,  secrétaire  de  M.  do  Selve,  écrit  de  Venise  au  Connétable 
(26  septembre  1554),  qu'il  a  informé  la  seigneurie  du  choix  que  le  Roy  a  fait  de 
M.  de  Selve  pour  son  ambassadeur  à  Rome,  el  de  M.  de  Lodève  pour  Venise 
(Bibl.  nat  ,  Fr.  23521,  fol.  129). 

(2)  Jules  III,  Jean-Marie  del  Monte,  né  à  Arezzo  le  10  septembre  1487,  arche- 
vêque de  Syrente,  élu  pape  le  8  février  1550.  Il  rétablit  et  continua  le  concile  de 
Trente  auquel  il  avait  assiste  sons  Paul  III  comme  légat.  Il  mourut  le  23  mars 
1555. 

('.\-  Marcel  II,  Marcel  Cervin,  né  à  Montepulciano,  cardinal  du  titre  deSainl 
en  1539,  élu  pape  le  9  avril  1555,  mourul  d'apoplexie  le  30  avril  1555. 

(4)  Le  Conclave  se  réuni!  le  15  mai. 

(5)  Le  cardinal  Hippolyte  d'Esté,  frère  du  duc  de  Ferrare. 


INTRODUCTION  XVII 

faire;  des  luttes  acharnées  divisèrent  huit  jours  entiers  le  Conclave 
et,  au  bout  de  ce  temps,  ce  fut  le  cardinal  Carafa,  combattu  par  les 
cardinaux  impériaux,  qui  sortit  vainqueur  du  scrutin  et  fut  proclamé 
pape  sous  le  nom  de  Paul  IV  (1). 

Notre  politique  en  Italie  devait  recevoir  avec  ce  pontife  une  orien- 
tation nouvelle.  Paul  IV,  en  effet,  n'avait  jamais  fait  mystère  de  ses 
sentiments  d'inimitié  envers  Charles-Quint  ;  on  pouvait  donc  con- 
jecturer qu'il  ne  tarderait  pas  à  prendre  bientôt  parti  dans  la  lutte 
et  qu'il  mettrait,  dans  ce  cas,  au  service  de  la  France,  l'influence  qui 
était  l'apanage  de  la  papauté.  Ces  prévisions  ne  tardèrent  pas  à  se 
réaliser. 

A  peine  élu,  il  manifestait  nettement  l'intention  de  contracter  un 
traité  d'alliance  avec  Henri  II.  C'était  là  un  événement  considérable; 
Paul  IV  inaugurait  son  règne  par  un  acte  réfléchi  de  politique 
belliqueuse. 

Cependant,  il  importait  au  pape  de  trouver  en  Italie  un  troisième 
allié.  Le  duc  de  Ferrare  lui  semblait  qualifié  pour  entrer  dans  la 
coalition;  mais  une  sérieuse  difficulté  s'élevait  entre  Hercule  et  le 
pape  qui  rendait  les  pourparlers  momentanément  impossibles. 
Paul  IV  n'avait  pu  pardonner  au  cardinal  Hippolyte,  frère  du  duc, 
d'avoir  été  son  rival  au  Conclave  et  lui  avait  intimé  l'ordre  de  quitter 
Rome  pour  se  retirer  à  Ferrare.  Cette  disgrâce  était  une  si  grave 
offense  faite  à  la  cour  d'Esté  cpie,  tant  qu'elle  ne  serait  pas  réparée, 
le  Duc  ne  pouvait  seconder  les  projets  du  Saint-Siège. 

Du  Cabre,  en  diplomate  avisé,  voit  dans  cet  incident  une  occasion 
de  temporiser  :  «  Votre  excellence,  écrit-il  à  Hercule,  ne  se  doist 
pas  monstrer  altérée  de  la  rigueur  tenue  au  mondit  sieur  le  Cardinal, 
mais  laisser  passer  quelques  jours  pour  voir  ce  qui  succédera  du 
cousté  de  Rome  et  des  Impériaux  »  (2). 

L'attitude  réservée  de  Lodève  était  sage  ;  le  prélat  jugeait  avec  un 
sens  très  exact  les  dangers  de  l'aventure  dans  laquelle  la  France 
allait  s'engager. 

Cependant,  le  pape  ne  tint  pas  longtemps  rigueur  au  cardinal 
d'Esté;  le  frère  d'Hercule  rentra  en  grâce  et,  aussitôt,  le  pontife  et 
l'ambassadeur  français  mirent  leurs  signatures  au  bas  du  projet 
cher  à  Paul  IV  (3).  Pour  en  ratifier  les  clauses,  Henri  II  pnvoya  à 
Rome,  en  qualité  de  plénipotentiaires,  deux  cardinaux  choisis 
parmi  les  plus  considérés  du  royaume  :  Charles  de  Lorraine,  arche- 
vêque de  Reims  et  pair  de  France,  et  le  cardinal  de  Tournon. 

I  On  consultera  sur  Paul  IV  et  son  pontificat  l'excellent  ouvrage  de  M.  Georges 
buRUY,  Le  cardinal  Carlo  Carafa.  Paris,  Hachette,  1S82. 

(2)  Gabre  au  duc  de  Ferrare;  de  Venise,  14  septembre  1555.  àrch.  de 
Modènej. 

(3)  A  la  date  du  15  octobre  1555. 


XVIII  INTRODUCTION 

Ces  deux  négociateurs  arrivèrent  à  Rome  vers  la  fin  d'octobre;  ils 
y  furent  reçus  avec  une  magnificence  extraordinaire;  on  leur  donna 
l'hospitalité  au  Vatican  ;  des  fêtes  splendides  furent  célébrées  en 
leur  honneur.  Au  bout  de  six  semaines  consacrées  à  l'examen  des 
articles  du  traité,  les  clauses  en  furent  acceptées  de  part  et  d'autre, 
et  le  document  définitif,  stipulant  formation  d'une  ligue  offensive 
enlre  le  pape  et  le  roi  de  France,  fut  signé  le  io  décembre. 

La  mission  du  cardinal  de  Lorraine  n'était  pas  limitée  à  cette 
seulenégociation  ;  elle  avait  aussi  pour  objet  de  décider  le  duc  de  Fer- 
rare  à  entrer  dans  la  ligue.  Le  cardinal  partit  dans  ce  but  de  Rome 
vers  la  fin  de  décembre,  mais,  au  lieu  de  se  rendre  directement  à  la 
cour  d'Esté,  il  fit  un  détour  vers  Venise, où  l'attendait  Lodève,  espé- 
rant obtenir,  en  passant,  de  la  prudente  République  qu'elle  adhérât 
à  l'alliance. 

Du  Gabre  connaissait  trop  bien  la  seigneurie  pour  s'illusionner 
sur  l'issue  des  efforts  que  tenterait  le  cardinal  ;  il  donna  au  Roi  son 
avis  et  ne  lui  laissa  pas  ignorer  que  la  République  ne  prendrait 
jamais  parti  entre  le  Pape  et  l'Empereur  (I). 

Entre  temps,  le  duc  de  Ferrare  se  montre  froissé  de  ne  recevoir 
qu'après  la  seigneurie  la  visite  de  l'envoyé  d'Henri  II  ;  il  s'en  plaint 
à  du  Gabre  en  termes  véhéments,  et,  n'écoutant  que  sa  colère, 
réclame  le  remboursement  immédiat  de  trente  mille  écus  que,  six 
semaines  auparavant,  il  avait  prêtés  au  roi  de  France.  Lodève,  témoin 
d'un  semblable  dépit,  craint  que  le  Duc  ne  passe  dans  le  camp  de 
l'Empereur  (2). 

Cependant  le  Saint-Siège  attachait  une  importance  capitale  à 
l'entrée  de  la  République  de  Venise  dans  l'alliance.  Le  neveu  de 
Paul  IV,  le  cardinal  Carafa,  résolut  d'aller  lui-même  vers  la  seigneurie 
pour  préparer  les  voies  au  cardinal  de  Lorraine.  Carafa  formula 
les  propositions  les  plus  séduisantes,  offrit  même  Ravenne(3)  aux 
Vénitiens  ;  mais,  toujours  fidèle  à  son  système,  la  seigneurie  ré- 
pondit à  cette  ouverture  «  qu'elle  avait  advisé  de  différer son  entière 
réponse  »,  et  qu  elle  conformerait  sa  conduite  à  ce  que  Dieu  lui 
inspirerait»  (4). 

Sa  mission  ayant  échoué,  Carafa  quitta  Venise  le  11  janvier.  Le 
cardinal  de  Lorraine,  à  son  tour,  y  arriva  le  16,  et  y  lut  reçu  avec 
une  telle  pompe    que   du  Gahre,  émerveille,  ne    put   s'empêcher 

(I)  Gabre  au  Roi;  de  Venise,  i  janvier  1556.    Bibl.  nat.,  Fr.  80456,  fol.  UT  . 
(2    Gabre  au  cardinal  deToumon:   de  Venise,  i  janvier  1556.  (Bibl.  nat..  Pr. 
20644,  fol.  8  . 
(3)  Gabre  an  Roi  :  de  Venise.  5  février  1556.    Msde  Grenoble,  \>-  H) 
i    /</  .  ibid. 


INTRODUCTION  XIX 

d'écrire  qu'il  n'avait  jamais  vu  chose  plus  splendide  que  cette 
réception  (1). 

Mais,  malgré  sa  splendeur,  cette  manifestation  n'impliquait  point 
l'idée  d'un  changement  quelconque  dans  la  politique  traditionnelle 
des  Vénitiens.  Le  cardinal  de  Lorraine  se  butta,  comme  Carafa, 
contre  l'opiniâtreté  de  la  seigneurie;  il  partit  donc ,  sans  avoir 
rien  pu  obtenir,  pour  Ferrare,  où  il  trouva  le  Duc  résolu,  cette  fois, 
à  adhérer  au  traité  d'alliance  contre  les  Impériaux. 

Ce  traité,  dont  la  négociation  avait  coûté  tant  d'efforts,  semblait 
devoir  lier  pour  longtemps  les  trois  contractants.  Il  n'en  fut  pas 
ainsi.  A  peine  conclu,  la  nouvelle  se  répandit,  tout  à  coup,  que  le  roi 
de  France  et  Charles  Quint  s'étaient  mis  d'accord  pour  signer,  le 
3  février,  à  Vaucelles,  une  trêve  de  cinq  années. 

Un  tel  bruit  était  fait  pour  surprendre  nos  agents.  Lodève  en  reçut 
la  confirmation  officielle  par  une  lettre  du  Roi  (2)  qui,  dès  l'abord,  le 
frappa  de  stupeur.  Mais,  après  une  plus  attentive  réflexion,  il  se 
rangea  sans  hésiter  du  côté  de  la  paix.  Il  savait,  par  expérience,  que 
les  intérêts  de  l'Italie  étaient  nettement  contraires  à  ceux  de  la 
France.  «  Excusez-moi,  Monseigneur,  écrit-il  (3).  si  je  vous  diz  deux 
mots  de  mon  advis  sur  tous  ces  broillements  d'Italie,  car,  ayant  veu 
durant  ces  guerres  les  procédés  de  ces  potentatz  et  de  ceste  nation 
envers  le  Roy  quand  ils  l'ont  veu  en  grand  travail  pour  leurs  affaires 
propres;  j'ai  désiré  souvent  une  chose  que,  Dieu  mercy,  je  veoy 
aujourd'hui;  c'est  de  les  veoir  en  nécessité  et  avoir  besoin  du  Roy 
et  que  Sa  Majeté  se  peut  passer  d'eulx.  La  ligue  du  pape  et  la  cap- 
pitulation  de  Ferrare  ont  esté  faites  au  temps  de  notre  nécessité  et 
il  est  impossible  qu'il  n'y  ait  quelque  chose  trop  désavantageux 
pour  le  Roy,  car  nous  estions  contraincz  de  s'accommoder  à  toutes 
leurs  volontez,  et  maintenant,  Dieu  mercy,  c'est  à  eux  à  s'accom- 
moder aux  nôtres  •>. 

Si  tel  était,  sur  la  trêve,  le  judicieux  avis  de  M.  de  Lodève,  le 
cardinal  Carafa  pensait  tout  différemment.  Le  neveu  de  Paul  IV  se 
sentait  atteint  dans  son  amour-propre  et  ruiné  dans  ses  espérances. 
L'alliance,  qui  était  son  œuvre,  lui  avait  coûté  trop  de  labeurs  pour 
qu'il  en  acceptât  gaiement  la  rupture.  Il  résolut  de  faire  revenir  le 
roi  de  France  sur  la  trêve  qu'il  avait  signée  à  Vaucelles.  Certes,  le 

(1)  Gabre  au  Connétable;  de  Venise,  17  janvier  1556.  (Bibl.  nat.,  Fr.  20644, 
fol.  54). 

(2)  Gabre  au  duc  de  Ferrare  ;  de  Venise,  19  février  1556.  (Arcli.  de  Modène). 

(3)  Gabre  (lettre  sans  adresse,  mais  vraisemblablement  au  Connétable),  de 
Venise,  26  mai  1556.  (Bibl  nat,  Fr.  3126,  fol.  99).—  Dans  cette dépêche,  lévèque 
de  Lodève  informe  son  correspondant  du  départ  du  cardinal  Carafa  pour  Paris, 
en  vue  de  négocier  avec  le  Roi  pour  rompre  la  livvedeVaucelIes.il  conviendra, 
dit-il,  de  bien  le  caresser,  mais  il  faudra  conseiller  à  Sa  Majesté  de  rester 
inébranlable  pour  maintenir  la  trêve. 


XX  INTRODUCTION 

plan  était  hardi,  mais  le  rusé  cardinal  se  sentait  de  taille  à  l'exécuter. 
Il  se  fit  donner  par  son  oncle  le  titre  de  légat,  quitta  Rome  le  11  mai, 
s'embarqua  pour  Marseille  à  Civita-Vecchia  et  arriva  à  Paris  le 
15  juin. 

Reçu  d'abord,  à  Fontainebleau,  par  Henri  II,  puis,  à  Paris,  par  le 
Parlement,  le  Clergé  et  la  Noblesse,  choisi  par  le  Roi  comme 
parrain  d'une  princesse  qui  venait  de  naître,  comblé  d'honneurs 
à  la  Cour,  il  manœuvra  avec  tant  d'habileté  qu'il  triompha  aisément 
de  la  faiblesse  royale.  Grâce  à  ses  intrigues,  la  trêve,  signée  pour 
cinq  années,  avait  à  peine  duré  trois  mois,  et  l'alliance  belliqueuse 
conclue  entre  le  Saint-Siège,  la  France  et  Ferrare  devenait  un  fait 
accompli. 

Cependant  un  succès  aussi  inespéré  ne  suffisait  pas  à  l'ambition 
de  Carafa.  11  voulait,  encore,  tenter  un  suprême  effort  pour  attirer 
Venise  dans  la  ligue.  Dans  ce  but,  il  députa  auprès  de  la  seigneurie 
son  frère  Antonio,  mais,  du  (ïabre,  comme  toujours,  se  montre 
sceptique  à  l'égard  des  résultats  de  cette  négociation.  «Je  m'attends. 
Sire,  écrit-il  au  Roi  (1),  qu'il  n'y  aura  de  ces  seigneurs  que  réponse 
courtoise,  mais  elle  sera  tellement  générale  que  cela  ne  les  obligera 
à  rien  qui  soit  ;  et,  après,  ils  se  rangeront  selon  le  temps  et  1  occa- 
sion»; puis,  diins  une  phrase  expressive,  il  trace  de  la  seigneurie 
le  portrait  suivant:  «C'est,  dit-il,  un  corps  qui  est  composé  de 
plusieurs  testes,  et  il  y  en  a  de  bien  grossiers  et  d'aucuns  bien 
habiles  et  grands  personnages,  mais,  tout  assemblé,  ils  font  un  - 
et  grand  prince  ;  ils  ne  veulent  point  de  guerre,  s'il  est  possible.  «'I 
n'ont  pas  tort,  et,  avant  de  se  mouvoir  et  rien  faire,  ils  verront  les 
occasions  bien  grandes  et  se  gouverneront  toujours  selon  le  temps». 

Carafa  ne  tarda  pas  à  vérifier  par  lui-même  l'exactitude  de  ce 
jugement;  il  arriva  lui-même  à  Venise  le  -I  décembre  2  .  eut  une 
première,  puis  une  seconde  entrevue  avec  le  Conseil,  y  employa  les 
arguments  les  plus  persuasifs,  mais  ce  fut,  comme  toujours,  peine 
perdue  et  du  I  labre  formula  son  opinion  personnelle  en  ces  termes: 
«  Je  ne  crois  pas  qu'ils  soient  pour  rien  faire  avec  le  pape,  ni  pour 
ceci,  ni  pour  cela  »  (3). 

N'ayant  rien  pu  obtenirde  la  seigneurie,  le  neveu  de  Paul  IV  quitta 
Venise  et  se  rendit  à  Bologne,  où  il  avait  à  prendre  de  graves  dis- 
positions avant  l'arrivée  imminente  d'une  armée  française  en  Italie. 

Sous  le  commandement  du  duc  de  Guise,  celte  armée  arriva  à 
Reggio  dans  les  premiers  jours  de  février;  le  duc  Hercule.  Carafa  et 


i    Gabre  au  Roi;  île  Venise,  3  juillet  1556.  Ribikr,  i.  m.  toi.  i 

2    Cabre  au  Roi;  de  Venise.  23 décembre  1556.  [Bibl.  nat.,  Fr.  3111,  fol  78 

(3)  Gabre,   à  M.  de  Selve;  de  Venise.  2   janvier  1557.    Ms.de    Grenoble, 

fol.  51). 


INTRODUCTION  XXI 

du  Gabre  allèrent  à  sa  rencontre,  et  Guise,  au  nom  du  Roi,  investit 
solennellement  le  duc  de  Ferrare  du  titre  de  lieutenant  général  de 
la  Ligue. 

Mais  des  dissentiments  ne  tardèrent  pas  à  s'élever  entre  Carafa  et 
le  duc  de  Guise  à  propos  du  plan  de  la  campagne  prochaine  ;  Guise 
tenait  pour  que  la  Lombardie  fût  le  théâtre  des  opérations;  le 
cardinal,  au  contraire,  voulait  que  l'armée  française  défendît  d'abord 
les  États  de  l'Église.  Le  duc  de  Guise,  soit  faiblesse,  soit  calcul, 
abandonna  le  plan  qu'il  avait  primitivement  conçu  et  se  rallia  aux 
desseins  du  cardinal.  La  faute  était  impardonnable  ;  joué  par  Carafa 
qui  lui  promettait  des  renforts  et  ne  les  envoyait  jamais,  réduit,  dès 
lors,  à  ses  propres  ressources,  notre  général  fut  défait  à  Civitella  et 
forcé  de  battre  en  retraite  devant  les  forces  supérieures  que  com- 
mandait le  duc  d'Albe. 

A  cet  événement  inattendu,  en  succéda  un  autre  plus  douloureux 
encore.  Le  25  août,  la  nouvelle  arriva  à  Venise  de  la  défaite  éprouvée 
le  10  août,  près  Saint-Quentin,  par  l'armée  française. 

Du  Gabre  communique  au  duc  de  Ferrare  les  tristes  détails  qui 
lui  parviennent  sur  ce  lamentable  échec  (1).  Le  connétable  de  Mont- 
morency, blessé  au  côté,  est  fait  prisonnier  avec  le  maréchal  de 
Saint-André  et  d'autres  gentilshommes  (2);  le  fils  du  Connétable  est 
mort  sur  le  champ  de  bataille. 

A  cedésastre  s'ajoutaient  d'autres  préoccupations  ;  Philippe,  enivré 
par  sa  victoire,  ne  serait-il  pas  tenté  de  marcher  sur  Paris?  Ne 
viendrait  il  pas  dicter  lui-même  au  Roi  les  conditions  de  la  paix 
sous  les  murs  de  la  capitale? 

Telles  étaient  les  inquiétudes  qui  agitaient  du  Gabre  lorsqu'on 
apprit  à  Venise  le  rappel  du  duc  de  Guise  et  de  l'armée  dont  il  avait 
le  commandement.  A  cette  nouvelle,  Lodève  ne  peut  maîtriser  son 
indignation.  Comment  oser,  écrit-il  au  duc  de  Guise,  abandonner 
tout  à  coup  l'Italie  et  les  amis  que  le  Roi  a  si  chèrement  achetés  et 
pour  lesquels  il  a  fait  tant  de  dépenses  (3)  ! 

Entre  temps,  le  pape  faisait  brusquement  volte  face  ;  il  chargeait 
son  légat  à  Venise,  le  cardinal  Trivulce,  d'agir  auprès  de  la  seigneu- 
rie pour  qu'elle  obtînt  du  roi  d'Espagne  la  cessation  des  hostilités. 
Paul  IV  voulait,  en  somme,  dénoncer  simplement  le  traité  qui  le 
liait  avec  la  France.  «  Il  y  a  apparence,  écrit  du  Gabre  à  ce  propos, 
que  le  pape  et  ses  neveux,  voyant  l'adversité  advenue  au  Roi, 
craignent  d'être  abandonnés  de  Sa  Majesté». 

(1)  Gabre  au  duc  de  Guise  ;  de  Venise,  22  août  1557.  (Bibl.  nat.,  Fr.  23230, 
fol.  553,  et  Mémoires  du  duc  de  Guise.  Irap.,  p.  381). 

(2)  Notamment  le  duc  de  Montpensier  et  le  duc  de  Lon^uevillc. 

(3)  Gabre  au  duc  de  Guise;  Venise,  1"  septembre  1557.  (Bibl.  nat..  Fr.  23236. 
fol.  556,  et  Mémoires  du  duc  de  Guise.  Imp.,  p.  285j. 

3 


XXII  INTRODUCTION 

La  convention  sollicitée  par  le  pontife  fut  signée  entre  les  deux 
parties  belligérantes;  la  paix  fut  conclue  au  grand  désappointement 
du  duc  de  Ferrare  qui  tremblait  pour  ses  États  (1)  et  de  du  Gabre 
qui  exhalait  son  dépit  en  adjurant  le  Roi  de  se  défier  à  jamais  d'aussi 
perfides  alliés. 

Cependant  la  mission  diplomatique  de  Lodève  arrive  maintenant 
à  son  terme.  L'évêque  reçoit  la  nouvelle  de  son  rappel  au  moment 
même  où  s*opère  un  changement  aussi  inexplicable  dans  la 
politique  du  Saint-Siège  Par  une  lettre  du  2-2  juillet  (2),  datée  de 
Compiègne,  le  Roi  notifie  son  congé  à  du  Gabre  et  nomme,  pour 
son  successeur  à  Venise,  l'évêque  de  Dax.  M    de  Noailles  (3i. 

Le  rappel  de  M.  de  Lodève  eut  lieu  sur  la  demande  exprimée  depuis 
longtemps  par  l'ambassadeur  lui-même.  Déjà,  dans  une  lettre  à  M  de 
Reauregard,  il  avait  manifesté  le  désir  d'obtenir  son  congé  pour 
vaquer  à  ses  affaires  en  France  (4).  Toutefois  du  Gabre  considérait 
que  ses  services  lui  donnaient  droit  à  une  compensation  ;  il  l'attendit 
vainement,  et  ses  lettres,  à  partir  de  ce  jour,  trahissent  son  découra- 
gement et  son  dépit. 

C'est  au  cardinal  de  Lorraine  qu'il  expose  ses  doléances  (5)  : 
«  Je  ne  suis,  dit-il,  en  aulcune  considération  envers  vous  aulties 
qui  estes  auprès  du  Roi.  car,  s'il  pleuvoit  abbayes  et  bénéfices,  il 
n'en  sauroit  tomber  un  seul  sur  ma  teste  ».  C'est  sur  M.  de  Reau- 
regard (6)  qu'il  épanche  ses  regrets  et  ses  sentiments  intimes  (7)  : 
«  Je  n'esperoy  jamais  guières  de  noltre  court  du  temps  que  je  pen- 
sois  y  avoir  ung  protecteur,  dit-il,  je  vous  laysse  penser  si  j'en  doitz 
espérer  maintenant  que  personne  ne  my  cognois  plus  ». 

Quoi  qu'il  en  soit,  du  Gabre  quitta  Venise,  après  avoir  touché  pour 
les  neuf  derniers  mois  de  sa  mission  la  respectable  somme  de 
47573  écus,  et  se  dirigea  sur  Paris. 

Une  lettre  qui  clôl  définitivement  sa  correspondance,  lettre  qu'il 
adresse,  peu  après  son  retour,   au  nouvel    ambassadeur  à  Venise, 

(1)  Gabre  au  Roi  ;  23  septembre  1551    Ribieb,  t.  n,  p.  70t. 

(2)  Voir  celle  lettre  à  l'Appendice. 

(3j  François  de  Noailles.  né  à  Noailles  en  Limousin  le  2  juillet  1519,  évéque  île 
Dax  en  1555.  Admis  < i . ■  n --  les  conseils  île  Henri  II.  le  roi  l'envoya  successivement 
comme  ambassadeur  en  Angleterre,  Venise  ci  Constanlinople.  Il  mourut  à 
Bayonne  le  19  septembre  1589. 

(4>  Gabre  à  M  de  Beauregard;  Venise,  j;  octobre  1556.  Bibl.  mit..  Fr. 
20156.  fol     1S1). 

(5)  Gabre  au  cardinal  de  Lorraine  :  Venise.  2j  septembre  1557,  Bibl.  mit.. 
Fr.  20456.  fol    199). 

(6)  Gabre  a  m.  de  Beauregard:  de  Venise,  2::  septembre  1557.  Arch.  des 
Aff    étrangères;  Venise,  t.  vu.  fol. 

(7)  Le  Itoi  à  Noailles;  17  octobre  155";.  Arch  «les  AH",  étrangères;  Venise,  t.  vu, 
fol.  123j. 


INTRODUCTION  XXIII 

nous  initie  à  ses  chagrins  intimes  II  ne  peut  se  résigner  à  voir  sa 
carrière  si  brusquement  brisée,  il  ne  peut  prendre  parti  de  sa 
disgrâce  ;  qu'on  lui  assure  une  situation  modeste,  qu'on  lui  donne, 
par  exemple,  une  abbaye,  et  ses  regrets  seront  moins  cuisants  ! 
Mais,  hélas  !  «  ce  ne  sont  guières  que  des  expectatives  sur  les  pre- 
miers bénélices  vacants  »  (1)  qu'on  fait  luire  à  ses  yeux,  et  l'infor- 
tuné prélat,  enfin  désabusé,  ne  peut  s'empêcher  d'ajouter  avec 
scepticisme  :«  J'en  donnerai  bien  la  moitié  pour  en  avoir  l'aultre 
assurée  »  (2). 

Ulcéré  par  toutes  ces  déceptions,  du  Gabre  n'avait  plus  qu'un 
parti  à  prendre  :  chercher  dans  le  cloître  la  paix  et  la  consolation. 
C'est  ce  qu'il  fit  sans  hésiter  davantage.  Il  choisit,  pour  s'y  retirer, 
l'abbaye  de  Saint-Germain  des  Prés,  possédée  à  titre  d'abbé  général 
par  le  cardinal  de  Tournon  qui ,  continuant  à  lui  distribuer  ses 
faveurs,  lui  céda,  pour  en  jouir  après  sa  mort,  le  bénéfice  de  cette 
riche  abbaye  (3). 

Du  Gabre  ne  devait  pas  lui  survivre  ;  quelques  mois  à  peine  après 
son  retour  à  Paris,  pendant  la  nuit  du  mardi  1er  février  1558,  il  exhala 
son  dernier  soupir  (4)  et,  trois  jours  après  sa  mort,  son  corps  fut 
inhumé  au  milieu  de  l'église  abbatiale  (5),  au-dessus  de  la  tombe 
de  l'abbé  Guillaume  (6). 

Le  précepteur  de  ses  neveux  composa  pour  lui  cette  épitaphe  (7)  : 

Hic  jacet  Reverendissimus  D.  Dominicus  du  Gabre,  episcopus 
Lodovensis.  régis  consiliarius  ac  legatus  Venetus,  qui  obiit  prima  die 
mensis  februarii  anno  1558. 

Qui  jacet  hoc  tumulo  prœsul  lectissimus  olîm 

Virtutem  merito  splendidiore  fuit. 
Legatus  varias  pro  rege  electus  in  oras 
Prœstitit  exacte  munere  digna  suo. 
Sed  quia  res  Christi  longe  studiosius  egit 
Jam  fruitur  tanlo  jiost  sua  fala  Deo  (8). 

(1)  Gabre  à  M.  de  Noailles  ;  Paris,  13  janvier  1558.  (Arch.  des  An",    étrangères; 

Venise,  t.  vu.  fol.  284). 

(2)  Id.  ibkl. 

(3)  BibI    nat.,  Collection  du  Languedoc  (Bénédictins^,  vol.  xli,  fol.   125. 

(4j  Hist.  de  l'abbaye  royale  de  Saint-Germain-des-Prés,  par  I).  Bouillard, 
1724,  in-fol.,  livre  5.  p.  189. 

(5)  Hist.  de  Saint-Germain-des-Prés,  par  Jacques  du  Breuil  (Bihl.  nat.,  latin 
12837,  fol.  230). 

(6)  D.  Bouillard  (Op.  cit ,  p.  318  )  dit  que  le  tombeau  de  Dominique  du  Gabre 
était  dans  la  cbapelle  de  Saint-Casimir. 

(7)  A.  Burty  [Topographie  historique  du  Vieux  Paris,  complétée  par  L.-M. 
Tisserand  (1876).  p.  116)  place  l'épitaphe  de  du  Gabre  dans  le  sanctuaire,  près  et 
derrière  la  tombe  de  Guillaume  lit  l'évêque,  abbé  de  Saint-Germain,  entre  l'aigle 
et  le  banc  des  chantres. 

(8)  Gallia  Christiana,  t.  v. 


XXIV  INTRODUCTION 

D'autres  poêles  de  son  temps  chantèrent  également  ses  louanges; 
un.  entre  autres,  Élienne  Forcadel,  jurisconsulte  du  diocèse  de 
Béziers,  consacra  les  vers  suivants  à  sa  mémoire  (1): 

Vade,  vola,  quœsit^  diujam  nuncia,serva 
Gabrœum,  meluo  prxsul  ut  hicpereat. 
Nam  Phœbum  aniisit  nuper  Parnassia  rupes: 
Bine  doc  tas  lacrymis  fons  sucer  atixil  aquas 
Ni  cavetis  ftel  doc/arum  prœda  soro  um 
Quem  cupiunt  Phœbo  subslituisse  suo  (2). 

Le  prélat  avait  institué,  par  son  testament,  Guillaume  du  Gabre. 
son  neveu,  pour  légataire  universel  de  ses  biens,  à  la  condition  que 
trente  pauvres,  vêtus,  à  ses  frais,  d'habits  de  deuil,  assistassent  à  ses 
funérailles  (3). 

Il  laissa,  au  dire  d'un  contemporain,  l'ambassadeur  vénitien  à 
Paris,  Jean  Michel,  outre  la  somme  de  vingt  mille  écus  comptant, 
des  meubles  de  grande  valeur  à  répartir  entre  son  neveu  et  ses  plus 
anciens  serviteurs  (4). 

La  famille  du  Gabre  portait  pour  armes  «  Parti  d'azur  au  lion  d'or 
à  trois  fasces  ondées  d'argent  sur  le  tout  •>  i.">  . 

L'évèque  avait  pris  pour  armoiries  personnelles  «  de  gueules  à 
une  chèvre  saillante  d'argent  »  (6). 

(1)  Etienne  Forcadel  (1534-73)  succéda  à  Cujas  dans  la  chaire  de  droit  à  Tou- 
louse ;  auteur  d'oeuvres  politiques  que  son  Bis  fil  paraitre  en  1579. 

(2)  Gallia  Christiana,  t.  v. 

(3)  L'église  de  l'abbaye  de  Saint-Germain-des-Prés  ayant  été  prolanée  en  1793, 
les  tombes  qu'elle  renfermait  onl  été,  pour  la  plupart,  violées.  Les  touilles  qui 
ont  été  laites,  à  différentes  reprises,  depuis  cette  époque,  n'ont  permis  de 
retrouver  que  quelques  rares  tombeaux  contenant  encore  les  corps  qui  y  avaient 
été  ensevelis.  C'esl  ainsi  que  Lenoir  Mu  ée  des  Monuments  français,  s  vol.  in-8  . 
t.  v.  p.  -in  a  découvert  deux  tombes  d'abbés  et  leurs  dépouilles.  L'ancienne 
église  abbatiale  de  Saint-Germain-des-Prés  esl  devenue  église  conventuelle  en 
1792  Après  les  massacres  de  l'abbaye,  en  septembre,  elle  subit  la  profanation 
rappelée  plus  haut  vers  la  fin  de  1793,  el  fui  après  convertie  en  magasin  à  sal- 
pêtre. Elle  devint  église  paroissiale  après  le  Concordai  de  180t. 

(4)  Bibl.  nat.  italien.  1719.  Dispacci  degl' ambascialori  Venezione  di  Paria  i> 
febrajo  1558. 

armoiries  de  François  du  Gabre,  avocatau  Parlement  de  Toulouse,  habitan  1 
Grenade  Voir  Armoriai  général  de  1696;  Toulouse-Montauban,  p.  28.  -  Us. 
Bibl.  nat.). 

6)  Fisqubt,  /.'/  France  pontificale  diocèse  de  Lodève),  p.  128. 


INTRODUCTION  XXV 


IV 


La  publication  des  dépêches  de  M.  de  Lodève  pendant  ses  deux 
missions,  à  Ferrare  et  à  Venise,  telles  qu'elles  sont  reproduites  dans 
ce  recueil,  permettra  de  mettre  en  relief  l'action  considérable  d'un 
ambassadeur  français,  presque  inconnu  jusqu'ici,  et  de  lui  rendre  le 
rang  qu'il  doit  équitablement  occuper  dans  l'histoire  diplomatique 
de  la  France  sous  Henri  II. 

Étudié  et  jugé  par  sa  seule  correspondance,  Dominique  du  Gabre 
apparaîtra  négociateur  habile  et  scrupuleux,  écrivain  disert  et  ex- 
pressif. Le  style  du  prélat  est,  sans  doute,  un  peu  familier;  il  révèle 
un  tempérament  enclin  au  bavardage  ;  mais,  sous  réserve  de  cette 
critique,  on  peut  dire  de  la  langue  de  l'ambassadeur  qu'elle  revêt 
une  absolue  pureté  de  formes  et  que  le  ton  de  ses  dépêcbes  indique 
un  écrivain  de  race",  vraiment  original,  entièrement  personnel.  Ce 
style,  émaillé  parfois  de  saillies,  pénétré  de  latinité,  abondant  en 
citations  classiques,  vif  et  gai,  produit  l'effet  d'une  conversation 
agile,  affranchie  de  prétention:  le  même  au  papier  qu'en  la  bouche, 
suivant  le  mot  de  Montaigne,  il  montre  bien  au  clair,  l'âme  toute 
nue  de  l'écrivain. 

Tel  qu'il  se  dégage  du  ton  de  ses  dépêches,  le  caractère  du  prélat 
se  dessine  aussi  avec  netteté;  c'est  celui  d'un  serviteur  zélé,  pas- 
sionnément dévoué  à  son  souverain,  rempli  de  louables  intentions, 
prudent  et  honnête,  jugeant  avec  clarté  les  événements,  désireux 
de  tout  prévoir,  étroitement  appliqué  à  remplir  le  rôle  délicat  qui 
lui  est  assigné. 

Qu'on  étudie  du  Gabre  dans  ses  fonctions  fiscales  et  politiques  à 
Ferrare  ;  qu'on  l'examine  dans  sa  mission  diplomatique  auprès  de 
la  seigneurie,  partout  on  peut  affirmer  qu'il  sut  se  montrer  digne 
de  la  confiance  royale,  et  n'obéit  qu'à  un  mobile:  étendre  le  prestige 
du  nom  français  dans  la  Péninsule.  A  ce  titre,  du  Gabre  mérite 
une  place  distinguée  parmi  ces  diplomates  qui  contribuèrent  à  la 
grandeur  de  notre  pays  sous  la  monarchie  des  Valois. 

Nous  avons  demandé  à  son  style  de  nous  révéler  l'intelligence, 
l'esprit  et  le  caractère  de  du  Gabre  :  c'est  à  la  même  méthode  que 
nous  devons  avoir  recours,  si  nous  voulons  évoquer  les  Iraits  du 
prélat.  Il  n'existe,  en  effet,  à  notre  connaissance,  aucun  portrait  de 
ce  personnage,  et  les  investigations  minutieuses  auxquelles  nous 
nous  sommes  livrés  pour  en  découvrir  un  n'ont  point  amené  de 
résultat. 

Il  suffirait,  en  vérité,  pour  acquérir  la  preuve  que  l'effigie  du  prélat 


XXVI  INTRODUCTION 

fait  malheuresement  défaut  à  la  glorieuse  galerie  des  hommes  illus- 
tres du  xvie  siècle,  d'avoir  recueilli  de  l'érudit  conservateur  du 
cabinet  des  Estampes,  M.  Henri  Bouchot,  l'aveu  qu'il  n'a  jamais 
rencontré  le  portrait  de  du  Gabre. 

Nous  avons  cru,  toutefois,  devoir  pousser  notre  curiosité  au  delà 
des  frontières  de  la  France,  et  nous  adresser,  aussi,  là  où  l'am- 
bassadeur avait  exercé  ses  fonctions  ;  mais  pas  plus  à  Ferrare, 
malgré  les  obligeantes  recherches  de  M.  Venturini,  conservateur 
des  Archives  provinciales,  qu'à  Venise,  où  le  chevalier  Charles 
Malaga,  directeur  des  Archives  de  l'État,  a  mis  à  notre  disposition 
ses  profondes  connaissances  des  galeries  de  la  cité,  nous  n'avons 
pu  mettre  la  main  sur  la  moindre  image  de  notre  évèque  (1).  Il 
nous  restait  à  consulter,  au  Brilish  Muséum,  le  manuscrit  Harley 
3310;  de  ce  côté  là  également,  nos  investigations  ont  élé  vaines  (2). 

Il  faut  donc  nous  résigner  à  enregistrer  cette  douloureuse  consta- 
tation, c'est  qu'en  un  siècle  où  l'art  de  la  gravure  était  dans  son  plein 
épanouissement  en  Italie  ;  où  l'école  de  Marc-Antoine  Raimondi 
venait  de  former  des  élèves  incomparables,  le  prélat  n'ait  servi  de 
modèle  à  aucun  artiste  de  ce  pays,  et,  aussi,  qu'à  défaut  du  burin, 
ni  le  crayon,  ni  le  pinceau  n'aient  servi  à  fixer  son  image.  Mais,  la 
correspondance  donne  des  indications  suffisantes  pour  brosser  en 
lignes  très  nettes  la  figure  du  diplomate. 

Au  physique,  c'était  un  homme  de  taille  moyenne  et  de  forte 
corpulence,  affligé  d'un  embonpoint  exagéré,  et  d  un  tempérament 
bilieux,  nécessitant  le  fréquent  usage  des  purgalions  (3). 

Au  moral,  c'était  un  joyeux  vivant,  un  épicurien,  sensible  par 
dessus  tout  aux  délices  de  la  table  ;  s'invitanl  chez  le  duc  de  Ferrare 
pour  manger  «un  couble  de  perdreaux»  (4).  se  délectant  à  la  pensée 
de  «boire  frais  et  manger  des  fruits  »  chez  ce  prince  (5),  et  écrivant 


(1)  Que  MM.  Venturini  et  If  chevalier  Malaga  daignent  recevoir  ici  l'expression 
trèssincère  de  notre  gratitude,  pour  l'empressement  si  aimable  avec  lequel  ils 
ont,  l'un  et  l'autre,  secondé  uns  recherches. 

(2)  Le  manuscrit  Harlej  3310,  conservé  au  British  .Muséum,  est  intitulé  *Aivnat\ 
délia  sua  patria  divisi  m  cinque  libri,  anno  m.  d.  a»;  c'est  une  chronique  île 
Roddi, ambassadeur ferrarais  auprès  du  Saint-Siège,  racontant  l'histoire  de  Ferrare 
depuis  sa  fondation  jusqu'en  1598.  Ce  manuscrit  contient  une  très  considérable 
série  de  pmiraiis,  dont  quelques-uns  même  ceux  des  contemporains  de  Itoddi, 
ont  été  exécutés  d'après  nature.  —  Nous  devons  remercier  M.  W.  de  Binch 
trustée  du  Itrilish  Muséum,  pour  la  gracieuseté  avec  laquelle  il  a  bien  voulu 
(sur  notre  demande)  compulser  le  Ms.  Harlej  3310  alin  de  s'assurer  si  le  portrait 
de  du  Gabre  ne  s'y  trouvait  point. 

(3)  Gabre  au  duc  de  Ferrare.  3  avril  1553, 

(4)  Gabre  au  duc  de  Ferrare,  '21  juin  1556. 

(5)  Gabre  au  duc  de  Ferrare,  6  août  1556. 


INTRODUCTION  XXVII 

encore  au  Duc  :   «Je  ne  meneray  que  deux  hommes,  un  pour  me 
porter  à  manger,  l'autre  à  boire  par  les  chemins»  (1). 

Nous  croyons  avoir,  depuis  le  commencement  jusqu'au  lerme  de 
cette  étude,  éclairé,  comme  il  le  fallait,  tous  les  points  obscurs  de 
la  vie  privée  et  publique  de  l'évêque-ambassadeur.  Peut-être  nous 
fera-t-on  le  reproche  d'avoir  donné  trop  d'ampleur  à  cette  étude? 
Nous  répondrons  à  cela  que,  précisément  parce  que  du  Gabre  était 
tombé  dans  l'oubli,  nous  avons  considéré  comme  un  acte  do  répa- 
ration de  lui  consacrer  une  notice  biographique  fidèle  et  détaillée 
qui  rendît  à  son  nom  la  notoriété  à  laquelle  ses  services  lui  per- 
mettent de  prétendre. 

Nous  ne  saurions  terminer  autrement  cet  avant-propos  qu'en 
nous  acquittant  d'un  agréable  devoir  :  remercier  tous  ceux  qui  ont 
bien  voulu  faciliter  nos  recherches  et  nous  aider  de  leur  expé- 
rience. 

Ce  sont:  M.  Léopold  Delisle,  administrateur  général  de  la  Biblio- 
thèque nationale,  qui,  pour  nous  permettre  de  copier  à  notre  aise 
les  dépêches  contenues  dans  le  manuscrit  de  Grenoble,  a  demandé 
pour  nous,  avec  sa  bienveillance  accoutumée,  le  transfert  à  Paris  de 
ce  précieux  document.  M.  Farges,  directeur  du  bureau  historique 
aux  Affaires  étrangères,  et  M.  Tausserat-Radel,  sous-directeur,  qui 
nous  ont  communiqué,  avec  une  libéralité  à  laquelle  nous  ne  sau- 
rions trop  rendre  hommage,  les  documents  conservés  dans  les 
dépôts  du  ministère.  M.  Paul  Dufey,  de  Paris,  à  l'égard  duquel  nous 
commettrions  une  injustice  si  nous  ne  disions  avec  quel  zèle  il 
a  fouillé  à  notre  profit  les  divers  fonds  du  Département  des  ma- 
nuscrits ;  MM.  Yignaux,  archiviste  de  l'hôtel  de  ville  de  Toulouse  ; 
Aristide  de  Robert,  maire  de  Gabre  (Ariège)  ;  l'abbé  Galabert,  curé 
d'Aucanville  (Tarn-et-Garonne),  qui  nous  ont  transmis  des  docu- 
ments précieux  pour  notre  étude. 

Enfin,  nous  enverrons  par-delà  les  monts  nos  sentiments  de 
sincère  gratitude  au  chevalier  Giovanni  Ognibene,  le  savant  directeur 
des  Archives  de  l'État,  à  Modène,  qui  a  mis  tant  de  bonne  grâce  à 
nous  donner  communication  des  dépèches  conservées  dans  les 
fonds  de  la  famille  d'Esté  et  de  la  famille  Fieschi. 

(1)  Gabre  au  duc  de  Ferrare,  6  août  1556. 


NÉGOCIATIONS 


DE 


DOMINIQUE  DU  GABRE 

(1552-1557) 


NÉGOCIATIONS  DE  DOMINIQUE  DU  CABRE 


GABRE   AU    DUC   DE   FERRARE   (1) 

4. —  [Fer rare].  3  janvier  J  552. —  Monseigneur,  ce  porteur  qui  est  a 
rnoy,  a  este  depesche  a  Sienne  pour  aller  de  vers  le  Roy  en  dilligence, 
et  pour  ce  quil  me  fault  bien  tout  aujourduy  pour  escripre,  jay  este 
dadvys  quil  vous  allast  trouver,  pour  rendre  compte  a  votre  ex- 
cellence dez  artères  du  dite  Sienne  (2)  et  de  la  façon  de  procéder  de 
nions,  le  duc  de  Florence  (3),  si  gratieuse  et  favorable  en  notre 
endroict,  que  cela  me  faict  prendre  quelque  oppinion  que  Ion  na 
poinct  envye  de  faire  lentreprinse.  Vous  pourrez,  monseigneur,  es- 
cripre par  ce  dit  porteur  lequel  sen  ira  a  Venize  prendre  aussi  une 
depesche  de  monsr  lambassadeur  (4)  auquel  il  conduyra  bien  de 
vostre  chasse  sil  vous  plaist  luy  en  faire  part,  et  demain  jenvoieray 
mon  pacquet  droict  a  Bresse  par  ung  aultre  de  mes  gens. . . 

De  Ferrare  ce  me  Janvyer  1552. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale  Estense. 
Lettere  di  oratori  Esteri.  Franchi  . 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

2.  —  [Ferrare],  5  janvier  1552. —  Monseigneur,  Je  salue  vostre 
excellence  de  la  prinse  de  Hesdin(5)  que  a  este  avec  composition  et 

'1)  Hercule  II  d'Esté,  fils  d'Alphonse  Ier  et  de  Lucrèce  Borgia,  duc  de  Ferrare 
et  de  Modène,  naquit  le  4  avril  1508,  épousa  en  1528  Renée  de  France,  fille  de 
Louis  XII  et  d'Anne  de  Bretagne,  régna  de  1534  à  1559  et  mourut  le  3  octobre  de 
cette  dernière  année.  Il  fut,  tour  à  tour,  dévoué  à  la  cause  de  Charles-Quint  et  de 
Henri  II,  selon  que  la  fortune  souriait  à  l'un  ou  à  l'autre  de  ces  belligérants.  Cepen- 
dant il  adhéra  à  la  ligue  conclue,  en  janvier  1556,  entre  Henri  II  et  le  pape  Paul  IV 
contre  les  Impériaux,  reçut  du  roi  de  France  le  titre  de  lieutenant-général  en 
Italie  ;  il  fit  la  paix  avec  l'Espagne  en  1558. 

(2)  Sienne,  capitale  d'une  puissante  république,  longtemps  rivale  de  Dise  et  de 
Florence,  fut  soumise  en  1540  par  Charles-Quint.  Libérée  de  la  garnison  impériale 
qui  l'occupait  depuis  douze  ans,  pendant  l'été  de  1552,  elle  était,  à  l'époque  où 
commencent  les  négociations  de  du  Gabre,  le  centre  de  graves  affaires  qui 
réclamaient  l'attention  des  diplomates  français,  et  le  théâtre  de  l'influence  de  la 
France  au  nord  de  l'Italie.  Sienne  fut  défendue  par  Biaise  de  Monlluc  qui  a  laissé 
un  écrit  très  émouvant  de  ce  siège  [Commentaire  et  lettres  de  Biaise  de  Montluc, 
par  Alphonse  de  Ruble  ;  publication  de  la  Société  de  l'Histoire  de  France,  5  vol. 
1865-1872). 

(3;  Cosme  I"  de  Médicis,  premier  grand-duc  de  Toscane,  né  en  1519  de  Jean 
de  Médicis  (le  Grand  Diable  ,  mort  en  1574,  monta  sur  le  trône  en  1537,  après  le 
meurtre  d'Alexandre  de  Médicis,  régna  en  véritable  tyran,  introduisit  l'inquisition 
en  Toscane,  et  se  fit  céder  Sienne  par  Philippe  II  en  1557. 

(4)  Odet  de  Selve.  (Voir  l'introduction  qui  précède,  p.  xiv,  note  4). 

(5)  Hesdin  ^Pas-de-Calais),  chef-lieu  de  canton  sur  la  Candie.  —   Les   troupes 


i  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1552] 

avec  mesme  condition  que  les  aultres  lavoient  heue  ;  monseigneur 
de  Thaiz  (1)  y  est  mort  et  luy  eust  mieulx  vallu  demorer  tousiour 
banny  ;  monseigneur  de  Rasse  (2)  qui  lavoit  randue  y  a  eu  une 
harquebuzade  a  la  teste,  voyla  toutes  les  particularités  que  Catherin 
Jehan  (3,  en  escript  a  raons'  lambassadeur  par  lettres  du  xxvme,  et 
la  Seigneurye  (4)  en  a  eu  corrier  exprès.  Jay  letres  du  xxie  du  Roy 
avec  nouvelles  de  Metz  que  sont  assez  vieille,  mais,  monseigneur,  je 

vous  envoyé  le  tout  comme  le  Roy  me  le  commande 

De  Ferrare  le  ve  jour  de  Janvyer  1552. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

3.  —  [Ferrare],  ô  janvier  1 552. —  Monseigneur,  Fncores  ce  soyr  est 
arryve  ung  corrier  depesche  de  sa  majesté  le  xxve  de  ce  moys  ou  il 
y  a  ung  pacquet  pour  vostre  excellence  quil  ma  semble  vous  debvoyr 
envoyer  dez  ce  soyr  mesmes  .le  presupose  que  par  la  vous  verrez 
toutes  les  particularitez  de  la  prinse  de  Hedin  qui  me  feront  ce  soyr 
cryer  le  Roy  boyt  de  meilleure  cueur. 

De  Ferrare  ce  vme  de  Janvjer  velij. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   AU    ROI 

4. — [Ferrare],  5  janvier  1 552. — Sire,  despuis  mes  dernières 
lettres  escriptes,  est  arrivé  le  corryer  despéché  par  Vostre  Majesté 
avec  vos  lettres  du  xxve,  par  où  nous  voyons  la  redition  de  Hesdin, 
avec  grande  réputation  de  voz  forces,  et  plus  désavantageuses  con- 
ditions de  voz  ennemys,  et  de  ceulx  qui  estoient  dedans  que  nous 
n'avious  entendu  par  les  advys  que  nous  en  avions  eu  icy  ce  matin. 

impériales  avaient  pris  Hesdin  depuis  peu,  quand  on  jugea  que  cette  place  devail 
être  reprise.  Antoine  de  Bourbon  fpère  de  Henri  IV,  fut  chargé  de  cette  mission 
et  y  réussit.  Après  la  prise  de  Therouenn<\  en  1553,  Hesdin  retomba  dans  les 
mains  de  Charles-Quint.  (Voir:  Lettres  d'Antoine  de  Bourbon  et  «le  Jeanne 
d'Albret,  par  le  marquis  de  Rociiambeac.  Soriété  «le  l'Hist.  de  France,  p.  i'.'. 
note). 

(1)  Jean  de  Taix,  chevalier  de  l'Ordre  du  Roi.  gouverneur  et  mailre  des  eaux 
et  forêts  de  Loches,  ambassadeur  extraordinaire  a  Rome  [1538  .  grand-maltre  de 
l'artillerie. 

(2  Horace  Farnèse,  duc  de  Castro,  ainsi  appelé  par  Catherine  de  Médicis. 
(Correspondance  de  Cath.  de  Médicis  par  H.  de  i.a  Femukrk.  I.  I,  p.  "  . 

(3;  Catherin  Jehan,  maître  de  la  poste  à  Lyon.  (Commentaires  de  Mouline,  p.  253  • 

(4)  La  seigneurie  ou  république  de  Venise. 


[janvier  1552]  Dominique  nu  gabre  ."> 

Je  ne  faiz  nul  doubte,  puis  que  cesle  espine  la  est  ostée,  que  vous  ne 
ferez  perdre  bien  tost  a  l'Empereur  son  obstination  de  Metz  (1). 
Vous  voyez  Sire  que  Dieu  et  le  temps  combattent  pour  vous  ;  avec 
tant  de  bonshommes  et  de  bons  serviteurs  que  vous  avez,  c'est  a  ce 
coup  qu'il  faull  accabler  vostre  ennemy  et  luy  taire  confesser  par 
force  qu'il  ne  vous  est  ny  supérieur,  ny  esgal.  J'espère  bien  que 
Dieu  vous  en  donnera  la  grâce,  et  que,  du  coste  de  deçà,  il  gaignera 
encores  moings  qu'il  n'a  fait  jusques  icy.  où,  Dieu  mercy,  tous  voz 
affaires  se  portent  bien,  et.  encores  que  l'argent  nous  fust  failly, 
nous  avons  trouvé  crédit  pour  accommoder  et  satisfaire  partout 
durant  ce  moys.  et  n'ay  failly  d'envoyer  a  Parme  (2)  et  à  la  Myran- 
dola  (3)  qu'ils  recepvront  pour  ceste  feste  des  Roys  vostre  bonne 
nouvelle,  et  croy.que  leurs  voysins  orront  demain  cryer  le  Roy 
boyt ,  a  voz  canons.  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  se  trouve  de- 
hors a  la. chasse  et  je  luy  ay  envoyé  son  pacquet  duquel  il  recepvra 
j'en  suis  sur  un  très  grand  plaisir  .... 
De  Ferrare  le  ve  Janvier  1552. 

(Bibl.  nationale,  fonds  français,  vol.  20453, 
fol.  143)  (originale  . 

<;abre  AT   ROI 

5.  —  [Ferrare],  5  janvier  1 55  2 . —  Sire  je  vous  escripvizhier  par  Gas- 
sot  (4)  tout  ce  qui  se  presentoit  a  ma  cognoyscance  icy  pour  voz  affai- 
res, et,  mainctenant,  il  n'est  rien  surveneu  de  nouveau  du  couste  de 
Sienne  ne  d'aillieurs, digne  de  vous  escripre,  sinon  quil  a  icy  passe  ung 
corrier  espaignol  et  par  conséquent  menteur,  qui  disoit  avoir  laisse 
l'armée  de  Naples  a  dix  postes  par  deçà  Naples,  laquelle  pourroit 
estre  devant  Sienne  dans  le  dixiesme  du  présent,  et  dist  davantaige 
que  le  Duc  de  Florence  avoit  faict  jusques  icy  l'honeste  et  le  gratieux 
a  l'endroict  de  voz  serviteurs,  laissant  passer  armée,  corriers  et 
soldatz,  et,  qu'il  avoit  délibéré  de  le  faire  ainsy  jusques  a  ce  qu'il 
se  veist  le  plus  fort,  et  l'armée  impérialle  comparoystre,  et  que  alors, 
il  se  declareroit  a  spaie  tracte  (5;,  disant  davantaige  que  l'Empereur 

(1)  Metz,  Toul  et  Verdun,  et  le  territoire  de  ces  tiers  villes,  dites  les  trois 
Évêchés,  tombèrent  au  pouvoir  de  Henri  II 

(2)  Le  duché  de  Parme  et  Plaisance,  donné  au  Saint-Siège  par  le  Congrès  de 
Mantoue  (loll;.  annexé  au  .Milanais  par  François  Ier  après  la  victoire  de  Marighan 
(1515),  fui  rendu  au  pape  Clément  VII  par  Charles-Quint  1.1530).  Paul  III  le  donna 
en  fief  (1345,  à  son  fils  naturel  Pierre-Louis  Famèse,  <|ui  eut  pour  héritier  Octave 
son  fils,  en  15 il. 

(3  La  principauté  de  la  Mirandole,  sous  la  protection  de  la  France,  entretenait, 
à  ses  frais,  une  garnison  française  dans  sa  citadelle. 

(4)  Gassot,  courrier  au  service  de  la  France, 

(5)  L'épée  hors  du  fourreau. 


t>  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1552" 

n'avoit  nulle  envye  de  faire  ceste  entreprise,  se  n'eust  este  l'envve 
de  complaire  audit  Duc.  C'est  parler  bien  avant  pour  ung  courrier, 
et  je  m'en  rapporte  a  la  vérité,  mais,  je  n'ay  voulu  faillir  d'ad- 
vertir  vostre  Majesté  de  ce.  que  j'en  puis  entendre.  Sire,  Monsieur  le 
Comte  de  la  Myrandola  Cl)  m'a  faict  entendre  qu'il  despechoit  home 
exprès  pour  ses  affères  en  France,  qui  m'a  faict  luy  envoyer  ceste 
lettre,  presupposaut  que  son  homme  ira  en  dilligence  et  ne  veulx 
faillir,  Sire,  a  vous  dire  que  ledit  Seigneur,  Conte  lequel  vous  con- 
gnoysces  mieulx  que  nous  trestons,  pour  estre  de  vostre  norriture, 
méritte  toulte  faveur  et  bon  traictement  de  vostre  Majesté,  il  a 
pourté  durant  son  siège  de  très  grandes  despences,  et  monstre  son 
affection,  son  cueur  et  sa  bonne  volunté  en  l'endroit  de  vostre 
service,  et  se  trouve  mainctenant  chargé  de  quatre  ou  cinq  cappi- 
taines  qui  ont  faict  si  grand  debvoir,  que  chacun  scayt,  durant  ledit 
siège,  ils  n'ont  point  maintenant  de  charge,  cl  il  leur  donne  tous  les 
moys  cinquante  franc/,  a  chacun.  La  raison  eust  bien  voulu  qu'on  les 
eust  employés  a  ceste  expédition  nouvelle  de  Sienne,  mais  ilz  ont 
este  oblyés;  ce  sont  des  personnes,  Sire,  de  qui  vous  pouvez  espérer 
service  si  vous  avés  a  continuer  la  guerre  et  croy  que  vostre  Majesté 
usera  en  cela  de  libéralité. tant  envers  eux  que  envers  ledit  Seigneur 
Conte  qui  ne  les  veult  abbandonner  après  l'avoyr  si  bien  servy,  el  si 
n'a  pas  grand  moyen  de  les  entretenyr  du  sien.  Je  croy  Sire  qu'il 
vous  fera  aussy  entendre   le    peu   de    moyen    qu'il    a   de  fournir  sa 

ville  de  munytions  d'artiglerie  sans  laquelle   toutes  les  forlen 

du  inonde  ne  servent  de  rien;  j'avois  este  recherche  de  y  faire 
quelque  despence  mais  j'ay  faict  responeeque  vous  n'a\  es  sen  items 
par  deçà  qui  y  mette  la  main  sans  vostre  exprès  commandement. 

Sire,  ce  matin  j'ay  receu  de  voz  lettres  du  \\r.  et  d'aultres  de 
Lyon  quiasseurent  la  prise  de  Hesdin:  je  n'ay  point  failly  incontinent 
de  despecher  a  tous  voz  serviteurs,  tant  eu  Toscanne  que  en  Lom- 
bardye,  affinqu'ilz  en  facent  l'alégresse,  aussi  bien,  que  les  Impé- 
riaulx  ont  fait  de  la  prinse  de  Metz  que  j'espère  qu'ilz  n'auront 
jametz.  Dieumercy  on  veoyt  que  \<>s  ennemys  ne  scavenl  garder  ce 
qu'ilz  ont  gaigné,  et  scavent  encore  moings  recouvrer  ce  qu'il/  <>nt 
pardu;  a  la  lin  fauldra  qu'il/  se  humylienl  par  force. 

Sire,  il  est  vray  que  nous  avons  quelque  faulte  d'argent;  >i  esl  ce 
que  nous  avons  donné  ordre  partout  avec  le  crédit,  que  pour  ce  moys, 
on  ne  s'appercevra  point  de  no/  nécessitez,  et  j'espère  avant  que 
nous  soyons  a  l'aullre.  que  vostre  Majesté  nous  aura  faietz  secourir. 


U    Galeollo  11  Pièo, comte  de  la  Mirandole,  se  plaça  sous  la  protection  de  II 

Franco,  mourut  en  1569. 


[JANVIER    1552]  DOMINIQUE   DU    GABRE  1 

De  quoy  je  vous  supplye  très  humblement  afïïn  que  voz  serviteurs 
par  deçà  ayent  le  moyen  de  vous  faire  le  service  qu'ilz  désirent.  . . . 
De  Ferrare  ce  ve  jour  de  Janvyer  1552. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20453,  fol.  147)  (originale). 

GABRE    AU    ROI 

6. —  [Ferrare],  9  janvier  1Ô52.  —  Sire,  nous  eusmes  hyer  icy  au 
matin,  par  lettres  de  Spire  (1)  du  2e  de  ce  mois,  ad  vis  comme  l'Em- 
pereur s'estoit  levé  de  devant  Metz  avec  tant  de  particularités  que 
nous  ne  faisons  un  seul  doubte  que  la  nouvelle  ne  soitvraye,  etmes- 
mement,  d'aultant  que  chacun  pense  bien  que  la  prinse  de  Hesdin 
et  la  crainte  qu'il  a  que  vostre  armée  marchast  vers  luy,  Font  faict 
resouldre  à  desloger  plustost  paradventure  qu'il  n'eust  fait,  et  pense 
que  Vostre  Majesté  nous  en  fera  scavoir  bientost  des  nouvelles.  Ce 
sont,  Sire,  deux  belles  et  grandes  victoires  que  nostre  Seigneur  nous 
a  données,  en  bien  peu  de  jours,  et  monseigneur  de  Guise  (2)  y  a 
acquis  une  réputation  et  louange  immortelle,  j'en  ay  advertiz  par 
deçà  tous  voz  serviteurs  en  Toscanne  et  en  Lombardie  qui  doibvent 
en  rendre  grâce  a  Dieu  et  faire  les  allégresses  que  méritent  tant 
de  prospérités,  que  Dieu  vous  donne  ;  je  vous  asseure  bien.  Sire, 
que  c'est  ung  plaisir  de  veoir  en  ce  pays  la  les  affections  de  ceulx 
qui  sont  part  ialz,  car,  ceulx  qui  sont  de  vostre  cousté,  font  maintenant 
tant  de  feste  et  de  joye,  qu'il  semble  que  vous  ayez  gaigné  tout  le 
monde,  et  les  pauvres  imperiaulx  sont  sy  abattuz  qu'ilz  n'osent  se 
monstrer  en  place.  J'espère  bien  que  ces  Napolitains  perdront  le  cœur 
et  la  volonté  de  venir  plus  à  Siennes,  et  encore  qu'ilz  fassent  de  grandz 
démonstrations  d'y  vouloir  marcher  jusques  a  envoyer  a  Rome  leurs 
forriers  et  provoyeurs  pour  arrester  de  leurs  logis  et  de  leurs  vivres 
dans  les  terres  du  Pape  ;  sy  voiton  que  le  Vice-Roy  ne  se  hâte  point 
de  partir,  ilz  ont  la  leurs  espagnolz  et  allemans  qu'ilz  payent  ainsi 
comme  ainsy,  et,  je  croy  qu'ilz  les  veullent  faire  promener  et  vous 
mestre  en  despence,  faisant  cette  bonne  mine  la,  et  voist  on  que  les 
Italiens  que  le  sr  Ascanyo  fait,  sont  en  fort  petit  nombre  et  sans 
argent.  Monsieur  de  Termes  (3)  m'escript  du  5e,  que  Mr  le  Duc  de 

(1)  Spire,  près  de  la  rive  gauche  du  Rhin.  La  chambre  impériale  y  fut  transfé- 
rée de  Francfort  en  1530.  Diverses  Diètes  y  furent  convoquées  par  Charles-Quint. 

(2)  François  de  Lorraine,  duc  de  Guise,  fds  aîné  de  Claude  de  Lorraine,  comte 
d'Aumale  et  d'Antoinette  de  Bourbon,  né  au  château  de  Bar  (1519).  A  l'époque 
où  commence  la  correspondance  de  l'évèque  de  Lodève,  le  duc  de  Guise,  lieu- 
tenant-général des  Trois  Évèchés,  défendait  Metz  contre  le  duc  d'Albe  et  Charles- 
Quint.  Il  mourut  le  24  février  1563,  devant  Orléans,  assassiné  par  Poltrot  de 
Méré. 

(3)  Paul  de  LaBarthe,  seigneur  de  Thermes,  né  en  1482,  se  signala  à  la  bataille 


8  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1552] 

Florence  a  fait  lever  ledit  Ascanyo  de  son  estât  pour  ce  qu'il  yfaisoit 
mille  desordres,  et  qu*il  s'est  retiré  sur  le  Perosin  avec  seullement 
do  cens  hommes.  Je  ne  puis  encores  croire  qu'ilz  viennent  à  Sienne 
pour  le  peu  d'apparence  qu'il  y  a  qu'ilz  doibvent  espérer  grand 
proffit,  mais,  quoy  qu'ilz  en  lacent,  Sire,  si  portés,  vous,  dès  ce  mois 
cy  aussi  grand  despence  que  s'il  y  avoit  devant  Sienne  50000  hom- 
mes, car,  l'on  a  fait  une  nouvelle  levée  jusques  a  dix  mille  soldatz 
dont  la  paye  court  dez  ce  mois,  et,  si  scait  on  bien  que  nous  n'avons 
pas  ung  liard  pour  commencer  ce  bal  ;  j'en  ay  remonslre  dict  et 
escript  tout  ce  que  j'ay  peu,  et  quand  nous  aurions  abondance  d'ar- 
gent je  louerois  ceste  dépense  et  diroil  que  tout  seroit  bien  fait  ;  mais 
l'entreprenant  sans  moyen  de  la  commencer,  il  y  a  danger  qu'il  y 
aura  plus  de  difficullé  a  la  continuer;  je  scay  bien  que  nous  trouvions 
par  deçà  en  une  grande  honte  si  on  n'eust  trouve  du  crédit.  Monsieur 
l'Ambassadeur  de  Venize  a  recouvert  27  mil  escuz  en  deux  fois 
de  Francesco  Nazy  (1)  qui  en  a  fait  très  volontiers  l'avance  sans  en 
avoir  commission  du  gênerai  d'Albenne  (2),  et  sy  n'en  veult  point 
dinterest;  j'ay  recouvert  aussi  en  celte  ville  50  mil  escuz  content 
d'ung  marchant,  comme  je  vous  escryviz,  Sire,  par  une  autre  lettre, 
et,  sans  cela,  je  ne  scay  pas  ce  que  nous  eussions  faict,  car  encores 
ai  je  receu  aujourdhuy  une  lettre  du  gênerai  d'Albenne  du  il  de 
ce  mois  qui  me  mande  ne  vous  pouvoir  envoyer  argent  comptant 
ny  en  remettre  de  quelques  semaines,  mais.  Sire,  il  vous  est  si 
affectionné  serviteur,  que,  sans  attendre  commission  ny  mandé 
de  vous  d'autant  que  je  lui  avois  escript  vostre  nécessite,  il  [n'en- 
voyé une  lettre  de  crédit  pour  envoyer  a  son  nom  Lm  escuz  lesquelz 
j'ay  trouvé  dont  je  veulx  attribuer  tout  l'bonneura  son  crédit  et  a  sa 
lettre  et  n'en  prendre  rien  pour  moy,  et  demain  j'espère  les  envoyer 
a  Sienne  par  bon  et  seur  chemin  s'il  plaisl  a  Dieu  ;  reste,  Sire,  qu'il 
vous  plaise  commander  qu'il  nous  soit  envoyé  pour  le  moys  de 
lévrier  en  toute  dilligence,  car,  je  ne  pense  plus  pouvoir  recouvrer 
ung  escu.  Vous  pouvez.  Sire,  congnoistre  par  l'effecl  de  la  lettre  île 
crédit  que  ledit  gênerai  d'Albenne  m'a  envoyée  si  je  vous  demande 

de  Cerisolles  [1544  .  à  Saluées  1541  .  a  Parme  1553  .  recul  le  bâton  île  maréchal 
de  Fiance  (1558),  mais  perdit  la  bataille  île  Gravelines,  où  il  l'ut  l'ail  prisonnier; 
il  ne  fut  relâché  qu'à  la  paix  de  Cateau-Cambrésis  1559);  il  mourut  eu  disgrâce 
(1562\ 

(1)  Francisco  Nazy,  gentilhomme  florentin,  résidant  à  Venise  en  qualité  de 
commettant  du  général  d'Elbène.  C'était,  dil  du  Gabre  AlV.  étrangères,  t.  ".  f°  9, 
Venise),  un  homme  de  grand  crédil  el  un  homme  de  bien,  qui  a  toujours  fourni 
les  deniers  pour  le  roi  en  Italie  el  a  secouru  les  ambassadeurs. 

2)   Allasse  del   lî.  no.  de  la  famille    del  Itcne.  originaire  de  Florence.   S€  relira 

en  France  sous  le  règne  de  François  I- .  Henri  II  le  créa  général  el  surintendant 
des  finances  hors  du  Royaume;  il  avait  épousé  Lucrèce  Cavalcanti,  une  des 
tilles  d'honneur  de  Catherine  de  Médicis. 


[FÉVRIER    1552]  DOMINIQUE   DU    GABRE  9 

sans  propoz,  semblables  aux  lettres  des  marchantz  dont  je  vous  ay 
escript  par  ma  dernière  despeche.  Sire  le  Capitaine  Nicolo  Losco 
sera  porteur  de  la  présente  despecbe  en  dilligence  pour  les  affaires 
de  Mr  le  Comte  de  la  Mirandolle,  et  entre  aultres  choses  il  vous  fera 
requeste  pour  quelque  enlretenement  de  quatre  capitaines  qui  ont 
si  bien  servy  durant  le  siège,  et  pour  avoir  munitions  de  vivres  dans 
sa  place  ;  je  ne  vous  en  fera  y  sur  ce  aultrement  requeste,  scachant 
que  vous  ne  faillies  point  de  recognoistre  ceulx  qui  vous  ont  fait 
service  etque,  en  tout  cas,  vostre  Majesté  trouvera  bon  ledit  sr  Comte 
et  ses  cappitaines  et  va  avec  luy  ung  ambassadeur  des  pauvres  sub- 
gects  du  Mirandolois  pour  vous  remonstrer  la  pauvreté  de  leur  pays 
qui  est  tout  brûlé  et  dissipé  depuis  le  siège,  j'ay  veu  souvent  alors 
la  pitié  qui  y  est  bien  fort  grande  et  suis  sur  que  si  vous  l'aviez  veue 
vous  y  useriez  de  quelques  libéralitez  et  aulmosne. 
De  Ferrare  ce  9e  jour  de  Janvier  1552. 

Sire  j'avais  desja  veu  les  estatz  des  Commis  de  l'extraordinaire  de 
lannée  passée  mais  touls  lesdits  commis  sont  encores  a  Sienne  et 
m'ont  envoyé  ung  estât,  par  lequel  ilz  ont  despencé  tous  les  50  mil 
escuz  qui  estoient  de  Rome  en  une  cbose  ou  aultre  durant  le  mois 
de  Décembre;  ils  attendent  que  Monseigr  de  Termes  soit  guéry  de  la 
goutte  pour  signer  les  ordonnances  et  après  nous  compterons 
emsemble  ... 

(Bibl.  nat,  Fr.  20641.  fol.  32)  (copie). 


GABRE   AU    DUC   DE   FERRARE 

7. —  [Venise],  3  février  155  2.  —  Monseigneur,  Je  vous  envoyé  par 
Partenay  (1)  la  coppye  de  la  lettre  de  Monsieur  de  Mirepoix  et  la  cop- 
pye  de  celle  de  Monsieur  de  Forquevaulx(2).  11  vous  diral'ocasion  de 
son  voyage  de  Sienne,  surquoy  il  vous  plaira  luy  dire  vostre  bon  et 


(1)  Jean  de  Partenay  Larchivèuue,  seigneur  de  Soubise,  né  en  1512,  se  convertit 
au  protestantisme  à  la  Cour  de  Ferrare,  où  sa  mère  avait  suivi  Renée,  mourut  le 
1er  septembre  1556. 

(2)  Raymond  de  Beccaria  dePaviede  Robert,  baron  de  Fourquevaux,  né  en  1508, 
fui  blessé  au  siège  de  Pavie,  fut  fait  prisonnier  au  siège  de  Naples,  servit  le  roi  à 
la  complète  de  la  Savoie  (1535-1536).  En  1542-43  fut  investi  de  la  charge  de  capitoul 
de  Toulouse.  En  1552  il  partagea  avec  du  Gabre  la  charge  de  Trésorier  des 
finances  en  Italie,  devint  ambassadeur  à  Madrid  en  1565.  mourut  à  Narbonne  en 
juillet  1574.  (Voir  sur  Fourquevaux:  Une  importante  correspondance  <lu  16' 
siècle,  par  l'abbé  C.  Douais,  aujourd'hui  évêque  deBeauvais.  Mgr  Douais  a  égale- 
ment publié  la  correspondance  de  ce  diplomate  avec  Charles  IX.  (Imp.  Boebm. 
Montpellier,  1897). 


10  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER   1552] 

prudent  advys  et  me  tenyr  au  surplus  en  rostre  bonne  grâce  pour 
très  humble  recommandé.... 
De  Venize  ce  me  de  février  1552. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   AU    DUC   DE    FERRARE 

8. —  [Ferrure],  3  février  1 5.')2.  —  Monseigneur  Jay  receu  la  lettre 
qu'il  vous  a  pieu  mescripre  du  ve  et  mattenclz  que  Partenay  sera  de 
retour  de  Sienne  sil  naura  eu  empescbement  sur  le  chemyn  et  vous 
aura  dit  ce  quil  aura  veu  ou  entendu  de  ceste  guerre  de  Sienne  de 
la  quelle  nous  nentendons  icy  nouvelles  non  plus  que  sil  ny  en  avoit 
point,  hier  on  disoit  que  le  vice  Roy(l)  sen  venoit  a  iMylain  et  domp 
Ferrant  (2)  a  Naples  Je  suys  icy  plus  longuement  que  je  cuydois 
pour  ung  affere  que  je  ne  puys  encores  dire  a  votre  excellence:  ce- 
pendant Monsr  lambassadeur  et  moy  vacquons  a  veoyr  les  masques 
et  moy  par  aventure  quelque  dame  en  tout  bien  si  en  toute  honneur; 
toutesfois  prenaint  ce  loysir  pendant  quon  De  peult  negotier  avec  ce 
sénat  qui  est  tout  occuppe  a  lexpedition  de  votre  trionvirat  qui  es( 
icy  et  quant  voz  altères  seront  depeschcz  a  vostre  contentement 
nous  essayerons  les  nostres.  Je  suis  bien  mai  rv.  monseigneur,  que 
je  ne  vous  puys  servir  de  prester  en  >■"  saincl  temps  el  aux  bonnes 
compagnies  de  dames  ou  vous  vous  trouvez  Je  repareray  mes  faillies 
en  caresme  sil  plaist  a  Dieu. 

De  Ferrare  ce  ixe  de  feburyer  1552. 

Cejourdhuy  est  arryve  le  sr  Amerigo  Sanseverin  (3)  qui  partyt  de 

Paris  le  xxve  du  passe  et  na  porte  lettres  de  personne   II  dit  que  le 

Roy  sen  alloit  en  poste  avec  toute  la  jeunesse  veoyr  messieurs  ses 

enfans  a  AidIm.n se  :  la   Rayne  sen  alloit  au  Sainct  Germain  et  mons. 

le  conestable  a  Chantilly,  et  au  retour  du  Roy  se  feroientles  nopces 

du  duc  Orace. 

'i.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


(1)  Doni  Pierre  de  Tolède,  vice-roi  de  Naples  1532  .  mort  le  ^  révrier  1552, 
oncle  du  duc  d'Albe,  beau-père  de  Cosme  i*r.  duc  de  Florence. 

j  Ferdinand  II  de  Gonzague,  '■'■  fils  de  Jean-François  H  el  d'Isabelle  d'Esté, 
né  h'  -2S  janvier  1507,  s'attacha  au  service  de  Charles-Quint  et  commanda  les 
troupes  impériales  en  Italie;  se  distingua  devant  Tunis  en  1536,  el  lui  nommé  à 
son  retour  vice  nu  de  Sicile.  En  1546,  nommé  au  gouvernement  île  Milan,  il  se 
rendit  coupable  de  concussions,  acheta  le  comté  de  Guastalla  qu'il  érigea  lui- 
même  en  duché,  mourut  le  15  novembre  1551  m  Bruxelles. 

\\ineii  de   Sainl-Seveiin.   clerc,    lui    nommé    le    31  janvier   1561    à  l'évêché 

d'Agde,  mourut  ;i  Barcelone  le  21  juin  1578  au  cours  d'un  pèlerinag 


[FÉVRIER  1552]  DOMINIQUE  DU  GÀBRE  il 


GABRE  AU  CONNETABLE 

9. —  [Ferrare],  22  février  1552.  —  Monseigneur  Jescripts  ung  mot 
au  Roy  de  quelque  trouble  ou  se  trouve  Mrde  Saint  Ciergue  (1)  lequel 
je  pense  ne  se  trouvera  point  en  faulte  dont  le  Roy  doibve  estre 
malcontant  et  la  qualité  de  ses  accusateurs  qui  sont  serviteurs  do- 
mestiques et  petitz  belistres,  ne  mérite  pas  qu'on  les  doive  escouster. 
Car  comme  j'ay  entendu  a  Venise  avant  l'accusation,  ils  avoient  été 
convaincuz  et  condempnez  de  larrecins  fait  audit  Sr  de  S'  Ciergue. 
Il  fait  grande  profession  d'eslre  vostre  serviteur  et  vous  ferez,  Mon- 
seigneur, cbose  digne  de  vous  de  prandre  sa  protection  s'il  n'a  point 
failly  Car  j'ay  oppinion  par  ce  qu'il  m'a  monstre  qu'il  se  justifiera 
fort  bien  de  tout  ce  qu'on  veut  luy  mettre  sus  (2). 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20553,  fol.  159.  Exlrait)  (copie). 


GABRE    AU    ROI 

10. —  [Ferraré],  26/28  février  1552.  —  Sire  depuis  ma  dernière 
lettre  qui  fust  du  22e  de  ce  moys,  par  le  bérault  est  arrivé  Monsieur 
de  Bonnacorsy  (3)  présent  pourteur  qui  s'en  va  devers  vostre  Majesté 
dépescbé  de  Sienne  lequel  a  este  contrainct  d'éviter  Florence  et  pren- 
dre la  detorce  a  travers  pays  jusqu'auprès  de  Rome.  Je  voys  aussi 
par  la  despeche  de  Monsr  le  Cardinal  que  Jberonimo  de  Pise  (4)  est 
allé  audit  Rome,  et  passe  seurement,qui  me  fait  espérer  que  largent 
qui  a  ette  envoyé  par  ceste  voye  la  y  pourra  entrer  sans  danger  ayant 
dez  hier  eu  nouvelles  de  Monsr  l'ambassadeur  de  Venize  qu'il  avoit 
desja  fait  partir  32  mil  escuz  par  des  corriers  de  la  seigneurie,  qui 
peuvent  passer  partout,  et  y  peuvent  estre  dez  ceste  heure,  et  le 
demourant  y  seroit  envoyé  de  main  en  main  jusques  a  5000  escus; 
ledit  Bonnacorsy  dit  aussi  que  quand  il  partit  de  Sienne  on  avoit  nou- 
velles que  le  Duc  de  Florence  avoit  laissé  partir  les  20  mil  escuz  et 
leur  faisoit  prendre  quelque  nouveau  chemin,  sur  lequel  Monseigr 
de  Termes  avoit  envoyé  escortes,  monstrant  ledit  Sr  Duc  que  les 
difficultez  quil  avoit  failtes  estoient  pour  ne  mettre  ledit  argent  en 
danger,  d'aultant  que  les    imperiaulx  estoient  advertyz  que   ledit 

(1)  Antoine  Bohier,  baron  de  Saint-Ciergue,  seigneur  de  Nazelle,  secrétaire  du 
Hoi,  Général  des  finances  en  Languedoc,  bailli  de  Cotentin. 

(2)  L'affaire  dont  il  s'agit  dans  celte  lettre  est  expliquée  dans  la  dépêche  de  du 
Gabre  au  Connétable,  en  date  du  28  février. 

(3)  De  Bonnacorsi.  secrétaire  du  duc  de  Ferrare. 

[i    Jheronimo  de  Pise,  colonel  italien  au  service  de  la  France. 


il  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1552] 

argent  estoit  audit  Florence;  s'il  est  ainsi  ledit  Duc  se  sera  par  avan- 
ture  adoulcy  et  résolu  de  mieulx  faire,  ayant  veu  ce  que  luy  escrip- 
voit  Monsieur  le  Cardinal  de  Tournon  par  Gassot,  mais  quoiqu'il  aye 
nous  ne  pourrons  avoir  lettre  ni  nouvelles  d'hommes  que  nous  y 
ayons  envoyé.  Dieu  veuille  que  tout  soit  bien  allé.  Il  passa  hier  par 
icy  ung  gentilhomme  napolitain  qui  alloit  devers  l'empereur  porter 
nouvelles  de  la  mort  du  Yiceroy  (1)  qui  morut  mercredi  dernier  dans 
Florence,  par  aventure,  que  cela  pourtera  quelque  desordre  et  confu- 
sion au  camp  des  ennemis  et  que  le  Duc  de  Florence  sera  plus  retenu 
etmoins  affectionné  en  ceste  entreprinsequiln'eust  faist;  si  est  ce  que 
la  revocation  et  parlement  des  ambassadeurs  d'une  part  et  d'autre 
est  faite  et  la  déclaration  tenue  pour  certaine  de  chacun  qui  s'y  con- 
noit.  Les  ennemis  ont  prins  quelques  chasteaulx  abandonnez  sans  y 
avoir  este  mis  par  les  nostres  gens  de  guerre,  et  aulcungs  ou  il  y  en 
avoit  par  composition  et  par  ce  que  l'on  en  attend  icy,  ilz  se  trouve- 
raient a  Pienca  (2)  qui  est  une  assez  grande  ville  entre  Rome  et 
Sienne  et  non  gueres  loing  du  grand  chemin, comme  vostre  Majesté 
pourra  voyr  en  une  carte  de  Toscane  ou  par  celle  que  porte  le  srSci- 
pion  ;  je  ne  faiz  doute  Sire,  que  se  trouvant  maistres  de  la  campagne 
ilz  ne  prennent  une  infinité  de  chateaulx  dans  le  Senoys  ou 
j'entendz  qu'il  y  en  a  plus  de  4  cent,  car  il  est  impossible  de  garder 
tout,  mais  après  ilz  se  trouveront  n'avoir  gaires  gaigné,  il  est  vray 
qu'on  pert  ung  peu  de  réputation  d'avoir  mis  des  gens  dans  ceulx 
qui  ne  sont  gardables,  et  suis  toujours  en  oppinion  qu'il  eust  este 
meilleur  et  de  plus  grande  espargne  de  les  laisser  vuides  de  gens  et 
de  vivres,  mais,  tout  le  pis  qui  puisse  a  mon  advis  arriver  est,  qu'il/. 
en  fortifieront  ce  qu'il/,  pourront  pour  tenir  après  cest  estât  la  en 
guerre  guerroyable  et  continuelle  comme  est  le  Piedmont,  pensantz 
bien  que  a  la  longue  après  ilz  auront  Sienne.  Vous  verrez  Sire,  mais 
qu'il/,  ayent  un  peu  tenu  camp  dans  le  pays  du  Sénois,que,peu  apeu, 
les  vivres  commenceront  a  leur  manquer,  je  scay  qu'il  est  impossi- 
ble qu'ilz  y  treuvent  a  manger  pour  leurs  chevaulx,  ne  gueres  pour 
les  hommes,  el  «pie  d'eulx  mesmes  ilz  se  défieront  aussitôt  qu'ilz 
trouveront  une  place  qui  puisse  les  amuser  huit  jours  et  ne  fait 
doubte  que  a  ces  commencementz  les  Sennois  ne  se  soient  trouvez 
ung  peu  empesché  comme  il  advienl  en  tous  sièges,  mais  au  boul 
d'ung  mois  ceulx  du  dehors  commencèrent  a  trouver  les  diffîcultez 
plus  grandes  et  ceulx  de  dedans  a  se  asseurer,  et  ne  les  gueres  esti- 
mer. Je  ne  fauldray  Sire  a  user  de  toute  dilligence  avec  l'aide  de 
Monsieur  l'Ambassadeur  de  Venize  (3)  a  y  faire  envoyer  argent  qui 

(1)  Le  vice-roi  de  Naples,  Pierre  de  Tolède. 

(2)  Pienza,  autrefois  Carignano,  patrie  du  pape  Pie  il  qui  lui  donna  son  nom. 

(3)  Odel  de  Selve. 


[FÉVRIER    1552]  DOMINIQUE    DU    GABRE  13 

est  le  principal  secours  qu'on  leur  puisse  faire  pour  ceste  heure  et 
s'il  s'en  peult  trouver  a  crédit  ne  a  quelque  perte  que  ce  soit,  il  sera 
accepte,  il  est  vray  qu'ilz  mandent  de  Sienne  qu'ilz  ont  13  mil  hom- 
mes de  pied  la  ou  jametz  ilz  n'avoient  escript  que  de  10  mil  et  dient 
que  a  grand  peine  70  mil  escuz  le  mois  leur  suffiront  parquoy  Sire  je 
voys  que  comprins  les  autres  dépenses  de  Parme,  la  Myrandola  et 
autres  extraordinaires,  que  nous  serons  courtz  chascunmoisde  plus 
de  25  mil  escuz  n'en  envoyant  que  50;  je  suis  très  marry  de  voir  si 
grand  despence  mais  je  veult  croire  comme  les  aultres  que  voz  prin- 
cipaulx  serviteurs  ne  la  feroient  si  elles  n'estoient  nécessaires,  je 
veoy  par  l'instruction  de  ce  pourteur  que  Messeig1-3  le  Cardinal  (1)  et 
de  Termes  vous  pressent  de  voulloir  faire  voz  forces  plus  grande 
en  Italie  et  que  sans  cela  ilz  n'espèrent  que  pertes  en  toutes  qualitez 
pour  vostre  Majesté  cela  n'est  pas  fort  discordant  a  ce  que  je  vous 
en  ay  escript  par  le  herault  et  au  mémoire  que  j'ai  envoyé  a  Monsei- 
gneur le  Connestable  (2)  par  quoy  Sire  il  est  nécessaire  d'y  bien 
penser  de  bonne  heure  et  vous  en  résouldre  et  semble  que  l'espé- 
rance que  vous  avez  d'estre  ceste  année  maistre  de  la  mer  de  deçà 
plus  par  aventure  que  vous  n'aurez  de  longtemps  vous  en  doit  don- 
ner occasion.  Vostre  fortune  est  aussi  si  bonne  que  l'on  doit  espérer 
que  l'exécution  aura  moins  de  difficultez  qu'il  y  a  resolution.  J'ai  veu 
les  particularitez  et  parties  que  M.  le  Cardinal  de  Ferrare  (3)  a 
envoyé  au  Pape  pour  le  faire  déclarer  on  verra  si  le  proffit  particu- 
lier le  mennera  plus  que  les  considérations  publiques  et  honnestes 
que  vostre  Majesté  luy  a  fait  proposer  en  le  faisant  rechercher  de  la 
ligue,  mais  jay  quant  a  moy  peu  d'espérance, et  par  les  lettres  inter- 
ceptées que  Bonarcorsy  vous  porte  on  voit  manifestement  que  l'opi- 
nion que  j'en  ay  prinse  n'est  point  mal  fondée  et  sy  le  Pape  son 
honneur  saulve  vous  pouvoit  getter  de  Sienne  je  tiens  pour  certain 
quil  le  feroit  non  pour  y  mectre  l'Empereur  mais  pour  ny  avoir  ne 
l'ung  ne  l'aultre. 

Sire  Monsieur  de  Fourquevaulx  est  venu  icy  pour  entendre  les 
particularitez  de  quelque  traicté  qui  fut  descouvert  a  Parme  sur  la 
personne  de  Monseigneur  le  Duc  et  s'en  est  retourné  bien  informé 
de  tout.  Nous  avons  arreste  emsemble  quil  donneroit  ordre  a   la 


(1)  Le  Cardinal  de  Lorraine  (Charles  de  Guise),  2«  fils  de  Claude  de  Lorraine, 
duc  de  Guise  et  frère  du  duc  François,  né  à  Joinville  (1525),  archevêque  de 
Reims,  mort  en  1574. 

(2)  Anne  de  Montmorency,  né  à  Chantilly  (15  mars  1492),  mort  à  Paris  (12  novem- 
bre 1567).  Gouverneur  du  Languedoc  (1526;  en  récompense  de  la  conclusion  du 
traité  de  Madrid  ;  grand-maître  de  la  maison  du  Roi  ;  Connétable  de  France  (1538). 

(3)  Hippolyte  d'Esté,  dit  le  Cardinal  de  Ferrare,  frère  d'Hercule  II,  né  1509, 
mort  1572  ;  vécut  en  France  à  la  Cour  de  François  Ier  et  de  Henri  II;  s  était  placé 
résolument  sous  la  protection  de  la  France. 


14  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    15521 

vente  des  vieilles  munitions  a  Parme  et  a  la  Mirandola  se  trouvant 
la  de  loisir  mais  quand  au  bled  qui  y  est,  je  veoy  qu'il  se  fault  resoul- 
dre  de  le  vendre  quant  il  plaira  aux  citadins  de  Parme  et  non  quand 
vous  le  commanderez,  le  tout  se  peult  excuser  et  dissimuler  au 
temps  ou  nous  sommes.  J'ai  baille  audit  sieur  de  Fourquevaulx  la 
copie  de  la  dernière  lettre  que  Vostre  Majesté  m'en  a  escript  afïin 
qu'il  la  mette  a  exécution  comme  il  le  scaura  très  bien  faire  car  il 
entend  cela  mieulx  que  moy  et  vous  est  Sire  fort  utile  serviteur  par 
delà.  Je  luy  ai  envoyé  le  contrôleur  Pomaro  Cl)  et  officiers  qui  y  doi- 
vent intervenir.  J'espère  que  tous  y  feront  leur  debvoir  et  le  mieulx 
qu'ilz  pourront,  car,  quant  a  moy,  Sire  je  ne  puis  aller  ny  avoir  une 
heure  de  loisir  pour  y  penser.... 
De  Ferrare  le  26  février  1552. 

Sire  despuis  ceste  lettre  escrite  est  retourne  de  Sienno  Parte- 
nay  que  javois  envoyé  conduire  les  20  mil  escuz  qui  asseure 
quils  estoient  arrivez  a  Sienne  a  saulveté,  et  a  passe  par  Florence 
a  son  retour  ou  l'on  a  veu  toutes  ses  lettres  horsmis  une  petite 
de  Messeigneurs  le  Cardinal  et  de  Termes  quil  avoit  cacbée,  les- 
quelz  ne  mescripvent  autre  chose  (pic  la  réception  des  20  mil 
escus  et  de  leur  en  envoyer  encore  70  mil,  asseuranlz  que  avec  cela 
toutes  choses  se  porteront  bien  ;  ilz  avoient  aussi  receu  vostre  despè- 
che apportée  par  Gassot  par  la  voye  de  Rome  ou  je  l'avoys  envoyée, 
et  ledit  Gassot  y  estoit  aussi  arrivé,  que  le  Duc  de  Florence  avoit 
laisse  passer,  de  sorte  qu'il  semble  qu'il  se  veuille  efforcer  de  nager 
entre  deux  eaux  qui  sera  fort  difficile  a  faire  ;  la  Vice  Reyne  et  toute 
sa  suite  sont  déjà  partis  pour  Florence  pour  retourner  a  Naples.  <  i 
semble  que  les  capitaines  de  ceste  armée  d'Impériaulx  de  recongnois- 
tre  pour  chef  Domp  Gartia  (2)  pourveu  qu'il  ne  commande  sinon  ce 
qui  sera  arresté,  en  attendant  que  l'Empereur  y  envoyé  quelqif  autre 
lieutenant  et  pour  ce,  Sire,  que  en  l'instruction  dudit  Bonacorsv  il  y  a 
quelque  mention  d'accord  qui  avoit  este  mis  en  avant  du  costé  des 
Impériaulx.  J'en  ay  devise  avec  Monseigr  le  Duc  de  Ferrare  qui  n'a 
pas  trouvé  bon  la  responce  des  noslres  de  vouloir  obliger  l'Empe- 
reur qu'il  ne  peust  assaillir  la  France  et  m'en  a  dit  son  opinion  que 
je  trouve  a  mon  gre  très  bonne,  suivant  laquelle  j'ai  escripl  en  chiffre 
a  voz  serviteursa  Sienne,  et  pour  ce,  Sire, qu'il  pourroil  advenir  main- 
tenant qu'ils  ont  pouvoir  de  vostre  Majesté  de  traiter  ei  que  sur  cel 
advis  chacun  commencera  sa  laisse,  ces  propos  se  pourroiénl  remet- 
tre en  avant  par  celui  qui  en  aura  le  plus  de  besoing  Je  vous  supplie 

(1)  Pierre  Pomaro,  gentilhomme  vénitien,  intendant  de  l'ambassade  de  France 
à  Constantinoplc. 

(2)  Dom  Garcia  (\c  Tolède,  lils  du  vico-roi  nom  Pierre  de  Tolède,  mort  le  i  juin 
1557. 


[FÉVRIER   1552]  DOMINIQUE   DU    GABRE  15 

très  humblement  veoir  la  copie  de  ce  que  je  leur  en  ay  escript  pour 
leur  mander  sur  le  contenu  de  ma  lettre  vostre  volonté  et  bon  plaisir 
et  on  pourra  plus  seurement  y  procéder.  Le  courrier  que  j'avois 
envoyé  a  Monsieur  de  Mirepoix(l)  est  aussi  revenu,  et  m'escript  le 
dit  sieur  qu'il  ne  fait  aucune  difficulté  d'envoyer  l'argent  a  Sienne  et 
qu'il  pense  le  Pape  de  bonne  volonté  a  vostre  endroit,  et  que  Vostre 
Majesté  aura  le  sieur  Camillo  a  son  service  sy  elle  le  veult  traiter 
comme  il  le  mérite. 

De  Ferrare  ce  28  février  1552. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20641,  fol.  62)   (copie;. 


GABRE    AU    CONNETABLE 

11. —  [Ferrare],  26/28  février  1552. — Monseigneur  ce  pourteur 
Monsieur  de  Bonacorsy  vous  informera  du  fait  de  Sienne  et  j'escript 
au  Roy  ce  que  nous  en  avons  entendu  depuis  quil  est  party  Je  vous 
asseure,  Monseigneur,  que  nous  sommes  fort  mal  d'argent  et  craint 
qu'il  n'en  advienne  quelque  desordre  Je  ne  doubte  pas  aussy  que 
vous  ne  soyez  par  delà  au  four  de  la  boite  et  que  c'est  la  cause  qu'on 
nous  le  envoyé  aussi  bellement,  et,  pour  accoustrer  tous  ceux  de 
Sienne  se  trouvent  sur  les  bras  13  mil  hommes  de  pied,  je  pense  que 
le  Roy  n'en  a  gueres  davantages  en  Piedmont,  et  s'y  tient  la  campa- 
gne le  plus  souvent,  quant  a  moy  je  ne  m'en  puis  taire  et  leur  en  ay 
escript  mon  advis  encores  qu'ilz  en  puissent  estre  marrys  et 
m'estimer  trop  audatieux.  Je  vous  supplie,  monseigneur,  résolvez 
vous  a  finir  cette  guerre  en  Italie  ou  elle  a  commencé  et  l'esloigner 
de  la  maison  du  Roy  qui  est  la  France,  ne  laissant  de  la  que 
quelque  moyenne  force  pour  ne  faire  que  se  deffendre  et  résister 
aux  correries  des  bourguignons,  car  si  vous  envoyez  armée  en  Italie 
l'Empereur  sera  contrainct  y  tourner  toutes  ses  forces  et  voyant 
l'Allemagne  en  tel  désordre  qu'on  dit,  il  ne  s'en  pourra  guères  préva- 
loir, ny  faire  armée  d'importance  pour  vous  aissaillir  la,  mais  seule- 
ment taschera  de  vous  faire  allarmes  et  empeschement  pour  vous 
garder  d'armer  par  deçà,  et  toute  l'Italie  ne  scauroit  trouver  que  bon 
et  grandement  louable  et  tenir  le  Roy  pour  tout  excusé  de  voir  qu'il 
envoyera  armée  par  deçà  pour  si  honneste  occasion  qu'est  la  liberté 
de  Sienne,  et  sy  le  Duc  de  Florence  vous  a  donne  juste  occasion  de 
vous  douloir  de  luy  et  de  luy  bailler  une  bonne  venue,  je  vous  res- 
pondz  qu'il  est  fort  aise  de  luy  faire  beaucoup  de  mal  et  que  tous 


(1)  Claude  de  la  Guiche,  prieur  de  Losne  cl  de  Saint-Pierre  de  Maçon,  abbé  de 
Hautecombe,  évèquc  d'Agde  1541),  de  Mirepoix  (1546),  ambassadeur  en  Portugal 
et  à  Rome,  mort  à  Rome  le  0  avril  1556. 


16  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1552] 

vous  leurront  faire  et  ne  s*y  trouvera  pour  ceste  heure  princes  ni 
gueres  de  privez  qui  prennent  les  armes  contre  vous;  vous  n'aurez 
aussi  jamais,  par  aventure,  plus  belle  occasion  d'estre  maistre  de  la 
mer  ny  occasion  plus  a  propoz  de  vous  impatronir  de  la  Toscane 
qui  vous  seroit  plus  facille  que  le  Royaume  de  Naples,  et  sy  vous  ne 
faites  bien  tost  armée,  j'ay  peur  que  vous  perdrez  les  amis  du  Roy  de 
la  réputation  de  tout  ce  que  vous  avez  despendu  pour  l'acquérir  en 
ceste  Italie  ou  vous  n'avez  jusques  icy  rien  faict  que  pour  aultruy  et 
maintenant,  est  le  temps  d'en  tirer  le  fruit  pour  le  Roy,  le  tout  vous 
soit  dict,  Monseigneur,  par  advis  et  avec  supportation  je  ne  vous 
parlerayplus  de  Monsr  le  Duc  de  Ferrare  lequel  jentretiens  toujours 
mieulx  que  je  puis  sans  entrer  aultrement  en  besoigne  n'en  ayant 
commandement,  ses  ambassadeurs  sont  revenuz  de  Yenize  les  plus 
mal  despechez  de  tout  le  monde,  mais  il  ne  fauldra  a  le  dissimuler 
jusques  a  ce  qu'il  en  soit  temps,  cela  ne  nuyroit  de  rien  a  ce  que  je 
vous  ay  escript,  si  le  Roy  trouvoit  bon  de  le  faire  rechercher. 
De  Ferrare  le  26e  février  1552. 

Monseigneur  j'entendz  que  le  faict  de  Mr  de  S1  Ciergue  a  esté  jugé 
a  Venize.  Le  procureur  du  Molin  (1)  qui  estoit  accusé  de  luy  relever 
les  secretz  a  été  absouz,  et  le  dit  S'  Ciergue  pour  avoir  par  voyes illi- 
cites voulu  entendre  les  secretz  de  la  Seigneurie  banny  de  tout  Tes- 
tât et  terres  fermes  des  Vénitiens  avec  peine  de  mil  escuz  s'il  y 
estoit  trouvé.  Je  croy  bien  que  ce  Molin  avoit  tiré  de  luy  quelques 
milliers  d'escuz  et  par  cela  il  en  demorera  a  mon  advis  quittes.  C'est 
maintenant  audit  de  S1  Ciergues  a  se  desmeler  envers  vous  autres 
des  intelligences  et  praticques  qu'on  dict  qu'il  avoit  avec  les  minis- 
tres de  l'Empereur  dont  il  dit,  et  je  le  pense,  qu'il  se  justiffira  fort 
bien. 

C'est  du  28  février  1552. 

(Bibl.  mit..  Fr.  20641,  fol.  66)  (copie) 


GABRE    AU   DUC   DE    FERRARE 

12. —  [Ferrare],  'JS  mars  1552.  —  Monseigneur,  Gassot  vient  dar- 
river  tout  a  ceste  heure  le  quel  je  retiendra}'  icy  pour  toul  demain 
attendant  quil  vous  plaisra  denvoyer  vostre  paquet.  El  sil  vous  plais! 
luy  commender  aultre  chose  il  a  bonne  volunte  de  vous  fere  service. 
11  est  arrivé  ce  matin  ung  courrier  de  France  mais  il  ne  ma  pal 
apporté  un  seulle  lettre  de  la  court,  el  ma  dil  seullement  de  bouche 

(l)  C'est  l'affaire  à  laquelle  il  est  fait  allusion  dans  la  précédente  lettre  'I'1  'I» 
Gabre,  datée  du  23  février. 


[MARS  1552]  DOMINIQUE  DU  GABRE  17 

quil  avoyt  porté  lettres  a  monsieur  le  cardinal  de  Chastillon  (1)  qui 
estoyt  ja  en  chemin  pour  sen  retournera  la  court  et  que  monsieur 
le  Receveur  de  cens  luy  avoyt  dit  que  nions"  de  Lansac  (2)  seroyt  bien 
tost  icy,  qui  me  portera  la  despesche  du  Roy  et  ma  dit  davantage  que 
monseigneur  de  Guyse  venoyt.  Je  vous  envoyé,  monseigneur,  ung 
paquet  quil  vous  a  apporté,  je  croy,  de  votre  ambassadeur,  affin  que 
sil  y  avoyt  chose  de  responce  pressée  vous  y  puyssiez  respondre  par 
le  dit  Gassot.  Jay  aussy  receu  une  lettre  du  gênerai  Dalbene  que  je 
vous  prie  aussy  voyr,  encor  quelle  soyt  ung  peu  longue  et  me  la 
renvoyer  avec  votre  volonté  et  commendement  sur  le  tout. 

Monseigneur  je  prie  notre  seigneur  quil  vous  donne  bonne  et  lon- 
gue vye. 

De  Ferrare  ce  28  mars  1552. 

Monseigneur,  Je  viens  de  recevoyrtouta  ceste  heure  lesxvmescus 
qui  restoient  des  Lm  que  Ion  ma  envoyé  de  Yenize  en  poste,  de  peur 
de  faillir  a  vous  présenter  toute  la  preste  a  ung  coup,  dautant  que 
Tombesy  navoit  receu  la  partie  que  Ion  cuydoit. 

Serres  (3)  vient  aussi  darryver  qui  vous  jra  demain  trouver  ;  les 
innemys  nont  encores  assiège  aulcune  place,  mais  votre  ambassadeur 
vous  escript  et  je  vous  envoyé  le  pacquet. 

Je  vous  envoyé  des  advis  de  monsieur  l'ambassadeur  aux  Souysses 
que  je  nay  eu  loysir  de  lire.  Il  vous  plaira,  monseigneur,  mêles  ren- 
voyer pour  en  rejouyr  le  sr  Don  Francesco  d'Est. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   AU    ROI 

13.  _  [Ferrare],  30  mars  1552.  —  Sire,  ce  porteur  Mr  Gassot  est 
despeche  de  Messgrs  le  Cardinal  et  de  Termes  et  depuis  par  Mrde 
Mirepoix  ;  par  luy  V.  M  entendra  toutes  nouvelles  de  ce  coste  la.  Je 
crois  que   les  Imperiaulx  n'ont  encore  entreprins   depuis  Monti- 

(1)  Odet  de  Coligny,  cardinal  de  Chatillon,  né  en  1513,  entra  dans  les  ordres, 
cardinal  (1533),  archevêque  de  Toulouse  (1535)  :  se  fit  calviniste  en  1562,  fut  excom- 
munié par  Pie  IV,  mais  n'en  continua  pas  moins  à  porter  la  pourpre  romaine,  se 
maria  avec  Elisabeth  de  Hauteville  (1564),  combattit  avec  les  protestants  à  Saint- 
Denis  (1567),  s'enfuit  en  Angleterre  et  mourut  empoisonné  par  un  de  ses  serviteurs 
en  1571. 

(2)  Louis  de  Saint-Gelais,  baron  de  la  Motte  Sainte-Heray,  seigr  de  Lansac,  che- 
valier d'honneur  de  Catherine  de  Médicis,  ambassadeur  à  Rome  (1548-1555),  puis 
au  Concile  de  Trente,  chevalier  de  l'Ordre  du  Roi,  capitaine  d'une  C"  de  cent 
^•ntilshommes,  mort  en  octobre  1589,  à  l'âge  de  76  ans. 

(3)  M.  de  Serres,  Trésorier  des  armées  et  commissaire  des  vivres,  secrétaire  du 
Roi. 


18  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1552] 

cello  (1)  aulcun  siège  et  se  treuvent  a  mon  advis  empeschez  et  irre- 
soluz  de  ce  qu'ilz  ont  afaire,  ayant  veu  audit  Monticello  une  si  grande 
deffence  et  ou  ilz  ont  perdu  tant  de  gens  qu'ilz  ne  doibvent  espérer 
que  beaucoup  piz  aux  aultres  lieux,  qui  ont  eut  cependant  loizir  de 
se  mieulx  fortiffier  et  fornir  dartillerie  ;  le  principal,  Sire,  de  ceste 
despeche  est  pour  l'argent  et  de  la  despence  de  quoy  je  veoy  que 
tous  voz  serviteurs  en  Italie  vous  sollicitent;  la  despense  de  Sienne 
a  este  si  grande  et  incertaine  qu'elle  avoit  tout  mis  a  sec  et  sans  les 
empruntz  que  l'on  a  fait  à  Rome,  a  Yenize  et  icy  on  se  trouveroit  en 
grand  desordre.  Je  vois  que  Mr  de  Mirepoix  a  trouvé  21  mil  cent  escus 
qui  coslent  un  peu  chèrement,  mais  en  telle  nécessite  c'est  ung 
secours  fort  a  propoz  et  que  je  n'estime  que  a  bon  marché.  Monsr 
lAmbassadeur  de  Venize  a  prins  de  l'argent  qui  avoit  été  envoyé  pour 
les  gens  de  pied  qui  sont  sur  l'armée  de  mer  20  mil  escuz  et  4  mil 
que  Nazy  en  a  preste  outre  10  mil  qui  luy  en  estoient  duez,  et  j'ay 
recouvert  icy  de  Mr  le  Duc  25  mil  escuz  qui  ne  costent  rien,  acten- 
dant  que  Y  M  aye  commodité  de  les  faire  rembourser.  Avec  tout  cela 
nous  avons  satisfait  a  Parme  et  a  la  Mirande  de  tout  ce  mois  de 
Mars,  de  sorte  quilz  y  pourront  attendre  la  paye  d'Avril  jusques  sur 
la  fin  du  mois  ;  l'on  a  envoyé  a  Sienne  tant  d'argent  qu'ilz  ont  tous 
les  arrerrages  qu'ilz  ont  sceu  despendre  et  demander,  et  le  parlait 
de  Mars,  ou  environ 30  mil  escuz,  pour  commencer  la  paye  d'avril,  de 
sorte  qu'ilz  pourront  attendre  quelques  jours  plus  aisément  le  reste, 
que  je  pense  que  Y  M  envoyera  bientost;  il  estvray,  Sire,  si  ceulx  de 
Sienne  commencent  nouvelles  despenses  et  entreprinses  pour  cette 
diversion  et  autre  dont  il  me  semble  qu'il/,  aycnt  quelque  volonté, 
nous  serons  toujours  a  recommencer,  et  en  nécessite;  je  leur  en  a\  e 
scrit  mon  adviz  et  qu'ilz  doibvent  remettre  telles  chose  a  taire  a 
Y.  M.,  car  si  l'on  fait  ladiversion  foible  et  avec  petit  argent  emprunté, 
ce  sera  tout  argent  perdu  et  l'ung  a  faire  gaster  a  l'autre,  .le  vous 
envoyé,  Sire, ung  petit  estât,  tant  des  debtes  que  nous  a  \  on-  que  de  tout 
ce  qu'il  sera  besoing  pour  tout  ce  mois  d'avril,  reprenant  les  arre- 
mantz  de  l'autre  dernier  estât,  et  vous  plaira.  Sire,  le  faire  veoir,  et 
pourveoir  a  ce  que  sera  nécessaire,  vous  voulant  dire.  Sire,  que  se 
trouvant  Mr  le  Duc  hors  de  cette  ville,  a  l'heure  que  j'ay  recru  du 
gênerai  d'Albenne  les  50000  escuz  de  son  rembourcement,  j'ai  este 
beaucoup  plus  hardy  par  lettre  que  je  n'eusse  este  en  présence,  'le 
le  requérir  d'un  nouveau  prest  ;  pour  ce  que  le  papier  ne  rougit  point. 
et  ay  présenté  le  remboursement  entier  et  honorable  comme  il  l'al- 
loit,  selon  vostre  promesse,  luy  remonstrant  avec  cela  la  nécessite 
de  voz  affaires  et  le  besoing  qu'ilz  avoient  de  son  secours;  je  vous 

(l)  Monticello,  village  dépendant  dePienza(Pienza,  ville  de  Toscane,  à  il  lieues 
S.-E.  de  Sienne). 


[MARS    1552]  DOMINIQUE   DU    GABRË  19 

asseure  Sire  qu'il  m'a  incontinent  respondu  fort  courtoisement, 
et  en  langage  très  affectionne,  a  vostre  service,  et  d'homme  qui 
désire  vostre  grandeur  et  la  prospérité  de  voz  affaires, ayant  été  très 
content  que  je  me  servisse  de  25  mil  escuz  pour  ceste  nécessite,  a  la 
charge  de  le  rembourcer  des  premiers  deniers  que  vostre  Majesté 
envoyeroit,  et  les  autres  25  mil  escuz,  je  les  ay  mis  en  main  de.  ces 
gens  selon  qu'il  a  ordonné;  j'ay  fait  responce  a  M.  le  Duc  qu'il  avoit 
presque  ressuscite  de  mort  a  vie  voz  affaires  et  vos  serviteurs  en 
Italie,  et  ay,  incontinent,  envoyé  la  moitié  de  son  nouveau  prest  a 
Parme  et  a  la  Mirande  qui  ne  scavoient  plus  a  quel  saint  se  vouer,  et 
le  reste,  je  l'ay  envoyé  a  Sienne,  ayant,  aussi  fait  rendre  a  Mr  le  Comte 
de  la  Mirande  une  partie  de  la  vaisselle  qui  estoit  en  gaige,  de  sorte 
que  chacun  a  eu  de  quoy  espérer,  et  attendre  le  secours  qui  doit 
venir  de  vostre  M.  C'est  un  aultre  service  que  le  dit  Duc  vous  a 
fait  aussy  a  propoz  que  le  premier,  dont  vous  plaira,  Sire,  le  remer- 
cier, de  bonne  sorte,  et  si  vous,  Sire,  estiez  résolu  d'entrer  et  de  venir 
en  conclusion  de  la  practique  que  vous  aurez  vue,  vous  devez  espé- 
rer que  une  armée  vostre  ne  se  perdra  jamaiz  sous  sa  charge,  par 
faulte  de  cent  ni  deux  cent  mil  escuz,  lesquelz  il  ne  lui  fauldra  jamais 
emprunter  de  voysin  qu'il  aye,  car  il  m'en  disoit  ces  jours  passez  que 
quant  une  armée  se  deffesoit  pour  cela,  ou  pour  aultre  accident, vous 
n'y  aurez  perdu  que  de  réputation,  et  luy  il  mettroit  en  danger  tout 
son  estât,  et  qu'il  luy  fault  faire  resolution  de  ne  donner  jamais  de 
bon  sommeil  s'il  entre  en  cette  praticque  avec  V  M,  qu'il  ne  veoit 
la  rasse  des  espaignolz  chassée  de  toute  l'Italie.  Je  ne  luy  voy,Sire, 
tenir  propoz  ne  langaige  de  ce  fait  la,  qui  ne  me  donne  grande  espé- 
rance quil  passera  oullre  si  vous  en  avez  bonne  envie  ;  il  m'a  envoyé 
ceste  nuict  passée  ung  paquet  pour  son  ambassadeur,  ou  il  y  a  des 
adviz  de  ce  que  l'on  avoit  entendu  de  la  Cour  de  lEmpereur  et  aussi 
du  fait  du  sr  Camillo  (1),  lequel  il  a  fait  practiquer  comme  de  luy 
mêmes  et  dit  que  vous  l'aurez  en  vostre  service  en  le  faisant  chef 
des  gens  de  guerre  qui  sont  en  Toscana,  luy  donnant  dix  mil  escuz 
de  pension  et  une  compaignie  de  50  hommes  d'armes  et  se  trouvant 
led.  sieur  Camillo  recherché  des  Vénitiens  et  des  Imperiaulx,  il  a 
promis  audit  Duc  de  ne  prendre  aulcun  parti  d'ung  mois  entier  dans 
lequel  puisse  venir  la  resolution  de  V.  M  et  scavoir  si  vous  serez 
content  de  luy  accorder  tout  cela.  Sur  quoy  Sire  je  vous  dirai  que 
ce  sr  Camillo  est  en  telle  réputation  en  ceste  Italie  et  mesmement 
envers  led  sr  Duc,  que  si  vous  larrestez,  led  sr  Duc  entrera  plus  volon- 
tiers en  la  charge  de  voz^  affaires,  et,  en  ce  cas  la,  vous  luy  devez 
donner  la  charge  et  non  a  autre  de  composer  avec  led.  sr  Camillo, 
lequel  le  doit  venir  trouver  icy;  il  a  oppinion  que  le  sr  Camillo  vous 

(1)  Camillo,  capitaine  italien. 


20  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1552] 

peut  faire  plus  grand  a  la  conservation  de  Sienne  et  la  conqueste  de 
Naples  que  gentilhomme  de  sa  qualité  qui  soit  en  Italie  pour  la 
grande  suite  quil  aura  de  tous  les  voisins  et  de  leur  estât  et  de  leurs 
maisons,  et  que  cela  donnera  grand  courage  au  Pape  de  se  mettre 
de  vostre  coste,  par  quoy,  Sire,  puisque  vous  êtes  savant  aux  affaires 
d'Italie,  et  qu'il  semble  que  toutes  choses  vous  convient  a  les  ache- 
ver, et  non  de  vous  en  reculer,  je  pense  que  vous  ne  debvez  pas  lais- 
ser passer  telles  occasions,  mais  vous  en  resouldre  promptement  et 
gaillardement,  et,  quand  bien  vous  n'auriez  pour  volonté  dy  faire 
guerre  pour  ceste  heure,  mais  espérance  de  respirer,  et  la  différer  en 
autre  temps,  telz  serviteurs,  l'ung  si  puissant  comme  est  le  Duc  de 
Ferrarre,  et  l'autre  de  si  grande  réputation,  et  si  grand  suite,  feront 
toujours  vivre  votre  réputation  en  Italie,  tiendront  vostre  ennemy 
en  suspens,  et  en  peine,  et  en  despence,  et  vous  faciliteront  toutes  voz 
entreprizes  pour  ladvenir,  de  sorte  que  ce  que  vous  despendrez  pour 
leur  entretien  ne  sera  point  mal  employé.  Ledit  sr  Duc  m'a  prié  de 
vous  escripre  chaudement  de  la  résolution  de  ce  fait,  et  vous  plaira. 
Sire,  en  faire  responce  au  plustost;  d'une  aultre  chose.  Sire,  vous 
veulx-je  faire  requeste,  c'est  que,  si  V.  M.  n'a  volonté  d'entendre  la 
pratique  dudit  sr  Duc  de  Ferrarre,  qu'il  vous  plaise  luy  donner  a 
congnoistre  sa  bonne  volonté,  et  ses  effets,  et  que  vous  ayant  comme 
il  m'a  dit  faict  rechercher  par  cy  devant  de  vouloir  souldoyer  la 
garnison  de  Bresseil  (1),  comme  vous  eussies  faict  s'il  fust  demoure 
a  Mr  le  Cardinal  son  frère  auquel  V.  M.  eust  este  contraint  de  faire 
la  fortiffication,  payer  l'artillerie  et  la  garnison,  et  que,  ayant  vous  ou 
Monseigneur  le  Connestable  remis  a  quelque  autre  temps  ou  a  je 
ne  scay  quelle  difficulté  la  responee  résolue  sur  sa  demande,  il  seroit 
raisonnable  maintenant  qu'il  se  treuve  si  affectionné,  qu'il  vous 
preste  son  argent  sans  proffict  ni  d'interestz  qu'il  pleust  a  V.  M. 
recongnoistre  tout  cela,  et  nous  commander  par  décade,  luy  faire 
payer  ladite  garnison  qui  ne  sera  a  mon  advis  que  de  cent  hommes; 
en  ce  temps  cela  lobligeroit,  Sire,  sans  autre  capitation  a  vous  faire 
service  de  sa  place  quelque  jour  quand  vous  en  aurez  besoing.  el  il 
congnoistroit  par  la  que  vous  l'estimez,  c'est  si  peu  de  chose  qu'il 
ne  vault  pas  le  parler,  il  me  disoit  ces  jours  passez  ne  m'en  avoir 
voulu  jamais  rien  dire,  pour  oster  toutte  oppinion  qu'il  vous  eust 
fait  service  de  son  argent  pour  en  espérer  quelque  recompense;  il 
vous  plaira  Sire  m'en  faire  entendre  ung  mot  de  vostre  m 'h. nie,  pour 
lui  monstrer  que  je  y  faitloffice  que  j'ay  peu. 
Sire,  le  contrerolleur  Pomaro  (2)  est  revenu  de  Parme  ou  il  a  veu 


(1)  Brescello,  dans  la  province  de  Modène,  sur  la  rive  droite  du  Pô. 

(2)  Pietro  Pomaro,  vénitien,  intendant  de   l'ambassade  française  a  Constan- 
tin ople,  employé  à  de  nombreuses  fonctions  dans  le  oord  de  l'Italie. 


[NOVEMBRE   1552]  DOMINIQUE  DU    GABRE  2l 

tout  le  fait  de  voz  munitions  avec  Monsieur  de  Fourquevaulx  qui 
m'en  escript  bon  tesmoignage,  et  se  contente  fortde  luy;  il  n'y  a  ordre 
que  Ton  veuille  trouver  bonne  la  vente  des  bledz,  sans  y  en  remettre 
d'aultres,  et  encores  moins  qu'on  toucbe  a  chose  qui  soit  des  muni- 
tions de  l'artillerie,  je  crey  qu'il  ne  sera  que  bien  fait  de  laisser 
passer  cela  en  ce  temps  qui  n'est  trop  asseure  de  guerre  et  aussy 
nous  serons  bientost  a  la  récolte.  Monsieur  de  Serres  est  vend  de 
Sienne  ou  il  vous  faisoit  beaucoup  de  services,  mais  pour  dix  jours 
il  estoit  nécessaire  qu'il  allast  veoir  sa  charge;  j'escript  a  M.  de 
Fourquevaulx  que  si  l'on  ne  veult  laisser  vendre  que  a  tout  le  moins 
ilz  gardent  de  laisser  rien  dépérir,  et  qu'ilz  le  baillent  a  renouveller 
et  après  quelques  jours,  on  en  parlera  plus  a  loisir,  et  regardera- t-on 
les  moyens  d'en  tirer  ce  qu'on  pourra,  autant  en  ay-je  escript  a  la 
Mirande  et  n'y  scaurois  pour  ceste  heure  autre  chose  faire. 

Sire,  nous  sommes  tous  attendant  en  grande  dévotion  de  voz 
nouvelles  et  la  resolution  que  V.  M  aura  prinse  sur  les  affaires  d'Italie. 
Il  se  parle  fort  par  deçà  de  la  venue  de  Monseigneur  de  Guise  qui  est 
fort  désirée  de  tous  voz  serviteurs,  mais  qu'il  vienne  bien  accom- 
paigne,  qu'est  Sire  tout  ce  que  je  vous  scaurois  dire  pour  ceste  heure. 

De  Ferrare  le  30  mars  1552. 

(Bibi.  nat.,  Fr.  20641,  fol.  99)  (copie). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

14.  —  [Venise],  13  novembre  1552.  — Monseigneur,  Je  ne  vous  ay 
point  escript  dez  nouvelles  qu'on  dit  icy  de  nostre  guerre  de  Lorreine 
ne  de  Picardye,  pour  ce  qu'elles  varient  de  jour  à  aultre,  et  que  l'on 
veoyt  évidemment  que  tout  n'est  que  mensonges.  Il  y  a  icy  lettres 
de  Lyon  du  xime  de  ce  moys  qui  eussent  faict  quelque  mention  de 
ces  escarmouches,  de  la  prinse  deMonsr  de  Haumale  et  duchasteau  de 
Hédin,  s'il  en  estoit  quelque  chose  et  icy  on  veult  croyre  pour  certain 
que  ladite  escarmouche  fut  faicte  le  me  de  ce  moys.  Il  s'en  fauldra 
raporter  a  ce  que  aportera  le  bon  temz  ;  on  y  tient  bien  pour  certain 
la  perte  de  Saint- Martin  (1)  pour  nous  et  la  conqueste  d'Albe  (2)  pour 
récompense.  Monsieur  l'Ambassadeur  a  trouvé,  Monseigneur,  vostre 
advis  très  prudent  et  bon,  de  différer  la  requeste  que  j'avoys  à  faire 
à  ces  Seigneurs,  et  dans  deux  jours  je  partiray  d'icy  pour  m'en  aller 
trouver  Vostre  Exellence.  S'il  falloit,  Monseigneur,  vostre   auctorité 


(1)  Saint-Martin,  château  situé  à  trois  lieues  d'Yvrée    Mémoires  de  Boyvin  du 
Villars,  coll.  Michaud,  t.  10,  p.  97). 

(2)  Albe,  ville  du  Piémont,  sur  le  Tanaro,  à  40  kil.  S.-E.  de  Turin. 


22  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1553] 

et  faveur  pour  me  faire  avoir  logerz,  j'ai  dit  à  ce  gentilhomme  que 
j'envoye  pour  préparer  ledit  logerz,  qu'il  en  allast  requérir  Vostre 
Excellence. 

De  Yenize  ce  xxme  novembre  1552. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale). 

GABRE   AU    ROI 

15. —  Ferrure],  21  janvier  1553. —  Sire,  ayant  escripta  V  M.  am- 
plement par  Niquet  (1)  et  depuis  a  Monseigneur  le  Connestable  par 
le  comte  de  Petiglian  (2)  je  n'ay  maintenant  chose  a  vous  dire  davan- 
taige  par  Monsieur  de  la  Croix  (3),  sinon  que  ayant  entendu  ce  qu'il 
m'a  dict  de  la  despeche  qu'il  vous  aporte  de  Sienne,  et  la  façon  de 
vivre  entre  Monseigneur  le  Cardinal  et  le  seigneur  Pierre  (4),  il  est 
aisé  a  congnoistre  qu'il  sera  nécessaire  les  séparer  de  lieu  et  de 
charges  ;  j'appréhende  que  V.  M  ne  s'en  trouve  ung  peu  empesché, 
estant  vostre  intention  que  vous  les  vouldriez  tous  deux  contens, 
comme  certainement  ils  le  méritent.  Le  Sr  Pierre  me  fait  grande 
instance  que  je  luy  veuille  envoyer  la  paye  de  Février  pour  le  pre- 
mier jour  du  mois.  C'est  une  chose  en  quoy  je  n'eusse  pas  failly,  si 
j'eusse  eu  vostre  reponce  sur  noz  partyz,  laquele  demeure  si  longue- 
ment a  venir,  que  je  suis  fort  esbahy,  car,  si  d'aventure  vous,  Sire, 
aviez  traité  par  delà  avec  le  général  d'Albenne.il  debvroit donner  par 
deçà  les  commissions  de  fournir  l'argon t  :  je  suis  bien  empesché  et 
fault  que  j'aille  jusques  a  Venise  pour  veoir  si  je  pourrois  recouvrer 
quelque  chose  de  ce  qui  est  deub  du  passé,  au  marchand  que  savea . 
afin  que  vostre  responce  venue,  et  encas  que  vous,  Sire,  vueilliez 
accorder  ces  partiz  la,  je  m'en  puisse  servir  pour  satisfaire  au  temps 
que  le  Sr  Pierre  demande.  Cependant,  je  ne  puis  croire  que  nous 
n'ayons  de  voz  nouvelles  pour  savoir  ce  que  l'on  aura  afaire  don-- 
navant,  le  Duc  de  Ferrai  e  fail  gens,  el  s'arme  plus  qu'il  ne  souloit, 
mais,  Dieu  mercy,  le  sieur  Pierre  ne  s'estonne  pas  de  si  peu  chose  et 
ne  vous  veult  pour  cela  mettre  en  despence  d'un  homme  de  guerre 
davantaige,  qui  me  plaist  fort,  car,  il  congnoist  que  l'aultre  a  plus  de 
peur  d'estre  assailly  qu'il  n'a  de  volonté  de  vous  offendre  ;  la  seulle 
personne  du  sieur  Pierre  le  mel  en  grande  despence  el  en  merveilleux 
suspect  et  commence  a  ce  que  j'entends  déjà,  a  parler  nouveau  lan- 
gage, qu'il  vous  a  toujours  été  serviteur,  et  s'esbahist  qu'on  luy  ait 

(1)  Niquet,  abbé  de  Saint-Gildas,  secrétaire  du  duc  de  Ferrare. 

(2)  Giovanni-Francesco-Ursino,  comte  de  Petiglianoi  un  des  plus  actifs  repré- 
sentants du  parti  français  en  Italie. 

(3)  Jean-Jacques  de  la  Croix,  secrétaire  de  l'ambassade  de  France  à  Venise. 

'.    Le  seigneur  Pierre,  très  probablement  Pierre  Strozzi,  maréchal  <l«'  France. 


[FÉVRIER    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRÈ  23 

envoyé  pour  voisin  un  sien  rebelle.  Si  le  fait  de  Corsegne  succède 
bien,  j'espère  qu'il  faudra  qu'il  s'humilie  davantaige.  De  St  Florent 
on  n'entend  rien,  sinon  que  lesvostres  souffrent  très  grandes  néces- 
sités de  vivre  et  ont  besoing  de  prompt  secours.  Dieu  veuille  que  le 
baron  de  la  Garde  (1)  y  arrive  a  temps  et  a  saulveté. 
De  Ferrare  ce  21  janvier  1553. 

Sire  le  seigneur  Pierre  m'escript  qu'il  partist  de  la  court  le  premier 
jour  de  Novembre  et  que  Testât  de  ce  mois  la  lui  est  deub,  me  priant 
de  le  faire  payer  sans  luy  donner  la  peine  de  le  poursuivre  en  la  court, 
me  disant  davantaige  quil  en  avoit  grande  faulte  et  quil  vouldroit 
que  je  fusse  a  Sienne  pour  beaucoup  de  considérations;  je  suis  résolu, 
Sire,  de  luy  faire  payer  ledit  mois  qu'il  demande,  car,  si  Vostre  Majesté 
ne  le  trouve  bon  je  le  feray  retenir  sur  ung  autre  moys  avenir,  et 
vous  plaira,  Sire,  me  mander  ung  mot  de  vostre  volonté;  quant  a 
mon  alée  la,  Sire,  je  me  trouveray,  Sire,  bien  partout  et  en  toutmes- 
tier  pourvu  que  je  vous  face  service,  mais,  celieu-cy  a  bien  besoing 
de  ung  plus  suffisant  que  moy  pour  donner  ordre  a  la  provision  et 
distribution  des  deniers,  d'où  despend  la  conservation  de  toutes  voz 
affaires  de  deçà  ;  il  est  vray  que  ung  homme  seul  ayant  un  peu  la 
praticque  des  marchants  et  l'intelligence  avec  ce  Prince  qui  vous  est 
affectionné,  qui  fait  et  peult  beaucoup,  satisfera  fort  bien  a  la  charge 
de  Venize  et  a  ceste  cy,  je  suis  si  ignorant,  que  je  ne  scaurois  estre 
sinon  inutille  en  l'ung  et  l'aultre  lieu,  pourquoy  je  ne  dois  avoir  en 
cela  volonté  aucune,  sinon  de  trouver  bon  et  me  disposer  afaire  tout 
ce  quil  vous  plaira  me  commander. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20642,  fol.  9)  (copie). 

GABRE   AU    DUC    DE    FERRARE 

16.  —  [1  enisë],  3  février  1 553.  —  Monseigneur,  Ce  porteur  m'a 
dit  vous  avoir  baillé  ung  pacquet  de  Monsieur  de  Forquevaulx,  duquel 

(1)  Antoine  Escalins  des  Aymars,  baron  de  la  Garde,  né  d'une  obscure  famille  à 
La  Garde  (Drôme)  vers  1498,  plus  connu  sous  le  nom  de  capitaine  Paulin  ou 
Polin  qui  devint  son  nom  de  guerre,  s'éleva,  par  son  intelligence  et  sa  bravoure, 
des  derniers  rangs  de  l'armée  jusqu'aux  grades  les  plus  importants.  Présenté 
par  Langey  du  Belley,  dont  il  était  le  protégé,  à  François  Ier,  il  reçut  du  Roi 
plusieurs  missions  importantes.  Envoyé  comme  ambassadeur  auprès  de  Suley- 
man  II,  il  décida  ce  sultan  à  s'unira  la  France  contre  Charles-Quint. 

A  son  retour,  il  fut  pourvu  des  fonctions  de  lieutenant-général  de  la  marine  au 
Levant  (1543)  et  de  général  des  Galères  de  France  ^1544).  Il  se  signala  par  une 
telle  violence  à  l'égard  des  Vaudois  de  Cabrières  et  de  Mérindol  qu'il  fut  destitué, 
puis  rétabli  dans  ses  fonctions  en  1551,  encore  destitué  en  1557,  et  de  nouveau 
rétabli  en  1566.  Il  conserva  sa  charge  jusqu'à  sa  mort,  survenue  le  30  mai  1578. 
Brantôme  (Fie  des  grands  capitaines.  Ed.  Lalanne  t.  iv,  p.  139)  donne  du  baron 
de  la  Garde  une  intéressante  biographie. 


§4  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1553] 

il  faict  mention  en  ma  lettre,  mais  je  croy  qu'il  ne  parlera  que  de 
Bresseil  et  du  bruyt  qu'il  a  entendu  que  les  Imperiaulx  y  font  quel- 
que fondement.  Je  ne  veoy  aulcune  occasion  de  rien  craindre  de  ce 
costé-là,  je  diz  de  Bresseil,  pour  les  raisons  que  vous  me  distes  der- 
nièrement, car  l'Empereur  n'a  pas  besoin  de  vous  rendre  son  ennerny. 
Je  ne  scay  s'il  seroit  bon,  Monseigneur,  que  Vostre  Excellence  pré- 
vynl  en  cela  le  Seigneur  Domp  Ferrant  et  luy  faire  entendre  claire- 
ment et  à  lettres  de  Scatola  que  s'il  entreprend  de  vous  faire  ce  tort 
qu'il  fera  le  plus  grand  desservice  à  l'Empereur  que  par  aventure  il 
luy  feist  jamez.  Vous  estez,  Monseigneur,  si  prudent  et  clairvoyant 
en  telles  choses  que  ne  vous  conseillant  qu'à  vous  mesmes  vous  y 
pourverirrez  fort  bien,  et  quant  vous,  Monseigneur,  n'y  voudriez 
croistre  la  garnison  là  y  voyai  nécessere  pour  s'asseurer  en  tout 
évennement,  Monsieur  l'Ambassadeur  qui  est  icy  et  moy.  prendrons 
ceste  auctorité  de  la  faire  payer  aux  despens  du  Roy,  quant  vous  le 
trouverez  bon.  Nous  avons  plusieurs  advys  qu'ilz  ont  quelque  entre- 
prise sur  Parme,  ce  ont  advisé  là  d'y  croistre  les  garnisons.  Je  y 
envoyé  pour  ceste  cause  tant  plus  d'argent  pour  ce  moys  et  leur 
mande  qu'ilz  ne  laissent  point  de  se  pourveoir  de  ce  qui  leur  fera 
besoing  et  qu'on  ne  leur  manquera  point  d'argent.  Je  croy  bien, 
Monseigneur,  que  ledit  sr  de  Forquevaulx  ne  vous  aura  rien  respondu 
de  l'entreprinse  de  Grapelle  et  à  ceste  cause  je  vous  envoyé  sa  pro- 
pre lettre  par  laquelle  il  vous  plaira  veoyr  que  l'avertissement  que 
l'on  leur  a  donné  estoit  plus  que  nécessere,  et  si  vous  le  trouvez  bon. 
Monseigneur,  de  baillera  mon  homme  qui  est  là,  ung  mémoire  de 
tout  le  faict.  il  l'envoyera  à  Monsieur  de  Forquevaulx  à  mon  nom  et 
s'en  pourront  ayderàfaire  le  procès  audit  suppliant,  de  qui  je  parye 
la  perte.  Je  m'en  retourneray,  Monseigneur,  devers  vous  le  plus  tost 
que  je  pourray,  bien  que  je  croy  que  Vostre  Excellence  pourra  faire 
le  voyage  de  Bresseil  puys  que  le  temps  se  met  au  beau.  Ce  jour- 
d'hui  Monsieur  l'Ambassadeur  a  eu  lettres  de  Rome  qui  asseuivnt 
que  le  Pape  a  acommodé  le  Duc  d'Urbin  (1)  à  s«>n  service  avec  des 
particularités  de  ce  faict-là  et  d'aultres  que  vous.  Monseigneur,  serez 
à  mon  advys  bien  aise  d'entendre,  par  quoy  je  foiz  coppier  la  lettre 
qui  sera  avec  la  présente.  J'ai  aussi  veu  la  proposition  que  Monsieur 
l'Ambassadeur  a  faicte  à  ces  Seigneurs  pour  les  persuader  à  la  ligue 
défensive,  ce  qui  m'a  semblé  si  belle  et  si  pertinente,  que  j'en  foiz 
faire  une  coppye  pour  la  vous  envoyer  par  le  premier.  Je  Fera)  partir 
cejourd'huy  Partenay  pour  aller  à  Sienne   conduyre  île   l'argent, 

(1)  Gui  d'Ubaldo  II  de  la  Rovère,  lils  de  François-Marie  l"  de  la  Rorère  et 
d'Eléonore  île  Gonzague;  duc  d'Urbin,  de  1538  a  1574,  date  de  sa  mort.  Fui  célè- 
bre par  -es  prodigalités,  ses  débauches  et  >cs  cruautés. 


[MARS    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  25 

auquel  je  foiz  prendre  le  mesme  chemyn  de  l'aultre,  donttoutesfois 
il  prendra  vostre  bon  advys  en  passant. 
De  Venize  ce  me  de  Febvryer  1553. 

Monseigneur,  je  croy  que  dans  huyt  jours  on  verra  clairement  si 
les  Espagnolz  et  Alemanez  de  Domp  Ferrant  doibvent  aller  à  Sienne 
ou  s'arrester  devant  Panne,  et  qu'il  ne  seroit  que  bon  de  différer 
vostre  voyage  de  Bresseil  jusques  à  ceste  beure-là. 

Monseigneur,  je  feray  partir  ce  soyr  Partenay  qui  vous  portera  les 
coppyes  de  la  lettre  de  Rome  et  de  Monsieur  de  Forquevaulx,  qui 
vont  peu-estre  plus  tost  prestes,  et  ce  porteur  a  grande  haste  de 
retorner  à  Parme. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale). 


GABRE   AU    DUC    DE   FERRARE 

17. —  [Ferrare],  16  mars  1 553. —  Monseigneur,  depuis  mon  aultre 
lettre  escripte  hyer  est  venumonsrBoucbier(l),  de  Rome,  lequel  est 
party  ce  matin  pour  aller  a  la  court.  Je  nay  eu  rien  de  nouveau  de 
luy,  sinon  que  le  Cardinal  Burgues  (2)  a  este  relègue  en  Espaigne  en 
quoy  ils  ne  luy  ont  pas  faict  grand  mal.  Il  a,  au  surplus,  commission 
de  dire  au  Roy  de  la  part  du  pape,  que  si  sa  majesté  veult  estre  mais- 
tre  de  la  compaigne  et  faire  une  bonne  armée  II  se  mectra  de  sa 
part  et  trouvera  argent  et  gens.  Il  porte  aussi  les  indultz  de  Pied- 
mont  et  Savoye  depescbez  fort  favorablement  pour  le  Roy.  A  Rome 
on  disoit  que  les  ennemys  sen  alloient  a  Chauchanon  et  laissèrent 
derrière  eulx  Chingy  (3)  et  Montalchino  (4).  Nous'  nen  entendons 
encor  rien  venir  ducoste  de  Florence. 

De  Ferrare  le  xvie  mars  1553. 

Le  dit  Bouchier  a  porte  ung  paquet  de  Rome  pour  vostre  excel- 
lance,  le  quel  sera  avec  la  présente. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale). 


(1)  Arnould  Bouchier,  seigneur  d'Orsay,  secrétaire  de  l'ambassade  de  Rome, 
maître  des  requêtes,  président  au  Grand  Conseil,  mort  en  1591  (Commentaires  île 
Montluc,  Op.  cit.,  t.  iv,  p.  34). 

(2)  François  de  Mendoza,  cardinal,  archevêque  de  Burgos.  né  en  1508,  mort 
3  décembre  1556.  —  Montluc  l'appelle  Burgos;  Boyvin  de  Yillers,  secrétaire  du 
maréchal  de  Brissac,  l'appelle  Burgues  dans  ses  mémoire-. 

(3)  Chinsi,  province  de  Sienne,  sur  une  colline,  dans  la  vallée  de  la  Chiana. 

(4)  Montalcino,  ville  de  Toscane,  à  40  kilomètres  de  Sienne. 


26  NÉGOCIATIONS  DE  [MARS  1553] 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

18.  —  [Ferrarè],  23  mars  1553. —  Monseigneur,  nayant  pas  grand 
argument  ne  occasion  de  vous  escripre,laffection,  neantmoins,etmon 
debvoir  me  commandent  de  vous  faire  révérence  par  ceste  lettre. 
Jay  eu  ce  jourdhuy  lettres  du  gênerai  del  Benne  du  xime  de  ce  moys 
a  Lyon;  il  ny  estoit  encores  nouvelles  du  parlement  du  cardinal  de 
Chastillon.  Si  vous  avez  bon  loysir,  monseigneur,  de  passer  la  voz 
festes,  il  mescript  que  je  trouveray  la  partie  en  mains  de  Nazy  qui  na 
commission  que  de  la  mettre  entre  mes  mains,  pour  en  fere  ce  que 
jay  promys,  et  a  cela,  sil  plaist  a  dieu,  ny  aura  faulte  quant  aux  provi- 
sions davril.  Il  estoit  après  a  y  pour  veoyr,  mais  qu'il  en  avoit  eu  de 
la  court  les  provisions  bien  lard,  de  sorte  que  je  crayns  bien  fort  que 
nous  nen  ayons  pas  au  xve  dumoys.  Il  en  pourra  venir  de  desordre, 
mais  si  ne  vous  prieray  je  pas  de  nous  y  ayder.  Il  est  vrav  que  epis- 
tota  non  erubescit  elle  vous  pourra  bien  fere  très  humble  requête  de 
vouloir  pour  ce  coup  quon  sayde  dune  partie  de  ce  qui  vous  est  deu, 
en  attendant  seullement  que  lassignalion  davril  soit  venue,  de  la 
quelle  on  remboursera  le  tout  toutesfois.  Je  ne  veulx  en  cela,  rien 
fere  ny  dire  qui  vous  desplaise.  Commandez,  monseigneur,  en  cela  et 
toute  aultre  chose  vostre  volunle  la  quelle  je  ne  passeray  pour  sil 
plaist  a  dieu.  Il  n'y  a  rien  de  nouveau  a  Venize  ny  de  Rome  dont  je 
euz  hier  nouvelle  de  monsr  de  Mirepoix,  qui  a  senty  forl  aigreraenl 
sa  revocacion.  Monsr  le  gouverneur  me  monstra  ce  quil  l'ust  de 
Florence  le  lendemain  de  vostre  partement  el  depuis  ne  sen  esl 
entendu  aultre  chose.  Je  suys  icy,  monseigneur,  ajouyr  ce  beau  lieu 
ayant  commence  ung  peu  de  diète  de  toutes  choses  en  ettendanl 
vostre  retour  qui  sera  tousours  désire,  avec  vostre  contentement  de 
celluy  qui  présente  a  vostre  excellence  ses  très  humbles  recomen- 
dations. 

De  Ferrare  ce  xxiue  mars  1553. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale  . 


GABRE   AU    DUC   DE    FERRARE 

19.  —  [Ferrare],  26  mars  1553.  —  Monseigneur.  Jentendz  que 
Matbeolle  (1)  passa  avant  hier  par  icy,  le  quel  porta  ung  gros  paquet 
pour  vostre  Excellence.  S'il  y  a  quelque  chose  qui  (misse  servir  en 

l)  Messer  Matteolo,  maître  des  postes  du  Pape.  Fr.  20641,  r  223,  lettre  de 
M.  de  Lansac  au  Roi:  «Sire,  le  Pape  dépèsche  \It  ;s  \iatteolo  son  maitre  de 
postes»,  etc.). 


(MARS    1553  DOMINIQUE   DU    GABRE  '11 

voz  afferes,  il  Vous  plairra  en  fere  part  au  Roy  et  envoyer  voz  lettres 
que  Gassot  portera,  le  quel  ne  peult  tarder  plus  gueres  a  venyr,  et 
affin  monseigneur  que  vous  commenciez  desja  a  avoir  ung  peu  de 
poyne  de  la  charge  que  jespere  que  vous  aurez  bientost,  je  vous 
envoyé  une  lettre  de  monseigneur  le  cardinal  (1),  avec  coppies  de 
lettres  de  monsr  le  duc  de  Florence  et  de  luy,  despropoz  daccord,et 
si  daventure  vous  en  aviez  eu  quelque  responce  de  vostre  ambassa- 
deur a  ce  que  vous  en  escripvistes  dernièrement,  il  vous  plairra 
monseigneur,  regarder  ce  quil  vous  samblera  quoy  y  face  et  me  ren- 
voyer les  dictes  lettres,  et  coppies,  et  vostre  bon  advys  sur  le  tout, 
dons  voyez  monseigneur  la  nécessite  dargent  ou  ilz  sont;  silz  nen 
sont  secouruz  je  crains  quelque  grand  inconvénient.  Vostre  partie  est 
toute  preste  a  Yenize  comme  Ion  ma  escript  et  debvoit  len  envoyer 
bien  tost  après  aultre  provision,  mais,  il  y  a  danger  quelle  vienne 
bien  tard.  S'il  vous  plaisoil  quon  sen  aydast  pour  ce  coup,  laissant 
tousiours  le  debte  sur  la  mesme  obligation,  nous  le  ferons  bien  trou- 
ver bon  au  marchand,  combien  quil  ayt  escript  a  ses  commectans 
quilz  ne  le  missent  que  entre  mes  mains  et  a  moy  que  je  eusse  a  en 
acquicter  sa  parolle;  mais  passée  ceste  nécessite  et  ce  moys  davril 
qui  sera  le  plus  fort  de  la  guerre  a  Sienne  je  mectray,  entre  voz 
mains  tous  les  deniers  qui  viendront,  si  tout  debvoyst  périr,  ayant 
escript  dernièrement  a  la  court  par  Partenay  si  expressément  quil 
est  impossible  quilz  ny  pourvoyent  daultre  façon.  Je  vous  asseure, 
monseigneur,  que  je  ne  suys  pas  assez  hardy  pour  le  vous  avoyr 
voulu  dire  en  présence,  mais  je  scay  bien  que  ce  papier  ne  se  cour- 
rousse  point,  et  vous  supplve  très  humblement  men  excuser,  vous 
souhectant  monseigneur  bonnes  festes  et  bonnes  pasques. 
De  Ferrare  le  xxvime  mars  1553. 

Monseigneur,  mons1"  de  Termes  faict  une  grande  presse  de  luy 
envoyer  ung  fondeur  qui  est  a  Parme  et  la  ou  il  ny  pourroit  aller 
que  je  face  requeste  a  votre  excellence  de  luy  prester  le  sien  pour 
ung  moys  seullement,  si  monsr  de  Forquevaulx  vous  faict  entendre 
ne  pouvoir,  recouvrer  laultre.  11  vous  plaira  me  mander  si  nous  pour- 
rons avoir  le  vostre  et  je  luy  bailleroys  argent  pour  sy  en  aller. 

(Arch.  de  Modène.  Caneelleria  Ducale). 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

20.  —  Ferrare  ,27  mars  1553.  —  Monseigneur.  .lavreceu  ce  jour- 
dhuy  la  lettre  qu'il  vous  apleum'escripre  du  xxvr2  de  ce  moys  qui  ma 
este  portée  pour  monsr  le  gouverneur,  lequel  ma  laid  ceste  faveur 

(1)  Le  cardinal  de  Lorraine. 


28  NÉGOCIATIONS   DE  [MARS    1553] 

(je  me  venyr  trouver  en  ce  beau  lieu  et  ma  faict  entendre  et  cognois- 
tre  ce  qu'il  vous  avoit  pieu  luy  escryre   dont  je  vous  mercye  très 
humblement,   et   vous  asseure,  monseigneur,  que  vous  ressuscitez 
de  mort  a  vye  les  afferes  du  Roy,  et,  beaucoup  de  serviteurs  et  de 
mynistres  que  sa  majesté  a  par  deçà,  ce  que  je  feray  sil  plaist  a  Dieu 
fort  bien  congnoistre  la  ou  il  en  est  de  besoing,  tenant  ma  depesche 
preste  pour  Gassot  lequel  doibt  arryver  bientost  comme  il  vous  aura 
pieu  veoyr  par  la  lettre  de  monseigneur  le  Cardinal.  Je  foyz  aussi 
mon  compte  que  votre  excellence  m'aura  envoyé  son  paquet  conte- 
nent  les  advys  quelle  a  eu  de  son  ambassadeur.  Et  si  Gassot  demeuroit 
trop  longuement   a  venyr,  je  depescheray  corrier  exprès  si  vous, 
monseigneur,en  estes  d'advys.  Je  croys  que  demain  viendra  le  corrier 
de  Florence,  duquel  nous  entendrons  quelque  chose  de  nouveau  de 
Sienne  et  quel  chemyn  les  ennemys  auront  prins.  J'ay  veu  monsei- 
gneur que  vous  noblyez  point  monsr  Dandelot  (l)et  a  faire  tousiours 
quelque  bon  office  pour  luy,  dont  jayadverly  monsr  Damanzay  (2;  qui 
est  icy.  Il  nya  nulle  nouvelle  de  monsr  le  cardinal  de  Chastilhon,  ny 
de  notre  court;  soubdain  comme  il  en  viendra,  je  ne  fauldray  de  vous 
en  donner  advys.  Cependant,  monseigneur,  encorque  je  me  soismys 
a  une  dyete  du  pain  et  deaue  pour  la  santé  du  corps  et  de  la  vie  si 
me  semble  il  que  jengresse  a  jouyr  de  ce  beau  lieu  avec  la  solitude 
et  liberté  de  l'exercisse.  Domp  Jocobo  my  est  venu  veoyr  a  cest  heure 
qui  ma  magniffye  pour  une  chose  trop  extraordinere,  les  caresses 
quil  a  receues  a  Florence  de  logeiz  au  près  de  la  personne  ducalle, 
de  deffrayement  pour  vingt  et  cinq  bouches,  de  libéralité/  et  grand/, 
presentz  au  partir  a  hommes  et  a  femmes.  Et  après,  ma  dit  quil  estoit 
icy  fort  maltrecte  de  votre  justice,  et  qu'il  seroit  contrainct  bien  tost 
de  sen  partir,  me  priant  si  javoys  eu  son  saufconduyt,  le  luy  vouloyr 
dire  et  qu'il  avoit  entendu  a  Florence  que  je  lavoys  eu  ;  je  luy  ay 
faict  responce  que  je  speroys  de  lavoyr  bientost,  mais  que,  après 
pasques,  nous  en  parleryons  pource  que  ces  jours  icy  nous  sont  fes- 
tes,  et  que  vous  ne  vouliez  pas  que  je  hantasse  malvai ses  compagnies 
en  ce  sainct  temps   et  que  je  pensoys  bien  quil  non  pouvoit  estre 
de  pyre  que  la  sienne.  Par  ainsi,  monseigneur, il  sera  remys  a  votre 
retour  icy,  sil  veult  avoir  nouvelle  de  son  saufconduyt,  et  aussi  quel- 
que secours  de  votre  excellence  a  lexpedition  de  son  procès. 
De  Ferrare  le  xxvne  mars  1553. 

(1)  François  de  Coligny,  seigneur  d'Andelot,  né  le  18  avril  LS21,  succéda  en 
1555  à  son  frère  aîné  L'amiral  Gaspard  de  Coligny,  comme  colonel  général  de  l'in- 
fanterie; mourut  à  Sainles  le  7  niai  1569,  après  avoir  pris  une  par!  très  active  aux 
guerres  civiles.  —  A  l'époque  où  se  place  la  présente  correspondance,  il  rem- 
plissait les  fonctions  d'agent  de  l'ambassade  de  Venise. 

[2  Jean  d'Amenzé,  enseigne  de  la  compagnie  colonelle  au  régimenl  de  Piémont, 
morl  à  Saint-Quentin  en  1551   LaChesnayi  des  Bois,  Dictii aire  de  la  noblesse). 


[Mars  1553]  Dominique  du  gabre  29 

No  ricevuto  querta  matina  di  Venetia  trentacinque  milia  scudi  et 
il  tombezi  me  ne  debbe  dare  quindeci  milia  fra  dua  giorni  subito 
faro  lufïicio  con  messer  PietroMoron  (1).  Fra  tantomandoa  Parma  la 
pagadi  marzo  cbe  certo  ferano  disperati  Domani  aviaro  dodeci  milia 
scudi  verso  siena  per  un  poco  de  tratenimento  non  potendo  credere 
che  fra  octo  giorni  non  venga  di  corte  la  loro  provisione  ordinaria. 
Jo  privero  il  servitio  fatto  a  bisogni  et  se  io  non  la  cauto  bene  che  mi 
sia  improverato,  nel  resto  sor  eccmo  nunc  vivo  et  regno  simul  ista 
reliqui,  etc,  questo  bel  luoco  mi  da  la  vitta. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    A    M.    DE    BEAUREGARD  (2) 

21.  —  [Ferrare],  29  mars  1553.  —  Monsieur,  Vous  verrez  parla 
despeche  de  ce  pourteur  la  cause  pour  laquelle  je  le  despeche  exprès, 
je  lay  employé  icy  en  beaucoup  de  voyages  et  de  postes  pour  les 
affaires  du  Roy,  l'ayant  trouve  de  bonne  volonté,  dilligent  et  lidelle, 
je  vous  supplieray  luy  vouloir  faire  donner  voyage  pour  me  revenir 
trouver  au  plustost  quil  pourra,  et  Tintroduyre  et  instruyre  de  ce  que 
vouldrez  quil  dye  pour  mon  interestz,  si  vous  en  voyez  quelque 
bonne  occasion.  On  dit  quil  ny  a  que  les  honteux  qui  le  perdent  a  la 
court,  pour  ceste  occasion  je  n'y  gaigneray  guieres.  Pleust  a  Dieu 
que  vous  eussiez  une  bonne  paix,  dont  il  est  icy  quelque  bruit.  Et 
sil  est  ainsy,  je  vous  prie  de  me  faire  oster  d'icy  et  me  laisser  aller 
dire  mes  heures  en  mon  heritaige,  car  vous  aultres  êtes  en  posses- 
sion de  ne  donner  les  biens  et  les  honneurs,  sinon  a  ceulx  qui  ne 
font  riens  pour  tous  potaiges,  et  je  ne  suis  que  trop  riche,  mais  qu'on 
se  contente  de  moy  me  recommandant,  Monsieur,  bien  humblement 
avostre  bonne  grâce. 

De  Ferrare  ce  xxix  mars  1553. 

Si  vous  donnez  loisir  a  ce  porteur  d'aller  demourer  huyt  jours  en 
sa  maison,  il  vous  viendra  retrouver  au  temps  que  vous  luy  direz 
pour  prendre  vostre  despeche,  je  vous  envoyé  par  luy  une  paire  de 
gant  pannez  pour  cest  esté  et  une  aultre  paire  pour  la  favorite. 

(Bibl.  nal.,  Fr.  20453,  fol.  195)  (originale). 


(1)  Pietro  Morone,  cardinal.  —  Le  pape  Paul  III  l'avait  chargé  en  1543  d'aller 
rappeler  Modène,  qui  devenait  un  foyer  de  protestantisme,  au  respect  de  l'Église 

(V.  RODOGANACHI,    Op    Cit.,  p.  201). 

(2)  Jean  de  Thier,  chevalier,  seigneur  de  Beauregard  en  Blaisois,  receveur  du 
domaine;  auparavant  secrétaire  du  duc  de  Montmorency,  puis  secrétaire  du  Roi 
(1542),  secrétaire  des  finances  (1547),  conseiller  général  des  finances  en  1553. 


30  NÉGOCIATIONS    DE  TaVRIL    15531 


GABRE    AU    DUC    DE   FERRARE 

22.  —  [Fit rare],  30  mars  1553.  —  Monseigneur.  Ce  suffisant  am- 
bassadeur présent  porteur  vous  rendra  bon  compte  de  Sienne,  don  il 
vient,  et  vous  dira  le  parteuient  de  Gassot  qui  sen  va  a  Venize  pour 
ny  l'ère  que  passer,  et  luy  ay  bien  fort  recommande  vostre  paquet 
que  monsr  le  gouverneur  me  porta  laultre  soyr, ayant  escript  de  mon 
coste  tout  ce  que  je  doibz  pour  le  secours  que  vous  avez  faict  aux 
affaires  du  Roy,  et  pour  presser  la  resolution  du  sr  Camillo  et  de  la 
garnison  de  Bresseil.  Si  vostre  excellence  menvoye  au  jourdbuy 
quelque  aultre  paquet  pour  la  court  je  lenvoyeray  après  le  dit  Gassot 
qui  pourra  estre  encor  tout  demain  a  Venize. 

De  Ferrare  le  xxxe  mars  1553. 

Arcli.  deModène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FKRRARE 

23.  —  [Ferrare],3  avril  1553.  —  Monseigneur.  Jay  receu  ce  matin 
les  deux  lettres  quil  vous  a  pieu  mescripre  du  dernier  du  passe  et 
IIe  du  présent  et  veu  ou  entendu  ce  que  le  sr  Batistin  (1)  ma  dit  de 
votre  part.  Et  quant  a  laccord  de  Sienne,  monseigneur  le  Cardinal 
men  escript,  de  sorte  que  la  pratieque  est  rompue  par  le  duc  de  Flo- 
rence et  ce  que  le  dit  sr  cardinal  (2)  y  a  respondu  par  le  passe  doul- 
cement,  ce  a  este  pour  lour  donner  parolles.  11  vous  plairra  veoyr  le 
tout  par  la  lettre  de  monsr  le  cardinal  que  je  vous  envoyé.  .le  trouve, 
monseigneur,  très  bonne  votre  oppinion  de  nentendre  a  accord,  sil 
fault  que  le  Roy  quicte  la  protection,  quelque  seurete  que  en  sceus- 
sent  1ère  les  venetiens  ny  le  pape,  doute  jescripray,  selon  votre 
advys,  a  mons1  lambassadeur  de  Venize  (3).  Le  duc  de  Florence,  par 
son  langaige,  ne  parle  plus  en  neutral  et  ses  effectz  accompaignent 
la  parolle  comme  il  se  veoyl  par  la  lettre  de  nions'  votre  ambassa- 
deur, h  me  samble,  monseigneur,  que  cela  mérite  de  depescherung 
corrier  exprès  au  Roy  pource  quilz  sont  sur  le  poinct  de  resouldre 
ce  quilz  ont  a  faire  aux  afferes  d'Italie. Cepandanl  les  ennemys  samu- 
seront  quelques  jour-  a  Montalcino  ou  a  ce  que  vous  aura  dit  Serres 
a  este  pourveu  de  tout  ce  que  ceulx  de  deddans  onl  seu  demander. 
Quanl  a  largent  pour  noz  -eus.  ilz  ont  eu  tout  ce  quilz  ont  seu  des- 
pendre et  demander  pour  mars  et  les  moys  passez  et  pour  cominan- 

(1)  Baptistin  sirozzi,  gouverneur  <le  Modène,  mort  à  Ferrare  en  I 
i-i)  Le  cardinal  de  Lorraine. 
(3)  Odet  de  Selve. 


[AVRIL    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  31 

cer  le  payement  davril  ilz  ont  trent  mil  escus.  Il  ne  leur  en  fault 
plus  que  xxvm  pour  achever  de  payer  tout  avril.  Albisse  del  Benne 
mescript.  par  une  lettre  du  xxvme  mars  que  jay  receue  ce  matin,  quil 
envoyé  pour  la  provision  d'avril  quatre  vingtz  mille  escus  et  xxv111 
écus  sol  pour  rembourser  le  gentilhomme.  Je  voye,  par  la,  que  nous 
aurons  ahondence  dargent,  car  ilz   estoient  en  doubte  si  le  gentil- 
homme vouldroyt  dez  xxv™  escuz  faire  ce  quil  a  faict.  Avant  que  en 
estre  requis,  jay  baille  les  aultres  xxvm  escus  icy  a  qui  Ion  mavoyt 
ordonne,  et  ay  panse,  monseigneur,  que  ce  seron  ung  secours  fort 
honorable  et  agréable  a  la  court  si,  avant  que  leur  argent  vint,  nous 
envoyons  encores  a  Sienne  les  dits  xxvm  escus  du  gentilhomme  que 
jay  déjà  paiez,  affin  que  ce  moys  davril,  qui  sera  le  principal  de  ceste 
guerre,  fust  du  tout  paye,  qui  donneroit  grand  réputation  aux  afferes 
du  Roy  et  cueuraux  soldatz.  Ce  ne  seroitqueung  prest  de  huyt  jours, 
duquel  la  première  seurete  et  obligation  seroit  toujours  entière.  Et 
je  respondz  bien  de  ma  teste  de  rendre  ces  xxvm  derniers  en  escus 
sol  dans  le  xve  de  ce  moys  et  des  aultres  xxvm  déjà  envoyez  on  leur 
pourroit  encor  donner  loysir  du  remboursement  a  laultre  moys.  Je 
vous  laisse  penser,  monseigneur,  si  ce  ne  seroit  pas  nouvelle  fort 
agréable  a  la  court  et  digne   de  corrier  exprès.  Le  gentilhomme  a 
encores  preste  les  lu1  escus  et  Sienne  ha  tout  ce  quil  luy  faict  besoing 
jusques  au  xme  de  inay.  La  deffaicte  des  allemandz,  le  siège  de  Mon- 
tealcino,  si  bien  pourveu  comme   Ion  escript,  et  le  langaige  et  les 
œuvres  du  duc  de  Florence,  les  quelles  je  vous  asseure  que  je  pren- 
drai de  leurs  vrayes  couleurs  et  seray  bon  soliciteur  de  ce  que  je 
spere  luy  adviendra.  Je  remectz,  monseigneur,  le  tout  a  votre  bonne 
volunte  et  prudent  advis.  Je  feray  payer  tout  ce  que  notre  ambassa- 
deur despendra  pour  vous  escripre  et  ay  prie  le  sr  Batistin  vous  faire 
courir  ce  paquet,  affin  que  la  responce  vienne,  si  vous  le  trouvez  bon. 
Je  despeche  corrier  exprès  a  la  court  et  tout  dung  traine  a  Sienne 
avec  lez  xxv'"  escus  que  jay  mis  en  mains  del  Manfredo.  Il  vous 
plairra,  monseigneur,  me  renvoyer  la  lettre  de  nions1-  le  cardinal  et 
le  discours  de  la  deffaicte  dez  allemandz  pour  les  envoyer  originelle- 
ment au  Roy,  si  vous  le  trouvez  bon.  Je  veoy  bien,  monseigneur, 
que  vous  estes  occupe  la  pour  chose  si  importante  que  cela  me  faict 
porter  plus  patiemment  la  privation  de  votre  doulce  présence,  la 
quelle,  monseigneur,  nous  attendrons,  puis  que  aultrement  ne  se 
peult  fere  a  la  semayne  prochaine,  affin  que  vous  voyez,  monsei- 
gneur, ce  que  le  gênerai   dal  Benne  mescript  de  largent.  Je  vous 
envoyé  sa  lettre  quil  vous  plairra  me  renvoyer,  que  ung  corrier  de 
banque  porta  hier  au  soyr  et  a  faict,  comme  il  me  semble  une  mer- 
veilleuse dilligence  par  la  dite  lettre.  Je  ne  veoy  mention  de  per- 
sonne qui  soit  en  chemyn  pour  venir  icy  et,  dez  le  xxme,  ilz  receu- 
vent  les  articles  que  scavez  qui  leur  feront  changer  toutes  leurs 


32  NÉGOCIATIONS    DE  AVRIL    1553] 

intentions,  pourquoy  je  suys  bien  aise  de  demourer  encores  quatre 
ou  cinq  jours  sans  avoir  nouvelles,  afïîn  que  tout  a  ung  coup  nous 
en  ayons  de  plus  seures  et  concluantes,  espérant  que  de  vostre  part 
vostre  excellence,  conseillée  et  réconciliée  avecque  Dieu,  sera  réso- 
lue a  fere  ce  que  toute  raison  divine  et  humayne  vous  persuadent. 
Il  vous  plaira,  monseigneur,  me  respondre  a  ceste  despeche  endilli- 
gence  si  me  commandez  voz  bons  plaisirs. 
De  Ferrare  en  ce  beau  lieu  3  avril  1553. 

Je  donneray  toute  ceste  semayne  a  monsrBresaule  (1)  pour  purger 

les  bonnes  chères  de  lyver,  netoyant  le  corps  après  lame,  affin  des- 

tre  plus  dispose  a  suyvre  cest  este  vostre  excellence  par  tout  ou  elle 

vouldra  aller. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

24. —  [Ferrare],  4  avril  1553. —  Monseigneur.  Jay  receu  ce  matin 
le  paquet  venu  de  France  quil  vous  a  pieu  menvoyerou  jay  trouve  les 
deux  lettres  du  Roy,  de  monseigneur  le  conestable,  et  une  de  Monsr 
le  cardinal  de  Chastilhon  que  je  vous  envoyé.  Jay  oultre  cela, quelques 
memoyres  signées  de  la  main  du  Roy  avec  mandement  de  sa  Majesté 
de  vous  en  faire  entendre  le  contenu,  ce  que  je  remectray  a  vostre 
venue  icy,  la  quelle  sera  aujourdhuy  comme  je  cuyde,  car  on  mes- 
cript  de  Venize  que  le  duc  d'Albe  (2)  a  charge  d'aller  en  Toscane 
persuader  le  duc  de  Florence  de  prendre  la  charge  de  commander 
a  larmee,  et,  en  ce  cas  la,  le  dit  duc  Dalbedoibt  passer  en  Espaigne, 
mais  si  laultre  ne  le  veult  accepter,  jentendz  qu'il  a  charge  dy  de- 
mourer luy  mesmes.  Je  suys  fort  ayse,  monseigneur,  de  veoyr  le  con- 
tentement que  vous  avez  du  Roy  et  que  sa  Majesté  vous  monstre 
par  effect  combien  il  vous  ayme  et  estyme.  Hz  me  mandent  quilzont 
trouve  fort  bon  tout  ce  que  vous  avez  discouru  de  laccordde  Sienne, 
mais  je  veoy  que  le  duc  de  Florence  ne  le  trouvera  jametz  bon.  m 
nous  nabbandonnons  dutout  la  protection  et  me  doubte  que  le  pape 
aye  ceste  mesme  intention,  mais  pour  user  do  leur  langaige.  je  dirois 
soubz  vostre  révérence  et  supportation  quilz  sont  bien  coillons  silz 

(1)  Le  médecin  de  du  Gabre. 

(2)  Ferdinand  Alvarez  de  Tolède,  duc  d'Albe,  né  eu  1508,  prit  part  sous  Charles 
Quint  à  diverses  expéditions,  gaijna  sur  l'électeur  de  Saxe  la  bataille  de  Mulhberg 
(1547),  et  obtint  des  succès  ru  Italie  sur  les  troupes  françaises  et  papales.  Il 
conserva  le  gouvernement  en  elief  des  armées  après  l'abdication  de  Charles- 
Quint  et  conquit  les  États  Pontificaux.  Leduc  d'Albe  se  distingua  par  sa  cruauté 
lors  de  l'insurrection  des  Pays-Bas,  au  cours  de  laquelle  il  se  glorifia  d'avoir  fai* 
exécuter  plus  de  10000 personnes.  Il  mourut  à  Lisbonne  le  il  décembre  1588, 


[AVRIL   1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  33 

pensent  que  les  minystres  du  Roi  soient  jusques  la  etmesmement, 
ayant  a  cest  heure  ung  gênerai  généralissime  en  noz  afferes,  comme 
vous  estes  sil  vous  plaist  de  laccepter  et  qui  entendez  toutes  leurs 
escrymes.  Jattendz,  monseigneur,  responce  et  vostre  advys  a  ce  que 
je  vous  envoiay  hier  de  monseigneur  le  cardinal  et  duduc  de  Florence, 
et  incontinent, vostre  responce  venue,  je  croy  que  je  despecheray  a  la 
court, si  ce  n'est  que  le  duc  Dalbe  vint  icy,  auquel  cas  je  retarderoys 
jusques  a  ce  que  vous  fussiez  departiz,  pour  vous  laisser  prandre 
loysir  descripre.  Je  vous  diray  seullement  ce  mot,  que  lacommedye 
que  scavez  arryva  a  la  court,  a  mon  advys,  le  mesme  jour  que  ceste 
depesche  en  partist,  et  selon  le  langaige  quilz  me  mandent,  vous 
tenyr.  Je  croy  que  je  ne  seray  point  battu  de  chose  que  je  y  aye 
faict  et  en  lieu  quilz  vouloient  que  vouz  partissiez  ung  peu  clair,  ilz 
verront  que  cest  a  eulx  a  se  laisser  entendre  ;  je  remettray,  mon- 
seigneur, le  demourant  a  quant  je  saurai  vostre  venue,  ou  si  vous 
demeureray  encor  cette  semayne  la.  Je  suis  contrainct  de  tenyr  la 
chambre  presque  toute  ceste  semayne  pour  prendre  le  loisir  de  me 
peurger. 
De  Ferrare  le  ime  avril  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

25.  —  [Ferrare],  8  avril  1553.  —  Monseigneur.  Je  despeche  ce 
paquet  exprès  pour  vous  tenir  advertiz  des  affaires  de  Sienne  et 
mesmement  y  ayant  3  choses  quil  est  nécessaire  que  le  Roy  entende  : 
Tune  le  bon  langaige  tenu  par  le  Duc  de  Florence  qui  seroit  bien 
content  daccord,  mais  que  le  Roy  quittast  tout,  et  vous  trouverez 
aussi  a  mon  advis  que  le  Pape  va  ce  chemin  la,  dont  nous  scaurons 
bientôt  la  vérité,  puisque  son  homme  est  a  Sienne  ;  l'autre  est  la 
défaite  de  ces  8  cens  allemandz,  et  la  3me  que  a  Sienne  ne  se  peuvent 
plus  plaindre  d'argent.  Mr  l'Ambassadeur  de  Venize  (1)  vient  de  me 
mander  quil  a  fait  partir  les  25  mil  700  escuz  quil  leur  falloit  pour  le 
parfait  d'avril  de  l'argent  que  le  gênerai  d'Elbenne  avoit  envoyé,  de 
sorte  que  je  retiendray  ceux  que  M.  le  Duc  ma  encores  preste,  car 
je  crains  que  silz  se  voyoent  plus  d'argent  quil  ne  leur  fault,  quilz 
veuillent  entreprendre  creue  de  gens  pour  la  diversion  et  aultres 
nouvelles  dépenses;  le  gênerai  d'Elbenne  m'escript  quil  nous  four- 
nira pour  tout  le  mois  162  mil  escuz.de  sorte  que  nous  serons  riches, 
et  mesmement  d'aultant  que  nous  ferons  bien  coller  quelques  mois 
avant  que  de  rendre  a  M.  le  Duc  ce  qui  luy  est  deu  ;  lequel  vous  avez 

(1)  De  Selve. 


34  NÉGOCIATIONS   DE  Tavril   1533" 

rendu  si  content  qu'il  nest  possible  de  plus,  et  vous  escript  de  sa 
main  quil  vous  est  tant  obligé  que  merveilles,  que  vous  y  avez  pro- 
cède d'une  bonne  et  grande  affection  d'amitié,  et  quil  espère  que  vous 
prendrez  doresnavant  la  protection  de  ses  affaires,  dont  il  se  tient 
fier,  ce  commencement  de  bonne  démonstration  lui  fera  faire  tant 
plus  aisément  le  sault;  quant  au  reste,  et  je  suis  toujours  en  espé- 
rance quil  le  fera,  si  vous  en  avez  ferme  envie,  sur  quoyje  pense 
que  je  aura  y  bientost  de  vos  nouvelles,  en  attendant  lesquelles  je  ne 
luy  parleray,  ne  offriray  rien  du  contenu  au  mémoire  quil  a  pieu  au 
Roy  rn'envoyer,  aftin  que  si  jay  fait  une  erreur,  je  nen  face  point 
deux.  Au  reste,  Monseigneur,  il  vous  plaira  m'avoir  en  vostre  souve- 
nance et  bonne  grâce  pour  très  humblement  recommande. 
De  Ferrare  le  8  avril  1553. 

Monseig1",  il  vous  plaira  voir  par  une  lettre  que  M.  de  Beauregard 

vous  lira  de  M.  le  Duc,  une  requeste  quil  luy  désire  estre  accordé, 

dont  j'ai  mis  un  mot  en  la  lettre  du  Roy,  et  vous  plairra  favoriser 

cela  selon  la  foy  et  espérance  quil  a  en  vous  Monseigneur.  Je  ne  scaj 

si  le  maistre  de  la  poste  de  ceste  ville  aura  dit  vray,  lequel  vient  de 

me  mander  que  ung passant  la  assuré  que  les  imperiaulx  avoient  lait 

si  grande  batterie  a  Montalcino  que  les  nostres  estoient  sur  le  poinl 

de  se  rendre  ou  de  recepvoir  lassault,  et   que,  sur   cela,  arrivèrent 

3  mil   hommes  de  pied  et  3  cent  chevaux  légers,  que  Mr  de  Terme»; 

avoit  envoyé,  lesquelz  donnèrent  l'aiïarme  au  camp  et  ceux  de  la 

ville  sortirent  aussi,  ou  il  y  avoil  eu  nue  demye  bataille,  et  que  les 

nostres  avoient  ete  en  tout  et  partout  supérieurs,  et  ce  qui  m'en  fait 

croire  quelque  chose,  c'est  que  le  corrier  ordinaire  de  Florence  pour 

\  enize  nest  point  venu  a  son  jour  accoustumé,  et  quand  ils  ont  une 

mauvaise  nouvelle  ils  le  retiennent  et  ne  laissent  sortir  une  seule 

lettre;  sil  en  venoil  certaine  je  ne  fauldray  île  vousenvoyer  courrier 

pexrès. 

lîilil.  uat..  Fr.  20ti î-j.  toi.  :.t     copie  , 


CABRE    AU    ROI 

26.  —  [Ferrare],  S  avril  /.">.'>.'>'.  -  Sue.  le  Secrétaire  Billon  I)  pré- 
sent porteur,  qui  est  a  Mr  le  Duc  de  Parme,  avoil  esté  par  ln\  despé- 
ché pour  vous  aller  parler  de  ses  affaires,  cl  se  trOUVOil  icy attendant 
argent  pour  son  voyage,  par  quoy  il  ma  semblé  le  debvoir  accommo- 
der de  porter  ceste  despechequi  mérite,  selon  mon  advis,  corrier  ex- 
près, et  luy  ayi  baille  cent  escuz  affin  quil  feist  dilligence  pour  vous 
tenir  adverty  de  Testai  de  vozatlaires  de  deçà  et  des  choses  advenues 

(1)  Secrétaire  du  duc  de  Parme. 


[AVRIL    1553]  DOMINIQUE   DU   GABRE  35 

despuis  mes  dernières  lettres  qui  ont  esté  par  Gassot,  affin  que,  sellon 
la  variété  des  choses,  V.  M  puisse  changer  ou  accommoder  ses  reso- 
lutions sur  lesd.  affaires.  En  premier  lieu,  il  vous  aura,  Sire,  pieu 
veoir  par  lad.  dernière  despeche  comme  javois  rembourse  Monsei- 
gneur le  Duc  de  Ferrare  sur  son  prest  de  25  mil  escuz  et  remprunté 
les  autres  25  mil,  et  que  d'un  cote  ou  d'autre  on  avoit  envoyé  a  Sienne 
tout  ce  quilz  avoient  demande  pour  le  passé  et  30  mil  escuz  pour  le 
mois  d'avril.  Je  me  suis,  a  la  fin,  recherché  et  résolu  de  rechercher 
mondit  sr  le  Duc  de  me  represter  encor  les  autres  25  mil  que  j'avois 
desjà  payé  pour  les  envoyer  tout  d'un  trainc  a  Sienne,  et  leur  fournir 
largent,en  attendant  que  l'assignation  que  le  gênerai  d'Elbenne  doit 
envoyer  pour  avril  soit  preste;  de  quoy  ledit  Seigneur,  Duc  continuant 
toujours  en  la  dévotion  et  bonne  volonté  de  vous  faire  service,  a  este 
très  content  et  a  escrit  icy  a  ses  gens  de  me  le  délivrer,  de  sorte  que 
voz  gens  de  guerre  a  Sienne  se  trouveront  aussy  bien  payez  que 
armée  ne  fut  jamais,  et  ne  leur  sera  deub  un  liard  jusques  en  may, 
qui  mettra  en  grand  repoz  vos  serviteurs  par  deçà  et  en  grand  seu- 
rete  et  réputation  voz  affaires,  lesquels  prospèrent  dieu  mercy  de 
bien  en  mieulx  ;  ayant  le  sr  Cornelio  Bentivoglio  (1),  ces  jours  passez 
deffait  une  troupe  de  8  cens  lansquenestz  soubz  deux  enseignes  du 
comte  de  Ladron  quilz  ont  aussi  pardues,  il  y  a  eu  quatre  cens  hom- 
mes taillez  en  pièces  et  le  reste  prisonniers  entre  lesquelz  est  le  filz 
dudit  conte  collonel  de  Lanquenestz  (2).  l'exécution  a  été  faite  par  ung 
discours  qu'il  vous  plaira  voir,  que  m'a  envoyé  M.  le  Cardinal  de  Fer- 
rare,  lequel  sera  avec  la  présente.  Depuis,  les  imperiaulx  ont  retiré 
le  reste  des  allemendz  qui  estoient  a  Marenne  et  joint  avec  leurs 
camp,  se  sont  logez  devant  Montalcino,  délibérez  comme  l'on  dit  de 
sy  opiniastres  et  de  l'avoir  en  toutes  façons,  et  j'entends  que  ceux 
qui  sont  dedans  sont  encores  plus  délibérez  dy  mourir  plustost  que 
de  se  rendre.  Serres  qui  est  icy  venu  pour  aller  a  Parme  donner 
ordre  a  sa  munition,  masseure  avoir  veu  une  lettre  signe  du  sr  Jor- 
dan Ursin  (3),  du  conte  Camillo  Martinengo  de  Moretz  (4),  callabrais 


(1)  Cornelio  Bentivoglio,  gentilhomme  bolonais,  colonel  de  l'armée  de  Pierre 
Strozzi,  attaché  au  service  de  la  France  dans  les  affaires  d'Italie  ;  capitula  honora- 
blement à  Sienne  le  21  avril  1555,  fut  nommé  lieutenant-général  pour  le  roi  en 
Italie  et  généralissime  des  troupes  d'Alphonse  II,  duc  de  Ferrare.  —  Brantôme 
(édit.  Lalanne,  t.  î,  p.  -298),  parle  de  lui  avec  éloge  et.lui  décerne  les  qualificatifs  de 
brave,  fidèle  et  bon  capitaine. 

(2)  Jean  Baptiste,  comte  Lodrono,  colonel  de  lansquenets  au  service  de  Charles- 
Quint. 

(3)  Jourdain  des  L'rsains,  chevalier  de  Saint-Michel,  gouverneur  et  lieutenant- 
général  en  Corse  pour  le  roi  de  France,  mort  le  25  septembre  1564.  à  l'âge  de 
39  ans. 

(4)  Camillo  Martinengo.  de  la  famille  des  comtes  Martinenghi,  capitaine  italien 
au  service  de  la  France. 


36  NÉGOCIATIONS    DE  AVRIL    1553] 

et  je  ne  saiz  quelz  autres  cappitaines  qui  sont  dedans,  par  laquelle 
ilz  escripvent  a  Monseigneur  de  Termes  quilz  a  voient  tout  ce  qui  leur 
faisoit  besoing,  quilz  ne  demandoient  plus  rien,  et  que  l'on  ne  fust  en 
aulcune  peine  d'eulx  ny  de  leur  place,  et  quilz  en  rendroient  bon 
compte;  j'entendz  quilz  ont  dedans  quelques  pièces  de  fer  et  assez 
de  mosquetz,  boletz,  poudres  et  vivres,  de  sorte  que,  Sire,  chacun 
en  espère  gloire  et  honneur  pour  les  vostres  et  confusion  pour  les 
ennemis.  C'est  grand  plaisir  quilz  se  soient  adressez  la,  puisquil  y  a 
des  gens  de  bien  dans  la  place,  j'entendz  quil  n'y  a  pas  moings  de 
15  cens  hommes  de  guerre  payez  et  sept  cens  de  la  ville,  de  sorte 
quil  sera  malaisé  de  forcer  tout  cela  et,  s'ilz  ne  le  peuvent  prendre 
c'est  assez  pour  leur  faire  quitter  toute  leur  entreprinse;  il  est  vrai 
que  le  Duc  de  Florence  s'est  a  la  fin  mis  a  braver  et  parler  clair  quand 
il  a  vu  qu'on  ne  voulloit  accordera  son  mot  et  quitter  du  tout  la  protec- 
tion de  Sienne,  comme  il  vous  plaira  veoir  par  une  lettre  que  Monsieur 
le  Cardinal  deFerrare  m'a  escripte,  laquelle  je  vous  envoyé  originalle: 
le  Pape  commence  fort  a  se  remuer  pour  parvenir  a  cest  accord 
depuis  le  retour  du  corrier  quil  avoit  envoyé  vers  l'Empereur,  et  a 
despeché  a  Sienneung  auditeur  de  Rotte  pour  cesteffect.  Dieu  veuille, 
Sire,  quil  naye  mesmes  désirs  et  intentions  que  le  Duc  de  Florence 
de  procurer  que  vous  quittiez  la  protection,  a  quoy  je  scay  bien  que 
Messeigneurs  voz  ministres  n'entendront  jamais,  et  ayant  reçu  ce 
matin  un  paquet  de  vostre  Majesté  pour  eulx  du  24e,  par  lequel  ilz 
verront  vostre  intention  sur  la  forme  dudit  accord,  je  leur  ay  envoyé 
par  corrier  exprès  ledit  pacquet  seur  chemin  aflin  quilz  puissenl 
tant  plus  seurement  negotier  et  repondre  a  l'homme  du  Pape,  et  luy 
ay  escript  une  lettre  dont  je  vous  envoyé  la  copie,  par  laquelle  il/ 
verront  qu'il  ne  leur  fault  craindre  faulte  d'argent  el  que  pour  cela 
ilz  ne  doibvent  prendre  occasion  de  condescendre,  a  chose  qui  ne 
soit  honorable  et  advantageuse  pour  V.  M.  J'ay  veu  lettre  de  l'Am- 
bassadeur de  Ferrare  qui  est  a  Florence,  par  lesquelles  le  Dm- 
avoit  fait  dix  cappitaines  qui  faisoient  gens  en  dilligence  pour 
aller  au  camp,  quil  faisoit  encores  porter  ï  canons  et  grande  quan- 
tité de  munitions,  je  crois  bien  qu'il  ne  fault  plus  doubter  de  sa 
volonté  ni  de  ses  effectz,  ilz  sont  trop  évident/  et  par  avanture 
trop  mal  considérez  pour  luy,  j'ay  l'ail  avec  Monseigneur  le  Duc  de 
Ferrare  que  son  ambassadeur  qui  est  a  Florence  despechera  corrier 
exprès  icy  quant  il  y  aura  nouvelle  d'importance  de  Montalcino  ou 
d'autre  chose,  et  que  je  payeroy  la  despence  des  corriers,  affin  que 
V.  M.  puisse  estre  adverlie  le  plus  souvent  qu'on  pourra  el  je  croy, 
Sire,  que  vous  advouerez  ceste  despence  qui  ne  sera  pas  grande. 

Sire,  j'ay  receu  en  escripvant  ceste  lettre  la  despeché  qu'il  vous  m 
pieu  m'envoyer  du  24e  Mars,  que  ung  corrier  despeelie  exprès  a  Mon 
seigneur  le  Duc  par  son  ambassadeur  a  apportée,  ledit  s1  Duc  me  la 


[AVRIL    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  37 

après  envoyée,  lequel  se  trouve  encores  a  Rege  (1)  et  a  Bresseil,  et 
m'escript  la  grande  obligation  qu'il  aavostre  Majesté  et  avostre  ser- 
vice pour  la  favorable  responce  qu'il  vous  a  pieu  faire  sur  ce  que 
son  ambassadeur  vous  a  voit  parlé  du  fait  de  Bresseil,  il  estime  plus 
cette  faveur  et  démonstration  de  vostre  amitié  en  son  endroit  quil 
ne  fait  tout  ladvantaige  et  soulaigement  que  luy  en  peult  advenir;  je 
luy  ay  puis  après  renvoyé  vostre  lettre  et  celle  de  Monseigneur  le 
Connestable  luy  escripvant  seullement  que  je  lerecongnoissois  desja 
pour  nostre  gênerai  généralissime,  et  que  par  ma  despeche  je  voyais 
vostre  intention  estre  telle,  de  sorte  quil  ne  tiendra  plus  que  a  luy 
remettant  a  luy  exposer  ma  créance  a  son  retour  icy  pour  ce  quil 
me  mandoit  quil  arriveroit  dez  hier,  ayant  entendu  que  le  Duc 
d'Albe  qui  estoit  a  Mantoua  passeroit  par  icy  allant  en  Toscana 
devers  lequel  il  avoit  envoyé  l'Eveque  Rosset  (2),  mais  depuis  s'est 
entendu  que  ledit  Duc  d'Albe  a  prins  le  chemin  de  Plaisance  et  de 
Gennes,  de  sorte  que  ledit  sr  Duc  de  Ferrare  ne  sera  icy  encores  de 
huit  jours  estant  retourné  a  Bresseil  quil  a  si  fort  a  cœur  quil  veult 
voir  les  balouards  (3)  fondez  avant  que  partir  de  la,  et  escript  que 
quoiquil  puisse  coster,  il  mettra  ledit  lieu  et  Rege  en  estât  impre- 
nable avantque  soit  la  S1  Jehan.  Je  retarderay  de  faire  partir  ceste 
despeche  pour  attendre  le  retour  et  le  rapport  dudit  Eveque  Rosset, 
et  pouvoir  advertir  V.  M.  de  ce  quil  aura  appris  dudit  Duc  d'Albe. 

Sire,  j'ai  veuparle  mémoire  quil  vous  a  pieu  m'envoyer,  les  parti- 
cularitez  et  offices  quil  vous  plaist  que  je  présente  a  Monsr  le  Duc, 
pour  luy  faire  dire  sa  volonté,  et.  ce  quil  desirait  pour  entrer  en  capi- 
tulation et  en  vostre  service,  et  je  congnois  par  la  que  j'aurois  mérité 
destre  battu  et  croyans  d'avoir  fait  une  grande  erreur  en  cuydant 
bien  faire,  car  je  luy  ay  présente  trop  plus  gros  et  grandz  partiz  que 
vous  me  commandez;  il  est  vray  quil  scait  bien  que  c'estoit  de  lui  a 
moy  et  que  je  n'avois  chargé  de  luy  présenter  ne  peu  ne  beaucoup; 
tout  ce  que  j'en  ay  fait  et  dit  n'oblige  a  rien  V.  M.  si  est  ce  que  je  ne 
pense  pas  estre  trop  aslongné  de  la  raison,  car  quant  aux  deux  mil 
hommes  de  pied  pour  la  seurete  de  son  estât,  je  vois  que  vous  en 
payez  bien  autant  au  Duc  Octavio  (4)  encores  que  vous  ne  luy  en 
eussiez  promis  que  15  cens  et  scachans  cela  2  cens  chevaulx  legiers, 
la  différence  de  l'ung  estât  a  l'aultre,  et  de  leurs  forces  et  puissances 

(i)  Retrgio,  ville  forte  à  25  kilomètres  de  Modène. 

(2)  Rosset  (Alphonse),  coadjuteur  de  l'Evéque  de  Ferrare  avec  succession 
future,  depuis  154S,  fut  pourvu  de  cet  Evêché  en  1563,  mourut  le  25  février  1577. 
[Italia  sacra,  t.  n,  p.  487,  N°  37). 

(3)  Boulevards. 

i)  Octave  Farnèse,  deuxième  tils  de  Pierre-Louis  Farnèse,  né  en  1524.  Gendre 
de  Charles-Quint,  dont  il  avait  épousé  en  1538  la  fille  naturelle  Marguerite  d'Au- 
triche, veuve  d'Alexandre  de  Vïédicis;  mourut  le  21  septemhre  1586. 


38  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1553] 

est  notoire  a  chascun,  et  quant  aux  hommes  d'armes,  vous  les  paie- 
riez aussi  bien  en  France  que  icy  et  si  en  tirerez  plus  de  service  que 
des  2  cens  chevaulx  legiers,  et  donneront  oultre  cela  grande  réputa- 
tion a  voz  garnizons  et  a  voz  forces  de  deçà,  car  ce  nom  d'hommes 
d'armes  françois  y  est  fort  estimé.  Quant  a  pentionje  scay  bien,  Sire, 
que  6  mil  escuz  plus  ou  moins  en  telle  marchandise  ne  vous  sont 
rien  une  fois  Tan  ;  quant  aux  villes,  places,  et  pays,  dont  je  faiz  tant 
le  libéral  en  mes  articles,  Dieu  mercy.  je  ne  luy  présente  rien  du 
vostre  et  faictz  bon  marché  de  ce  que  vous  ne  tenez  point  encores  en 
payant  toutefoiz,  mais  quant  vous  l'auriez  bien  dez  demain  conquis; 
je  crois  que  vous  auriez  besoing  de  trouver  homme  qui  acheptat 
ainsi  des  villes  pour  vous  fournir  argent  a  maintenir  la  guerre  et 
poursuivre  la  conqueste  des  autres  ;  par  ainsy  mon  trop  parler  et  pré- 
senter se  peult  excuser,  réduire  et  modérer  a  bien  peu  de  chose,  veu 
mesmement  les  commoditez  que  vous  pouvez  tirer  de  ce  prince,  car 
en  premier  lieu,  Sire,  ce  sera  grande  réputation  et  faveur  en  vos 
affaires  d'avoir  ung  si  puissant  serviteur  en  ce  pays,  qui  ne  fera 
jamais  rien  contre  vostre  volonté,  quelque  grand  pouvoir  que  vous 
lui  bailliez,  car  il  est  homme  de  bien  et  aimé  son  honneur  et  je 
vous  respondz  bien,  sur  ma  teste,  que  vous  le  trouverez  saige  et 
bien  conduisant  voz  affaires;  il  vous  accommode  de  25  pièces 
dartyllerie  par  prest  et  sans  argent,  que  vous  ne  scauriez  amener 
de  Piedmont  ici  sans  grosses  despenses,  ny  les  faire  fondre  icy 
de  cet  esté,  ny  les  monster,  sans  quil  vous  coustat  beaucoup, 
oultre  le  retardement  que  l'armée  feroit  pour  l'attendre,  il  vous 
faict  maistre  de  son  état,  comme  s'il  estuit  au  milieu  de  la  France, 
lequel  estât  au  milieu  de  l'Italie,  grand,  riche  et  fertile  et  ou  il  y  a 
des  plus  fortes  places  qu'on  puisse  veoir  ailleurs,  et  non  seullement 
il  vous  en  accommode,  mais  il  prive  voz  ennemi/,  quelz  quilz  soient, 
d'en  pouvoir  tirer  aulcune  commoditez,  vivres,  ne  passaige,  chose 
que  j'estime  bien  fort,  car  il  leur  fauldra  chercher  chemin  nouveaulx 
et  prendre  de  terribles  destours  pour  aller  a  Milan,  a  Rome  el  a 
\aples.  Quant  aux  conditions  que  je  y  ay  mises  de  ne  se  déclarer  m 
vous  ne  voulez  faire  passer  armée  en  Italie,  et  consigner  la  paye  de 
lad.  armée  pour  3  mois,  si  vous  vouliez  perdre  Sienne,  je  lui  voulois 
oster  toutes  occasions  de  crainte  et  de  difficultés  el  faire  en  cela  le 
neulral.  Car  aussy  ne  seroit  il  raisonnable  quil  se  meist  en  ceste 
peine,  et  en  danger  son  estât  s'il  pensoil  lEmpereur  supérieur  el 
triomphant  avec  armée  en  Italie,  el  vous  n'y  avoir  que  des  garni- 
zons. Si  je  n'y  ay  mis  contribution  d'argent,  pour  sa  part,  aux  guer- 
res et  conquestes,  c'est  uni:  article  dont  je  u'aj  voulu  aulcunemenl 
approcher,  car  il  penseroit  que  l'on  ne  le  cherchast  que  pour  son 
argent  et  pour  faire  voz  guerres  a  ses  despen/.,  el  c'est  la  chose  du 
monde  qui  le  feroit  le  plustost  retirer;  toutesfuis.  mon  intention  el 


[AVRIL   1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  39 

mon  espérance  est  bien  de  s'ayder  de  ses  deniers  en  une  nécessité 
sans  en  faire  mention,  car  dez  quil  sera  entre  en  déclaration,  son 
intérêt  le  pressera  assez   de  ne   laisser  mal  aller  voz  affaires   par 
faulte  d'argent.  Quant  au  traitement  du  sr  Camillo  (1)  et  du  sr  Bap- 
tistin  Strozzy,  ce  sont  deux  personnes  auquel  je  voyais  que  le  srDuc 
a  grande  affection,  quil  estime  gens  de  grand  service,  et  pensoit  que 
ce  vous  seroit  grand  plaizir  et  grand  repoz  d'avoir  icy  ung  tel  chef 
accompagne  de  grands  et  bons  ministres,  de  sorte  que  pour  les  guer- 
res de  deçà,  vostre  Majesté  ne  seroit  forcée  de  se  purger  de  4  ou  5 
grandz  personnaiges  qui  sont  nécessaires  et  bien  sceantz  auprès  de 
V.  M.,  avec  lesquelz  vos  pourriez  travailler  l'Empereur  du  coste  de 
Flandres,  tant  qu*on  luy  face  ung  jour  rendre  l'esperit  et,  après  tout 
cela,  Sire,  ma  principale  mire   n'a   esté  que   de  le  y  faire  entrer  a 
quelque  condition   que  ce   peust,   scacbant  bien   quil  fault  grande 
tentation  et  occasion  pour  ce  faire,  car,  pour  son  particulier,  il  n'a 
aulcune  nécessité  qui  l'en  contraigne,  1  Empereur  ne  luy  demande 
rien,  mais  plustot  le  caresse  et  luy  a  rendu  Bresseil,  il  ne  craint 
point  d'être  assailly  ne  provocqué  a  guerre   par  aulcuns  Princes 
d'Itallie  et  n'y  en  apparence  le  proffît  ne  le  gain  d'argent  ne  le  peult 
aussy  mouvoir,  car  il  n'en  a  que  trop  et  en  a  moins  faulte  que  prin- 
ces d'Italie,  ne  autres   qu'on   congnoisse  aujourdhuy  ;    il  vivait  en 
repoz  et  se  va  mettre  en  ung  grand  travail  ;  je  dis   par  la,  Sire,  que 
s'il  veut  passer  oultre,  V.  M.  luy  en  aura  très  grande  obligation  et 
que  toutes  ces  raisons  me  doivent  servir  pour   ma  justification,  et 
sy  l'on  trouve  que  j'ay  fait  erreur  en  mes  articles,  il  est  vray  qu'il  y 
a  beaucoup  de  choses  que  je  rabillerois  bien  s'il  falloit  venir  a  les 
conclure  a  bon  escient  et  ny  ay  pas  mis,  pour  la  première  ouverture, 
beaucoup  de  conditions  et  considérations  qui  y  sont  nécessaires; 
car,  a  la  vérité,  je  les  lait  a  la  haste  et  pour  ung  essaye  seullement. 
Je  pense,  Sire,  que  V.  M.  m'en  mandera  bientôt  son  bon  plaisir  et 
volonté,  suivant  laquelle  je  feroy  mon  livre  de  retractation,  s'il  en 
sera  besoing  et  mettroy  peine  de  me  passer  par  vostre  intention  de 
ma  part;  cependant  je  ne  parleray  point  audit   sr  Duc  du   prêt  de 
2  cens  mil  escuz,  affîn  que  l'une  chose  ne  gaste  l'autre  et,  si  je  suis 
presse  de  ma  créance,  je  ne  luy  diray  de  votre  part  sinon  parolles 
generalles,  remettant  le  tout  a  quant  V.  M.  aura  fait  responce  auxdits 
articles;  d'une  chose  me  suisje  advisé,  sur  laquelle  jevouldrois  bien 
aussy  entendre  voslre  volonté  et  que  vostre  conseil  y  pensast,  les 
2000  hommes  de  pied  de  sa  garnison,  selon  la  solde  que  vous  donnes 
par  deçà  ne  monte  guères  moins,  comprins  tous  estatz  el  appoincte- 
mentz  de  8000  escuz  le  mois,  qui  est  raison  de  quatre  escuz  pour 
homme  ;  luy,  en  ses  garnisons  donne  moins  de  solde  et  plus  petitz 

(1)  Camillo  Martinengo. 


40  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1553] 

appoinctementz  et  sy  fait  35  jours  au  mois,  par  quoy  je  vous  pen- 
serois  bien  espargner  12  ou  15  mil  escuz  par  an  en  ceste  article  seul 
si  l'ontrouvoit  bon  de  luy  bailler  l'argent  de  ladite  garnison  et  quil 
les  feist  payer  par  ses  trésoriers  et  officiers,  et  je  croy,   au  compte 
que  j'en  foiz  que  vous  en   seriez  quitte  pour  6  mil  5  cens  escuz  le 
mois  ou  7  mil  au  plus  a  Parme  et  a  la  Mirande  (1)  souloient  se  con- 
tenter ainsy  de  petites  sommes  solde,  mais  depuis  que  vostre  argent 
trocta  et  que  voz  vieilles  bandes  y  arrivèrent,  tout  le  monde  voulust 
estre  de  leur  livrée,  je  ne  scay   s'il  le   vouldroy  ainsi,  mais  s'il  est 
trouvé  bon  j'en  parleray  et  luy  feray  bien  congnoistre  que  ce  sera 
vostre  advantaige  et  le  sien,  et  sy  vous  envoyé  icy  personnaige  de 
plus  grande  qualité  et  soffisance  que   moy   pour  traicter  ce  négoce, 
je  ne  fauldray  point  de  luy  bien  aider  de  ce  que  je  pourray  et  scau- 
ray,  je  croy  que  pour  parvenir  a  bonne  fin  et  a  effect  de  ceste  pra- 
ticque  V.  M.  ne  fauldra  pas  de  faire  entendre  audit  Duc  vostre  déli- 
bération d'armer  grossement  par  deçà  et   de  vouloir  continuer  la 
guerre  en  ceste  Italie,  car   il  faict   bien  son  compte,  s'il  entre  en 
ceste  praticque,  quil   ne  lui    fault  dormir  de  bon   sommeil  quil  ne 
voye  les  Espagnolz  hors  d'Italie  et  ne  s'y  veult  pas  mettre  pour  ne 
rien  faire,  Je  luy  ay  fait  entendre  ce  qu'il  vous  plaist  m'escripre  du 
renfort  de  Piedmont  et  de  la  descente  des  Souisses,  je  vous  asseure, 
Sire,  que  vous  commencé  par  cette  descente  d'allemandz  par  le  pays 
des  Vénitiens  faisant  courir  le  bruit  qu'on  les  envoyé  a  Naples  pour 
les  joindre  avec  des  Italiens  et  favoriser  l'armée  de  mer,  chose  qui 
sera  aisément  crue,  on  leur  fera  incontinent  tourner  bride, et  s'il  est 
besoing  les  mettre  tous  sur  le  pays  jusqua  Bresseil  ou  l'on  pourroit 
avoir  envoyé  8  ou-  dix  canons  devant  dont  on  ne  prendra  aucune- 
ment soupçon,  d'aultant  que  Monsieur  le  Duc  y  envoyé  grande  quan- 
tité d'artillerie  pour  bien  fournir  sa  place  et  en  une  nuit  on  verrait 
le   canon  planté  devant   Crémone  (2),  et  ne  scay  si  Domp  Ferrand 
seroit  par  avanture  a  temps  de  le  secourir,  pour  le  moins  sait  on 
bien  quil  est  sans  argent,  sans  crédit  et  -an-  -rnsde  guerre,  et  l'effet 
principal  que  je  prétendz  seroit  tout  bien  asseuré,  car  la  force  prin- 
cipalle  que  vous  vouldriez  envoyer  de  Piedmont  et  passeroit  par  le 
beau  grand  chemin  sans  contradiction  et  netoyerait  tout  le  Parme. 
san  de  ces  petitz  Chasteaulx  qui  y  sont,  sant  empeschement,  et  par 
aventure  feroit  d'autres  exploits  en  ce  voyage,  que  le  temps  apporte, 
lesquelz  on  n'auroit  (3)  ne  espéré,  et  si  une  fois  on  peull  avoir 

par  deçà   un  corps   d'allemandz   et   de  vostre  gendarmerie,  alors 
diroiton  que  vous  voullés  faire  guerre  en  Italie  et  verraton  parler 

(1)  La  Mirandole. 

(2)  Crémone,  ville  fortifiée  au-dessus  de  l'embouchure  de  l'Adda. 

(3)  Mot  laissé  en  blanc  dans  le  texte. 


[avril  i553]  dominiqi'k  nu  gabrë  Kï 

clair  beaucoup  de  gens  par  deçà  qui  maintenant  n'osent  ouvrir  la 
bouche.  Il  n'est  plus,  Sire,  le  temps  que  l'on  disoit  que  l'Italie  estoit 
le  cimetière  des  françois,  vous  y  avez  deux  ou  trois  grands  pays 
dont  vous  estes  maistres,  ou  voz  armées  peuvent  séjourner,  se 
rafreschir  et  retirer,  et  praticquera-t  on  quelquesfois  les  remeides 
de  l'Empereur  de  les  faire  vivre  a  discrétion  dans  les  terres  de  vos- 
tre  ennemy  quant  il  n'a  point  d'argent  pour  les  payer.  Les  françois 
ne  sont  plus  insolans  comme  ils  soloient  estre  et  sont  désirez  en 
Italie,  et  au  contraire  les  Espaignolz  hays  de  Dieu  et  du  monde,  et 
puis,  Sire,  vostre  fortune  est  telle  et  si  grande,  que  tout  s'inclinera 
devant  vous  et  serait  dommage  sarrester  en  si  beau  chemin.  L'Empe- 
reur se  trouve  bien  peu  d'Espaignolzen  Italie  et  moins  d'Allemandz, 
scaurois  croire  que  s'il  en  avoit  le  moyen  comme  il  a  eu  autrefois 
de  150  a  200  mil  allemandz,  qu'on  n'ouyt  déjà  parler  de  sa  levée,  de 
sorte  que  je  pense  qu'il  n'y  envoyera  point  et  ainsi  si  vous  pouvez 
faire  armée  pour  estre  une  fois  maistre  de  la  campaigne  en  Italie, 
en  ce  temps  que  personne  ne  luy  vouldra  ayder,  j'ay  ferme  espé- 
rance que  ce  jeu  sera  bientost  finy. 

Sire,  cette  lettre  gardée  jusques  a  aujourd'huy  que  Monsieur  le 
Duc  m'a  envoyé  le  paquet  par  son  ambassadeur  par  lequel,  comme 
il  m'escript,  Vostre  Majesté  entendra  toutes  les  particularitez  quil  a 
relire  du  Duc  d'Albe,  lesquelles  je  nereddiray  point  icy,  il  m'escript 
quil  a  grande  envie  d'estre  icy  de  retour  et  que  nous  avons  bien  a 
parler  ensemble,  cependant  j'espère  bien  avoir  de  voz  nouvelles; 
il  craint  que  Mr  le  Cardinal,  son  frère  (1),  ne  se  contente  point  destre 
recompensé  en  benetice  de  revenu  de  Bresseil,  pensant  quil  espère 
bien  cela  de  Vostre  Majesté,  et  plus  grand  choses  pour  les  services 
quil  vous  fait,  et  si  ce  n'esloit  chose  qui  desplut  a  V.  M.,  il  desireroit 
fort  pour  recevoir  vostre  libéralité  bien  complète  quil  vous  pleust 
recompenser  ledit  sieur  Cardinal  sur  quelque  terre  temporelle  pour 
le  jouir  seullement  a  sa  vie,  toutesfois  il  proteste  que  V.  M.  ne  le 
trouve  bon  quil  se  contentera  de  ce  quil  vous  plaira  et  me  prie  faire 
bon  office  envers  Monseigneur  le  Conneslable  si  vous  le  voulez  bien 
obliger,  Sire,  et  avez  intention  vous  servir  et  prévaloir  de  luy.  Je 
serois  d'advis,  soubz correction,  qu'il  vous  pleust  lui  accorder  cela, 
car  Monsieur  le  Cardinal  vous  est  si  affectionne  que  quant  vous 
prendriez  tout  son  temporel,  etlespirituel  avec,  pour  vostre  service, 
il  n'y  aura  jamais  regret  et  pourrez  accommoder  cela  avec  luy. 

De  Ferrare  ce  8  avril  1553. 

Sire,  en  fermant  ce  paquet  j'en  ay  receu  un  de  Monsieur  de  Mire- 
poix  qui  vous  escript  du  parlement  des  legalz  pour  le  l'ait  de  la  paix 
en  poste;  cela  me  fait  croire  que  l'Empereur  la  désire  fort  et  que  le 

(1)  Le  cardinal  de  Ferrare. 

(i 


42  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1553] 

Pape  n'en  feroit  si  grande  presse  s'il  n'estoit  trouvé  bon  de  l'Empe- 
reur. J'entendz  par  la  mesme  despèche  que  le  pauvre  M.  de  Mire- 
poix  est  si  malade  quil  n'a  peu  signer  la  lettre  quil  m'escripvoit;  Dieu 
luy  donne  guerison,  car  vous  avez  en  luy  ung  bon  serviteur. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20642,  fol.  43)  (copie). 


GABRE   AU    DUC    DE    FERRARE 

27.  —  [Ferrare],  14  avril  1553.  —  Monseigneur.  Je  ne  faillys  point 
denvoyer  votre  paquet  a  la  court  par  le  corrier  exprès  que  je  y 
voulois  depescher,  etescripviz  de  la  meilleur  sorte  que  jesceuz  de  la 
recompence  de  monseigneur  le  Cardinal  en  temporel,  de  quoy,  je 
spere  que  le  Roy  vous  gratifyera  voluntiers  et  mesmement.  veu  la 
bonne  volunte  et  affection  que  sa  Majesté  vous  porte  de  la  quelle 
vous  serez  amplement  informe  par  le  sr  Pierre  Strossy  (i  )  qui  sera 
ce  matin  arryve  devers  vous,  avec  ample  information  de  la  volunte 
du  Roy  sur  les  propos  que  vous,  monseigneur,  et  moy,  avons  tenuz 
ensamble  sur  les  quelz,  monseigneur,  je  vous  supplye  vous  vouloir 
bien  resouldre  et  accomoder  nostre  intention  a  celle  de  sa  Majesté, 
de  la  quelle,  sil  plaist  a  Dieu,  vous  naurez  jametz,  si  non  toute  conso- 
lation et  grandeur  pour  votre  maison. 

Monseigneur,  Je  scay  bien  que  quant  je  vous  feiz  requeste  dez  der- 
niers xxvm  escus  que  javois  icy  baille  a  voz  gens,  jobligeois  ma  teste 
de  les  vous  rendre  dans  huyl  jours,  el  en  escus  au  soleil.  Jescripviz 
au  Roy  votre  libérale  et  cortoise  responce,  mais,  toutesfoys,  je  nay 
point  encores  touche  l'argent,  et  est  entre  les  mains  dez  vostres. 
.Nous  en  avons  plus  de  besoing  que  jametz  pour  secourir  Sienne  et 
oster  a  monsieur  le  cardinal  et  aux  m  iny  s  très  du  Roy  toute  occa- 
sion de  condessendre  a  aulcun  accord  qui  ne  soit  honorable  pour  le 
Roy,  a  quoy  une  grande  nécessite  d'argent  les  pourroit  induyre. 
Toutes  foys  je  nay  voulu  reprendre  les  dit/  \\\m  escus  sans  nouvel 
commandement  de  vous,  et  délivrer  ma  teste  du  dangier  en  \> 
quanl  ma  promesse  réintégra  comme  il  esl  par  mis,  car  je  veoy  bien 
quil  est  impossible  de  vous  rendre  cest  argent  sinon  du  premier 
fons  qui  vieillira  dt;  France.  El  pour  ceste  cause,  monseigneur,  il 
vousplairra  en  mander  vostre  volunte,  car  vous  ne  ferez  pas  moindre 
secours  au  Roy  a  ceste  foiz  que  vous  avez  faicl  aux  aultres  besoingz, 
et  mesmement  voyant  dequel  bon  pied  le  Pape  y  va,  car  son   audi- 

i    Pierre  Strozzi,  d'une  illustre  famille  de  Florence,  cousin  germain  de  la  reine 

Catherine  île  Médicis.  il  s'était  mis  au  service  de  la  France:   fui  nommé  général 

galères,   puis  maréchal  de  France,   il  dirigea  l'expédition  organisée   pour 

secouru-  Sienne  en  1554,  lui  battu  en  1555  à  Lucignano,  commanda  eu  1555  les 

troupes  iiu  Pape  ci  mourut  en  1558  .m  siège  We  Thionville. 


[AVRIL   15531  nOMINIQUE  DU   gabre  43 

teur  Fanlouche  (1),  parce  que  mescript  monsp  le  Cardinal,  du  vie,  na 
propose  aultres  conditions  daccord,  sinon  que  l'Empereur  quicteroit 
tout,  pourveu  que  le  Roy  feist  le  semblable  et  quil  se  levast  des 
armes  et  de  la  protection,  a  quoy  monsr  le  cardinal  na  faict  aultre 
responce,  sinon  quil  ne  pouvoit  accorder  cela  sans  en  advertir  sa 
majesté,  ne  voulant  du  tout  rompre  la  praticque,  mais  par  ce  moyen 
la  lentretenyr  encores  quelques  jours,  et  monsr  de  Myrepoix  mescript 
que  le  Pape  vouloit  venvrceste  semayne  a  Viterbe  (2)  pour  s'approu- 
cber  des  afferes  de  Sienne  quil  veult  composer,  bravant  quil  veult 
veoyr  a  qui  il  tiendra  pour  se  résouldre.  Dieu  veuille,  monseigneur, 
que  mainclenent  sur  les  bons  coupz  il  ne  se  résolve  a  notre  desa- 
vantaige  et  quil  ne  se  mec  te  a  nous  empescher  passaige  et  argent. 
11  y  a  deux  moys  que  jay  pronousticque  et  escript  cela  au  Roy,  Dieu 
veuille  quil  en  advienne  aultrement.  Rien  vous  veulx  je  faire  entendre 
que  les  médecins,  a  ce  que  mescript  monsr  lambassadeur  de  Venize, 
asseurentque  monsr  de  Myrepoix  na  scauroit  vivre  jusques  a  la  fin  de 
ce  moys.  Il  nous  a  escript  deux  lettres  quil  n'a  peu  signer  pour  une 
grosse  fiebvre  quil  avoit,  et  les  a  faict  signer  a  .N'iquet,  de  sorte  que 
malade  ou  mort,  il  ny  a  la  plus  personne  que  puisse  parler  au  Pape 
ny  donner  ordre  a  la  conduyte  des  deniers  qu'on  envoyé  a  Sienne, 
et  pource  que  je  veoy  que  le  Roy  sera  tousiours  très  ayse  que  vous 
preniez  l'auctorité  de  commander  en  sez  afferes.  Je  croy  quil  seroit 
bon  que  vous  et  le  sr  Pierre  Slrossy  en  parlissiez  ensemble  pour  y 
envoyer,  quelque  gentilbomme  denlendemant,  en  attendant  que  le 
Roy  y  aye  envoyé  nions,  de  Lansac  ou  aultre  successeur.  Je  finiray 
aujourdhuy  toutes  mes  purgations,  et  si  vous  ne  venez  icy  bientost, 
monseigneur,  je  suis  bien  homme  pour  vous  aller  trouver  et  veoyr 
vostre  fortyfycation  de  Bresseil.  Il  vous  plairra  me  mander  vostre 
volunte  en  me  recommandant,  monseigneur,  très  humblement  a 
vostre  bonne  grâce. 

De  Ferrare  le  x\iine  avril  155.3. 

Monseigneur.  Je  vous  envoyé  une  lettre  que  monsieur  lambassa- 
deur de  Venize  mescript  par  la  quelle  il  vous  plairra  veoyr  tout  ce 
quon  peult  espérer  de  notre  armée  et  de  la  turquesque  dont  il  plairra 
a  vostre  excellence  que  le  seigneur  Pierre  (3)  aye  communication,  la 
quelle  lettre  vous  plairra,  monseigneur,  après  me  renvoyer. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.)- 

(1)  Frédéric  Fanturcio,  de  famille  noble  'le  Bologne,  auditeur  île  Rote,  mourut 
à  Rome  en  1561.  Il  était  l'ami  et  le  confident  de  Carafa.  Voir  Duruy,  Le  cardinal 
Carlo  Carafa.  0/>.  cit.,  p.  205). 

(2)  Viterbe,  ville  d'Italie,  à  90  kit.  de  Rome. 

(3)  Pierre  Strozzi. 


NÉGOCIATIONS  DE  [AVRIL  1553] 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

28.  —  [Ferrare],  15  avril  1 553.  —  Monseigueur,  Je  suis  prie  de 
lieu  ou  je  nescaurois  rien  reffuyer  de  vous  faire  une  requeste  qui 
est  de  faire  miséricorde  a  ung  pouvre  contadyn  qui  est  icy  en  voz 
presons  nomme  Jehan  Marye  de  Byasio,  prévenu  de  quelque  homy- 
cide  fortuit  ou  a  tout  le  moyns  ung  peu  excusable.  Il  a  ung  père  bien 
vieulx.  Jentendz  quil  a  aussi  femme  et  enfantz,  lesquelz  desireroient 
quil  vous  pleust  commuer  la  vye  en  une  gallere  a  temps  ou  perpé- 
tuelle ou  si  vous  vouliez  plustost  entendre  la  qualité  du  maléfice 
quil  vous  pleust  mander  a  monsr  vostre  potestat  de  diferer  le  juge- 
ment et  lexécution  jusques  a  vostre  retour.  Cest,  monseigneur,  la 
plus  belle  partie  que  dieu  aye  donne  aux  princes  que  de  pouvoir 
faire  miséricorde  et  despencer  sur  la  sévérité  dez  loix.  Et  je  vous 
supplye  très  humblement  en  vouloir  user  pour  ce  coup,  pourveu  que 
le  cryme  nen  soit  indigne  et  notre  seigneur  vous  en  scaura  bon  gre 
et  aussy  je  vous  en  seray  très  oblige  serviteur. 

De  Ferrare  lexvme  avril  155;*. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DIX    DE   FERRARE 

29.  —  [Ferrare],  1~  avril  1553.  —  Monseigneur,  .le  croy  que  le 
capitaine  Jheronimo  de  Pize  vous  aura  parle  en  passant,  allant  a 
Panne.  Je  croy  bien  quil  ne  nous  cuydoit  pas  la,  car  il  ma  envoyé 
ung  petit  paquet  de  monsieur  le  cardinal  pour  votre  excellence,  le 
quel  sera  avec  la  présente.  Mon  dict  sieur  le  cardinal  mescript  du 
xme  que  les  afferes  de  Montalcino  se  portent  si  bien  quon  peult  espé- 
rer quil  sera  la  ruyne  des  ennemys,  car  ilz  nont  plus  desperence,  a 

labaterye;  ont  essaye  et  failly  une  myi I  eD  recommencent  une 

aultre  qui  leur  reussyra  aussi  mal.  Si  vous,  monseigneur,  estes 
contant  comme  je  vous  ay  dernièrement  escript,  je  ferois  partir  dez 
demain  xxvm  escus  pour  la  paye  de  may  qui  nicrtra  noz  gens  en  si 
grand  cueur  que  Ion  pourra  tenyr  les  afferes  du  Roy  estre  en  une 
grand  seurete  et  aurez  faict  en  cela,  monseigneur,  ung  très  grand 
secours  a  sa  Majesté  et  a  ses  afferes,  de  quoy  je  vous  supplye  très 
humblement. 

De  Ferrare  le  xvne  avril  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


AVRIL  1533]  DOMINIQUE  DU  GABRE  45 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

30.  —  [Ferrare],  18  avril  1553.  —  Monseigneur,  Jattendz  en  dévo- 
tion responce  de  ce  que  jay  escript  a  vostre  excellence  du  prest  de 
xxvm  escus,  espérant  que  depuis  la  venue  du  sieur  Pierre  vous  naurez 
pas  dimynue  mais  plus  tost  augmente  laffection  que  vous  aviez  au 
bien  des  afferes  du'Roy.  Jay  eu  ce  matin  nouvelles  de  Ravenne  (1) 
comme  le  cardinal  Sainct  George  (2)  y  est  arryve  et  tn  doibt  partir 
demain  matin  pour  venyr  icy  et  dicy  en  France.  Je  croy,  monsei- 
gneur, que  vous  eussiez  bien  voulu  le  veoyr  et  jen  ay  faict  advertir 
le  sr  Batistin  présupposant  bien  que  en  vostre  absence  vous  vouldrez 
quilz  le  logent  et  le  caressent.  Cest,  monseigneur,  tout  ce  que  je 
vous  puis  dire  pour  cest  heure. 

De  Ferrare  le  xvme  Avril  1553. 

Monseigneur,  depuis  ceste  lettre  escripte,  le  seigneur  Batistin  ma 
porte  la  vostre  du  xvie  davril  et  ay  veu  aussi  ce  quil  vous  a  pieu  luy 
donner  charge  me  dire  doht  je  baise  très  humblement  les  mains  de 
vostre  excellence,  et  vous  asseure  que  vous  avez  conserve  deux  foiz 
Sienne  et  je  le  precheray  comme  je  doibz,  de  sorte  quilz  seront  bien 
sourdz  silz  ne  lentendent  a  notre  court,  bien  que  mon  crédit  y  soit 
dimynue  et  moy  presque  ruyne,  si  vous,  monseigneur,  ny  remé- 
diez. Jay  bien  fort  grand  désir  de  vous  parler  et  vous  supplye  très 
humblement,  monseigneur,  navoir  point  moyns  de  volunte  de  bien 
l'aire  que  vous  aviez  du  temps  de  la  comedye,  encores  que  ce  que 
vous  avez  ouy  depuis  soit  différant,  remectant  le  surplus  qui  est  bien 
long  a  quant  nous  aurons  ceste  grâce  de  vous  reveoyr. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   AU    ROI 

31.  —  [Ferrare],  21  avril  1553.  —  Sire,  La  venue  du  sr  Pierre 
pardeça,  et  après  de  Mr  de  Lanssac,  auront  esté  s'il  plaist  a  Dieu 
utilles  pour  vostre  service  ayant  voz  ministres  cogneu  ou  entendu 
par  eulx  une  partye  de  vostre  volunte  sur  les  afferes  d'Italie.  Il  est 

(1)  Ravenne,  chef-lieu  de  la  province  de  ce  nom,  sur  le  Montone,  à  6  kilomè- 
tres de  son  embouchure,  dans  l'Adriatique.  Place  fortifiée  de  la  Romagne. 

(2)  Jérôme  Capiferi  ou  Capo  di  Ferro,  romain,  né  le  22  juin  1503,  nonce  en  France 
en  1540;  évèque  de  Nice  1542-46;  envoyé  en  France  en  1547  ;  cardinal  du  titre 
'le  Saint-Georges  au  voile  d'or  (19  décembre  1544]  ;  légat  en  Romagne  sous  Paul  III, 
Jules  III  et  Marcel  II;  mort  pendant  le  Conclave  en  1559. 


40  NÉGOCIATIONS    l'E  AVHIL    1553] 

vray,  Sire,  que  pour  ne  faillir  a  la  submission  et  révérence  que  je 
doibz  a  Vostre  Majesté,  je  confesseray,  puis  qu'ainsi  elle  Ta  juge  que 
jay  failly  lordement  a  la  praticque  de  Monsr  le  Duc  de  Ferrare  (1), 
mais  non  pas  s'il  vous  plaist  que  chose  que  jaye  faicte  ne  dicte,  porte 
maintenant  ne  pour  ladvenir  aulcun  dommaige  ne  préjudice  en  voz 
affaires.  Ma  faulte,  Sire,  s'il  y  en  a,  procède  d'une  maladie  commune 
a  tous  voz  serviteurs  et  ministre  en  Itallye.  Car  il  nous  semble  quil 
ny  a  aullre  monde  que  ce  pays  et  que  toutes  choses  laissées  vous 
deves  entendre  a  vous  en  faire  maistre  ;  porquoy  nous  ne  parlons 
que  d'expedientz,  de  praticques  des  guerres  et  d'armes  pour  vous  y 
faire  trionfer.  Je  ne  vous  ennuyeray  point,  Sire,  de  mes  excuses  et 
de  mes  deffenses  que  je  pense  avoir  bien  pertinentes,  mais  vous 
supplieray  tant  et  si  humblement  que  je  puis,  de  pardonner  ma  trop 
grande  affection  qui  m'a  ainsi  transporte  a  vouloir  bien  faire,  et  je 
serai  doresnavant  plus  retenu  en  telles  choses  et  mettray  peine,  Sire, 
en  aultre  endroit  de  vous  faire  tant  de  service  quil  elîacera  toute 
Terreur  dont  on  me  veult  reprendre,  me  remettant  au  surplus  de 
vos  affaires  a  ce  que  j'en  escriptz  a  Monseigneur  le  Connestable  et 
quil  vous  plaira  entendre  du  sr  Pierre,  lequel  en  est  si  sollisemment 
informé  quon  luy  feroit  tort  de  vous  en  escripre  plus  long  discours. 
De  Ferrare  ce  xxvne  avril  1553. 

(Bibl.  liât.,  Fr.  20453,  f°  167)  (copie). 


(iABHE    AU    CONNÉTABLE 

32.  —  [Ferrare],  J~  avril  155$.  —  Monseigneur,  je  vous  mercie 
très  humb'ement  de  ce  quil  vous  a  pieu  m'escripre  et  faire  entendre 
par  le  sr  Pierre,  et  depuis  par  Mr  de  Lanssac,  et  pour  n'estre  point 
obstiné  et  contracter  contre  ce  que  vous  avez  desja  trouvé  maul- 
vais,  mais  plus  tost  me  humilier  et  repentir  de  la  faute  (2)  que  je  ne 
cuide  pas  avoir  faicte,  je  vous  supplye,  Monseigneur,  que  cela,  bien 
ou  mal  quel  qu  il  suit,  me  soit  pardonne  el  quej'en  puisse  avoir  mou 
esprit  en  repos,  car  Dieu  mercy,  il  n'ya  rien  de  gasté  mais  plus  tost 

i  Illusion  aux  négociations  que  venait  d'entamer  du  Gabre,  pour  faire  entrer 
le  Duc  dt'  Ferrare  dans  une  alliance  avec  la  France.  Voir  à  l'appendice  qui  suit 
le  texte  du  projel  d'alliance  en  date  du  13  mars  1553  . 

Du  Gabre,  à  l'occasion  de  ce  traité,  fut  blâmé  par  ses  contemporains,  tourné  en 
dérision,  accusé  «le  trahison.  Quelques  ani s  plus  tard,  cependant,  le  traité  éla- 
boré par  du  Gabre  fui  repris,  sans  qu'on  y  apportai  aucune  modification  appa- 
rente, par  les  cardinaux  «le  Tournon  el  <le  Lorraine,  ainsi  qu'on  le  verra  au 
cours  de  la  présente  publication.  G'csl  là  la  preuve  i|ue  l'Évéque  de  Lodève  avait, 
au  début  île  son  ambassade,  une  très  exacte  conception  des  intérêts  fran 
Italie. 

_    Nouvelle  allusion  au  projet  de  traite  d'alliance  avec  Hercule  II. 


[AVRIL    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  47 

amendé  comme  vous  entendrez  par  le  sr  Pierre  qui  s'en  va  bien 
informé  du  tout.  Je  n'ay  rien  présente  a  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare 
de  la  part  du  Roy  ni  de  moymesme  et  ay  seullement  mis  par  escript 
les  choses  auxquelles  je  luy  voyois  quelque  affection,  et  que  j'avois 
tire  de  bouche  de  luy  en  devisant  entre  nous,  retrangnant  le  tout,  de 
sorte  que  ce  qu'il  vouldroit  avoir  en  don,  je  le  luy  vouloys  faire 
achepter  bien  chèrement,  espérant  tirer  argent  de  luy  par  ce  moyen 
sur  les  conquestes  qui  sont  a  faire,  ayant  veu  que  tous  aultres  expé- 
dients que  je  luy  avoismis  en  avant  a  ceste  fin  ne  pouvoientle  mou- 
voir et  ne  contiennent  les  articles,  don  d'ung  poulce  de  terre,  mais 
bien  de  luy  faire  payer  de  Crémone  ung  million  d'or,  a  vous  qui  ne 
l'avez  pas  encores,  lequel  il  a  peu  aultrefois  avoir  pour  4  cent  mil 
escus  de  lEmpereur  qui  le  possède;  et  quant  aux  aultres  places  nom- 
mées auxdits  articles,  s'il  avoit  tout  largent  qui  est  en  Italie  il  n'en 
scauroit  avoir  achepte  la  moitié,  mais  toutesfois  cela  luy  rendoit  le 
traité  un  peu  honorable  et  de  quelque  espérance.  Quant  a  Parme,  je 
me  suis  bien  garde,  de  mettre  une  seulle  parolle  qui  puisse  offencer 
lhonneur  du  Roy  ny  la  protection  quil  a  prinse  du  Duc  Ottavio,  j'au- 
rois  grand  honte  dy  avoir  pensé  ;  quant  le  Duc  Ottavio  mesmes  ver- 
roit  larticle,  je  suis  seur  quil  ne  le  scauroit  trouver  maulvais  et 
l'accorderoit,  sil  ne  tenoit  que  a  cela  que  le  Duc  de  Ferrare  fut  au 
Roy,  car  lhors  il  pourroit  dormir  seurement  de  sa  place  et  se  tien- 
droit  tout  assure,  voyant  un  voysin  si  puissant  affectionne  et  oblige 
a  sa  deffence,  et  en  disant  seullement  quil  ne  veult  prendre  recom- 
pense de  Parme,  le  Roy  est  obligé  de  toutes  ses  promesses,  et  s'il 
vous  plaist  rebvoir  et  considérer  ce  qui  en  fait  mention  en  mes  arti- 
cles, je  suis  seur  que  vous  avez  trop  bon  jugement  pour  me  repren- 
dre d'y  avoir  faict  faulte  digne  de  la  collere  du  Roy.  Monsieur  le 
Duc  (1)  trouve  mes  articles  si  peu  advantageux  pour  luy  quil  seroit, 
comme  il  dict,  bien  inarry  de  les  avoir  acceptez  et  concludz  ainsyje 
n'ay  contenté  ne  vous  ne  luy,  mais  je  loue  bien  Dieu  que  l'une  n'y 
l'autre  des  partyes  n'en  aye  receu  desplaisir  ni  dommaige,  cela  me 
faict  porter  plus  patiamment  ma  deffence,  espérant  que,  après  y 
avoir  mieulx  pensé,  vous  changerez  d'opinion  et,  quant  a  la  resolu- 
tion prinse  avec  le  sr  Duc  par  le  sr  Pierre,  il  la  vous  scaura,  Monsei- 
gneur, fort  bien  faire  entendre,  pourquoy  je  m'en  tairay  et  aussi  de 
l'expédition  faite  du  cappitaine  Jheronimo  de  Piza  vers  Sienne  par 
Monsieur  de  Lanssac,  et  pour  l'accord  auquel  j'ay  grandîesperance  et 
en  les  partiz  que  le  Cardinal  Dandin  (2)  nous  asseure  de  la  part  du 


(1)  Le  duc  de  Ferrare. 

(2)  Dandini  (Jheronimo),  né  à  Césène  en  1509,  protonotaire,  évêque  de  Cassano 
1 1544),  d'Imola  (1546),  nonce  en  France  sous  Paul  III,  cardinal  en  1551,  mort  le 
4  décembre  1559. 


48  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1553] 

Pape  et  ce  que  Mr  de  Lanssac  a  rapporte  de  l'intention  de  sa 
Majesté  qui  me  semble,  Monseigneur,  la  meilleure  et  la  plus  saige 
de  tout  le  monde,  ne  voyant,  quant  a  moy,  que  lhonneur  et  la  répu- 
tation du  Roy  y  soit  en  rien  intéressez.  Mr  le  Duc  montre  ce  quil 
scait  faire  et  sa  vraye  affection,  car  il  aconduict  le  tout  avec  grande 
repputalion  du  Roy,  faisant  que  les  legatz  le  prioient,  et  a  tous  les 
ministres  de  sa  Majesté  qui  estoient  icy  de  chose  dont  nous  les 
eussions  deu  prier  ce  me  semble  a  jointes  mains,  de  quoy  le  Roy  luy 
doibt  un  bien  grand  mercy  et  pleust  a  Dieu  qu'on  se  fict  aussi  bien 
entendu  il  y  a  4  mois,  car  on  eut  espargné  o  cent  mil  escuz  au  Roy  ; 
et  si  cela  se  peult  accommoder  a  la  façon  qui  s'est  icy  ouverte  pour 
l'bonneur  de  Dieu,  Monseigneur,  faites  icy  servir  la  botique,  car  je 
vay  faire  dix  mil  despenses  les  plus  perdues  et  inutilles  que  je  vis 
jamais.  Messieurs  qui  sont  a  Sienne  me  mandent,  par  leurs  derniè- 
res despecbes,  quilz  ont  encores  faict  lever  six  compagnies  nouvelles; 
je  ne  doubte  point  quilz  en  rendent  bonne  raison,  mais  si  leur  ay 
bien  escript  quil  y  avoit  peu  de  gens  qui  approuvent  ceste  grande 
despense,  ny  de  vouloir  garder  tant  de  pays,  loutesfois  a  argent  ne 
tiennent  que  tout  ne  s'y  porte  bien,  car  il  y  a  six  jours  que  je  lais 
partir  3  mil  escuz  pour  la  paye  de  .May  et  Mr  l'Ambassadeur  de 
Venize  en  devoit  envoyer  24  mil,  mais  je  luy  escripvis  hier  quil  estoit 
meilleur  de  les  retenir  encores  pour  quelque  jours,  veu  l'espérance 
d'accord,  et  que  par  avanture  les  tenai.t  court  de  cela,  on  saulve- 
roit  la  moitié  de  la  paye  de  May.  .le  suis  fort  ayse,  Monseigneur,  de 
la  venue  de  Mrde  Lanssac  qui  est  parly  pour  Rome,  car  nous  ne 
scavions  a  qui  adresser  nostre  argent  pour  Sienne  et  avez  faict,  a 
mon  advis,  une  très  bonne  élection  de  luy,  qui  est  bonnesteet  saige 
gentilhomme,  et  est  desja  connu  et  agréable  au  Pape.  Vous  aurez 
entendu,  par  la  despecbe  de  Nicquet,  la  morl  de  Monsieur  de  Mire- 
poix,  accompagnée  de  la  perte  de  vingl  mil  escuz  par  ce  que  une 
maulvaise  nouvelle  ne  vient  jamais  seule.  Quelques  Italiens  de  fac- 
tion impériale  a  Viterbe  avoient  dévalises  sur  le  chemin  de  Peti 
glan  (lj  ledit  argent,  lequel,  depuis,  a  este  recouvert  comme  m'es- 
cript  ledit  Niquet  et  vous  puis  asseurerque  a  sienne.  Monseigneur, 

ont  eu  tous  les  restes  de  Mars  et  toute  la  paye  de  Avril  de/,  le  com- 
mencement du  moys,  et  dez  hier  arrivèrent  dans  Rome  les  .'?<>  mil 
escuz  pour  la  paye  de  May,  qui  n'est  encores  achevée,  aflin  que  a 
laulte  dargent  on  ne  prenne  point  excuse  que  les  affaires  du  Roy 
n'aillent  point;  il  est  vray  que  c'est  de  l'argent  de  Monsieur  le  Dur 
et  que  toujours  luy  debvons  nous  50  mil  escuz  qu'il  a  repretez  aussi 
libéralement  que  je  veiz  jamais,  pourquoyje  vous  supplie  1res  hum- 


fi)  Pitigliano,  ville  d'Italie  dans  la  province  de  Grosselo,  à  20  lieues  s.-S.-K.  <io 

Sienne. 


[AVRIL    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  49 

blement  que,  sans  plus  différer,  vous  nous  faictes  envoyer  de  quoy 
le  rembourser.  Il  me  semble  que  le  Roy  se  peult  aussy  assurer  de 
sa  bonne  volonté  que  sil  y  avoit  enlre  eulx  mil  cappitulations,  les 
effets  et  les  démonstrations  et  le  langaige  quil  en  tient  tous  les  jours 
me  le  font  ainsy  croire,  et  me  tient  tout  asseuré  que  sil  vous  voyoit 
en  intention  de  faire  quelque  cbose  de  bon  en  Italie,  quil  se  conten- 
teroit  de  partiz  raisonnables  pour  venir  a  la  déclaration  publique; 
bien  fautil,  Monseigneur  que  je  vous  die  quil  a  trouve  voz  articles 
dix  fois  plus  étranges  que  vous  n'avez  faict  des  miens  et  s'y  n'a  pas 
laisse  d'y  respondre  toutesfois  fort  bonnestement,  comme  vous 
entendrez  dudit  sr  Pierre,  qui  est,  Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous 
scaurois  dire  après  mes  très  bumbles  recommandations  a  vostre 
bonne  grâce. 
De  Ferrare  le  27  Avril  1553. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20612,  fol.  SI)  (copie). 


GABRE    AU   CONNETABLE 

33.  —  [Ferrare],  27  avril  1553.  —  Monseigneur.  Je  ne  puis  faire 
moins  que  de  respondre  a  ce  quil  vous  a  pieu  mescripre  du  faict  des 
munitions  de  Parme,  auxquelles  on  ne  touche  en  façon  quelconques 
de  quelque  espèce  et  qualité  quelles  soient,  encores  que  le  Roy  aye 
tant  de  foys  escript  d'en  vendre  aulcunes  ;  non  que  ce  soit  ma  faulte 
ny  des  ministres  du  Hoy,  mais  pour  ce  seullement  qu'on  ne  le 
treuve  pas  bon,  et  nous  nous  accommodons  au  temps;  quand  je  m'en 
fusse  bien  voullu  mesler,  je  n'en  ay  jamais  eu  le  loisir  et  ay  tout 
remis  a  Mr  de  Fourquevaulx  qui  est  sur  les  lieux,  et  ne  trouvant  que 
très  bon  tout  ce  qu'il  faict  et  tout  ce  qu'il  dict;  car  aussy  ne  semble 
t-il  sage  et  bonneste  gentihomme,  cela  est  bien  loingde  mestre  volu 
mesler  de  ses  charges  ny  de  diminuer  son  pouvoir  et  authorite.  Je 
ne  me  meslay  jamais  d'ordonner  despence  d'un  escus,  ny  de  com- 
mander choses  quelconques,  et  ne  faict  icy  que  leur  respondre  et 
solliciter  ce  qui  leur  faict  besoing,  leur  servant,  ce  me  semble,  de 
valet  a  tant  qu'ilz  sont,  de  quoy  je  ne  me  dedaigneray  jamais  pour  le 
service  du  Roy  a  moindre  qu'eulx,  mais,  sansl'interetz  du  Roy,  je  ne 
le  ferois  ny  vouldrois  aussi  peu  que  homme  de  mon  estât  qui  fut  au 
monde,  et  ne  puis  penser,  Monseigneur,  ou  l'on  a  prins  qu'il  y  ait 
entre  nous  incompatibilité  ny  entreprinse  lung  sur  l'aultre,  car  je  scay 
bien  que  M.  de  Fourquevaulx  n'en  peult  pas  avoir  escript,  et  je  n'y 
pensois  jamais  (1  ).  Je  vous  supplie,   Monseigneur,   ne  prenez  pas 

(1)  Du  Gabre  et  M.  de  Fourquevaux:  étaient  liés  d'amitié.  Voir  C.  Douais,  Une 
importante  correspondance,  Op.  cit..  p.  S;.  L'évêque  de  Lodève  se  défend  ici 
d'une  accusation  portée  contre  lui.  touchant  ses  rapports  avec  FourquevauX-  Les 


50  NÉGOCIATIONS    DE  TmAI    1553] 

cette  opinion  de  moy,  car  je  vous  respondz  bien  que  je  n'ay  pas 
grande  envie  de  m'y  forrer  si  avant,  et,  pour  le  commencement,  on 
ne  m'en  donne  pas  si  bonne  curée  que  je  m'y  doibve  eschauffer 
davantage. 

Le  27e  avril  1553. 

(Bibl.  nat,  Fr.  20642,  fol.  84)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

34.  —  [Ferrure],  14  mui  lô53.  —  Monseigneur,  je  ne  vous  feray 
longue  lettre  ni  redicte  de  ce  que  j'escriptz  au  Roy,  et  me  desplait 
que  je  ne  vous  puisse  mander  quelques  bonnes  nouvelles  de  laffaire 
de  Sienne,  mais  je  vois  bien,  par  ce  que  nous  entendons  dudit  Sienne, 
que  la  difficulté  et  longueur  ne  viendra  que  de  nous  mesmes,  et 
que  toujours  nous  ferons  despendre  au  Roy  plus  quil  ne  veult  ;  de 
quoy  je  ne  pense  pas  estre  de  la  partie,  et  pour  ceste  cause,  Monsei- 
gneur, il  vous  plairra  faire  pourveoir  et  continuer  d'envoyer  argent, 
comme  s'il  n'y  debvoit  avoir  accord;  atlin  quil  n'en  vienne  inconvé- 
nient, vous  avez  bon  loisir  tout  ce  moys,  car  avec  le  prest  et  secours 
de  Mr  le  Duc,  toute  la  paye  de  May  sera,  dans  bien  peu  de  jours,  dans 
Sienne.  Je  ne  vous  parleray  plus,  Monseigneur,  de  Mr  le  Duc  de  Fer- 
rare,  sinon  de  vous  supplyer  que  tout  le  passe  soit  oblyë  (1),  puisque 
rien  n'est  mal  aile,  Dieu  mercy.  Je  scay  bien  que  led.  sr  Duc  a  parle 
de  moy  au  sieur  Pierro  (2)  plus  a  mon  adventaige  que  je  ne  mérite, 
et  je  crains  que  cela  me  rende  suspect  envers  vous  aultres,  car  je 
vouldroys  que  mes  œuvres  me  recommandassent  et  non  ceulx  a  qui 
j'ai  a  négotier  pour  le  Roy.  Je  scay  bien  que  je  vouldroys  aussy  peu 
advancer  mon  honneur  et  mon  debvoir  que  homme  de  mou  estât 
que  le  Roy  aye  en  son  servie»',  mais,  Monseigneur,  pour  osier  tout 
scrupule,  vous  me  feriez  grande  grâce  de  m'oster  die  j .  ri  vous  servir 
de  moyen  aultre  endroit.  Pour  le  moins  je  scaurais  bieu  dire  grâces 
devant  le  Roy  si  je  ne  suis  bon  a  aultre  chose.  Bien  von-  assureray 
je,  Monseigneur,  que  je  ne  m'accuseray  jametz  davoir  fait  faulte  en 
ceste  pratique,  pour  avoir  voulu  faire advantaige  a  Monsieur  le  Dur. 
car  s'il  est  permis  de  le  dire  comme  il  est  de  le  faire  pour  le  service 
de  son  prince,  je  cuydois  l'avoir  bien  embarqué,  H  surpris,  avec  pro- 
messes et  espérances  qui  necostoientrien  au  Roy.  et,  si  vous  lussiez 
prins  au  mot,  il  estoit  bien  empesché  de  sen  retirer  ;  il  est  vray  que 
vous  l'aurez  tousjours  si   vous  voulez   faire  quelque  entreprise  en 

faits  de  ce  genre  abondaient  a  celle  époque  ou  ion  vivait  dans  une  atmosphère 

de  délations  et  de  basses  calomnies. 

(1)  Allusion  au  projet  d'alliance  avec  Hercule  11. 

(2)  Pierre  Strozzi. 


[MAI    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  51 

Italye,  fondée  et  digne  de  sa  déclaration,  et  se  contentera  toujours 
de  la  raison,  car  il  me  disoit,  n'y  a  que  deux  jours,  que  sil  voyoit  une 
fois  ce  que  le  Roy  veult  faire  pour  luy,  que  l'on  luy  laissast  lors  faire 
sa  déclaration  quand  il  verroyt  le  temps  a  propoz,  sans  mettre  temps 
a  vous  en  advertir.  car  il  vouldroit  commencer  par  un  service  et  une 
exécution  d'importance,  et  avoir  donne  plustost  le  coup  que  la 
parolle.  J'estois  résolu  de  ne  vous  en  parler  jamais  plus,  mais  il  me 
semble  ne  pouvoir  faillir  de  vous  dire  tout  et  le  remettre  après  au 
bon  jugement  du  Roy  et  le  vostre. 
De  Ferrare  ce  14e  May  1553. 

lîibl.  nat.,  Fr.  20453,  fol.  169)  (copie). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRAKE 

35.  —  [Venise],  II  mai  l.')33.  —  Monseigneur,  Je  eusse  dez  hier 
renvoyé  ce  messagïer,  n'estoit  que  je  m'attandois  recepvoir  encores 
quelque  paquet  de  la  Court,  que  Bocbier  qui  est  passe  a  Ferrare 
doibt  avoir  apporté.  Le  Secretere  de  Monsr  d'Âramon  (1),  qui  est 
depesche  oour  Levant  le  m'a  dit,  ainsi  qui  partist  de  la  Court  le 
xxixe  du  passe,  et,  a  ce  que  je  veoy,  ilz  désirent  et  solicitent  l'arrivée 
de  l'armée  pour  après  n'en  rien  faire.  Il  laissa  le  Sr  Pierre  Strozzy 
a  Lyon  le  premier  jour  de  ce  moys,  de  sorte  que  ce  pouvre  gentil- 
homme aura  faict  ceste  course  en  cinq  jours,  et  disoit  vouloir  estre 
a  la  Court  le  quatriesme.  Je  ne  me  vouldrois  pas  venter  d'en  faire 
aultanls'il  en  estoit  besoing.  Je  vous  envoyé,  Monseigneur,  la  lettre 
de  Monsrde  Lansac  avec  l'advis  du  Pape  sur  les  articles,  ou  il  y  a 
quelques  choses  que  je  n'approuverois  pas,  comme  seroit  ce  mot 
liberta  anticha,  pour  ce  qu'on  scait  bien  qu'elle  a  tousiours  esté  ville 
imperialle  et  soubg  la  protection  de  l'Empire.  L'aultre  article  est  du 
chef  de  la  garnison,  confident  ou  diffident,  qui  seroit  tenir  toutes  cho- 
ses en  querelle  et  dispute,  et  est  meilleur  laisser  le  tout  à  l'élection 
des  Seinnois.  Tout  le  reste  ne  me  semble  pas  fortpreiudiciable.  L'on 
a  icy  nouvelles  que  les  Imperiaulx  se  sont  retirez  de  Terouenne  (2), 
n'ayant  faict  que  courir  après  la  bâche.  Le  Duc  de  Florence  a  envoyé 

il)  Gabriel  de  Luez.  baron  d'Aramon,  né  à  Nîmes  à  la  fin  du  xv  siècle,  fut  atta- 
ché à  la  Cour  de  La  Mirandole  (1542),  puis  ambassadeur  à  Constantinople  jusqu'à 
sa  mort,  survenue  en  1554,  pendant  un  voyage  en  France.  Il  tï!  conclure  l'alliance 
de  Soliman  II  et  du  roi  de  France  contre  Charles-Quint. 

Le  secrétaire  de  M.  d'Aramon.  dont  il  est  ici  question,  est,  sans  doute,  Jean 
Chesneau,  qui  a  laissé  une  relation  très  intéressante  du  voyage  en  Perse,  Syrie, 
Palestine,  Egypte,  de  M.  d'Aramon,  lequel  avait  suivi  Soliman  dans  son  expédition. 

(2)  Tberouanne,  village  du  Pas-de-Calais,  à  16  kilomètres  de  Saint-Omer,  était 
une  des  principales  forteresses  sur  les  limites  des  Pays-Bas.  Charles-Quint  la  prit 
et  la  détruisit  en  1553. 


52  NÉGOCIATIONS    DE  [MAI    1553] 

ung  ambassadeur  en  Souisse,  avec  force  argent,  pour  rechercher  ces 
Seigneurs  des  ligues,  d'une  ancienne  confédération  qui  a  este  aultres 
foix  avec  la  maison  de  Medicis,  mais  il  a  este  renvoyé  comme  homme 
de  qui  l'on  n'a  pas  tenu  grand  compte.  J'espère,  Monseigneur,  estre 
mardy  pour  le  plus  tard  devers  Vostre  Excellence. 
De  Venise,  ce  xie  May  1553. 

Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

36. —  [Venise],  14  mai  1553.  —  Monseigneur.  Je  foys  mon 
compte  de  partir  demain,  s'il  plaist  h  Dieu,  et  remectray  à  vous 
monstrer  lors,  les  lettres  que  j'ay  eu  delà  Court  par  Bouchier.  qui 
me  mande  vous  avoir  eu  toutes  nouvelles  de  la  Court.  Il  me  samble 
qu'ilz  son  demy  appaisez  en  mon  endroyt.  Ledit  Bochier  m'a  escript 
bien  légèrement  ma  créance,  remectant  a  m'en  escripre  plus  ample- 
ment, mais  qu'il  soit  a  Rome.  Parquoy  pour  sa  venue  nous  n'aurons 
aprins  grand  cbose  et  fault  attandre  la  despeche  qu'on  fera  a  l'arri- 
vée du  Sr  Pierre  (1). 

De  Venize,  ce  xmie  May  1553. 

\rrh.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


GABRE    AU    CONNÉTABLE 

37.  —  [Ferrare  ,  20  mai  1553.  —  Monseigneur,  il  vous  plaira 
voir  par  la  lettre  du  Roy  l'occasion  de  la  despeche  de  Perrot  (2), 
présent  porteur,  de  quoy  ne  vous  fault  faire  redicte  ;  jay  faict  ung 
mémoire  abreige  de  Testât  des  affaires  de  deçà  et  de  quelques  dis- 
cours tenuz  avec  Mr  le  Duc  de  Ferrare,  il  vous  plaira  le  lire,  et  après, 
en  faire  entendre  au  Roy  ce  quil  vous  semblera  estre  bon,  excusant 
sil  vous  plaist  le  reste  :  cbascun  dict  icy  sa  ratellee  et  son  advis 
cuydiïnt  bien  faire  ;  niais  ces!  pour  nous  soubmetre  après,  comme  la 
raison  veult,  et  vostre  meilleure  oppinion. 

Monseigneur,  icy  est  venu  un  Monsieur  Dominicque  de  la  hfirande 
que  ces  dames  de  Mantoue  3  e1  M .  le  Cardinal  i  envoyenl  devers 
vous,  pour  ce  quilz  ont  entendu   que   le  Roy  voulloit  mener  a  la 

(1)  Pierre  Strozzi. 

2)  Perrot,  courrier  au  service  de  la  France. 

3   Les  dames  de  la  maison  de  Gonzague,  duchesses  de  iantoue. 

i  Hercule  de  Gonzague,  deuxième  fils  de  Jean  François  il.  né  en  1505.  Évoque 
de  .Mantoue  (1520  .  cardinal  [1521  .  mort  le  2  mars  1563.  il  gouvernh  le  duché  peir 
dant  la  minorité  de  son  neveu. 


[MAI    1553]  DOMINIQUE   DU   GABRE  53 

guerre  le  Sr  Ludovic  de  Mantoua  (1);  il  y  a  ces  deux  bonnes  femmes 
qui  ont  grande  crainte  de  le  perdre,  voyant  le  Duc,  son  frère  (2),  fort 
mal  sain,  et,  si  ledit  Ludovic  se  trouvoit  a  la  guerre,  mourant  le  Duc 
son  frère,  il  y  a  danger  que  l'Empereur  et  Domp  Ferrand  se  saisissent 
de  son  estât,  le  prétendant  confisque  comme  d'ung  rebelle,  qui  ne 
seroit  service  pour  le  Roy,  et  puis  ilz  disent  que  le  garson  est  fort 
jeune  pour  n'en  pouvoir  tirer  service,  et  quil  peultbien  attendre  que 
Monseigneur  le  Daupbin  (3)  son  maistre  aille  a  la  guerre  pour  en  ce 
cas  le  suivre.  Monsieur  le  Duc  a  este  dadvis  que  je  vous  en  escripvisse 
ung  mot  et  que  le  Roy  fera  bien  de  contenter  de  cela  ceulx  de  ceste 
maison.  Je  vous  en  ay  escript  ung  mot  par  ledit  Dominicque  de  la 
Mirande  qui  est  fort  affectionné  serviteur  du  Roy  et  le  vostre.  Il  sen 
va  par  le  Piedmont  et  par  luy  j'ay  escript  ung  mot  de  nos  nouvelles 
a  Mr  le  Mareschal  (4). 

De  Ferrare  le  20  mai  1553. 

(Bil)l.  nat.,  Fr.  20642,  fol.  101)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

38.  —  [Ferrare],  23  mai  1553.  —  Monseigneur,  je  receuz  hier 
unes  lettre  de  Mr  deLanssac,  laquelle  j'envoye a  MrlAmbassadeur  de 
Venize(5)  pour  la  veoir,  et  après  vous  la  faire  corrirparung  pacquet 
exprès  et  par  les  postes  ordonnées,  par  laquelle  il  vous  plaira  veoir 
que  ledit  sr  de  Lanssac  a  remis  sur  les  praticques  de  l'accord  de 
Sienne,  et  a  faict  a  mon  gré  bien  saigement,  mais,  la  responce 
faicte  par  Mr  le  Cardinal  au  chambrier  du  Pape,  monstre  bien  quil  ne 
fera  rien  quil  n'aye  commandement  exprès  du  Roy,  lequel  je  m'at- 
tendz  vous  nous  envoyerez  bientost.  J'ay  veu  par  lettres  de  Gennes, 
qui  asseurent  que  le  Marquis  de  Marignan(6)n'estoit  allé  a  Florence 
que  pour  faire  embarquer  des  allemandz  et  espaignolz,  qui  sont 
devant  Montalcino,  pour  les  descendre  audit  Gennes,  et  de  la  aller  au 
Piedmont;  s'il  sera  vray,  c'est  desja  le  font  du  renfort  que  vous  avez 
envoyé  en  Piedmont  et  j'auray  bien  devine,  car  j'ay  toujours  dit  que 

(1)  Louis  de  Gonzague,  seigneur  de  Bozzolo. 

(2)  Pierre  de  Gonzague. 

Les  membres  de  la  maison  de  Gonzague  s'étaient,  presque  tous,  mis  au  service 
de  la  France. 

(3)  François  II. 

(4)  Le  maréchal  de  Termes. 

(5)  Odet  de  Selve. 

(6)  Jean-Jacques  de  Médicis,  marquis  de  Marignan,  né  à  Milan  (1497),  mort  dans 
cette  ville  (1555).  Après  avoir  servi  la  France,  il  se  laissa  séduire  par  les  pro- 
messes de  Charles-Quint  et  passa  au  service  de  l'Empereur.  (Voir  Bra.ntomk, 
Grands  capitaines  étrangers.  Édit.  Lalanne,  t.  i,  p.  291). 


54  NÉGOCIATIONS    DE  [MAI    1553] 

les  Italiens  nouveaulx  que  le  Duc  de  Florence  faisoit  lever  n'estoit 
que  pour  remplir  ceulx  la  qui  s'en  dévoient  aller;  s'il  est  ainsy,  que 
Mr  de  Termes  voye  n'avoir  atîaire  qu'a  Italiens,  vous  verrez  quil  se 
mettra  en  campaigne  avec  les  1 3  mil  hommes  quil  lia  et  le  doibl  faire, 
car,  les  siens  sont  déjà  disciplinez,  et  bien  armez,  et  sy  n'y  a  pas 
moins  de  cavallerie  que  les  ennemys  et  si  ce  bel  argent  ne  nous 
falloit,  il  n'y  a  point  de  faute  que  la  continuation  de  la  guerre  de 
Sienne  seroit  plus  maintenant  pour  le  Roy  que  l'accord,  et  que  Dieu 
auroit  inspire  Mr  le  Cardinal  de  se  rendre  difficile  audit  accord  pour 
ne  laisser  séparer  cette  assemblée  de  gens  de  guerre  qui  est  a  Sienne, 
et  ne  perdre  ceste  occasion,  si  l'armée  de  mer  vient  de  destruire  le 
Duc  de  Florence,  car  vous  avez  a  Sienne  une  demye  armée  toute 
preste  avostre  renfort  déjà  achemine  en  Piedmont.  Je  vous  laisse 
penser.  Monseigneur,  où  s'en  trouveront  ces  imperiaulx  s'il  sortoit 
encores  de  Parme  ou  du  Ferrarois  une  bande  d'artillerie  accompai- 
gnée  seulement  de  <i  mil  hommes  et  trois  cent  chevaulx;  pour  ung 
mois  ou  deux,  ce  seroit  une  despence  de  60  mil  escuz  en  ung  mois 
ou  deux,  qui  par  avanture  en  vauldroil  ung  million,  car  les  impe- 
riaulx ne  scauroient  quel  coste  secourir  le  premier  assailli/  tout  en 
ung  coup  parle  Piedmont,  par  Lombardie,  par  la  Toscane  et  par  la 
mer;  quand  ilz  vouldroienl  remédier  d'ung  coste  ilz  perdroient  de 
l'aultre,  et  vous  faites  aussy  bien  la  despence  ainsy  comme  ainsy. 
hormis  de  celle  que  l'on  pourroil  faire  deçà,  mais  si  vous  nous 
envoyez  de  quoy  assigner  ceux  qui  nous  vouldrons  prester,  j'aurois 
espérance  de  trouver  l'argenl  pour  ceste  petite  troupe  qu'on  feroit 
icy,  laquelle  ne  seroit  pas  digne  de  mectre  ung  Dur  de  Ferrare  en 
campaigne,  mais  les  gens  seroienl  prest  plustost  que  le  Sr  Pierre  (1) 
ne  scauroit  estre  icy  pour  les  menner  sans  aultre  intention  que  tra- 
vailler a  divertir  et  faire  valeur  les  autres  armées,  et  paradvanlure 
quilz  feroient  plus  d'effecl  que  tous  les  autres,  avec  huictoudix 
canons  seullement,  car  on  prendroil  une  infinité  de  chasteaux  et  de 
grandes  villes  non  fortes  qui  se  porroient  fortiffier  ;  ce  seroit  un 
camp  volan,  lequel  en  ung  besoin  paye  le  premier  moi-;;  mi  tien- 
il  loi  t  en  campagne  au  temps  (\t>>  vivres  et  de  la  récolte  et  sans 
dangier  de  rien  perdre,  car  ilz  auroienl  toujours  leur  retraite  a  seu- 
rete;  cela,  Monseigneur,  m'est  échappe  de  la  plume  en  passant, 
mais  je  le  pense,  aussy  aije  a  faire  que  a  dire,  si  nous  avions  Mon- 
sieur le  Duc  noslre  et  son  artillerie.  Monseigneur,  vous  aurez  au  — \ 
avec  la  présente  une  copie  de  lettre  de  lAmbassadeur  de  Ferrare  a 
Klorence  qui  escript  quelques  parti cularitez  de  la  conspiration  de 
Sienne  avec  une  liste  des  cappilaines  que  tait  le  hue  de  Florence, 
et  quant  a  nous  faire  raison  des  destroussemenl  île  corriersdu  Duc 

i)  Pierre  Strozzi 


[MAI    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  55 

de  Ferrare,  le  Duc  de  Florence  a  fait  rendre  le  cheval  et  l'argent, 
mais  des  lettres  il  n*en  est  point  de  nouvelles;  il  montre  bien  parla 
quil  scait  ou  elles  sont  et  quil  ne  cherchoit  autre  chose  que  cela. 
Monsieur  le  Duc  a  dit  aujourdhui  au  secrétaire  de  Florence  quil  ne 
voulloit  plus  qu'on  luy  rendit  les  lettres  et  quil  n'en  avoit  que  faire, 
et  que  son  maitre  montroit  trop  manifestement  grand  malice  et 
grand  ignorance;  s'ils  estoient  deux  gentilshommes  privez,  je  crois 
quil  fauldroit  quilz  combatissent,  je  vousasseure  bien,  Monseigneur, 
que  je  ne  tache  pas  fort  a  y  mettre  la  paix  entre  eulx. 
De  Ferrare  ce  23  Mai  1553. 

Les  lettres  de  lAmbassadeur  de  Ferrare  sont  dans  le  paquet  adres- 
sant a  lAmbassadeur  du  Duc  auprès  de  sa  Majesté,  nous  n'avons 
point  encore  nouvelles  de  Mp  le  Cardinal  du  Bellay  (1). 

(Bibl.  nat..  Fr.  20642,  fol.  102)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

39.  —  [Ferrare],  26  mai  1 553.  —  Monseigneur,  le  srFlaminio  (2) 
présent  porteur  est  despeché  par  Messieurs  qui  sont  a  Sienne  ;  vous 
aurez  ample  information  de  la  conspiration  de  Sienne  et  du  peu 
d'espérance  quil  y  a  en  l'accord,  lequel  Monsieur  le  Cardinal  tient 
pour  tout  rompu,  tant  pour  n'estre,  se  dit-il,  l'accord  agréable  aux 
Siennois  que  pour  le  soupçon  que  l'on  a  quil  y  eut  quelque  intelli- 
gence, en  sorte  quil  conclut  a  demander  toujours  secours  et  plus 
grand  force  et,  a  la  fin,  je  crois  que  vous  serez  contrainct  d'entrer 
encore  en  ceste  despence,  pour  faire  d'ungcoup  deux  bons  effectz, 
l'ung  pour  délivrer  Sienne,  et  l'autre  pour  favoriser  l'armée  de  mer, 
et  donner  quelque  commencement  a  lentreprinse  de  Naples  ;  et  si 
vous,  Monseigneur,  résolvez  par  delà  d'y  faire  effort  et  ne  pouvoirou 
vouloir  envoyer  ung  peu  de  Souisses,  on  lèvera  bien  le  siège  de 
Sienne  avec  quelques  Italiens  que  l'on  levé  pour  ung  mois,  et  mes- 
mement,  si  les  Espaignolz  et  Allemandz  se  lèvent  du  siège  pour  aller 
partie  a  Naples,  et  partie  en  Piedmont,  comme  il  se  dit  pour  certain 
et  comme  il  est  bien  croyable.  A  Venize  estoit  arrive  Monsieur  de 

(1)  Jean  du  Bellay,  deuxième  fds  de  Louis  du  Bellay,  seigneur  de  Langey,  et  de 
Marguerite  de  la  Tour  Landry,  né  en  1492;  successivement:  évêque  de  Bayonne, 
Paris,  Limoges,  Le  Mans;  archevêque  de  Bordeaux  (4544-1553  ;  cardinal  (1535); 
fut  nommé  lieutenant-général  du  royaume  (1536  et  chargé  de  missions  diploma- 
tiques importantes  en  Angleterre.  Disgracié  par  les  Guises,  il  se  relira  en  Italie, 
où  il  devint  évêque  d'Ostie;  il  mourut  à  Rome  le  15  lévrier  1560. 

[2]  riaminio  Ursini,  capitaine  italien  envoyé  par  Strozzi  à  Montluc  pendant  le 
siège  de  Sienne  (Montluc,  Commentaires,  Op.  cit.,  t.  n,  p.  64). 


56  NEGOCIATIONS    DE  [MAI    1553^ 

Cabassolles  (1),  comme  vient  de  m'escripre  Monsieur  l'Ambassadeur, 
et  tous  deux  seront  icy  demain  a  larrivee  de  Mr  le  Cardinal  du  Bellay, 
qui  a  mande  quil  pouvoit  estre  icy  le  29.  Je  l'ay  fait  savoir  a  Mr  de 
Forquevaulx  pour  s'y  trouver  aussy,  aflîn  que  nous  fassions  une 
autre  diète  au  Bosquet,  comme  celle  de  Chioja  ('2;,  et  m'attendz  bien 
cependant  que  nous  aurons  eu  quelque  responces  aux  despecbes  du 
sr  Pierre,  et  autres  du  3e  el  5e  apportées  par  Francbot  (3)  et  scauront 
plus  clairement  toutes  voz  intentions  pour  mieulx  resouldre  tout  ce 
que  chacun  aura  a  faire;  cependant,  je  vous  diray  seulement  que 
ceulx  de  Sienne  ont  pour  le  payement  de  Juin  45  mil  escuz,  que 
M1'  1  Ambassadeur  de  Venize  y  a  envoyé.  M.  de  Lanssac  me  mande 
avoir  en  main  33  mil  escuz  d'un  party  fait  par  feu  Mr  de  Mirepoix. 
Je  luy  escript  quil  veuille  prendre  la  dessus  neuf  mil  escuz  quil  fault 
pour  le  parfait  de  Juing.  11  est  vray  que  Messieurs,  a  Sienne,  m'es- 
cripventque  je  leur  envoyé  6  mil  escuz  en  lieu  de  ceux  qui  furent 
perduz  a  Montalcino  et  encores  4  mil  pour  les  compaignies  nouvel- 
les quilz  ont  levé.  J'ay  escript  aud.  sr  de  Lanssac  que  silz  en  font 
plus  grand  presse,  quil  les  leur  vueille  envoyer  de  la  partie  qui  est 
entre  ses  mains,  de  sorte  que  encores  il  aura  de  reste  pour  le  mois 
de  Juillet  14  mil  escuz  ;  par  ainsy,  on  ne  peult  dire  quil  y  ait  faute 
d'argent.  J'ay  icy  de  la  monnoye  que  le  gênerai  d'Albenne  avoit  en- 
voyé pour  36  mil  escuz,  de  laquelle  on  ne  peult  se  deffaire  prompte- 
ment,  et  j'espère  la  faire  servir  au  remboursement  de  Mr  le  Duc  (4), 
a  qui  il  ne  sera  plus  deu  que  15  mil  escuz  :  ceux  de  Parme  et  de  la 
Mirandole  attendront  le  mois  de  Juinjusques  a  la  lin.  cependant  il 
sera  venu  aultre  provision  d'argent.  Mr  de  Lanssac  m'escripl  quil 
voulloit  rembourser  une  partie  de  20000  escuz  employez  par  feu 
Mr  de  Mirepoix,  qui  furenl  envoyez  ;i  Sienne,  comme  vous  aurez  ?eu 
par  uni:  estai  que  j envoyai  du  30e  de  Mars  par  Gassot,  mais  je  luy 
ay  escripl  (pie  par  les  instructions  du  s1  de  Mirepoix  que  pourta 
ledit  Gassot,  le  remboursement  de  ladite  partie  estoil  assignée  a 
Lyon  aux  payements  de  la  foire  de  Pasques,  parquy  il  ne  debvoil 
employer  la  ceste  partie  des  :'..".  mil  escuz.  Voila,  Monseigneur,  en 
somme,  Testât  ou  toutes  cboses  se  trouvent  en  matière  de  deniers, 
de  sorte  que  l'on  ne  peut  dire  quil  y  en  nye  nécessite  ;  j'entendz  par 
ledit  porteur  que  a  sienne  non!  point  faulte  de  vivres  el  que.  leur 

fournissanl    la    paye    accouslui '.  ilz  attendront    fort    bien    VOStre 

secours  deux  el  trois  moys;  si  la  leste  dure  si  longuement;  le  Duc  de 


(1)  Antoine  de  Cabassolles,  issu  d'une  famille  de  Provence;  gentilhomme  ser- 
vani  de  Henri  [I, capitaine  des  galères. 

(2)  Chiosa,  ville  à  22  kilomètres  de  Venise,  avec  poil  sur  l'Adriatique. 
(:?)  Courrier  au  service  de  la  France. 

i     Le  due  de  Ferrure. 


[MAI    1553  DOMINIQUE    DU    GABRE  57 

Florence  se  trouvera  bientostau  fons  de  sa  boite  et  de  ses  provisions 
et  congnoislra  bien  quil  a  faict  une  grande  folie  de  s'attacher  (1,  a 
ung  si  grand  Roy. 
De  Ferrare  ce  26  mai  1553. 

Mr  le  Duc  partist  hier  pour  aller  accorder  deux  contes  d'Allema- 
gne qui  doibvent  combattre,  desquelz  le  Roy  de  Roesme  luy  escript 
en  grande  affection  ;  le  Sr  Flaminio  et  moy  laccompagnasmes  dans 
son  coche  une  grande  partie  du  chemin,  pour  luy  faire  part  de  la  des- 
peche  de  ce  pourteur  a  qui  il  dict  son  advis  de  tout,  et  vous  prie  de 
l'excuser  s'il  n'a  eu  la  comodite  d'escripre  par  luy.  Je  vous  prie, 
Monseigneur,  de  vous  asseurer  de  sa  bonne  disposition  et  volonté 

aux  affaires  du  Rov. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  206«,  fol.  104  (copie). 


GABRE    AU   DUC   DE    FERRARE 

40.  —  [Ferrare],  26  mai  1553.  —  Monseigneur.  Depuis  mon  aultre 
lettre  escripte  est  arrive  ung  corrier  du  Roy,  exprès;  après  l'arrivée  a  la 
court  du  Sr  Pierre  deLbome,  du  sieur  Rodolphe  (2)  et  de  Franchot,par 
le  quel  ilz  nous  escripront  amplement,  et  nest  ce  corrier  depesche 
pour  aultre  chose  que  pour  porter  en  extrême  diligence  lintention 
du  Roy  a  messieurs  qui  sont  a  Sienne,  daccepter  laccord  selon  voz 
articles.  Je  vous  envoyé,  monseigneur,  ce  que  le  Roy  et  monseigneur 
le  Connestable  men  ont  escript,  avec  les  nouvelles  de  Terouenne.  Le 
corrier  a  laisse  monsieur  le  cardinal  du  Rellay  a  Bresse  et  ne  fauldra 
pas  d'estre  icy  dimenche  ou  lundy.  Jay  grand  regret,  Monseigneur, 
a  ce  vostre  voiage,  et  si  déjà  vostre  excellence  na  commande  ce  quil 
fault  pour  recepvoir  ledit  Sr  cardinal,  il  vous  plairra  mander  ce  quil 
vous  ploist  quon  face,  bien  que  jen  iray  parler  après  disner  a  mon- 
seigneur le  gouverneur,  et  vous  plairra,  monseigneur,  me  renvoyer 
les  lettres  et  nouvelles  du  Roy.  Jay  faict  passer  sur  lheure  le  corrier 
jusques  a  Rome  avec  le  paquet  de  Sienne,  et  le  sieur  Flamynio  est 
aussi  party  pour  la  court.  11  ma  semble,  monseigneur,  vous  debvoir 
depescher  ce  pourteur  exprès. 

De  Ferrare  le  xxvie  mai  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE   FERRARE 

41.  —  [Ferrare],  26  mai  1553.—   Monseigneur.  Monsr  lambassa- 
deur  de  Venize  ma  escript  quil  sera  icy  demain  ou  dimenche  pource 

(1)  S'attaquer. 

(2)  Sans  doute  Rodolphe  de  Gonzague. 


58  NÉGOCIATIONS   DE  [JUIN    1553 

que  monsieur  le  Cardinal  de  Bellay  luy  a  escript  de  sy  trouver  le 
xxixe  qui  est  lundy,  auquel  jour  il  doibt  arriver.  De  quoy  je  vous  ay 
voulu  advertyr  pour  entendre  ce  quil  vous  plairra  quon  face.  Cepan- 
dent  je  parleray  au  sieur  Batistin  pour  faire  accommoder  ce  lieu  icy 
de  quelques  lictz  et  meubles.  Je  logeray  icy  monsieur  lambassadeur 
en  atandant  que  laultre  vienne  ;  mais  vous  serez ,  sil  vous  plaist. 
content,  monseigneur,  que  je  mayde  de  votre  cave  et  de  voz  meubles, 
aultrement  il  serait  icy  fort  mal  receu.  Il  ma  envoyé  une  lettre  de 
monsieur  le  Conestable  a  luy  adressante,  du  vne  de  ce  moys,  en  la 
quelle  il  y  a  les  motz  qui  sensuyvent: 

«  Je  ne  fors  doubteque  monsieur  de  Lodeve  ne  vous  ay  faict  scavoir 
comme  il  est  aile  delà  négociation  du  sieur  Pierre  Strozzy,  qui  est 
icy  de  retour  dez  avant  hier,  ensemble  ce  qui  a  este  mis  en  avant 
de  la  part  de  notre  Saint  Père  sur  le  faict  de  Sienne,  qui  est 
tant  honorable  pour  le  Roy  que  nous  ne  scaurions,  pour  le  présent, 
ce  me  semble,  mieulx  souhaiter».  Hz  escripvent  aussi  que  dans 
Terouenne  (1),  messieurs  de  Montmorency,  de  Fumel  (2)  et  pieu- 
sieurs  aultres,  et  deux  compaignies  de  gens  de  pied,  et  pource  quil 
ny  avoit  faulte  que  de  gens,  ilz  espèrent  que  lEmpereur  y  prendra 
une  grand  liante.  Je  vous  envoyé,  monseigneur,  ung  paquet 
venu  de  France.  Je  vous  escripray  plus  a  loysir,  ayant  envye  que 
ce  pourleur  vous  trouvast  ce  matin  sil  estoit  possible. 

De  Ferrare  ce  xxvi'  may  1553. 

\  ch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


CABRE   AU    CONNETABLE 

42.  —  [Ferrare],  3  juin  1553.  —   Monseigneur,   le  Cardinal   «lu 

Bellay  ma  donné  charge  de  vous  envoyer  la  lettre  de  Monsieur  de 
Lanssac  que  vous  trouverez  en  ce  pacquet,  et  vous  supplye  de  l'ex- 
cuser sil  ne  vous  a  pas  escript  la  dessus,  car  il  estoil  dans  le  bateau 
pour  sen  aller  aujourdhuy  coucher  a  Ravenne  et  faire  sa  meilleure 
dilligence  quil  pourra  pour  se  trouver  a  Orvieto  (3),  et  aider  a  eeste 
bonne  œuvre  de  laccord  de  Sienne  auquel  jaj  grande  espérance, 
car  Ion  voit  évidemment  que  les  Imperiaulx  sonl  du  tout  perdu/  sili 
ne  le  font,  et  contrainctz  d'abandonner  le  tout  honteusement  ;  mais, 

(1)  Tlierouaiiue. 

i    François,  baron  de  Fumel,  gentihomme  ordinaire  de  la  Chambre,  capitaine 
«les  gardes  sous  François  I    el  Henri  II,  ambassadeur  à  Constantinople    : 
puis  gouverneur  de  Marienbourg;  mourut,  massacré  dans  son  château  (dans  le 
Quercy   par  les  protestants,  le  29  novembre  1561 .  • 

3   Orvieto,  ville  d'Italie,  province  de  Pérouse,  chef-lieu  «le  l'arrondisse ni 

de  ce  nom. 


[JUIN    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  59 

pour  cela,  le  Roy  ne  se  Irouveroit  pas  décharge  de  ses  Siennois  et 
dune  si  grosse  despence  quil  la  fauldroit  entretenir,  a  laquelle  il  se 
desmele.  Par  laccord  et  par  ainsi,  il  me  semble  toujours  très  bon 
et  nécessaire,  car  sil  fault  pluz  rentrer  en  despence  pour  ledit 
Sienne,  ny  pour  la  venue  de  larmee  de  mer,  vous  pourrez  fayre  ung 
monde  nouveau,  et  le  tout  sera  par  aventure  mieulx  entendu  quil 
na  este  pour  le  passé.  Monsieur  le  Duc  eut  hier  nouvelles  que  voz 
lansquenetz  etoient  arrives  a  Albe  et  que  Domp  Ferrand  estoit  demy 
désespère,  nayant  ne  gens  ne  argent,  et  faisoit  4  mil  italiens  pour 
mettre  dedans  ses  places  et  sayder  de  vieulx  soldatz  qui  sont  pour 
les  garnisons,  et  a  qui  Ion  dit  quil  est  deu  4  ou  5  payes,  qui  nest 
pas  pour  tirer  grand  service  deulx;  il  cherchoit  de  vendre  pour 
30  mil  escuz  de  revenus  en  la  duché  de  Milan  (1).  Jay  belle  envye 
douyr  dire  que  M.  le  Maréchal  commence  a  marcher,  car  chacun  a 
oppinion  quil  ne  trouvera  pas  grande  résistance.  M.  le  Duc  a  lettre 
delà  Court  de  lEmpereur  qui  font  mention  du  peu  de  recueil  que 
lEmpereur  a  fait  au  cardinal  Dandin,  nayant  voulu  que  personne  de 
sa  part  soit  aile  au  devant  de  luy  ;  je  crois  que  cest  pour  faire  a 
maulvais  jeu  bonne  mine  et  monstrer  quon  leur  faict  desplaisir  de 
parler  de  la  paix  ;  mais  si  vous  luy  tenez  bon  tout  cest  este,  il  faut 
quil  confesse  estre  devenu  de  très  grand  bien  fort  petit,  et  quil  se 
rende  ou  quil  meure  de  despit.  Il  vous  plaira  prendre  quelque  reso- 
lution sur  larmee  de  mer,  car  il  semble  que  celle  apportée  par 
Cabassoles  ne  soffit  pas. 

De  Ferrare  ce  3  juin  1553. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20642,  fol.  107)  (copie). 

GABRE   AU    CONNÉTABLE 

43.  —  {Ferrare],  i  7  juin  1553.  —  Monseigneur.  .Je  despeche  ce 
corrier  exprès  pour  donner  advis  au  Roy  du  deslogement  des  im- 
periaulx  du  pays  des  Senoys.  Hz  disent  que  c'est  après  avoir  fait 
laccord,  mais  je  ne  le  puys  croyre,  veu  ce  que  Monsieur  le  Cardinal  de 
Ferrare  a  escript  par  Tassin  (2)  qui  partist  hier  matin,  ce  n'est  aultre 
chose,  après  tout,  que  pure  et  belle  nécessite,  et  la  vraye  et  bonne 
fortune  du  Roy.  On  verra  la  vérité  de  l'histoire  par  la  première 
despeche  qui  viendra  de  Rome;  mais,  cependant,  je  croy  que  vous 
ne  trouverez  point  maulvaise  la  despeche  de  ce  corrier  que  je  fais 
courir  exprès  pour  ce  que  vous  avez  eu  tant  de  nouvelles  contreres, 
que  vous  debvez  estre  en  payne:  les  unes  vous  asseuroient  la  paix  et 
les  autres  la  guerre,  et  ceste  cy  vous  donnera  grand  espérance  de  la 

(I,  Domp  Ferrand  Frédéric  II  de  Gonzague,  voir  p.  10,  notes)  était  gouverneur 
du  Mil, mais  et  comte  de  Guastalla  dans  cette  province. 

•i    Tassin  de  Lonato,  agent  de  la  France  dans  la  haute  Italie. 


60  NÉGOCIATIONS    DE  [JUIN    1553] 

victoire  et  de  lhonneur  pour  le  Roy,  dont  vous  aurez  bientost  confir- 
macion  de  la  vérité  par  les  despeches  qui  vous  viendront  de  Rome 
ou  de  Sienne,  et  ce  pendant  vous  aurez  tant  plus  de  temps  a  resoul- 
dre  ce  quon  aura  afaire  par  deçà. 
De  Ferrare  ce  xvne  juing  1553. 

Monseigr.  Jay  baille  cent  escuz  a  ce  corrier  qui  ma  promys 
corir  jour  et  nuyt  et  faire  extrême  dilligence  ;  il  vous  plaira  lui  faire 
bailler  argent  pour  sen  retournera  ses  journées.  Monseigneur  le  Duc 
de  Ferrare  escript  au  Roy  de  sa  main;  il  vous  plaira  luy  faire  quelque 
bonne  responce  pour  toujonrs  la  tenir  en  bonne  volunte. 

(Bibi.  nat..  Fr.  20455,  fol.  93)  (originale;. 


GABRE    AU    CONNÉTABLE 

44.  —  [Ferrare],  23  juin  1553.  —  Monseigneur.  Je  loue  Dieu  de 
ce  que  vous  aurez  par  le  sieur  Niquet  confirmation  de  la  bonne  nou- 
velle que  nous  vous  avons  escrite  dicy  de  la  victoire  de  Sienne  ;  sil 
vous  plaisoit  men  donner  ung  jour  une  autre  de  quelque  bonne  ab- 
baye que  le  Roy  meust  donne,  ce  seroit  une  bonne  manche.  Je  ne 
vous  feray,  Monseigneur,  longue  lettre  par  ce  soffizant porteur,  sinon 
de  vous  supplier  quon  puisse  le  plustost  quil  sera  possible  ce  que 
debvront  faire  Messieurs  qui  sont  a  Sienne  de  ceste  armée  quilz  se 
trouvent  sur  les  bras,  car  je  me  doubte  quilz  ne  se  hasterontde  rien 
casser  quilz  ne  voyent  autres  nouvelles  du  Roy,  et  en  toutes  façons 
faites,  sil  vous  plait,  envoyer  de  largent,  car  nous  sommes  tantost 
en  juillet  et  navons  pas  ung  seul  escu.  Jay  pave  Monsieur  le  Duc  de 
toutcequon  lui  debvoit  de  quelque  monnoye  que  le  général  Delbenne 
mavoit  envoyé,  parce  (pion  ne  sen  pouvoil  défaire  ailleurs  sans  la 
faire  battre  en  autre  monnoye  de  ce  pays  avec  grand  perte,  oultre  la 
longueur,  laquelle  ledit  Sr  Duc  se  contentera  dattendre,  et  je  don- 
neroy  ordre,  Monseigneur,  suivant  ce  quil  plait  au  Roy  men  escripre, 
quil  sera  paye  de  sa  garnison  de  cent  hommes  de  Bresseil,  depuis  le 
premier  jour  de  avril,  qui  est  le  temps  ipn'  le  Roy  laccorda,  et  quant 
a  la  recompence  de  Bresseil  pour  Monsieur  le  Cardinal  (1),  que  le 
Roy  avoit  accorde  en  autant  de  bénéfices  que  ledit  Sr  Duc  demande 
luy  estre  change  en  autant  de  temporel  a  la  vie  dudil  sieur  Cardinal; 
je  luy  ay  fait  entendre  ce  quil  vous  plaira  men  escripre  par  Bona- 
corsy  qui  arriva  il  y  a  trois  jours.  11  ma  dicl  quil  ne  scauroit  estre 
que  très  content  de  tout  ce  quil  plaira  au  Roy,  mais  quil  me  prioil 
bien  de  vous  en  répliquer  encore  ung  mot  et  vous  supplier  de  luy 

(i)  Le  cardinal  de  Ferrare. 


[JUILLET    1553]  DOMINIQUE   DU    CABRE  61 

vouloir  estre  aydant,  a  cela  quil  tiendra  a  fort  grande  obligation  du 
Roy  et  de  vous.  Je  croy,  Monseigneur,  que  vous  naurez  pas  grand 
peine  daccommoder  cela  avec  Monsieur  le  Cardinal  son  frère;  je  ne 
vous  eusse  pas  fait  cette  recharge  sil  ne  men  eust  bien  fort  prie. 
De  Ferrare  ce  23  Juing  1553. 

Monseigneur,  si  le  Roy  ne  va  pas  a  ceste  guerre  de  Terouenne, 
vous  ferez  grand  plaisir  a  Monsieur  le  Duc  den  faire  revenir  Monsieur 
le  Prince  (1  )  son  filz,  car  il  en  est  en  très  grande  peine.  Je  veoy,  Mon- 
seigneur, quelques  gens  par  deçà  mettre  des  partiz  pour  conjurer  la 
tempeste  de  ceste  guerre  vers  Naples  et  en  desmeler  le  Duc  de 
Florence.  Vous  pourres,  Monseigneur,  pour  en  délibérer  mettre  en 
considération  que  lune  ne  se  peut  faire  sans  Suisses  et  a  grosses 
despenses,  et,  sur  lentree  de  liver,  et  celle  de  Toscane  se  peult  faire 
avec  Italliens  qui  sont  desa,  tous  portes  et  assemblez  sur  le  lieu,  et 
si  vous  laviez  une  fois  commence,  les  Florentins  seroient  gens  pour 
mettre  la  main  a  la  bourse  et  vous  descharger  de  ceste  despence. 

(Bibl.  nat.,  Fr.,  20642,  fol.  118)  (copie). 


GABRE   AU    ROI 

45. —  [Ferrare],  7  juillet  1553. —  Sire,  vous  n'entendez  pas  a  mon 
advis  que  je  serve  a  mes  despens,  ny  que  je  sois  pirement  traité  que 
les  autres;  si  j'avois  bien  de  quoy  le  faire  du  mien,  je  vous  asseure 
bien  que  je  ne  chargerois  gueres  voz  finances,  ny  ne  seriez  jamais 
importuné  de  moy  ;  et  sur  ce  propos,  je  vous  diroy,  Sire,  qu'on  m'a 
cotize  au  riereban  (2)  pour  mon  evesche,  a  4  hommes  darmes  et 

(1)  Alphonse  d'Esté,  fils  aîné  d'Hercule,  héritier  présomptif  du  duché  de  Ferrare, 
né  on  1533,  s'était  enfui  pour  se  mettre  au  service  de  la  France  (28  mai  1552). 
—  Voir,  sur  cet  épisode,  E.  Roooc.vnachi,  Renée  de  France,  Op.  cit.,  chap.  X, 
p.  223  sq. 

Alphonse  succéda  à  son  père  et  régna  de  1559  à  1597. 

(2)  Le  ban  était  la  réunion  de  tous  les  nobles,  qui,  relevant  directement  du  roi, 
devaient  le  service  militaire.  L'arrière-ban  était  composé  des  nobles  possesseurs 
d 'arrière-fiefs. 

En  leur  qualité  de  seigneurs  dominants  dans  leur  diocèse,  les  Évêques  de  Lo- 
dève  auraient  dû,  comme  les  autres  seigneurs,  fournir  au  roi  un  certain  nombre 
d'hommes  d'armes,  mais  ils  en  étaient  exemptés,  en  vertu  des  diplômes  royaux 
qui  leur  avaient  conféré  les  droits  régaliens.  Louis  Vil  et  Philippe-Auguste 
(Voir  Histoire  de  la  ville  de  Lodève,  par  Ernest  Martin.  Montpellier,  Serre  et 
Koumégous,  1900,  3  vol.  in-8°,  au  3e  vol.,  Cartulaire,  pièces  xxn  et  xxxviu) 
défendaient  formellement  à  n'importe  quelle  autorité  d'exercer  aucune  action  sur 
les  biens  de  l'Église  de  Lodève. 

Malgré  ces  prohibitions,  les  officiers  royaux  avaient  essayé  de  tout  temps  de 
soumettre  les  Évêques  de  Lodève  aux  mêmes  conditions  que  les  autres  seigneurs. 


62  NÉGOCIATIONS    DE  [JUILLET    1553] 

8  archiers;  jamais  Eveque  mon  prédécesseur  n'en  paya  et  en  ay  fort 
bons  privilèges  et  exemptions,  mais  le  Senechal  de  Carcassonne  (I) 
ne  nous  veult  autrement  ouyr.  Je  suis  oultre  cela  bien  fort  charge 
de  décimes  et  me  semble  que  encores  que  mon  estât  me  défende  de 
porter  les  armes,  que  je  ne  laisse  pas  deservir  pour  la  guerre.  Il  vous 
plaira  commander,  Sire,  que  je  ne  sois  poinct  travaillé,  pour  cela 
faire  escripre  une  lettre  audit  Senechal  de  Carcassonne  qui  a  fait 
saisir  mon  temporel,  et  mes  officiers,  et  brouillé  tous  mes  petits 
affaires. 

De  Ferrare  7  Juillet  1553. 

(Bibl.  nat,  Lat.  17026,  fol.  180  (Évêchés  de  Franee  . 
Gagnières),  lettre  L.  (extrait)  (copie  . 

GABRE    AU    ROI 

46.  —  [Ferrare],  '^J  juillet  1553.  — Sire,  Niquet  arriva  icy  le  15me 
de  ce  mois  et  le  soir  mesme  partit  pour  aller  a  Sienne  par  la  voye 
de  la  Romaigne  (2),  prenant  la  traverse  a  Oruyette  (3)  sans  le  mettre 
ni  vostre  despeche  au  hazard  dépasser  par  Florence, car  bien  que  le 
Duc  de  Florence  aye  monstre  quelques  jours  le  passage  libre  et  quil 
aye  laisse  passer  aucuns  corriers  et  gens  despechez  par  Messieurs 
vos  ministres,  encore  ne  se  sont  ilz  peu  tonus,  aux  passages,  d'ou- 
vrir ce  que  s'adressoit  a  Monsieur  l'Ambassadeur  de  Venize  '»  e*  a 
moy.  Et  est  entre  ledit  Duc  en  tel  soupseçon,  que  l'on  n'entend  de 
luy  toujours  autre  chose  que  d'avoir  faict  prisonniers  les  pins  appa- 
rens  citadins  de  Florance.  Il  scayl  bien  que  Messieurs  vos  ministres 
attendent  vostre  résolution  qui  luy  eust  donne  envie  d»-  la  voulloir 
scavoir,  et  pour  cette  cause,  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  n'a  esté 
d'advis  que  .Niquet  en  approchasten  façon  quelconque; nous  n'avons 
poinct  veu  par  voz  lettres  ni  entendu  la   résolution  que  vous  avez 

Ainsi.  Gaucelin  de  La  Garde  (1292)  avait  été  mis  à  l'amende  pour  n'avoir  pas 
envoyé  île  secours  à  l'armée  de  Navarre.  En  L314,  Guillaume  de  Mandagot  avait 
dû  payer  des  subsides  pour  l'expédition  de  Belgique. 

En  bien  des  circonstances,  les  sénéchaux  de  Carcassonne  avaient  exigé  la 
finance  pour  les  acquisitions  de  fiefs  ou.arrière-fiefs  faites  par  les  sujets  des  I 
quesde  Lodève  (1294,  L305,  1325,  1329,  1332,  1354,  1357,  1358,  1360,  ! 
voir  vidimus  de  la  régale  aux  Archives  municip.  de  Lodève  .  mais,  toujours,  les 
Êvéques  de  Lodève  avaient  obtenu  gain  de  cause  et  les  officiers  royaux  avaient 
été  obligés  de  rapporter  leur  ordonnance  ou  de  restituer  ce  qu'ils  avaient  perçu. 
(Renseignements  dus  à  l'obligeante  érudition  de  M.  Albin  H&brard,  notaire  a 
Lodève). 

M    L'Évéchéde  Lodève  était  ressor table  de  la  «'.oui-  du  sénéchal  de  Carcassonne. 
-•  Etomagne,  province  d'Italie,  entre  celle  de  Ferrare  et  celle  d'Urbin. 

(3)  Orvieto. 

(4)  Odet  de  Selve. 


[JUILLET    1553]  DOMINIQUE   DU   GABRE  63 

prinse  sur  le  fait  de  Sienne,  d'aultant  que  Niquet,    pour  n'avoir 
charge  de  nous  en  communiquer  ou  aultrement,  nous  en  a  parle  le 
plus  sobrement  qu'il  a  peu.  Mais  je  suis  seur  que  Vostre  Majesté  ne 
n'y  peult  avoir  prins  que  bonne  et  saige  resolution  et  que  ceux  a  qui 
vous  lavez  commandée  le  scauront  bien  exécuter.  Sire,  quant  a  ce 
qu'il  vous  plaist  me  commander  de  requérir  Monsieur  le  Duc  de 
vous  represter  les  cinquante  mil  escus  que  je  luy  avois  remboursé, 
je  luy  ay  baillé  voz  lettres  et  celles  de  Monseigneur  le  Connestable, 
mais  il  avoit  déjà  fait  ce  que  vous  desirez,  et  il  y  a  plus  de  vingt 
jours  qu'il  m'avoit  preste  14  mil  escus  dont  je  contentai   ceulx  de 
Pannes  et  de  la  Myrandola,qui  cryoient  après  cest  argent  et  sans  ce 
ilz  nen  eussent  point  eu  le  mois  passé,  et  il  y  a  environ  10  jours 
que   Messeigneurs   le  Cardinal  et  de   Termes    m'escripvirent  une 
extrême  nécessite  ou  ilz  estoient  par  faulte  d'argent  dont  ilz  voyoient 
une  évidente  ruyne  en  voz  affaires,  me  priant  de  faire  toute  extrême 
dilligence,  de  les  secourir  de  vingt  cinq  ou  trente  mil  escuz.  Je  mon- 
tray  ceste  lettre  à  Monseigneur  le  Duc  et  n*euz  que  a  ouvrir  la  bou- 
che, car,  incontinent,  il  me  fit  délivrer  et  rendre  tout  le  reste  des 
50  mil  escus,  lesquels  j'acceptay  d'aultant  plus  volontiers  que  je  ne 
scavoys  sans  cela  ou  prendre  la  paye  de  ce  moys  pour  Parme  et  la 
Mhandola.J'ay  envoyé  a  Sienne  25  mil  escus;  Monsieur  de  Lansac  me 
mande  y  avoir  envoyé  autres  dix  mille  quil  a  empruntez,  a  la  charge 
de  les  rendre  dans  vingt  jours,  de  sorte  qu'ils  ont  de  ceste  heure  trente 
cinq  mil  escuz,  qui  est  beaucoup  plus  que  eux  mesmes  n'ont  de- 
mandé, et  qu'il  ne  leur  fault  pour  payer  ce  mois;  s'il  est  vray  ce  que 
l'on  m'a  dict,  car  ceux  qui  viennent  de  la  disent  quil  n'y  a  point  en 
tout  lestât  du  Sennois  cinq  mil  hommes  de  guerre.  Je  suis  asseuré, 
Sire,  que  vous  cognoissés  bien  que  mondit  seigneur  le  Duc  vous 
faict  en  ses  prestz  faictz  a  ses  extrémités  un  très  grand  service,  et  je 
scay  bien  que  j"ay  desja  veu  cinq  a  six  fois  vos  affaires  en  fort  mau- 
vais estât  sans  son  secours,  car  vous  devez,  Sire,  croire  que  vous 
n'avez  serviteur  déclaré  en  Italie,  ni  ville  ni  place,  qui  ne  soient  si 
pauvres  d'eux  mesmes  que  leur  taillant  la  paye  d'ung  mois,  ilz  n'ont 
après  de  quoy  disner;  ilz  vous  seront  affectionnez  tant  qu'ilz  pour- 
ront avoir  de  vostre  argent  largement,  et  sans  mesure,  comme  ils  ont 
eu  jusques  icy,  mais  sil  vous  survenoient  affaires  et  nécessitez  telle 
que  vous  ne  leur  puissiez  continuer  vos  libéralités.  Dieu  veuille  que 
leur  affection  ne  se  change,  et  que  vous  ne  les  perdiez  bientost,  et 
pour  ceste  cause,  Sire,  il  est  fort  bon  de  recognoistre  et  entretenir 
ce  prince  icy,  qui  ne  vous  fait  service  pour  avoir  rien  du  vostre,  ne 
pour  besoing  qu'il  en  ayé,  et  qui  a,  Dieu  mercy,  de  quoy  vous  accom- 
moder du  sien  comme  il  fait  bien  souvent,  et  au  besoing,  au  regard 
de  ia  lettre  qui  oblige  le  gênerai  d'Elbene  au  remboursement  de  ce 
prest  que  V.  M.  me  recommande  retirer,  je  l'avois  offerte  audit  Sei- 


64  NÉGOCIATIONS    DE  [JUILLET    15o3] 

gneur  Duc  avant  de  recevoir  vostre  lettre,  daultant  que  ledit  Del- 
benne,  soigneux  de  vostre  service,  et  ne  pouvant,  comme  il  m'escrip- 
voit,  pour  ceste  fois,  nous  envoyer  argent  dont  il  scavoit  que  nous 
étions  en  nécessité,  m'avoit  escript  que  si  je  ne  pouvois  mieulx  faire 
que  je  obligeasse  de  nouveau  sadite  lettre,  et  m'a  semblé  ne  devoir 
point  importuner  de  me  la  rendre,  d'aultant  que  pour  cela  vous  ne 
serez  pas  plustost  presse  du  remboursement,  et  que  ledit  Delbene 
mesmes  n'aura  aucun  regret  de  vous  faire  service  de  son  crédit 
envers  ledit  Seigneur  Duc.  Il  est  vray  que  jay  promis  le  remborcer 
des  premiers  deniers  et  voudroit  bien  qu'il  se  peust  faire,  puisque 
ledit  Delbene  a  déjà  mandé  faire  les  provisions,  car  c'est  toujours 
l'assurer,  pour  en  tirer  après  secours  plus  grand,  et  en  une  plus 
grande  nécessité,  mais  je  luy  vois  faire  si  francbement  ce  qu'il  faict 
que,  encores,  qu'il  s'accommodast  en  tout  ce  qu'il  pourra  a  vostre 
volonté,  si  seroit  il  bonneste  de  monstrer  qu'on  luy  veult  tenir 
parolle. 

Sire,  je  crois  que.  tant  plus  ceste  guerre  durera,  tant  plus  croistra 
la  despence  d'argent  et  voy  bien  que  les  affaires  que  vous  avez  du 
couste  de  Picardie,  qui  vous  sont  par  raison  plus  importantes  que 
ceux-cy,  vous  ousteront  le  moyen  de  pourvoir  aux  affaires  d'Italie  et 
serons  tous  les  mois  à  recommencer  et  à  travailler  pour  trouver  ar- 
gent. Monsieur  l'ambassadeur  et  moy,  avions  trouvé  assez  bon 
commencement  sur  vos  gabelles  de  Lyon,  mais  puisqu'elles  ont  été 
vendues  aux  marcbandts  de  Lyon,  nous  sommes  contraincti  de  nous 
retirer  de  ce  marché,  non  <;m>  laisser  les  marchans  un  peu  marris 
pour  les  avoir  tenus  si  longuement  en  espérance.  Il  est  vray  que  en 
pratiquant  avec  plusieurs  marchans  chrestiens  et  juifs  de  trouver 
argent,  je  pense  avoir  trouvé  un  party  qui  vous  sera  uni:  très  grand 
service  et  commodité  selon  mon  jugement,  ayant  trouvé  gens  qui 
veullent  faire  une  compagnie  et  entreprendre  de  fournir  dans  Venize 
et  dans  Bologne  tous  les  moys  cent  et  dix  mille  francs  que  mons- 
tent  toutes  vos  despences  des  garnisons  de  Sienne,  ih'  l'arme  et  de 
la  Mirandola,  et  faire  de  ceste  façon  qui  s'ensuit:  cesl  a  sca  voir  que 
au  iou,couau  20med'aoust  prochain  ils  fourniront  en  monnoye  ayant 
cours,  aux  lieux  des  garnisons,  ou  en  or,  selon  leur  commodité,  la 
somme  de  cent  et  dix  mille  francs;  le  15e  de  septembre  semblable 
somme  et  le  15e  d'octobre  semblable  somme,  se  contentons  d'estre 
rembourcez  en  escuz  a  Lyon,  ou  en  monnoye  grosse  rumine 
testons  (1)  et  reals  (2),  toute  monnoye  menue  exceptée,  au  courset 
prix  qu'elles  ont  maintenant  en  France,  en  la  façon  qui  s'ensuit:  cesl 

1)  Teslon,  ancienne  monnaie  d'argent,  valant  dix  sens  el  quelques  deniers. 

(2)  Real,  monnaie  d'Espagne,  égale,  en  billon,  au  ringtièn i.  en  argent,  au 

dixième  de  la  piastre. 


[JUILLET    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  65 

à  savoir  le  premier  jour  d'octobre  cent  et  dix  mille  francs,  le  pre- 
mier jourde  novembre  cent  et  dix  mille,  et  le  premier  jour  de  dé- 
cembre cent  et  dix  mil,  de  sorte  quils  viennent  a  avoir  déboursé 
deux  cens  vingt  milles  livres  du  leur  pour  les  deux  mois  daoust  et 
septembre  avant  que  de  toucher  de  vostre  argent,  pour  lequel  prest 
et  advance  ilz  ne  vous  demandent  aucun  proffit  ne  interetz.  Voicy 
tout  ce  quilz  demandent:  ilz  disent  en  premier  lieu  quil  couste,  en- 
tre marchans  mesmes,  de  remettre  argent  de  Lyon  en  Italie  cinq 
pour  cent,  ilz  en  veullent  seullement  ung  davantage  et  se  charger  de 
remettre  en  Italie  ou  ailleurs,  ou  bon  leur  semblera,  et  le  mieulx 
quils  pourront,  largent  que  vous  leur  aurez  baille  a  Lyon,  le  tout  à 
leurs  despens,  périls  et  fortune,  sans  que  Vostre  Majesté  aye  aucun 
souci,  perte  ni  despence  de  faire  tenirargent  en  Itallie,  tellementque, 
a  ceste  raison  de  six  pour  cent  quilz  veullent  pour  le  port  et  change, 
vous  auriez  à  leur  faire  payer  à  Lion,  le  premier  jour  doctobre,  cent 
seize  mil  six  cens  livres  pour  principal,  change  et  interestz,  le  pre- 
mier jour  de  novembre  autant,  et  le  premier  jour  de  décembre  aul- 
tant.  Veullent  une  autre  chose  qui  est  la  plus  malaisée,  c'est  quils 
n'ayent  a  traiter  que  avec  le  gênerai  dAlbenne  en  son  propre  et  privé 
nom,  et  quil  prenne  par  de  la  de  vous,  les  sûretés  telles  qu'il  advisera, 
se  voulant  bien  fier  a  luy  seul  de  la  seureté  de  leurs  deniers  pour  la 
bonne  réputation,  en  quoy  ilz  le  tiennent  destre  homme  de  bonne 
foy  et  qui  scait  conduire  ses  affaires.  Veullent  aussi  permission  de 
transporter  hors  de  France,  soit  en  Italye  ou  ailleurs,  ce  quilz  auront 
receu  a  Lyon,  soit  en  or  ou  en  monnoye,  quand  ils  verront  en  avoir 
plus  de  commodité  que  de  le  remettre  par  lettre  de  change,  et  a  leur 
langage  je  veoy  bien  que  si  l'on  leur  tient  parolles  ces  trois  premiers 
mois  qu'ilz  continueront  toute  l'année  et  moys,  en  suivant  de  cette 
mesme  façon.  Je  ne  scays,  Sire,  si  je  me  scaurois  bien  expliquer  et  en- 
tendre, mais  cest  ung  party  qui  me  semble  bien  claire  et  intelligible 
et  de  petite  perte  pour  Vostre  Majesté,  et  qui  mettra  en  grans  repos 
et  sûreté  vos  affaires  de  deçà,  vous  et  voz  serviteurs  avec,  et  ne  voy 
point  ou  c'est  que  peuvent  en  avoir  grand  gaing  ceulx  qui  le  veulent 
entreprendre,  s'ilz  ne  le.  font  sur  la  diversité  des  monnoyes,  chose 
qui  ne  vous  tourne  point  à  perte  ny  ne  sort  poinct  de  votre  bource. 
Et  pour  ce,  Sire,  que  j'ay  veu  ledit  General  dAlbenne  et  autres  mar- 
chands difficiles  a  faire  telles  seuretez,  je  luy  envoyé  la  coppie  de  cet 
article  pour  ne  point  perdre  de  temps,  et  affin  qu'il  se  résolve  sil 
vous  vouldra  ou  pourra  faire  ce  service  qui  luy  tourneroitaussi,àmon 
advis,  a  solaigement,  veu  les  difficultez  que  luy  mesmes  m'escript  de 
trouver  argent  par  deçà,  et  lui  envoyé  pour  cette  cause  ung  corrier 
exprès,  et  puis  que  ces  marchands  ne  demandent  que  luy,  et  je  scay 
fort  bien,  et  le  voy  tous  les  jours  par  les  effectz  quil  est  fort  affec- 
tionnné  à  votre  service,  et  au  bien  de  vos  affaires,  j'ay  opinion  et  es- 

8 


66  NÉGOCIATIONS    DE  rJUILLET    15531 

perance  quil  ne  fera  difficulté,  en  quoy  faisant.  Sire,  il  vous  fera  ung 
très  grand  service  et  digne  d'estre  recogna  de  V.  M.  avec  les  autres 
passez,  car  pendant  que  vous  serez  occupé  a  cesle  guerre  de  Pycar- 
die  et  durant  ces  trois  ou  quatre  mois,  vous  aurez  loisir  et  commo- 
dité de  penser  et  pourvoir  aux  affaires  de  delà,  et  si  ledit  Delbenne 
se  resoult  de  faire  ladite  seureté  et  que   Messeigneurs  de   vostre 
conseil  trouvent  bon  ce  party,  il  ne  faut,  Sire,  que  advertiren  dilli- 
gence  ledit  Delbenne   de  vostre  volonté  et  luy  mander  qu'il  m'en- 
voye   par  corrier  exprès  sa  lettre  obligatoire,   telle   que  je  la  luy 
demande,  et  puis  reposez  vous  sur  moy  de  l'exécution  de  ce  party, 
car  j'ay  fort   bonne  espérance  de  le  faire  mettre  a  effect  sans  qu'il 
vous  faille  desborcer  rien  a  Lyon,  ne   icy,  jusques   au  premier  jour 
d'octobre,  et  si  ledit  général  avoit  cependant  fait  provision  par  deçà 
d'autre   argent  pour  aoust,  jen  pourrais  rembourser  Monsieur  le 
Duc,  qui  le  rendroit  fort  content  et  plus  prompt  une  autre  fois,  car, 
après  tout,  c'est  aultantd'argent  en  réserve  et  entre  ses  mains  pour 
vous  en  prévaloir  à  une  grande  nécessité  à  laquelle  je  suis  seur  quil 
ne  vous  refusera  jamais,  veu  l'affection  qu'il  porte  à  vostre  service. 
Et  si  davanture.  Sire,  ce  party  ne  vous  estoit  agréable,  ou  que  ledit 
Général  d'Elbenne  ne  voulut  en  cela  vous  prester  son  crédit,  je  vous 
supplie  très  humblement  luy  escripre  fort  expressément  quil  ayt  à 
envoyer  et  pourvoir  dargent  par  deçà,  en  sorte  que  a  larrivée  de 
l'armée  de  nier,  qui  apportera  encores  plus  grande  despence,  on  ne 
laisse  point  empirer  voz  affaires  pour  nous  trouver  en  nécessité,  ci 
vous  plaira.  Sire,  sur  le  tout  me  faire  entendre  vostre  volonté  et  me 
reputeray  heureux  si  cecy  vous  est  agréable  d'avoir  esté  ministre  de 
chose  ipie  je  pense  vous  estre  de  quelque  solaigement  aux  grandes 
affaires  que  vous  savez  maintenant.  Il  faudroit  aussy,  en  ci'  cas  la, 
pour  la  commodité  de  ces  marchands  une  vostre  lettre  quilz  m'ont 
demandé,  adressant  aux  commis  de  l'extraordinaire  par  deçà  a  ce 
quilz  ayent  a  recevoir  toutes  monnoyes  de  ce  pays,  aux  prix  qu'elles 
auront  cours,  aux  lieux  ou  vous  faietes  despences  et  les  ecus  avec,  et 
quils  facent  leurs  quittances  de  ce  qu'il/  recevront  a  livres  tournois 
et  non  a  escus,   puisque  le  remborcement  se  doit  faire  en   livres 
tournois,  especifiant  toutes  fois  en  leurs  dites  quittances  les  espè- 
ces qu'ils   recevront,  comme  il  est  coustume  en   vos   finance  eu 
France. 
De  Ferrare  ce  21e  de  juillet  1553. 

(ItiM.  nat..  Fr.  20642,  lui.  I  id    (copie  . 


JUILLET    i  5-r>3  DOMINIQUE   DU    GABRE  67 


(ÎABRE    AU    CONNETABLE 

47.  —  [Ferrure1,  'Il  juillet  l.).)3.  —  Monseigneur,  J'ay  vu  qu'il  a 
pieu  au  Roy  et  a  vous  de  m'escripre  et  ne  ma  point  failly  en  recher- 
cher Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  duprest  de  50  mil  escus,  car  je 
lavois  desja  faict  sans  qu'il  me  fust  besoin  dy  user  autre  persuasion 
ny  remonstrance  que  de  luy  faire  veoir  la  nécessité  des  affaires  du 
Roy  par  les  lettres  que  javois  de  Sienne,  lesquelles  je  vous  envoyé  ; 
et  m'a  très  liberallement  fait  rebailler  le  tout,  je  ne  l'ay  point  re- 
cherché des  dix  mil  escus  d'avantaige  dont  vous  m'escripvez  pour 
ce  que  ce  mois  de  juillet  est  paye  partout,  et  avant  que  l'on  soit  a 
l'autre  paye,  le  général  d'Elbenne  aura  faict  quelque  provision  d'ar- 
gent, comme  il  m'escript.  Quant  je  y  verrois  la  nécessité,  je  scay 
bien  que  Monsieur  le  Duc  ne  laissa  mal  aller  les  affaires  ;  a  faulte  de 
dix  mil  escus,  et  ne  pense  point  que  sans  luy  et  son  secours,  il  ne 
fut  advenu  grands  désordres  aux  affaires  de  deçà,  car  nous  nous 
sommes  veuz  cinq  ou  six  fois,  a  la  fin  du  mois,  sans  ung  escu,  et  il 
nous  a  toujours  donne  moyen  d'appaiser  et  satisfaire  partout.  Je 
vous  supplie  Monseigneur  que  sa  bonne  volonté  et  ses  bons  effectz 
soient  cognus  et  quil  soit  bien  traité  en  ses  affaires  ;  il  me  disoit 
encores  avant  hyer  que  depuis  quil  pleust  au  Roy  se  charger  de  la 
recompence  de  Bresseil  envers  Monsieur  le  Cardinal  son  frère,  il 
n'avoit  plus  a  y  penser  qu  rit  a  luy,  mais  que  pour  rendre  son  dit 
frère  plus  content,  il  eust  fort  désiré  que  le  Roy  luy  eust  accorde 
la  dite  récompense  en  temporel  comme  est  Bresseil,  a  la  vie  dudit 
Cardinal  ;  je  ne  vous  en  escript  point  pour  vous  en  vouloir  estre  im- 
portum,  mais  pour  ne  faillir  a  vous  dire  ce  que  je  voy  en  luy  et  les 
moyens  que  vous  avez  de  toujours  l'obliger,  et  en  chose  de  petite 
importance;  je  ne  vous  diray  rien  des  affaires  de  Sienne,  d'où  je  nay 
rien  entendu  despuis  la  despeche  que  vous  a  apporté  Ascanio  de 
Nepy;  la  restitution  de  Lezignan  (1)  n'est  point  encore  exécutée  pour 
ce  que  le  Duc  de  Florence  a  voulu  avoir  lettres  patentes  de  la  Sei- 
gneurie, comme  ils  pardonnent,  aux  habitants  de  ce  lieu  la,  toutes 
les  faultes  que  l'on  leur  pouvoit  reprocher  en  cette  mutation  la  ; 
quant  à  l'armée  de  mer,  je  vous  envoyé  quelques  advis  que  Mr  le 
Duc  en  eust  hier,  je  présuppose  que  vous  aurez  escript  par  Niquet 
ce  qu'elle  aura  afaire,  et  a  ceux  de  Sienne  aussi.  Vous  verrez  Mon- 
seigneur ce  que  j'escrips  au  Roy  d'un  party  pour  vous  mettre  hors 
de  la  passe  ou  vous  estes,  d'envoyer  tous  les  mois  argent  par  deçà. 
Si  le  gênerai  d'Albenne  veut  faire  service  au  Roy  d'asseurer  ceux 

(1)  Lucignano,  village  d'Italie,  au  N.-E.  de  Sienne  et  à  G4  kilomètres  S.-S.-E.  de 
Florence. 


68  NÉGOCIATIONS    DE  AOUT    1553] 

qui  veullenl  fornir  l'argent,  vous  seriez  en  grand  repos  et  nous  avec 
par  deçà,  car  il  ne  fault  que  faillir  ung  moys  a  ces  gens  icy  pour 
perdre  tout,  tant  de  biens  que  vous  leur  avez  fait  par  le  passé,  et 
pour  peu  qu'ilz  vissent  mutation  de  fortune  en  voz  affaires,  je  croy 
qu'ils  ne  demanderoient  pas  mieux  que  celte  excuse,  par  quoy  si 
l'on  vous  trouve  par  delà  les  moyens  et  les  inventions  pour  y  remé- 
dier, aidez  les  s'il  vous  plaist  de  vostre  part,  car  de  mon  cousté  j'ay 
fort  bonne  espérance  de  faire  exécuter  ce  que  contient  la  lettre  que 
j'escrips  au  Roy,  mais,  que  du  vostre  vous  ne  faillez  a  vous  mesme. 
et  pour  ne  tenir  ces  gens  en  suspens,  il  sera  bon,  sy  l'on  trouve  ce 
party  avantageux  pour  le  Roy,  que  l'on  despecbe  incontinent  ung 
courrier  exprès  a  Albisso  d'Elbene,  et  avec  une  simple  lettre  sienne 
qu'il  m'envoye  telle  que  je  luy  escris,  il  me  suflîra.  et  puis  après,  il 
traittera  a  plus  grand  loisir  ce  quil  lui  fault  de  vous  pour  sa  seureté, 
vous  asseurant  Monseigr  que  s'il  fait  ce  service  et  vous  ne  luy  faites 
faire  du  bien,  vous  donnez  un  très  mauvais  courage  aux  autres,  car 
il  y  met  son  crédit,  qui  est  l'bonneur  et  la  ricbesse  d'ung  marchand, 
et  y  hazarde  tant  de  facultez  qu'il  a;  cecy  me  gardera  d'aller  a 
Sienne,  ou,  Messieurs  qui  sont  la,  me  mandent  aller:  d'ailleurs  je  scay 
bien  que  ce  lieu  icy  ne  doit  point  en  ce  temps  demeurer  qu'il  ny 
ait  quelqu'un  pour  le  Roy  et  seroit  besoins  qu'il  y  en  eut  un  plus 
suffisant  que  moy,  qui  est  tout  ce  que  je  vous  diray  pour  ceste  heure. 
De  Ferrare  ce  21  juillet  1553. 

Monseigneur,  vous  m'avez  escrit  de  voir  ce  quil  fauldroit  pour 
fournir  la  place  de  la  Mirandola,  de  ce  qui  y  fait  besoing,  et  vous  en 
envoyer  un  estât,  il  vous  plaira  voir  une  liste  de  ce  que  le  Comte 
demande,  qui  ne  monte  que  3000  ecus  de  dépense;  quand  vous  vou. 
drez  qu'il  soit  accommodez  de  si  peu  de  chose,  il  vous  plaira  de  me 
le  faire  entendre  et  m'envoyer  de  quoy  le  faire. 

(Biltl.  nul..  Fr.  20642,  fol.  1  »•>    (copie) 


GABRE    AU    ROI 

48.  —  [Ferrare],  14  août  1553.  —  Sire,  Monsieur  de  Termes  est 
allé  trouver  l'armée  en  l'Isle  d'Elbe,  on  verra  quelle  resolution  ils 
prendront  ensemble;  far  si  c'est  de  faire  la  conqueste  de  l'Isle, 
beaucoup  de  gens  disent  que  le  port  est  garny  de  deux  grosses  for- 
teresses, et  qu'il  y  aura  bien  affaire  a  les  forcer.  Cependant  le  Duc 
de  Florence  s'est  armé  grossemenl  ci  a  aujourd'huy,  comme  disent 
ceux  qui  en  viennent,  dix  mille  hommes,  et  en  l'ail,  tous  les  jours. 
assembler  davantage;  il  y  a  danger  qu'aussi-tost  que  Monsieur  de 
Termes  se  sera  embarqué  avec   les  quatre  raille  hommes,  et  com- 


[septembre  1553  Dominique  du  cabre  69 

mencé  la  guerre  a  l'Elbe,  ou  a  Plombin  (1),  que  le  dit  Duc  de  Flo- 
rence ne  melte  toutes  ses  forces  dans  le  Siennois,  conduites  par  le 
Marquis  de  Marignan  qui  est  auprès  de  luy.  Mais  je  crois  bien  que 
s'il  voit  que  l'armée  ne  soit  a  l'Elbe  que  pour  prendre  rafraischisse- 
ment,  qu'il  ne  sera  pas  le  premier  a  commencer  la  guerre  entre 
vous  deux,  et  craindra  de  vous  provoquer  davantage  ;  scacbant  qu'il 
ne  vous  en  a  donné  que  trop  d'occasion  par  le  passé.  Monsieur  le 
Duc  de  Ferrare  ne  se  lie  pas  fort  en  luy,  comme  Vostre  Majesté  le 
scait,  et  le  voyant  si  grossement  armé,  il  craint  d'estre  contraint 
aussy  de  s'armer,  et  je  luy  en  voy  quelque  volonté  pour  n'eslre  pas 
au  despourveu,  et  si  je  la  luy  voy  continuer,  je  ne  travailleray  pas 
fort  a  l'en  dissuader:  car,  s'il  le  fait,  il  mettra  grand  soupçon,  et  a 
l'Empereur,  et  au  Duc  de  Florence,  et  penseront  qu'il  se  vueille 
déclarer;  chose  qui  ne  leur  plairoit  guère.  Il  est  vray  que  celuy  la 
fait  désirer  le  remboursement  de  ce  qui  luy  est  deu,  pour  se  pou- 
voir aider  du  sien,  et  nous  le  rendra  aussi  d'aultant  plus  difficile  a 
en  prester  doresnavant,  car  si  de  mal-heur  l'Empereur  venoit  au 
dessus  de  ses  intentions,  ledit  Seigneur  Duc  s'attend  bien  d'avoir 
des  affaires  de  son  costé,  et  se  veut  tenir  bien  pourvu  et  préparé. 
Pour  ceste  cause,  Sire,  je  seroys  bien  marry  s'il  nous  fallait  recom- 
mencer une  guerre  a  Sienne  ou  ailleurs.  Car  je  voy  que  vous  avez 
pour  vostre  guerre  de  Picardye  besoin  de  tout  ce  qu'on  peut  recou- 
vrer, et  nous  n'avons  pas  moien  de  payer  pardeça  une  seule  nou- 
velle compagnie  de  gens  de  guerre,  ny  a  peine  de  maintenir  les 
garnisons  que  vous  avez  commandées. 
De  Ferrare  14  août  1553. 

(Ribier,  Mémoires  et  lettres  d'Estat,  etc.,  t.  n,  p.  450). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

49.  —  [Ferrare],  S  septembre  1553.  —  Monseigneur,  Je  nay  eu  que 
ce  matin  audiance  combien  que  je  arrivasse  hier  après  disner.  Mais 
aussi  je  ne  pouvois  avoir  chevaulx  sans  licence  du  seigneur  mesmes. 
Noz  propoz  ont  este  courtz  et  en  termes  generaulx.  Et  ayant  veu 
quon  parloil  fort  réservé,  jay  incontinent  prins  congé,  mayant  dit 
que  le  passaige  sera  tousjours  seur  pour  moy  et  autres  ministres 
du  Roy  et  pour  largent  avec.  Mais  quon  ne  luy  donne  occasion  de 
changer  de  volonté.  Icy  ont  nouvelles  que  Drogut   (2)  avoit  mis 

(1)  Piombino,  ville  forte  de  Toscane,  en  face  de  l'île  d'Elbe. 

(2)  Droguet  ou  Dragut,  célèbre  corsaire,  né  en  Anatolie,  servit  sous  Barberousse 
et  commanda  la  flotte  de  Soliman  le  Magnifique;  il  mourut  au  siège  de  Malte  en 
1556. 


70  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    1553' 

quatorze  canons  en  terre  pour  batre  Bonifacio  (1)  dans  lequel  estoit 
le  gouverneur  de  lisle  et  quon  pense  quilz  le  prendront.  De  Picar- 
die, ilz  nen  ont  aucunes  nouvelles  depuis  le  xxe  du  passe.  Je  serai 
ce  soir  a  Sienne,  sil  plaist  a  Dieu,  et  sil  ne  me  survient  aucun  em- 
peschement.  Cest  a  la  haste,  Monseigneur,  sur  le  chemin  ou  jay 
rencontre  ce  porteur. 
Ce  vendredi  vme  septembre  1553. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale  etc.  . 


GABRE   AL'    ROI 

50.  —  [Ferrare],  Pr  octobre  1553. —  Sire,  depuis  mon  autre  lettre 
escripte  a  Sienne,  je  suis  arrivé  tcy  de  retour,  ayant  veu  Monsieur  le 
Duc  de  Florence  en  passant,  et  este  avec  luv  assez  longuement  et, 
venant  sur  le  propoz  delà  suspension  que  le  Pape  (2  a  voit  proposée 
pendant  que  j'estois  a  Sienne,  laquelle  vous  est  envoyée  par  Mon- 
sieur le  Cardinal  de  Ferrare,  il  me  dit  que  toute  suspension  et  Irefve 
luy  seroit  fort  préjudiciable,  car,  il  confesseroit  par  la.  avoir  été  en 
guerre  avec  V.  M.;  auquel  cas  ce  seroi  a  lui  qui  est  Finférieur,  a  la 
chercher  et  demander,  mais  qu"il  ne  se  plaint  point  de  guerre  que 
vous  luy  avez  faite,  et  aussy  ne  veull  pas  advouerde  vous  en  avoir 
commencée  et  que  cela  l'avoit  gardé  d'accepter  ladite  suspension  : 
je  luy  dis  la  dessus  que  cela  ne  seroit  pris  en  cesle  façon  de  chacun, 
et  que,  lavant  vos  ministres  acceptée,  a  la  grande  prière  du  Pape  et 
pour  satisfaire  a  sa  Sainteté  et  luy  lavant  refusée,  on  ne  pouvoil 
attribuer  cela  que  a  quelque  desseing  ou  entreprinse  qu'il  eust  sur 
cest  estât  de  Sienne,  qui  seroit  cause  de  faire  prendre  meilleure 
garde  a  toutes  choses  et  de  faire  tenir  plus  -rosses  voz  i:arnizons. 
Il  me  réspondit  que  je  voyois  bien  qu'il  avoil  casse  ses  gens  de 
guerre  et  que  cela  nous  devoit  oster  cesti'  opinion  de  luy.  mais  que, 
si  l'on  en  avoit  souspeçon  quil  seroi I  presl  d'entendre  a  toute  autre 
forme  d'accord  et  de  capitulation,  et,  luv  ayant  dit  que  s'il  enpropo- 
soit,  j'en  advertirois  Monsieur  le  Cardinal  pour  lui  respondre,  lequel 
a  ce  que  il  voyoit,  estoit  de  fort  bonne  volonté  eu  son  endroit  et  «pie 
ledit  sieur  Duc  avoit  aussy  uni:  bon  ami  auprès  'le  Vbstre  Majesté 
qui  estoit  Monsieur  le  Cardinal  de  Tournon,  qui  ne  fauldroit  de  faire 
bons  offices  pour  luy  eu  ce  qu'il  desiroit  raisonnable,  et  il  demeura 
sur  les  siennes  sans  vouloir  proposer  aulcun  party,  sinon  qu'il  des- 
pecheroit  ung  homme  devers  le  Pape,  a  qui  il  en  falloit  donner  [hon- 
neur, et  luy  feroit  entendre  son  intention,  .le  luv  dist,  pour  le  premier 

i    Konifaeio,  ville  forte  de  Corse,  avec  port,  sur  le  détroit  du  même  nom. 
(2)  Jules  III. 


[OCTOBRE    1553]  DOMINIQUE    DU   GABRE  71 

party  qui  me  vint  a  la  bouche  qu'il  se  pourroit  bien  faire  une  capi- 
tulation ,  que  ces  deux  estatz  de  Sienne  et  de  Florence  ne  se  pour- 
raient offeneer  l'ung  l'aultre,  et  qu'il  y  auroit  bonne  voisinance  et 
libre  commerce  entre  eulx,  sans  y  faire  aulcune  mention  de  guerre 
ny  de  suspension.  Lors,  il  me  dit  qu'il  escriproit  a  Monsieur  le  Car- 
dinal et  envoyeroit  devers  le  Pape  et  qu'on  le  trouverait  prest   a 
entendre  toutes  choses  raisonnables.  De  quoy  j'advertiz  incontinant 
mondit  seigneur  le  Cardinal,  et  croy  que  ceste  forme  de  cappitulation 
ou  aultre  semblable  qui  n'obligerait  rien  que  voz  forces  de  Sienne 
vous  serait  plus  advantageuse  que  la  suspension    proposée  par  le 
Pape,  laquelle  veult  obliger  toutes  voz  forces,  d'où  qu'elles  viennent, 
par  mer  ou  par  terre,  et  ne  pouvoir  offeneer  ledit  Duc  ;  et  je  ne 
scay  sy  Vostre  Majesté  serait  contente  de  se  lier  a  cela;  il  me  dist 
la  seconde  défaite  et  ruine  du   Marquis   Albert  (1)  et  confessoit  la 
retirata  de  l'armée  de  l'Empereur,  quil  attribuoit  a  prudence  pour 
s'estre  trouve  de  beaucoup  inférieure  a  la  vostre;  qu'il  avoitadvis 
de  son  ambassadeur  quil  se  traittoit  quelque  trefve  entre  vos  deux 
Majestéz,   laquelle  il   désirait   fort   de  son  coustez,  puit  me  dist  la 
prinse  de  Boniface  ou  Drogut  avoit  faict  de  grandes   cruautez  et 
que  cestoit  ung  port  fort  de  nature  et  d'une  très  grande  importance; 
que  les  Genevoiz  (2)  estoient  resoluz  de  faire  tout  leur  effort  possi- 
ble pour  recouvrer  ceste  isle  la,  mais  quils  sont  coustumiers  de  ne 
pourvoir  a  leurs   affaires  que  après  le  faict  ;  je  luy  dict  que  nous 
avions  bien  présenty  qu'ilz  cherchoientayde  avec  luy  mesmes  pour 
leur  s  deffences,  et  se  parloit  en  beaucoups  de  lieux  quilz  faisoient 
ligue  pour  se  deffendre  et  secorir  l'un  l'aultre,  il  m'asseura  quil 
n'en  avoit  oneques  oy  parler  et  que  je  cognoissois  mal  les  Genevois, 
qui  estoient  si  superbes  quilz  se  tiendraient  a  honte  de  demander 
aide  a  personne,  qu'on  verraient  maintenant  ce  quilz  savoienl  faire, 
et  que  c'estoit  a  eulx  a  courir,  monstrant  qu'il   n 'avoit  pas  grand 
regret  a  leur  travail,  et  sy  me  dist  davantaige  que  si  Vostre  Majesté 
les  pouvoit  assurer  de  les  fornir  de  bled  qui  leur  est  nécessaire  par 
la  Provence,  que  vous  pourriez  aisément  les  attirer  a  vostre  dévo- 
tion, mais  que  la  nécessité  quilz  ont  des  bledz  de  Cicille  (3),  et  quilz 
ont  toutes  leurs  richesses  ez  mains  de  l'Empereur  ou  dans  ses  pays 
les  gardera  d'abandonner  l'Empereur  ;  il  me  fist  ung  peu  plus  de 
caresses  qu'il  n'avoit  faite  a  l'aller  et  me  fist  voir  ses  enfans  dont 
il  y  en  a  l'aisné  (4)  déjà  grandet,  de  treize  ou  quatorze  ans,  et  luy  dict 

(1)  Albert,  marquis  de  Brandebourg,  né  en  mars  1522,  mort  le  8  janvier  1558. 
En  153 i,  il  fut  dépouillé  de  ses  États  et  se  retira  en  France. 

(2)  Génois. 

(3)  Sicile. 

(4)  François  de  Médicis,  associé  au  pouvoir  par  son  père  en  1564,  lui  succéda 
en  1574  et  régna  jusqu'en  1587.  Il  mil  son  dévouement  au  service  de  Philippe  N, 


72  NÉGOCIATIONS  DE  ^OCTOBRE  1553"1 

qu'il  seroit  tantost  temps  de  parler  de  le  marier  pour  veoir  sil  avoit 
envie  de  parler  de  quelque  chose,  mais  il  n*en  fist  semblant  et  dist 
quil  estoit  encores  trop  jeune  ;  tout  le  reste  de  nostre  discours  fust 
de  propos  commungs  et  familiers.  Tous  noz  corriers  et  argent  pas- 
sent maintenant  par  Florence  sur  sa  parolle  et  on  n'y  fait  plus 
fascherie  a  personne,  de  sorte  que  j'estois  d'opinion  que  Monsieur 
le  Cardinal  cassast  les  six  cens  hommes  qui  sont  superflux  a  Sienne 
oultre  les  trois  mil  commandez  par  Vostre  Majesté,  mais  a  ce  quil 
m'aescript  parce  gentilhomme  quil  a  despeché  vers  vostre  Majesté, 
il  est  résolu  de  les  entretenir  encores  pour  ce  mois  qui  vient,  atten- 
dant ce  que  fera  ledit  Duc  de  Florence. 

Sire,  je  n'ay  poinct  encores  responce  a  ce  que  je  vous  ay  escript 
des  partiz  qu'on  m'avoit  ici  présentez  ;  si  vostre  Majesté  se  resoull 
a  modérer  icy  la  despence  comme  il  me  semble  qu'on  doibt  l'aire, 
il  ne  sera  plus  besoing  de  si  grosses  provisions,  mais  si  vous  de- 
mourez  toujours  en  guerre  et  quil  ne  se  conclue  quelque  trefve, 
vostre  Majesté  doibt  prendre  argent  de  tous  coustez  et  en  Italie  et 
en  France,  quand  il  s'en  trouve,  et  faire  soulier  vostre  ennemy  de  la 
guerre  sil  ne  veult  recongnoistre.  11  nous  fault  pour  ce  mois  d'Octo- 
bre, environ  35  mil  escuz  pour  tous  les  lieux  donl  nous  n'avons 
que  environ  trente  mil  livres,  et  faull  (pie  le  surplus  vienne  dem- 
pruntz  nouveaulx,  par  quoy  il  plaira  a  Vostre  Majesté  y  faire  pour- 
voir; je  ne  scay  si  les  partiz  accordez  a  Venize,  a  Monsieur  l'Ambas- 
sadeur, sont  pretz  ny  argent  comptant,  d'aultanl  quil  me  semble, 
quil  y  avoit  de  grandes  longueurs  avant  que  de  desborcer  l'argent  ; 
il  ne  peult  estre  que  nous  n'ayons  bientost  de  voz  bonnes  nouvelles 
sur  cela  et  du  progrez  de  vostre  armée. 

De  Ferrare  ce  premier  d'Octobre  1553. 

Sire,  j'ay  trouvé  icy  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  qui  s'en  va 
dans  deux  jours  voir  ses  fortiffications  de  Bresseil  el  Fteige  l  et  y 
mettre  la  dernière  main  pour  ceste  année  ;  je  l'ay  trouve  forl  aise 
des  heureuses  nouvelles  qu'il  entend  tous  les  jouis  de  vostre  armée, 
car  il  ne  pouvoit  croire  que  l'Empereur  se  lis!  mieulx  quil  na  faict, 
trouvant  fort  estrange  quil  eul  mis  armée  en  campagne,  si  foible 
qu'elle  ayt  este  contrainte  se  retirer  de  la  sorte  qu'elle  a  faict,  il 
est  tousjours,  Sire,  d'une  très  bonne  volunte  et  dévotion  en  vostre 
service:  il  a  reçu  hier  une  despeché  en  chiffre  du  Due  Auguste  (2) 

accabla  son  peuple  d'impôts  el  trouva  la  richesse  dans  la  confiscation  'les  biens 
des  grandes  familles .  Toutefois,  il  se  montra  protecteur  éclairé  des  arts  el  fonda 
la  célèbre  galerie  de  Florence.  Il  fui  le  père  de  Marie  de  Médicis. 

(1)  Reggio. 

(2)  Auguste,  électeur  de  Saxe,  dil  le  Pieux,  frère  cadel  de  Maurice  voir  ci- 
après  ,  né  31  juillet  1526,  mort  février  1586. 


[OCTOBRE    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  73 

frère  du  feu  Maurice  (1),  de  laquelle  il  m'a  dict  qu'il  vous  laict  don- 
ner emple  ad  vis  par  son  ambassadeur,  parquoy  je  n'en  feray  icy 
redicte. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20642,  fol.  173)  (copie;. 


GABRE    AU    CONNETABLE 

51.  —  [Ferrure],  ô  octobre  1553. —  Monseigneur,  j'ai  receu  par 
Niquet  la  lettre  quil  vous  a  pieu  mescripre  du  17  du  passe  contenant 
la  façon  tenue  a  chercher  l'ennemy  et  a  lui  présenter  la  bataille  ;  je 
croy  que  aujourdhuy  ceste  lettre  est  en  beaucoup  de  mains  en  Italie, 
car  je  l'ay  fait  traduire  en  Italien,  et  soudain  ay  trouvé  qu'on  l'avoit 
fait  imprimer,  il  nous  peult  estre  aussy  bien  permis  que  aux  Impé- 
riaulx  de  faire  imprimer  leurs  mensonges,  vostre  retraite  est  loué  et 
estimée  de  chacun  et  ne  puis  croire  que  l'Empereur  vueille  avoir 
encore  cest  hiver  une  armée  sur  les  bras  pour  vous  fascher  de  ce 
cousté  la,  et  s'il  ne  cherche  maintenant  propoz  par  trefve  ou  par 
une  paix,  il  fault  dire  qu'il  a  encore  espérance  de  vous  lasser  a  la 
longue  par  faulte  d'argent,  à  quoy  je  m'attens,  Monseigneur,  que  vous 
scaurez  bien  remédier,  il  me  semble  que  des  affaires  de  deçà  vous 
en  pouvez  estre  en  repoz,  et  les  ranger  et  reigler  a  un  estât  certain, 
et  quil  n'y  fault  craindre  pour  cest  iver  aulcune  altercation  ne 
(2)  réserve  a  Corsegne  (3),  lequel  par  ce  que  j'ay  entendu 
de  Niquet  vous  avez  délibère  de  bien  secourir  ;  qui  est  a  mon  advis 
une  fort  bonne  resolution  pour  l'importance  de  ce  lieu  la  très 
grande,  sy  jamais  l'on  a  envié  de  dominer  et  conquérir  en  Italie.  Vous 
verrez,  Monseigneur,  par  une  despeche  de  Monseigneur  de  Termes, 
que  Monseigneur  le  Cardinal  de  Ferrare  ma  envoyée,  ouverte, 
comme  toutes  choses  se  portent  bien  de  ce  cousté  la;  sy  ces  espai- 
gnolz  et  allemandz  qui  sont  a  Gennes  estoient  employés  a  autres 
entreprises  que  en  Corsegne  ou  en  Piedmont,  on  vous  en  donnera 
incontinent  adviz  et  a  nouveaulx  accidentz  nouveaux  conseils,  car 
ilz  se  peulvent  adresser  en  lieu  du  Roy  ou  l'on  naye  bon  moyen  de 
leur  respondre.  ne  rien  surprendre  ou  Ton  ne  puisse  bientost  pour- 
voir en  telles  nécessitez.  Je  faiz  grand  fondement  sur  laffection  que 
Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  a  au  service  du  Roy,  lequel  je  veoy 
fort  content  de  sa  Majesté,  et  je  veult  croire  quil  ne  nous  laissoit  pas 

(1)  Maurice,  électeur  de  Saxe,  né  le  21  mars  1521,  mourut  le  11  juillet  1553  des 
suites  d'une  blessure  reçue  dans  un  combat  contre  Albert,  marquis  de  Magde- 
bourg;  son  frère  Auguste  lui  succéda. 

(2)  Mot  en  blanc  dans  le  texte. 
\3)  La  Corse. 


74  NÉGOCIATIONS    DE  OCTOBRE    15o3j 

en  ung  maulvais  passage,  s'il  nous  en  peut  gecter  dont  il  a  bien  le 
moyen.  Monseigneur,  jay  entendu  de  Niquet  que  Ton  faisoit  quelque 
changement  de  ministres  du  Roy  en  Levant  ;  je  ne  craindray  point 
de  vous  dire  que  Monsieur  lAmbassadeur  de  Venize  (1)  et  moy,  de- 
vizant  ensemble  de  la  charge  dambassadeur  en  ce  pays  la,  trouvions 
Mr  de  Forquevaulx  selon  nostre  oppinion  aultant  a  propos  pour  ceste 
charge  que  gentilhomme  que  l'on  y  scauroit  choisir,  car  il  a  beaucoup 
veude  monde  et  de  pays  par  mer  et  par  terre  etsy  est  homme  de  guerre 
et  homme  de  lettres,  et  sest  trouve  en  degran  des  affaires.  Quelques 
fois  vous  avez  faulte  de  gens  capables,  et  vous  trouvez  empeschez  a 
en  faire  bonne  eslection,  par  quoy  il  vous  plaira  de  m'excuser  si  jay 
usé  de  présomption  a  vous  nommer  cesluy  la  qui  n'en  scay,  je  vous 
en  respondz,  chose  du  monde,  mais  la  charge  est  si  honorable  quil 
l'accepteroit  bien,  luy  donnant  loisir  d'aller  jusques  devers  le  Roy  et 
sa  maison,  dont  je  veoy  quil  a  fort  grande  envie,  et  s'attend  d'avoir 
son  congé  pour  cest  hiver,  sy  est  ce  que  lieu  de  Parme  ne  doibt  pas 
demourer  quil  y  ait  quelquun  pour  le  Roy.  .le  ne  le  diz  pas  pour 
empescher  son  congé,  car  il  est  bien  raisonnable,  et  je  le  veoy  fort 
plaindre  de  nestre  traite  comme  il  le  mérite  :  vous  feriez  bien, 
Monseigneur,  de  l'avoir  pour  recommandé. 
De  Ferrare  ce  5  Octobre  1553. 

Monseigneur,  je  veoy  par  ce  que  le  Roy  mescript  que  sa  Majesté 
a  bonne  volonté  de  me  faire  quelque  bien,  je  vous  supplie  de  vou- 
loir aider  de  vostre  part,  et  je  my  loueray  tout  avec  le  reste  de  mes 
ans  a  faire  service  a  sa  Majesté  et  a  vous  Monseigneur. 

(Bibl.  oat.,Fr.  -206.-2.  loi.  181)  (copie 


CABRE    AU    ROI 

52.  —  [Ferrare],  ■')  octobre  1 553.  —  Sire,  Niquet  arriva  icy  h* 
3e  jour  d'octobre  avec  la  despeche  qui)  vous  a  pieu  faire  par  luy, 
par  laquelle  nous  avons  entendu  au  vrav  le  triomphe  et  l'honneur 
que.  V.  M.  a  rapporté  de  son  voyage  de  Flandres,  ayant  chassé  et 
rembarré  voz  ennemis,  non  seulement  hors  de  vostre  royaume,  mais 
jusqu'au  milieu  de  leur  pays,  sans  les  pouvoir  attirer  au  combat,  le 
leur  ayant  présente  a  bon  escient.  Cela,  Sire,  l'ait  fort  connoistre  a 
chascun  la  foiblesse  de  l'Empereur  et,  au  contraire,  vostre  grande 
force  et  ne  voy  personne  qui  ne  loue  et  n'estime  fort  prudente  la 
retirata  de  vostre  armée;  veu  la  saison  de  l'iver  ou  nous  approchons. 
Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  Sire,  a  este  fort  aise  de  voir  par  ce 
quil  vous  a  pieu  luy  escripre  et  que  je  luy  ay  dit    de  vostre  part,  le 

(1)  Odelde  Selve. 


[OCTOBRE    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRÉ  75 

contentement  que  Vostre  Majesté  a  de  luy,dont  il  veoit  les  effectz  et 
la  démonstration  par  la  libéralité  qu'il  vous  a  pieu  user  envers  luy, 
tant  pour  la  garde  que  pour  la  recompense  de  Bresseil  envers  Mon- 
seigneur le  Cardinal  son  frère,  qui  aura  occasion  maintenant  d'estre 
content;  je  suis  asseuré,  Sire,  que  vostre  Majesté  n'aura  jamais  regret 
d'obliger  ce  prince,  car  je  ne  luy  veoy  désirer  que  vostre  grandeur  et 
prospérité,  et  l'occasion  et  le  temps  a  propoz  quil  la  puisse  aider  et 
y  faire  sa  bonne  part.  J'ay  fait  coppier  le  discours,  du  progrès  de 
vostre  voyaige  et  des  nouvelles  d'AUemague,  que  j'ay  envoyé  a 
Venize,  a  Parme  et  a  la  Mirandola;  quant  aux  conditions  de  paix 
que  l'Empereur  a  baille  au  légat  Dandin,  il  semble  que  ce  ne  soit 
que  une  comédie  pour  faire  rire  le  monde  et  se  faire  moquer  de 
luy;  je  m'attendz  bien  que  Vostre  Majesté  luy  respondra  ce  quilfault 
en  tel  cas,  mais  si  fauldra  il  que  a  la  fin  il  se  humilie  ou  qu'il  crevé. 
Sire,  Vostre  Majesté  aura  veu  par  une  despeche  de  Monseigneur  le 
Cardinal  de  Ferrare  et  mesme  ce  que  jai  trouvé  au  mesnaige  et  des- 
pense de  Sienne,  et  vous  ayant  représenté  lestât  de  toutes  choses 
par  un  mémoire  que  j'en  a  y  envoyé  a  Monseigneur  le  Connestable, 
Vostre  Majesté  pourra  resgler  la  despence  et  toutes  choses  a  l'ad- 
venir,  selon  la  prudence  et  prévoyance  accoustumée,  car  Dieu  mercy, 
l'honneur,  et  ladvantaige,  et  la  victoire  vous  est  demeurée  en  tout  ce 
que  vous  avez  entreprins  en  Italie  et  croy  qu'il  n'y  a  guères  per- 
sonne aujourd'huy  qui  ait  plus  envie  de  vous  y  rien  demander  ;  il 
est  vray  qu'on  a  nouvelles  d'environ  deux  mil  espaignolz  arrives  a 
Gennes  sur  des  navires  d'Espaigue,  ou  sont  aussi  arrives  sur  les  galle- 
res  (1)  d'André  Doria  (2),  les  Allemandz  et  Espaignolz  qui  estoient  a 
Naples  ont  dit  que  les  Espaignolz  nouveaux  iront  en  Piedmont  si  la 
tresve  ne  continue  et  que  déjà  Domp  Ferrand  avoit  envoyé  ses  com- 
missaires pour  les  conduire,  mais  je  crois  plustost  qu'on  lèvera  les 
vieulx  et  les  nouveaulx  sur  la  bourse  des  Gennois  pour  essayer  le 
recouvrement  de  Corsegne  (3)  et  que  toute  la  tempeste  tournera  de 

(1)  Galères,  vaisseaux  longs  el  étroits,  d'un  petit  tirant  d'eau,  adoptés  au  xvie  siè- 
cle par  les  Vénitiens  et  les  Génois.  Ils  étaient  munis  de  deux  mâts  avec  des  voiles 
triangulaires,  dites  latines,  et  avaient  ordinairement  26  rames  de  chaque  côté,  avec 
4  à  6  rameurs  sur  chaque  rame.  Ces  vaisseaux,  armés  pour  la  guerre,  pouvaient 
contenir  500  hommes,  des  munitions  et  des  provisions  pour  deux  mois;  ils  pou- 
vaient, également,  être  affectés  au  transport  des  marchandises. 

(2)  André  noria,  né  à  Oneille,  dans  le  golfe  de  Gènes,  le  30  novembre  i486,  tut 
un  des  plus  grands  hommes  de  mer  du  x\T  siècle.  Issu  d'une  ancienne  famille 
de  Gènes,  il  entra,  à  19  ans,  au  service  du  Pape  Innocent  VIII,  qu'il  abandonna 
pour  servir,  tour  à  tour,  plusieurs  princes  italiens.  Dans  la  guerre  entre  Fran- 
çois Ier  et  Charles-Quint,  il  accepta  le  commandement  des  galères  françaises, 
puis  il  passa  du  côté  de  l'Empereur,  au  service  duquel  il  s'attacha  définitivement 
en  1528.  Il  mourut  à  Gênes  le  15  novembre  1560. 

(3)  La  Corse. 


76  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    1353] 

ce  coste  la  ou  Ton  voit  que  voz  affaires  continue  la  prospérité  que 
Dieu  vous  a  donné  aux  aultres  endroits,  comme  il  vous  plaira  veoir 
par  une  lettre  que  Monseigueur  de  Termes  en  escript  a  Monseigneur 
le  Cardinal  de  Ferrare,  laquelle  Sire  il  m'a  semblé  devoir  vous  en- 
voyer par  corrier  exprès  jusqua  Lyon,  ne  scachant  si  du  coste  de 
Marseille  Vostre  Majesté  en  aura  eu  si  emple  information  ;  je  pense 
que  de  ceste  heure  cela  doit  estre  en  vostre  obéissance  comme  est 
tout  le  reste  de  ceste  isle  la,  car  le  gentilhomme  que  Monseigneur 
de  Termes  a  icy  envoyé,  estoit  arrive  audit  Calvy  (1),  et  que  Mrde 
Termes  tenoit  cette  place  la  pour  Vostre  Majesté;  dans  vingt  quatre 
heures  après,  il  l'envoyoit  icy  pour  avoir  argent  dont  Monseigneur 
le  Cardinal  de  Ferrare  me  faisoit  aussy  fort  grande  instance  et  qu'on 
le  pouvoit  bien  bazarder  sur  deux  ou  trois  fregattes  armées  quil 
avoit  mené,  mais  deux  choses  m'ont  gardé  de  luy  en  envoyer,  l'une 
pour  n'en  avoir  pour  le  présent  icy  ne  ailleurs,  n'ayant  encores  eu 
vostre  responce  sur  les  partiz  dont  je  vous  escripviz  du  cinquième 
de  septembre  pour  en  recouvrer,  l'autre  que  par  vostre  lettre  Vostre 
Majesté  m'escript  qu'ilz  seront  secouruz  de  ce  que  leur  fait  besoing 
par  le  coste  de  Marseille,  et  Niquet  m'a  asseuré  que  les  provisions 
estoient  desja  acheminées  et  d'argent  et  de  vivres  et  d'armes,  au 
moyen  de  quoy  j'ai  renvoyé  ledit  gentilhomme  sans  argent  pour 
contenter  mondit  Seigneur  de  Termes  de  ceste  espérance  et  des 
bonnes  nouvelles  de  son  secours,  et  aussy  de  l'heureux  succez  de 
vostre  armée  de  Picardie  dont  il  me  prioit  fort  ladvertir,  et  puis 
que  Vostre  Majesté  prent  a  cœur  et  se  resoult  de  vouloir  secorir 
et  garder  ceste  conqueste,  je  la  tiens  pour  toute  asseurée  et  Mes- 
sieurs les  Genevois  (2)  bien  empeschez  s'ilz  se  doivent  resouldre  ou 
a  la  force  ou  a  l'accord.  Quant  a  ce  quil  vous  plaist  me  mander, 
Sire,  que  je  cherche  toujours  des  empruntz,  comme  de  moy  mesme, 
je  feray  ce  que  je  pourray  et  verray  après  que  j'aurois  eu  vostre 
responce  sur  les  partiz  qui  m'avoient  este  proposez,  de  continuer 
ceulx  la  ou  d'en  chercher  de  nouveaulx,  mais  pour  ce  que  ce  sont 
choses  incertaines  et  longues,  j'eseript  a  Mr  le  General  d'Elbenne 
que  si  V.  M.  n'a  accepte  lesditz  partiz,  ne  luy  vola  faire  sa  promesse 
qu'il  advize  de  continuer  le  secours  qu'il  a  accostuuo'  par  le  passé 
en  vos  affaires,  car  nous  sommes  sans  argent,  el  n'y  a  que  18  mil 
escus  pour  ce  mois,  comme  j'ay  escript  a  V.  M.  de  reste  du  party 
de  330  mil  livres,  et  sy,  par  une  voye  ou  par  une  aultiv,  ledil  Del- 
benne  ne  vous  en  envoyé,  ilz  demeureront  sans  argent  en  l'ung 
l'autre  lieux  de  voz  garnizons. 
Sire,  je  ne  veulx  faillir  a  mercier  très  humblement  V.  M.  de  l'es- 

(i)  Calvi  (Corso),  chef-lien  d'arrondissement 
(2)  Génois. 


[OCTOBRE   1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  77 

pérance  qu'elle  m*a  donné  par  sa  lettre,  de  recognoistre  par  quelque 
bienfait  le  peu  de  service  que  je  luy  faiz  icy  ;  j'ay  tant  de  foy  en 
vostre  bonté  et  en  vostre  parolle,  que  je  m'en  tiens  asseuré,  je  le 
désire  pour  avoir  de  quoy  dépendre  et  avoir  meilleur  moyen  de  vous 
faire  service,  mais  encore  plus  pour  la  réputation,  que  chacun 
puisse  cognoistre  que  mon  service  vous  est  agréable, 
De  Ferrare  ce  5e  d'Octobre  1553. 

Bibl.  nat.,  Fr    20642,  toi.   178)  (copie). 

GABRE    AU    CARDINAL    DE    LORRAINE 

53.  —  [Ferrare],  5  octobre  1 553.  —  Monseigneur,  Vous  avez  fort 
contenté  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  par  la  lettre  qu'il  a  pieu  au 
Roy  vous  escripre  et  par  celle  de  vostre  main,  et  mesmement  de 
l'avoir  gratifié  de  recompences  de  Bresseil  en  temporel  ;  il  veoit  par 
la  que  le  Roy  veult  faire  quelque  chose  pour  luy  et  l'a  en  considé- 
ration de  serviteur  affectionné  comme  il  luy  est  ;  je  vous  asseure 
Monseigneur  que  ces  obligations  peuvent  servir  de  beaucoup  au 
Roy  en  ses  affaires  de  deçà.  Je  faiz  corrir  exprez  cette  despecbe  a 
sa  Majesté  pour  les  bonnes  nouvelles  quil  y  a  de  Corseque  (1),  ne 
scacbant  si  le  Roy,  par  aultre  voye,  en  auroit  eu  advertissement; 
j'escrips  aussi  a  Sa  Majesté  en  quel  estât  nous  sommes  de  deniers 
par  deçà,  il  vous  plaira  y  pourvoir  et  au  surplus  me  tenir,  s'il  vous 
plaist,  en  vostre  bonne  grâce,  a  laquelle  je  me  recommande  très 
humblement. 

De  Ferrare  ce  ve  d'Octobre  1553. 

Monseigneur,  je  suis  prié  de  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  de 
vous  recommander  l'Eveque  Rosset  pour  lequel  vous  avez  fait  re- 
queste  au  Roy  de  quelque  abbaye,  et  Sa  Majesté  en  a,  comme  j'en- 
tends, donne  bonne  espérance  ;  il  est  toujours  prompt  et  prest  a 
faire  service  a  Sa  Majesté  quand  il  peult,  et  est  un  des  principaux  du 
Conseil  dudit  Duc  qui  prendra  sur  ses  épaules   l'obligation  de  ce 

fait  la. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20453,  fol.  179)  (originale). 

GABRE  AU  CONNÉTABLE 

54.  —  5  octobre  1553.  —  Monseigneur,  j'ay  entendu  de  Niquet 
que  l'on  faisoit  quelque  changement  de  ministres  du  Roy  en  Levant, 
je  ne  craindray  point  de  vous  dire  que  Mr  l'Ambassadeur  de  Venise 
et  moy,  devisans  emsemble  de  la  charge  d'Ambassadeur  en  ce  pays 
la,  trouvions  M1'  de  Forquevaulx  selon  nostre opinion  aultant  a  propos 

(1)  Corse. 


78  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    1553] 

pour  cette  charge  queguieres  gentilhomme  que  l'on  y  scauroit  choi- 
sir. Car  il  a  beaucoup  veu  du  monde  et  de  pays  par  meret  par  terre  et 
est  homme  de  guerre  et  homme  de  lettres,  et  s'est  trouvé  en  de  grandes 
affères.  Il  vous  plaira  m'excuser  si  j'ai  usé  de  présomption  a  vous 
nommer  cesluy  la  qui  n'en  scait,  je  vous  en  repondz,  chose  du 
monde,  mais  la  charge  est  si  honnorable  qu'il  l'accepteroitbien,  luy 
donnant  loisir  d'aller  jusques  devers  le  Roy  et  a  sa  maison,  dont  je 
veoy  qu'il  a  grande  envye,  et  s'attend  d'avoir  son  congé  cest  hiver. 
Si  est  ce  que  ce  lieu  la  de  Parme  ne  doibt  pas  demourer,  qu'il  y  ait 
quelqu'un  pour  le  Roy.  je  ne  le  diz  pas  pour  empescher  son  congé, 
car,  il  est  bien  raisonnable  et  je  le  veoy  fort  plaindre  de  n'estre 
traite  comme  il  le  mérite  ;  vous  ferez  bien.  Monseigneur,  de  l'avoir 
pour  recommandé. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20453,  fol.  181.  Extrait)  (copie). 


GABRE  AI  CARDINAL  DE  LORRAINE  ET  AU  DUC  DE  GUISE 

55.  —  [Fer rare],  9  octobre  1553.  —  Le  Cardinal  Dandin.  qui  a  sé- 
journé icy  quatre  ou  cinq  jours,  m'a  dict  que  le  plus  grand  plaisir  que 
peult  avoir  l'Empereur,  est  d'ouyr  dire  que  le  Roy  porte  grande  des- 
pence a  Sienne  et  Parme  afin  que  le  Roy  se  consume  tant  plustost,  et 
puisse  tant  moins  satisfaire  a  la  guerre  de  Picardie,  et  que  l'Empe- 
reur luy  a  dit  souvent  vouloir  oublier  l'Italie  el  l'Allemagne  pour 
faire  tous  ses  grands  efforts  du  couste  de  France,  chose  toutes  fois 
qu'il  ne  fault  croire  comme  l'Évangile,  car  l'Empereur  De  se  vante 
guère  de  ses  intentions,  mais  plustost  de  ce  qu'il  ne  veult  pas  faire. 
Monseigneur  le  Duc  a  longuement  entretenu  le  dit  Seigneur  Cardinal 
et  n'a  tire  de  luy  chose  qui  me  semble  d'importance;  le  peu  qu'il 
en  a  entendu,  il  le  m'a  dit  et  escripl  a  son  ambassadeur  pour  le  l'aire 
entendre  au  Roy  qui  me  gardera  de  vous  en  faire  redite,  ,1'ay  envie, 
Monseigneur,  de  vous  dire  une  petite  responce  de  ma  manière  el 
qui  me  sembleroit  digne,  aux  brève-  demandes  et  conditions 
daccord,  que  l'Empereur  bailla  par  escriptaudil  Cardinal  Dandin.  les- 
quelles les  Impériaux  publient  en  Italie  pour  grandeur  de  leur 
maitre,  et  cesl,  ce  me  semble,  sa  honte,  car  il  confesse  d'avoir 
beaucoup  perdu  en  ceste  guerre,  puis  quil  en  demande  restitution, 
et  pour  monstrer  davantaige  quil  n'a  rien  gaigné,  la  response  seroil 
honneste  que  pour  monstrer  a  la  chrestienté  que  le  U>\  est  plus 
raisonnable  que  (Empereur  et  désire  le  repos  et  la  paix  universelle 
plus  que  luy.  Afin  d'y  parvenir  plus  facilement,  Sa  Majesté  esl  con- 
tente que  l'Empereur  garde  tout  ce  quil  lient  aujourd'huy  des  con- 
questes  de  cette  dernière  guerre,  promettant  de  ne  luy  en  jamais 
rien  demander,  et  pour  faire  la  loy  esgalle,  que  le  Roy  est  content 


[OCTOBRE    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  79 

retenir  aussi  ce  quil  a  pris  et  promet  de  jamais  n'en  rien  rendre. 
Cependant,  pour  traiter  des  differens  principaulx  que  Sa  Majesté 
saccommodera  a  suspension  d'armes  et  a  tresve  tant  que  chacun 
pourra  connoistre  sa  bonne  volonté ,  il  meriteroit  fort  bien  ceste 
responce  publique  pour  luy  faire  cognoistre  quil  ne  doibt  pas  faire 
grand  fondement  sur  sa  grandeur  et  que  cela  est  désja  passé  pour 
luy.  Je  vous  dis,  Messeigneurs,  cecy  plus  pour  en  rire  que  pour  me 
vouloir  mesler  de  parler  de  telles  choses  qui  ne  m'appartiennent  et 
ou  je  n'entens  rien. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20453,  fol.  183.  Extrait)  (copie). 


CABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

56. —  [fierrare],  23  octobre  l.îoS. —  Monseigneur,  Je  receuz  hier  la 
lettre  quil  vous  a  pieu  mescripre  duxxi  de  ce  mois  et  veula  recom- 
mandation quil  vous  plaist  fere  du  Seigneur  Rodolfo  Gonzaga  (1) 
pour  les  dix  celades  (2)  que  monsieur  de  Forquevaulx  luy  veult  cas- 
ser ;  vous  scavez  Monseigneur  que  mon  mestier  est  de  prescher  la 
reformation  et  retranchement  de  la  despence  et  ne  me  doibz  oppo- 
ser, quant  autres  veulent  fere  quelque  bon  mesnaige,  mais  plus 
tost  les  y  conforter  ;  toutes  fois,  ce  qui  vient  de  Vostre  Excellence 
sera  tout  jour  de  telle  considération  en  lendroict  des  ministres  du 
Roy  quon  fera  tout  le  possible  pour  vous  satisfere  et  escripz  a 
mons'  de  Forquevaulx,  non  impérieusement,  mais  de  telle  façon  que 
sil  faict  selon  mon  oppinion  il  vous  viendra  fere  la  révérence  et 
monstrera  de  gratifier  le  Seigneur  Rodolfo  pour  lhoneur  de  vous 
laisser  courre  ce  mois,  car  je  suis  bienasseure  que,  a  lautre  prochain, 
il  aura  reiglement  certain  de  ce  quil  en  aura  a  fere,  ou  de  la  payer 
du  tout,  ou  de  la  casser  du  tout,  et  seray  bien  aise  sil  saccomodera  a 
mon  oppinion  pour  vostre  contentement.  Je  vous  envoyé  la  lettre 
dans  ung  paquet  a  luy  adressant.  Il  vous  plaira,  Monseigneur,  le  luy 
envoyer.  Il  ma  escript  de  ces  prisoniers  que  le  Seigneur  Jehan 
Francesco  a  retenuz  (3)  les  quelz  le  dit  Seigneur  de  Forquevaulx 
cognoit  fort  bien,  et  mescript  que  tous  trois  ensemble  ne  sçauroient 
avoir  forny  ung  escu,  de  sorte  quil  naura  pas  faict  le  butin  quil 
pensoit  mais  on  cognoit  par  la  sa  bonne  volunte.  Cestoienf  troys  sim- 
ples soldatz   qui   sen    alloient   chercher  la   guerre  en  Piedmont, 

(1)  Le  comte  Rodolphe  de  Gonzague,  seigneur  de  Luzzaro,  capitaine  italien  au 
service  de  la  France. 

(2)  Celades,  cavaliers  coiffés  de  la  salade,  sorte  de  casque  en  usage  du  xv°  au 
xvir  siècle. 

(3)  Jehan  Francesco  de  Saint-Séverin,  comte  de  Colorno,  mort  en  1568. 


80  NÉGOCIATIONS    DE  ToCTOBRE    1553] 

prenans  ce  chemin  la  sur  la  seureté  de  la  tresve  de  Parme  et  sans 
aucune  malice.  Il  recognoit,  en  cela,  fort  mal  le  beneffice  quil  a  receu 
des  François,  car  sans  nous,  il  seroit  encores  en  prison  et,paradven- 
ture,  son  corps  sans  teste,  et  por  toute  recompence  il  nous  a  payez 
dung  procès.  Si  vous  nous  prestiez  pour  dix  jours  dix  canons  on 
luy  osleroit  aisesment  Colornie  (1),  au  nom  de  monsr  Dandelot  (2) 
ou  de  voz  sugetz  qui  sont  condamnez  pour  luy,  et  ceste  place  seroit 
bonne  pour  annexer  avec  Bresseil.  Jentens  que  Hieronimo  de  Pisa 
passa  hier  en  Boloigne  et  croy  bien  quil  vous  sera  allée  trouver.  Je 
croy  aussi  que  Vostre  Excellence  aura  entendu  larrivee  du  cardinal 
Dandin  et  que  vous  chercherez  le  moyen  de  luy  parler.  Je  nay 
aucunes  nouvelles  de  nostre  argent  de  Florence,  mais  ung  homme 
du  Duc.  passant  par  icy,  allant  vers  l'Empereur,  a  asseure  quil  nen  a 
jamais  oy  parler  quon  eust  retenu  nostre  argent.  Au  demourant. 
Monseigneur,  je  nay  depuis  vostre  parlement  receu  lettre  ny 
nouvelle  quelconques  de  lieu  que  soit,  parquoy  je  ne  vous  feray 
plus  longue  lettre  que  de  vous  mercyer  très  humblement  de  ladvis 
de  Florence  quil  vous  a  pieu  menvoyer.  Le  Seigneur  Paulo  Ur- 
sino  (3)  est  icy  qui  ne  sen  veult  aller  a  Rome  sans  vous  fere  la 
révérence  et  a  délibéré  dattendre  vostre  retour.  Cependant,  vous  ne 
trouverez  pas,  si  vous  plaist,  maulvais  que  nous  nous  aydions  de 
vostre  cave. 

De  Ferrare  ce  xxma  d'octobre  1553. 

Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


GABKE    AU    DOC    DE    FERRARE 

57.  —  [Ferrare),  25  octobre  1553.  —  Monseigneur.  Javoys  receu 
quelques  advysde  mons*lambassadeurdeVenize(4  .lesquelz  je  vous 
envoyé  ayant  oblige  les  mectre  dans  mon  aultre  pacquet.  Jentendz 
que  le  légat  Dandin  passera  bien  tost  et  croy  que  Vostre  Excellence 
le  verra. 

De  Ferrare  ce  xxve  octobre  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale  elc). 

(1)  Colorno,  Dourg  à  13  kilomètres  de  Parme. 

(2)  François  de  Coligny,  seigneur  d'Andelot.   Voir  noir  i,  p.  28  . 

(3)  Jean-Paul  Orsini  de  Cerri, capitaine  italien  au  service  de  la  Fiance,  nommé 
par  François  [•*,  vers  1535,  colonel  général  des  bandes  italiennes. 

(4)  Odet  de  Selve. 


[OCTOBRE    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  81 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

58.  —  [Ferrare],  2ô  octobre  1553.  —  Monseigneur,  Je  baise  très 
humblement  la  main  de  Vostre  Excellence  pourla  bonne  nouvelle 
quil  luy  a  pieu  me  donner,  el  prie  nostre  Seigneur  quelle  soit  si 
vraye  que  nous  en  ayons  bien  tost  la  vraye  et  entière  consolation. 
Je  vous  asseure  que  personne  noura  parler  de  cest  advis  la,  ny  par 
parole  ne  par  escript.  Il  est  vray  que  Messieurs  les  Legatz  navoient 
guieres  dbonneur  ny  leur  maistre  en  leur  voyaige,  si  aussi  tost  quilz 
sont  partiz,  laccord  se  faisoit.  et  me  rejoys  aussi  bien  fort  de  ce  que 
Monseigneur  le  Cardinal  sest  si  bien  appaisé  et  rengé  a  la  raison.  Le 
temps  est  celluy  qui  acoutre  toutes  choses.  Jeuz,  hier,  lettres  de 
Lyon  du  xvme,  et  Albize  ma  renvoyé  les  quictances  et  trouve  bon 
nostre  expédient,  et  pour  ceste  cause,  jay  depesche  ung  homme 
exprez  a  Sienne,  devers  le  trésorier  La  Fontaine,  mais  de  lavenir  il 
se  remet  a  la  responce  quon  en  fera  de  la  court,  dont  il  dit  navoir 
jamais  oy  nouvelles.  Je  croy  que  par  la  rivière  nous  aurons  res- 
ponce et  toutes  nouvelles  dans  la  fin  de  ce  moys,  et,  jusques  a  cela, 
je  ne  me  puys  resouldre  de  la  façon  quil  fauldra  tenir  du  dernier 
argent  prins  du  gentilhomme;  toute  la  lettre  dAlbize  ne  contient 
que  la  longueur  de  largent  en  France,  qu'il  ne  nous  fault  fere 
compte  davoir  a  Lyon  que  testons  qui  costent  a  convertir  en  escuz 
deux  pour  cent,  et  me  prie  et  conjure  que  je  vueille  procurer  chose 
que  je  ne  trouve  pas  bonne,  car  il  veult  temps  de  la  moytié  par  tout 
décembre  et  de  lautre  par  tout  février,  et  puys  fere  payer  par  deçà 
a  quarante  sept  soulz  escu  dltalie,qui  torne  de  perte  quatre  et  demy 
pour  cent  et  me  mande  que  je  luy  depesche  corrier  exprez  en  cas 
que  Vostre  Excellence  ne  sen  contente,  afin  quil  face  la  provision  de 
la  première  paye  quil  tiendra  preste  a  Lyon  en  testons.  Je  remetray 
la  resolution  de  delà  a  vostre  venue,  car  il  nous  en  fault  parler  en- 
semble, mais  si  cependant  je  luy  escripz  je  luy  diray  franchement 
que  son  ofre  nest  acceptée  et  quil  tienne  la  première  paye  preste 
dans  le  xx  de  novembre.  Cependant,  viendra  la  responce  de  la  court 
qui  nous  donnera  plus  grand  clarté  et  resolution  a  toutes  choses. 
Le  maistre  de  la  poste  de  Lyon  (1)  mescript  que  nostre  armée 
estoit  partie  de  Marseille  le  xm  de  ce  moys  et  tout  jour  que  Calvy 
estoit  prins,  mais  ilz  ne  disent  pas  tout  jour  vray.  Albize  vous 
escript  des  nouvelles  quil  ma  mande  veoir,  mais  il  mescript  vous 
advertir  que  depuis  il  a  oy  parler  du  partement  de  larmee  de  la 
quelle  toutesfois  il  nest  asseuré. 

De  Ferrare  ce  xxve  d'octobre  1553. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

(1)  Messer  Matlieolo.  (Voir  note  1,  p.  26). 


82  NÉGOCIATIONS    DE  [NOVEMBRE    1553] 


GABRE    AU    CONNETABLE 

59.  —  [Ferrare],  10  novembre  /ô.)3.  —  Monseigneur,  faisant  une 
despeche  au  Roy,  je  nay  vollu  faillir  vous  faire  ce  mot  de  lettre 
pour  vous  dire  seullement  que  toutes  choses  vont  bien  par  deçà  et 
n'atendons  sinon  argent  dont  nous  avons  faulte.  S'il  ne  nous  en 
vient  du  costé  du  Roy  ou  de  Lyon,  vous  pouvez  faire  estât,  Monsei- 
gneur, que  les  garnisons  du  Roy  n'en  auront  poinct  de  ce  moys  qui 
sera  la  première  paye  qu'on  aura  faillie,  et  si  vous  estes  auprez  du 
Roy,  il  vous  plaira.  Monseigneur,  y  faire  pourvoir  pour  l'avenir,  et 
pour  ne  vous  ennuyer,  ne  vous  ferai  plus  longue  lettre. 

De  Ferrare  ce  xe  de  novembre  I553. 

(Bibl.  nat.,Fr.  20453.  fol.  185)  (originale  . 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

60.  —  [Ferrare],  18  novembre  1553.  —  Monseigneur.  Il  ne  vient 
rien  de  lieu  du  monde.  Jay  seullement  eu  la  recharge  de  Monsei- 
gneur le  Cardinal  en  matière  de  deniers,  et  mescript  que  lamy  ny 
debvroit  fere  dificulte,  puis  quil  scait  quil  ny  peult  rien  perdre,  et 
met  le  mot  de  levangille  non  qui  bene  inceperit  sed  qui  perseveraverit 
usque  ad  finem,  et  quon  doibt avoir  regard  a  la  peine  la  ou  il  osl. 
Je  vous  envoyé  une  lettre  de  monsieur  de  Lanssac  qui  parle  plus 
clairement  que  laulre,  toutes  fois,  je  y  ay  mis  une  gloze  selon  mon 
sens,  mais  je  veulx  bien  dire  que  quant  Boucher  ne  vous  eust  celée 
ceste  partie,  ne  a  moy  avec,  pour  le  moins  nous  ne  leussions  point, 
gastee,  et  par  adventure  laurions  nous  facilitée  a  la  court  et  aydee 
mieulx  quelle  ne  sera.  Je  croy  bien  que  cela  esl  cause  de  la  lon- 
gueur de  la  court.  Jay  grand  regret,  Monseigneur,  que  vous  aavez 
ung  peu  plus  beau  temps  en  vostre  chasse,  el  vous  souhaicte  icy  de 
retour  suyvi  de  douze  charretes  chargées  de  vostre  chasse. 

De  Ferrare  ce  xvme  de  novembre  Ki.">;i. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

61_  —  [ferrare  .  20  novembre  1553.  -  Monseigneur.  Depuis  mon 
paquet  serre,  jay  receu  la  lettre  quil  vous  a  pieu  mescripre  du  \i\. 
et   ny  a  eu  ordre  de    fere  passer  monsr  Boucher  par  Valcolin    I 

î    Valcolin  colle  val  d'Eisa),  ville  d'Italie,  chef-lieu  de  canton  de  la  province 

de  Sienne. 


[NOVEMBRE  1553]        DOMINIQUE  DU  GABRE  83 

pour  ce  quon  luy  dit  quil  y  avoit  grand  estorze  (1).  Je  ne  sceux  tirer 
de  luy  chose  quelconques,  sinon  que  les  Florentins  a  Rome  avoient 
offert  une  grosse  somme  pour  1ère  la  guerre,  et  que,  a  la  court  ses- 
toient  plustost  moquez  du  cardinal  du  Bellay  et  de  nions1-  de  Lanssac 
que  autrement.  Je  croy  que  par  les  paquetz  de  monsr  vostre  ambas- 
sadeur, vous  scaurez  quelquez  particularitez,  mais  quant  a  lalee  de 
mons'  le  Grand  Prieur  (2),  il  sen  va  trouver  larmée  la  ou  il  est  lieu- 
tenant gênerai  du  Roy.  Je  vous  supplie,  Monseigneur,  vous  en 
vouloir  venir  bien  tost  pour  resouldre  la  depesche  que  je  veulx  fere 
a  la  court. 

De  Ferrare  ce  xx  de  novembre  1553. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU   DUC    DE   FERRARE 

62.  —  [Ferrare],  20  novembre  1553.  —  Monseigneur.  Hier,  arriva 
icy  monsr  Bouclier  qui  ny  sejorna  guieres  que  deux  heures,  et  sur  la 
nuit  print  la  barque  jusques  a  Ravenne;  il  me  laissa  deux  paquetz 
de  monsieur  vostre  ambassadeur  et  une  lettre  de  madame  de 
Guise  (3),  qui  seront  avec  la  présente,  et  ung  paquet  du  Roy,  et 
pource  que  je  suis  maulvais  barangueur  pour  exposer  ma  créance, 
vous  la  prendrez  sil  vous  plait  en  la  mesme  lettre  originale  que  sa 
Majesté  mescript,  la  quelle  je  vous  envoyé  avec  une  de  monseigneur 
le  Conestable  et  une  du  Recepveur  de  Sens.  Messer  Albize  del 
Benne  a  escript  a  Venize  quon  nous  payast  pour  ce  mois  de  novem- 
bre quatre  vingtz  mille  francz.  Je  vous  envoyé  aussi,  Monseigneur, 
sa  lettre,  et  pour  ce  quil  est  très  nécessaire  que  je  y  depesche  ung 
corrier  pour  respondre  tant  a  la  court  que  a  luy.  Je  désire  fort 
vostre  retour  pour  communiquer  et  arrester  de  toutes  choses.  Bou- 
cher a  trouve  entre  autres  choses  fort  maulvaise  responce  sur  len- 
treprinse  quil  alloit  proposer,  et  veult  on  que  nous  vivons  en  paix. 
Je  ne  vous  feray,  Monseigneur,  plus  longue  lettre,  sinon  que  je  vous 
en  envoyé  une  ou  vous  verrez  destranges  nouvelles  du  lurcq.  Jay 


(1)  Eslorse,  en  français  de  l'époque,  signifie  combat. (Lucurne  de  Sainte-Palaye, 
Dictionnaire  de  l'ancienne  langue  française). 

(2)  François  de  Lorraine,  chevalier  de  Malle,  grand-prieur  de  France,  gouverneur 
des  galères,  né  le  1G  avril  1534,  mort  en  1563  ;  frère  du  duc  de  Guise  et  du 
cardinal  de  Lorraine 

(3)  Anne  d'Esté,  fille  aînée  d'Hercule  II  et  de  Renée  de  France,  née  le  1G  no- 
vembre 1531,  mariée  à  Saint-Germain  en  15  48  avec  François,  duc  d'Aumale,  tils 
de  Claude  de  Lorraine,  duc  de  Guise;  morte  en  1607. 


84  NÉGOCIATIONS    DE  [DÉCEMBRE    1553] 

une  longue  lettre  des  grandz  bruslemens  que  noz  gens  font  au  pays 
de  lEmpereur,  laquelle  je  nay  loisir  de  fere  coppier,  mais  vostre  ex- 
cellence la  verra  a  son  retour. 

De  Ferrare  ce  xxe  de  novembre  1553. 

(Aich.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.), 


GABRE    AU    DCC    DE    FERRARE 

63.  —  [Ferrare],  4  décembre  Jù53.  —  Monseigneur,  ce  soir, 
dassez  bonne  beure,  est  arryve  ce  gentilhomme,  Monsieur  des  Lan- 
des, depesche  a  Ronime  de  messeigneurs  les  card inaulx  vers  le  Roy. 
Et  après  que  Monseigneur  le  Cardinal  de  Ferrare.  monsr  le  prince  (1) 
et  moy,  avons  veu  sa  depescbe,  et  trouve  quelle  nest  que  generalle 
de  la  bonne  disposition  et  voullunte,  ou  ilz  ont  trouve  nostre  Saint 
Père  et  quilz  debvoient,  dans  deux  ou  trois  jour  après,  depescber, 
monsr  de  Lansac  avec  les  articles  delà  capitulation  rabillee  sellon 
lintencyon  du  Roy,  par  le  quel  on  entendra  toutes  autres  particula- 
ritez.  Nous  avons  une  foiz  cuyde  laisser  passer  oultre  ce  porteur 
sans  aller  trouver  vostre  Excellance,  mais  pour  ne  faillyr  a  lobeis- 
sance  que  nous  debvons  maintenant  a  nostre  chef,  il  a  este  advise 
par  les  dits  seigneurs,  que  ce  dit  porteur  vous  allast  trouver  pour 
vous  randre  compte  a  bouche  de  toutes  choses,  outre  ce  que  vous 
en  verrez  par  le  double  de  son  instruction.  11  me  semble,  mon- 
seigneur, que  vous  navez  gueres  de  cboses  a  escripre  par  luy,  el  le 
debvez  laisser  aller  avec  ting  mol  de  lettre  vostre,  vous  reservant 
a  escripre  plus  amplement  et  avec  meilleur  fondement  par  monsr 
de  Lansac  après  avoir  entandu  de  luy  toutes  les  j)articularitez.  el 
veu  comme  tout  sera  passe  et  accorde  a  Rome.  Si  pour  ceste  cause 
il  serait  bon  quil  vous  pleust,  monseigneur,  vous  en  revenyr  icj 
au  plus  tost  quil  vous  sera  possible,  pour  ne  fallyr  a  larryvee  du 
du  dit  Lansac,  Mes  dits  seigneurs  1rs  card  inaulx  me  pressent  el 
esconjurent  fort  de  vous  presser  de  secours  pour  le  depost  quil 
fault  faire  a  Homme,  et  de  la  façon  que  le  rembursement  sen  doibl 
faire,  cela  se  pourra  plus  tosl  appeller  anticippatioo  de  deniers  pour 
quelque  moys,  que  prest,  car  desja  il/,  onl  faicl  parti/  avec  mar- 
chans  a  Homme  pour  recouvrer  nc  l"1  escus.  comme  il  nous  plaira 
veoir  par  la  lettre  que  mes  dits  seigneurs  les  card  inaulx  men  ont 
escripte,  laquelle  je  vous  envoyé,  et  sil  vous  plaisoil  me  mander 
la  dessus  ung  bon  mot  de  vostre  voullunte,  jeu  advertiraj  par 
courrier  exprès  les  dits  seigneurs  cardinaulx  comme  ilz  désirent. 
Je  vous  supplye,   monseigneur    puys  que  vous   vouliez    mectre  el 

(1)  Alphonse  d'Esté.  (Voirnote  i,  p.  61). 


[dÉCEMBRK    1553]  DOMINIQUE    DU    GABRE  85 

la  vye  et  le  statpour  le  Roy),  que  vous  y  mectiezencores  se  secource 
d'argent  pour  si  peu  de  raoys.  Et  vous  mectrez  le  Roy  en  une  très 
grande  obligation  et  ferez  congnoistre  a  tant  quilz  sont  qui  nont 
encores  jamais  ouy  parler  de  telz  serviteurs  que  vous,  car,  sans 
vostre  ayde  ilz  veoient  bien  quilz  ne  sauroient  establir  ne  asseurer 
ceste  ligue,  et,  non  seullement  vous  obligerez  le  Roy,  mais  tous  ses 
ministres  qui  auront  fort  grand  tort  silz  ne  recongnoissent  de  tout 
leur  pouvoir  ce  grand  benetice  que  vous  aurez  faict  aux  affaires  de 
sa  Majesté. 
De  Ferrare  ce  ime  de  décembre  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

64.  —  [Ferrare],  5  décrmbrr  1553.  —  Monseigneur.  Tassin 
vient  d'arriver  de  Sienne  tout  a  ceste  heure,  depesche  par  Monsei- 
gneur le  Cardinal,  avec  commission  de  n'arrester  pas  une  heure 
icy  et  de  fere  extrême  diligence,  combien,  toutesfois  que  parla 
lettre  myenne  que  je  vous  envoyé  ny  aye  rien  de  si  presse.  Toutes- 
fois,  je  luy  ay  dit  quil  nauroit  point  de  chevaulx  sil  ne  prenoit 
vostre  depesche.  11  dit  que  sil  alloit  devers  vous,  il  luy  fauldroit 
revenir  icy.  A  ceste  cause,  il  ma  prie  que  je  ne  le  fisse  point  passer 
par  la,  mais  que  je  vous  envoyasse  la  lettre  de  Monseigneur  le 
Cardinal  et  quil  actendra  jusques  a  ce  soir.  Je  'sous  supplie,  Mon- 
seigneur, si  vous  pouvez  envoyer  dez  envict,  ce  que  vous  voulez 
escripre,  le  vouloir  fere,  car  pour  le  plus  tard  demain  a  louvrir  des 
portes,  tout  le  monde  ne  le  liendroit  pas.  Etjenvoye  ceste  depes- 
che au  seigneur  Alessandre  Guerin  pour  la  fere  corir  incontinent. 

Je  ne  veulx  oblier,  Monseigneur,  de  vous  dire  que  ce  petit  Cor- 
nelio,  qui  escript  des  nouvelles  de  Venize ,  mescripvoit  que  la 
maladie  du  Pape  estoit  cogneue,  vraye  hidropisie,  incurable  et  juge 
de  ne  la  fere  guieres  plus  longue.  Et  verrez  que  cestoit  ladvis  que 
portoit  ce  eorrier  qui  ne  voulait  entrer  a  Ferrare  de  peur  que  nous 
le  luy  demandissions.  Je  me  veoys  mectre  a  escripre  a  Albize  la 
dernière  resolucion  que  nous  prinsmes  avant  hier. 

De  Ferrare  ce  ve  de  décembre  1553. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


86  NÉGOCIATIONS    DE  [DÉCEMBRE    1553] 


GABRE    AUX    CARDINAUX    DE   LORRAINE    ET    DE   TOURNON 

65.  —  [Ferraré],  21  décembre  1 553.  —  Monseigneur,  Monsieur  de 
Lanssac  vous  escript  par  la  lettre  quil  m'a  communiqué,  ce  quil  a 
faict  et  négotié  passant  icy,  et  ma  lettre  en  sera  tant  plus  courte 
n'ayant  rien  a  vous  dire  davantaige,  sinon  quil  me  semble  que 
vostre  negotiation  de  Rome  n'eust  sceu  passer  plus  heureusement 
pour  le  Roy,  et  que  Sa  Majesté  aura  grande  occasion  de  s'en  con- 
tenter; quant  au  secours  que  vous  demandez  et  espérez  de  ce  lieu 
icy,  vous  le  pouvez  tenir  pour  certain  et  assuré,  s'il  ne  survient  du 
costé  du  Roy  ou  du  vostre.  chose  qui  contraigne  a  changer  d'oppinion. 
Il  a  respondu  a  Monsieur  de  Lanssac  ce  que  vous  verrez  par  sa 
lettre;  mais  j'en  ay  plus  particulière  et  plus  expresse  promesse,  non 
de  si  grand  somme  que  vous  demandez,  mais  seulement  ncm  escus, 
il  est  vray  que  jespère  que  l'on  n'aura  pas  grand  difficulté  ii'l"' escus, 
compris  les  xxxm  qui  luy  sont  déjà  deub.  Mais  aussi,  mettant  tou- 
jours cette  condition,  qui  n'est  que  raisonnable,  qu'on  veult  scavoir 
quoy  et  comment  les  temps  du  renboursement,  et  quelle  seurete  il 
y  aura,  et.  si  l'on  le  veult  rembourser  dans  troys  moys,  je  croy  quil 
ne  demandera  ne  profiltz  ne  interetz.  et  ne  vouldra  quil  en  couste 
rien  au  Roy;  mais  si  l'on  veult  après  quil  preste  pour  autres  troys 
moys,  il  entend  d'avoir  la  promesse  de  Gadaigne(l)  et  retourner  aux 
mesmes  conditions  quil  faisoit  les  années  passées,  et  a  ses  autres 
prestz.  Puysque  vous,  Monseigneur  de  Lorraine,  devez  hientost  estre 
icy  et  que  l'on  a  temps,  d'icy  en  lévrier,  de  pourvoyr  a  cella,  vous 
mesme  pourrez  icy  arrester  les  conditions,  el  serez  d'autant  plus 
résolu  de  ce  quil  y  faudra  faire  après  avoir  eu  nouvelles  de  la 
Court,  mesme  sur  la  veneue  de  Monsieur  de  Villandry  -  qui  fust, 
ace  que  je  vois,  despéché  incontinent  après  l'arrivée  de  Gassot,  et, 
ayant  despéché  personne  de  sa  qualité.  Je  ne  suis  pas  hors  île  soup- 
çon quilz  n'ayent  a  la  Court  trouvé,  en  ce  qui  fust  traité  icy,  quel- 
que chose  qui  leur  ay  despieu  :  toute-lois  je  u'ay  pas  voulu  mettre 
ce  doubte  la  aux  espritz  de  ces  gens  icy,  mais  plustosl  ay  donné 
espérance  que  ledit  Villandry  doibt,  a  mou  advis.  apporter  la  ratifi- 
cation. 

(l)  Gadagne,  famille  originaire  de  Florence,  d'où  elle  fui  bannie  L'un  de  ses 
membres,  Thomas  de  Gadagne,  vinl  -établir  à  Lyon  el  tut  maître  d'hôtel  de 
François  Ier.  Un  aube  Thomas  île  Gadagne  tut  maître  d'hôtel  île  Henri  II.  Le  fils 
de  ce  dernier,  Guillaume,  seigneur  de  Botheon,  Verdun,  etc.,  lui  gouverneur  du 
Lyonnais  et  ambassadeur  extraordinaire  a  Venise  SOUS  Henri  111. 

(-2  Claude  Le  Breton  de  Villandry,  secrétaire  de-  finances;  en  mission  a  Rome 
en  1554, 


[DÉCEMBRE    1553]  DOMINIQUE   DU    GABRE  87 

Quant  aux  xvnm  escus  que  vous  avez  emprunté  pour  satisfaire  a 
tout  le  passé  des  despenses  de  Tuscane,  je  ne  sçavois  quel  secours 
vous  y  faire  que  de  vous  envoyer  toute  la  provision  de  deniers  que 
le  Roy  envoyé  par  deçà,   et  ne  vous   fault   point,  s'il  vous   plait, 
faire  aucun  fondement  sur  les  emprunts  qu'on  peult  faire  icy,  car 
.Nazi   ne  bailleroit  pas  ung  escu  du  sien  et  moings  de  celluy  de 
Gadaigne  s'il  n'en  a  expresse  commission  de  Messe  Albisse  ;  den  de- 
mander tousjours  en  ce  lieu  cy  il  n'y  a  point  apparence  ;  d'ailleurs  je 
vous  asseure  quil  n'en  veult  plus  ouyr   parler;  je   présuppoze  que 
vous  avez  escript  a  la  Court  de  ce  qui  vous  faict  besoing  pour  payer 
vos  debtes,  car  il  faut  que  telle  provision  vienne  de  la.  Je  y  en  ay 
aussi  escript  du  mes  me  pas  de  vous  envoyer  la  coppie  de  l'article 
de  ma  lettre,  affin  que,  par  la,  vous  voiez  clairement  en  quel  estât 
nous  sommes  icy  de  finances  et  sellon  cela  puissiez  faire  une  re- 
charge a  la  Court  ou  y  pourvoir,  par  aultrevoye,  le  mieulx  que  vous 
pourrez;  car,  quant  à  moy,  je  ne  scaurois  faire  ne  plus  ne  moing 
que  de  vous  envoyer  ce  que  l'on  m'envoye   de  la  Court.  Je  m'en 
voys  demain  a  Venize  pour  me  trouver  ces  festes  aux  cerymonies 
publiques,  d'aultant  quil  y  a  déjà  deux  mois  que  l'on  n'y  a  veu  per- 
sonne pour   le  Roy,  et  verray  si  ces  seigneur  cy  ont  rien  senty  des 
choses  passées  a  Rome  et  icy  et  si  Vous,  Monseigneur  de  Lorraine 
vouliez  venir  audit  Venize,  je  vous  viendray  trouver  icy  au  repasser, 
comme  il  vous  plaira  me  le  commander;   je   feray  partir  le  lende- 
main de  Xoel  xxmm  escus,  desquels  vous  aurez  a  payer  voz  debtes 
et  le  moys  de  Janvier  aux  Sienoys;  s'il  n'y  en  a  pas  assez  ne  vous 
en  prenez  a  moy,  car  je  ne  scaurois  que  faire,  et  si  vous  diz  davan- 
taige  pour  ma  descharge,  quil  est  deffendu  a  Nazy  de  fournyr  ung 
escu  plus  quil  aura  en  commission,  et   a  moy  de  rien  emprunter 
sans  commandement  exprès  de  Messeigneurs  ;  le  commis  principal 
qui  a  réside  icy  près  de  moy  a  Venize  s'en  est  ces  jours  passez  allé 
a  Lyon,  je  scais  quil  avoit  son  estât  de  recettes  et  despences  de  ceste 
année  tout  prest,  mais  il  ne  l'a  laisse  a  aucun  de  ses  gens   Je  pren- 
dray  cette   seureté   a  Venize  de  fouiller  dans  son  coffre  et  si  j'y 
trouve  ledit  estât  ou  autre  estât  qui  vous  puisse  satisfaire  je  le  vous 
envoiray.  Cependant,  je  vous  envoyé  Testât  de  larecepte  et  despence 
de  Parme  et  la  Mirandola  que  j'ay  faict  dresser  au  commis  de  Parme 
qui  s'est  trouve  icy.  Quant  au  controlleur  Arnoul,  il  est  a  Venize  ou 
je  n'auray  pas  si  bonne  commodité  que  jeusse  eu  en  cette  ville  de 
faire  ce  que  vous  me  commanderez  ;  toutes  fois  j'y  donneray  ordre 
audit  Venize  et  vous  plaira  me   commander  ce  que  vous  vouldrez 
que  j'en  face,  car,  de  le  vous  envoyer  a  Rome  avecques  garde,  il  est 
malaisé  et  seroit  chose  de  trop  grande  despence  et  je  croy  qu'on  le 
vous   pourroit  envoyer  avecques  le  procédé  ordinaire  ou  avesques 
les   trésoriers  qui  porteront  la  prochaine  assignation,  et  quil  ne 


88  NÉGOCIATIONS    DE  JANVIER    1554] 

s'en  ensuyvroit  point,  car  il  est  contrainct  de  desmeler  ceste 
fuzée  ou  de  ne  retourner  jamais  en  France.  Je  ne  feray  en  cela 
plus  ne  moings  que  ce  que  vous  me  commanderez,  mais  je  me 
délibère  bien  de  me  saisir  de  ses  papiers  pour  veoyr  s'il  y  a  quelque 
chose  qui  découvre  sa  malversation. 
De  Ferrare  ce  xxi  jour  de  Décembre  1553. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20453,  fol.  235)  (originale). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

66.  —  [Ferrare],  1 1  janvier  f.)54.  —  Monseigneur,  Monsieur  de  la 
Croix  a  este  icy  retenu  tout  ce  jour  pour  donner  loisir  a  Monseigneur 
le  Duc  et  a  Madame  (ld'escripre.  car,  quant  a  moy,  je n'avois  pasa  le 
charger  de  longues  lettres,  ni  rien  de  nouveau  a  vous  dire  du  fait  de 
Sienne,  je  pense  que,  avant  l'arrivée  de  ceste  despeche,  vous  y  aurez 
prins  quelque  resolution  ;  au  reste,  Monseigneur,  je  m'esbahis  fort 
qu'on  na  faict  responce  sur  les  partyz  de  la  despense  d'Italie,  car 
ilz  ne  sont  pas  de  sy  petites  sommes  qu'on  puisse  tenir  longuement 
les  gens  en  suspens,  et,  si  ceulx  qui  m'avoient  donné  parolles.  voyant 
cette  longueur  et  irrésolution,  se  retiroient  de  ny  vouloir  plus  en- 
tendre, il  me  semble  qu'on  en  délivra  donner  la  coulpe  ne  a  eulx 
ne  a  moy,  et  le  piz  que  je  y  voye  est  que  cependant  les  affaires  du 
Roy  demeurent  sans  les  provisions  nécessaires,  et  nousicy  en  peine. 
Il  vous  plaira,  Monseigneur,  commander  qu'on  nous  face  responce 
et  nous  faire  entendre  la  volonté  du  Roy  surlesditz  partiz.  .l'entendz 
que  Monsieur  de  la  Croix,  présent  porteur,  sest  trouvé  fort  a  propoz 
a  Sienne  pour  moyenner  quelque  forme  d'accord  entre  les  deux 
seigneurs.  Vous  congnoissez,  Monseigneur,  dextérité  «'i  suffisance 
en  beaucoup  de  bonnes  choses,  et,  mérite  que  luy  continue/  vostre 
faveur  et  bonne  grâce. 

De  Ferrare  ce  xie  janvier  1554. 

Monseigneur,  avec  ceste  lettre  sera  un  paquet,  adreçant  au  Nonce 
du  Pape,  qui  ma  este  fort  recommandé  de  Monsieur  de  Lanssac 
comme  pacquet  d'importance  et  venant  de  sa  Sainteté,  il  voua 
plaira  commander  quil  soit  baillé  seurement. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20643,  fol.  5    copie  , 

(1)  Le  duc  et  la  duchesse  de  Ferrare. 


[FÉVRIER    1554]  DOMINIQUE   DU   GABRE  89 


GABRE    AU    CONNETABLE 

67.  —  [ferrare],  18  février  1554.  —  Monseigneur,  Le  sieur 
Enea(l),  présent  porteur,  est  envoyé  devers  le  Roy  par  la  Seigneurie 
de  Sienne,  et,  a  ce  que  je  voy,  ne  luy  ne  personne  n'estiment  gueres 
dangereuse  l'entreprinse  ny  la  conqueste  du  Duc  de  Florence;  il 
m'a  dict  quelques  propoz  dont  il  semble  qu'il  a  envie,  particulière- 
ment de  dire  son  advis  au  Roy  sur  le  gouvernement  et  conduite  de 
leur  cité  et  a  la  fin  serez  bien  contraintz  de  venir  a  lopinion  quil  en 
a,  et  dy  trouver  quelques  bonnestes  occasions  et  moyens  par  lesquels 
la  réputation  du  Roy  ny  soit  intéressée  ;  au  reste,  il  semble  qu'il 
semble  d'avoir  quelque  charge  en  ceste  guerre  et  vouldroit  estre 
bonoré  par  lettres  patentes  de  charge  plus  grande  qu'il  ne  l'espère 
avoir  en  effect,  car  il  s'accommodera,  après  n'avoir  qu'une  compagnie 
ou  plus,  comme  le  temps  et  l'occasion  le  portera.  Vous  savez,  Mon- 
seigneur, qu'il  este  le  premier  qui  a  mis  la  main  a  chasser  les  Es- 
paignolz  et  croy  que  les  ministres  du  Roy  a  Sienne  tesmoigneront 
toujours  qu'il  peult  beaucoup  entre  leurs  citadins,  et  quil  est  fort 
affectionné  au  Roy,  et  me  semble  quil  sera  fort  bien  faict  le  ren- 
voyer par  decaleplustost  que  vous  pourrez  et  content  nayant  a  vous 
dire  aultre  chose  de  nouveau  depuis  la  despeche  de  Monsieur 
Thomas  Delvechio  (2). 

De  Ferrare  ce  18  février  1554. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20643,  fol.  -22)  ^copie). 


GABRE    AU    ROI 

68.—  Ferrare],  18  février  1554. —  Sire,  vous  ayant  escript,  deux 
jours  il  y  a.  par  Monsieur  de  Ramboillet(3),  je  ne  vous  feray  longue 
lettre  par  le  sieur  Thomas  Delvechio,  présent  porteur,  qui  vous  dira, 
Dieu  mercy,  toutes  bonnes  nouvelles  de  Sienne;  il  m'a  communiqué 
quelque  chose  des  advis  du  Seigneur  Pierre  (4)  sur  ceste  guerre  et 

(1)  Enée  ou  Enea  Piccolomini,  gentilhomme  siennois,  seigneur  de  Sticciano, 
appartenait  à  une  famille  originaire  de  Rome  établie  à  Sienne  depuis  le  vu*  siècle. 
Enea.  banni  de  Sienne,  était  à  la  tète  du  mouvement  qui  devait  affranchir  sa 
patrie  du  joug  des  Espagnols.  Voir  Desjardins,  Xéyociations  de  la  France  avec 
la  Toscane,  t.  m.  p.  339). 

(2)  Thomas  del  Vechio,  aumônier  ordinaire  du  Roi,  fut  envoyé  en  1554  auprès 
du  duc  de  Ferrare  par  Catherine  de  Médicis.  (Voir  Correspondance  de  Catherine 
de  Médicis,  par  Hector  de  la  Ferrière,  t.  i,  p.  23). 

(3)  Jacques  d'Angennes,  seigneur  de  Rambouillet,  capitaine  des  gardes  de 
Henri  II,  mort  en  1562. 

(4)  Strozzi. 


90  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1554] 

que  de  trois  voyes  quil  propoze,Vostre  Majesté  doibt  chérir  la  meil- 
leure et  celle  qui  luy  sera  plus  commode  selon  la  qualité  et  lestai 
de  voz  aultres  affaires.  Il  debvroit  avoir  honte  de  dire  son  oppinion 
en  telles  choses,  mais  pour  le  zelle  que  j  ay  au  bien  de  voz  affaires, 
bien  souvent  je  m'y  oublie,  et  par  cela.  Sire,  Vostre  Majesté,  Sire, 
me  pardonnera,  si  j'ay  dit  audit  Delvechio  des  raisons  qui  me  feroient 
trouver,  en  cas  que  vous  ne  soyez  délibéré,  faire  grand  effort  ailleurs. 
La  troisième  voye  la  plus  raisonnable  et  celle  qui  off endroit  plus 
vostre  ennemy,  et  par  advanture  seroit  occasion  de  faire  soulever 
son  peuple,  bien  me  semble  que  ung  des  points  principaulx  est  de 
tenir  voz  délibérations  bien  secrettes,  et  monstrer  que  Vostre 
Majesté  est  du  tout  résolue  sur  la  deffensive,  car,  par adventure,  voz 
ennemys  seront  plus  negligens  a  s'armer  grossement,  pour  ce  qu'on 
croit  volontiers  ce  que  l'on  désire,  et  ce  qui  couste  le  moins.  Cepen- 
dant, passèrent  les  mois  de  Mars  et  d'Avril,  pendant  lequel  lesenne- 
miz  se  consumèrent  a  faire  des  fortza  l'entour  de  Sienne,  comme  il 
semble  quils  ont  intention,  et  Vostre  Majesté  pourra,  a  loisir,  prépa- 
rer ses  forces  et  en  quelque  partie  vous  servir  de  la  mer.  Si  le  fait  de 
Corsegne  prent  quelque  bonne  issue,  auquel  temps  vous  aurez  loisir 
de  pourvoir  a  largent  duquel,  par  raison,  vous  en  debvrez  avoir  lait 
bon  amas  pour  la  commodité  qu'avez  eu  de  ne  rien  débourser  pour 
le  fait  dltalie  jusques  en  avril,  auquel  mois  il  fault  que  l'assignation 
soit  preste  a  Lyon,  pour  le  remboursement  qu'il  fault  faire  au  mar- 
chand que  vous  scavez,  au  commencement  de  May,  et  en  ce  temps 
le  général  d'Elbenne  commencera  a  desbourser,  comme  il  s'est 
offert  par  l'accord  de  la  compagnie,  environ  60  mil  escuz  par  mois,  et 
oultre  cela,  si  l'on  tient  paroi  le  aux  dits  marchants,  et  qu'il  puisse 
en  efï'ecl  recouvrer  largent  qui  est  deu  au  temps  promis,  je  ne  sui> 
pas  hors  despérance  quil  ne  m'accorde  de  vous  secourir  de  quelque 
bonne  somme  extraordinaire  si  vous  en  avez  besoing;  nous  aurons 
aussy  quelque  quarante  mil  escuz  des  parliz  de  Venize,  comme 
me  mande  ledit  General  d'Elbenne.  J  entends  que  le  S1  Robert 
Strozzi  (I)  est  aile  a  Rome  conclure  quelque  partv  de  cinquante  nul 
escus,  et  puis  cest  le  temps  (pie  toutes  ses  bonnes  bourse-  des 
marcbans  florentins  doibvent  faire  une  queste  entre  eulx  pour  aider 
leur  liberté  quilz  désirent  tant,  et  le  leur  fault  faire  bien  entendre; 
aussy  bien  le  Duc  prent  tout  le  revenu  quilz  ont  a  Florence,  ainsj 
comme  ainsy  vous  avez  par  deçà  uni:  chef  fort  digne  el  a  propos,  pour 


1  Robert  Strozzi,  quatrième  lils  de  Jean-Baptiste  Strozzi,  dit  Philippe  Strozzi, 
et  de  Clarisse  de  Médicis,  nièce  de  Léon  \.  dirigeait  à  Venise  la  célèbre  maison 
de  banque  fondée  dans  celle  ville  par  la  Famille  Strozzi.  il  faisait  également  le 
commerce  dan--  le  Levant,  ci  mettait  volontiers  ses  capitaux  au  service  dfl 
l'ambassadeur  de  France. 


TfÉVRIER    1554  DOMINIQUE   DU    GABRE  91 

conduire  ceste  entreprinseavecun  couple  de  bons  hommes  de  guerre 
queVostre  Majesté  luy  pourroit  envoyer.  J'ay,oultre  cela,oppinion  que 
Dieu  y  st^ra  de  vostre  cousté  et  que  vostre  ennemy  a  commancé  une 
guerre  fort  injuste.  Vostre  Majesté  avec  sa  prudence  et  bon  consei 
y  scaura  bien  prendre  quelque  bonne  résolution  et  aussi  sur  le  faict 
de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Ferrare  qui  ne  se  tient  guères  content 
du  procède  du  sieur  Pierre,  et  cela  tient,  à  mon  advis.  en  grand  peine 
a  l'ung  et  a  l'aultre,  ilz  sont  fort  différentz  de  sa  complexion  et  de 
profession  et  seront  presque  toujours  en  opinion  contraire. 
De  Ferrare  ce  18e  de  février  1554. 

Sire,  le  sieur  Thomas  Delvechio  a  veu  icy  par  le  langaige  de  Mon- 
seigneur le  Duc  en  son  affection  a  vostre  service  et  principallement 
a  cette  guerre  de  Toscana,  Vostre  Majesté  pourra  mettre  le  tout  en 
considération,  et  au  reste,  puisque  le  Sr  Delvechio  aveu  ici  toutes 
les  opinions  de  voz  serviteurs,  il  sera  plus  capable  de  porter  vostre 
volunte  et  reponce  sur  le  toutqu'ung  aultre  nouveau,  et  sy  servira  de 
beaucoup  par  deçà,  car  il  est  personne  dextre  et  capable  du  pays  et 
fort  affectionné  a  vostre  service. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20643,  fol.  20)  (copie). 


GABRE    AU    ROI 

69.  —  [Ferrare'],  28  février  i 554.  —  Sire,  Vostre  Majesté  aura  tou- 
tes bonnes  nouvelles  de  Sienne  par  la  despeche  de  Tassin,  présent 
porteur,  et  a  ce  que  je  voy,  Monseigneur  le  Cardinal  sest  accommodé  a 
laisser  faire  audit  sieur  Pierre  les  choses  de  la  guerre, et  de  demeurer 
la  pour  le  seul  respect  de  ne  faire  chose  contraire  a  vostre  volonté, 
lequel  il  a  préféré  a  toutes  ses  commoditez  et  délibération  déjà  faites. 
Au  contraire, voz  gens  de  guerre  ont  fait  plusieurs  belles  factions,  et  a 
ce  que  j'entendz  vos  ennemiz  ont  toujours  du  pire;  les  choses  de  la 
mer  sont  si  incertaines  que  nous  n'avons  rien  icy  de  véritable  du 
faict  de  Corsegne,  ny  de  vostre  armée,  et  si  nous  voulons  croire  aux 
nouvelles  qui  viennent  de  Florence,  S1  Florent  (1)  se  seroit  rendu 
dès  le  13  de  ce  mois  avec  tollerable  proposition;  c'est  que  les 
François  qui  y  estoient  soient  ramenez  a  Antibel  (2);  les  Italiens  ne 
pourront  servir  sa  Majesté  de  6  ans  ;  le  sieur  Jordan  (3)  et  Capitaine 
Valvion  confinez  pour  6  mois  a  Gennes  et  au  bout  de  six  mois  mis 
en  liberté,  disoient  bien  aussi  lesdites  nouvelles  que  l'armée  navoit 

(1)  Saint-Florenl-en-Corse.  arrondissement  de  Bastia. 

(2)  Probablement  Antibes,  eliet-lieu  de  canton,  arrondissement  de  Grasse, 
département  des  Alpes-Maritimes. 

(3)  Probablement  Jourdain  des  l'rsaius.  (Voir  note  3,  p.  35). 


92  *       NÉGOCIATIONS    DE  FÉVRIER    1554' 

peu  entrer  au  port  de  Boniface  (1)  par  le  temps  contraire  et  avoit 
rencontrez  deux  navires  chargez  d  Espaignolz  qu'ils  avoient  prinses. 
Tant  de  particularitez  nous  a  toujours  tenu  en  opinion  qu'il  fusl 
vray,  mais  de  Gennes  on  ne  voit  personne  qui  en  escripve  rien,  et 
de  Sienne  escripvent  que  une  partie  de  l'armée  estoit  auprès  de 
l'Elbe.  Dieu  la  vueille  accompagner  ou  qu'elle  soit.  On  faict  grand 
bruict  de  levée  de  gens  de  guerre  du  sr  Ascanio,  de  ceulx  de  Naples 
qui  doibvent  venir  a  Sienne,  et  de  quelques  aussy  de  Gennes.  mais. 
par  ce  que  le  sieur  Pierre  m'escript,  il  ne  s'estonne  ny  n'estime 
guères  tout  cela.  Je  vous  veult,  s'il  vous  plaist  Sire,  faire  souvenir 
que  sy  Vostre  Majesté  se  resoult  de  faire  guerre  ny  armée  par  deçà, 
que  Tonne  scauroit  trop  de  bonne  heure  commencera  levergens  de 
cheval,  car  il  y  aura  de  la  difficulté  et  de  la  longueur  a  en  trouver. 
Le  Duc  de  Florence  baille  40  escus  de  pretanza  (2  a  chacun,  et  s) 
n'en  peut  faire  et  icy  sur  le  Ferrarois  et  pays  de  Vénitiens,  on  en 
pourroit  trouver  une  bonne  troupe,  mais  ce  ne  sera  pas  sans  bailler 
quelques  bonnes  advanses  aux  capitaines.  Vostre  Majesté  y  pourra 
adviser  et  en  commander  sa  volonté  :  de  gens  de  pieds,  je  pense 
qu'on  en  trouvera  toujours  tant  qu'on  en  vouldra.  Sire,  en  matière 
de  finance,  je  vous  diray  que  le  gênerai  Delbenne  a  advisé  H  m'a 
escript  depuis  peu  de  jours  en  ca,  affin  que  vos  affaiies  ne  se  trou- 
vassent en  difliculé  et  nécessité,  que  je  prinse  jusques  a  cinq  cens 
mil  livres  de  la  campagne,  que  scavez  en  ces  quatre  mois  de  janvier, 
février,  mars  et  avril,  ce  que  je  feray,  encores  que  ce  soit  plus  qui] 
ny  en  fault  pour  la  despense  qui  se  fail  de  présent,  et  si  l'on  ne  l'ait 
quelques  grandz  extraordinaires,  j'espère  que  vous  trouverez  icy 
ung  fons  réservé  de  quinze  ou  vingt  mil  escuz  quand  vous  vouldres 
commencer  la  guerre,  oultre  les  aultres  parties  et  le  fons  qu'il  touz 
aura  pieu  voir  par  lestât  que  j'envoyay  par  le  sr  Thomas  Delvechio. 
Je  vous  supplie  humblement,  Sire,  pour  le  bien  de  vos  affaires, 
faire  bien  assigner  le  rembourcement  des  cinq  cens  mil  livres  au 
gênerai  d'Elbenne  pour  avril,  en  sorte  qu'il  dous  puisse  rembourcer 
pour  le  plus  tard  le  15''  de  niay.  el  que  la  compagnie  qui  s'esl 
dressée  de  luy  et  du  marchand  que  Vostre  Majesté  scait,  se  puisse 
continuer,  car  elle   porte   une  grande   sûreté    el   commodité  a  vos 

affaires,  vous  donnant  toujours  trois  à  quatre isde  loisir  dassem- 

bler  voz  deniers  et  vous  ostant  le  soucy  de  l'envoyer  en  Italie, 
puisque  vous  n'avez  qu'a  le  desbourcer.  >t  -i  l'on  leur  failloit  a  ceste 
première  assignation,  ilz  seroient  contrainetz  Faillir  de  leurs  conv.  li- 
sions et  promesses  aux  autres  mois  advenir,  et  ne  seroit  que  contu- 
sions et  desordres  en  vos  affaires. 


(1)  Bonifacio. 

(2)  Solde. 


[MARS    1554]  DOMINIQUE   DU   GABRE  93 

Sire,  a  Parme  et  a  la  Mirandola,  ny  a  aulcun  suspect  d'entreprinse 
d'ennemis,  ny  plus  nouvelles  de  ces  grandz  levées  de  gens  de 
guerre,  et  n'est  on  entre  en  aulcune  despence  que  de  la  milice 
de  Parme,  laquelle  a  mon  advis  le  sr  de  Forquevaulx  licentiera, 
puisquil  n'y  verra  plus  de  besoing.  Je  croy  aussy  que  le  Duc  Oc- 
tavio(l)  et  le  Comte  de  la  Mirandola  soient  de  cette  heure  en  chemin 
et  que  bientost  nous  entendrons  leur  arrivée.  11  y  a  deux  jours  que 
le  Comte  de  Petiglian  passa  par  icy  et  a  tousjours  trouvé  les  chemins 
bien  seurs,  je  croix  que  aussi  feront  les  autres  qui  viendront  après 
luy. 

De  Ferrare  ce  28e  de  Février  1554. 

(Bil)l.  nat.,  Fr.  20643,  fol.  25  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

70.  —  [Ferrare],  11  mars  1554.  —  Monseigneur,  Je  ne  vous  seau- 
rois  mander  autres  nouvelles  de  Sienne  que  ce  quil  vous  plaira 
veoir  par  la  lettre  du  sieur  Pierre,  seullement  je  puis  vous  asseurer 
qu'ilz  sont  si  bien  couvertz  d'argent  qu'ilz  ont  de  cette  heure  envi- 
ron 43  mil  escus  ou  ilz  n'ont  a  toucher  encores  de  25  jours;  je  n'ay 
sceu  jusquicy  avoir  ung  estât  de  leurs  despence  pour  ce  qu'elle  est 
encore  confuze  et  incertaine  mais  je  veoy  bien  d'icy  en  hors  que 
tout  y  est  bien  menaigé,  nous  attendrons  au  reste  vostre  resolution 
par  Thomas  Delvechio.  Cependant,  nous  disons  icy  que  le  Roy  n'a 
pas  accoustumé  de  se  mouvoir  pour  ung  tel  compagnon  que  le  Duc 
de  Florence  et  que  sa  Majesté  ne  fait  pas  grand  cas  de  sa  guerre. 
Monsieur  lAmbassadeur  de  Venize  (2)  ma  escript  que  le  dit  Duc  na 
peu  avoir  des  Allemandz  et  que  son  homme  qui  estoit  aile  pour  la 
levée  s'en  estoit  revenu  sans  rien  faire.  Nicquet  est  party  ce  soir 
pour  aller  a  Sienne,  et  si  la  maladie  du  Pape  est  dangereuse,  dont 
vous  verrez  des  nouvelles  par  la  despeche  de  Monsieur  de  Lanssac, 
Monseigneur  le  Cardinal  (3)  se  trouvera  la  demy  porté  et  aura  bonne 
occasion  de  sortir  de  Sienne.  Je  ne  scay,  maintenant  quil  a  son 
congé,  ce  quil  en  resouldra  de  faire  et  ay  opinion  que  si  ceste  muta- 
tion advenoit,  il  importeroit  beaucoup  pour  le  Roy  de  se  trouver 
arme  grossement  sy  près  de  Rome,  et  si  vous  voulez  entrer  en 
besongne  et  en  despence  par  deçà,  ayez,  Monseigneur,  moins  de 
gens  el  quil  y  ait  ung  peu  d'Allemandz  ou  de  François,  car,  sans 
cela,  il  semble  en  ce  pays  que  une  armée  est  imparfaite.  Il  n'y  a 

(1)  Octave  Farnèse. 

(2j  Odet  de  Selve. 

(3)  Le  cardinal  de  Ferrare. 


94  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1554] 

point  encores  nouvelles  de  Monsieur  de  Montluc  (1)  et  faites  bien, 
Monseigneur,  d'envoyer  telles  gens  par  deçà.  Je  remettray  le  sur- 
plus sur  ce  quil  vous  plaira  voir  en  la  lettre  du  Roy. 
De  Ferrare  ce  17e  de  Mars  1554. 

Bibl.  nal.,  Fr.  20643,  fol.  35  (copie  . 


GABRE  AU  COMTE  DE  LA  MIRANDOLE 

71. —  [Ferrare],  .20-27  mars  1554.  —  Monseigneur,  Je  receuz,  hier, 
vostre  lettre  par  ce  laquay  et  tout  sur  lheure  je  fiz  partir  vostre 
paquet  pour  Monseigneur  le  Cardinal  (2)  par  ung  corrier  que  je  depes- 
chay  exprez.  Jay  depuis  entendu  ce  que  ma  dit  Pierre  Pomara  sur 
le  faict  de  voz  munitions  et  suis  dopinion.  Monsieur,  puis  que  vous  le 
desirez  ainsi,  quon  mecte  le  tout  entre  voz  mains  a  la  charge  de  les 
tenir  en  bon  estât  et  les  représenter  et  en  tenir  compte  au  Roy.  Et 
aprez  ces  testes,  Pomara  vous  en  ira  fere  la  consignation  et  moy 
mesmes,  si  je  puis  avoir  ung  peu  de  loisir,  iray  jusques  la.  Mes 
derniers  lettres  de  la  court  sont  du  xi  et  semble  quilz  se  refroidis- 
sent plus  tost  quilz  ne  seschaufent  des  afferes  de  de<;a.  Et  vous 
suplie.  Monsieur,  excusez  moy  si  je  vous  escriptz  quelque  foiz  pour 
ceulx  qui  men  prient,  car  si  jeusse  este  belle  tille  je  croy  que  je 
neusse  sceu  refuzer  personne.  Le  Bru  pour  lequel  je  vous  avois 
escript  mest  bien  venu  dire  que  a  luy  mesmes  el  a  dautres  que  l'eu 
Monsieur  le  Conte  votre  père,  ou  vous,  aviez  faicl  semblable  grâce 
si  la  chose  est  faisable.  Je  vous  en  suplie  si  elle  ne  lest  je  nenlendz 
pas  de  vous  en  fere  requeste.  C'est.  Monsieur,  tout  ce  que  je  vous 
scaurois  dire  pour  ceste  heure. 

De  Ferrare  ce  xxe  de  mars  1554. 

Monsieur,  ung  de  voz  laquais  sen  alla  de  s;i  -race  sans  prendre 
ceste  lettre;  depuis  jay  receu  le  paquet  de  Monseigneur  1»'  Cardinal 
quil  vous  a  pieu  menvoyer  dont  je  vous  mereye  bien  humblement. 
Nous  navons  icy  rien  de  nouveau  de  Sienne,  sinon  que  par  une 

(1)  Biaise  de  Montluc.  né  a  Condom  en  1501,  mort  en  1577,  célèbre  capitaine, 
servit  d'abord  dans  la  compagnie  commandée  par  Bavard,  fut  fait  prisonnière  la 
bataille  de  Pavie   1525  .  prit  part  à  l'expédition  de  Lautrec  contre  Naples   I 

à  la  défense  de  Marseille  menacée  par  Charles-Quinl  1536),  a  la  bataille  de 
Cerisolles  1544  .  et  défendit  héroïquemenl  Sienne  contre  les  Impériaux.  Devint 
colonel  général  de  l'infanterie,  lai  1564,  nommé  lieutenant-général  en  Guienne, 
il  y  lil  une  guerre  sans  merci  aux  calvinistes.  En  1571,  Henri  III  le  nomma 
maréchal  de  France.  Il  se  retira,  peu  après,  dans  son  château  de  Montluc,  où  il 
rédigea  ses  mémoires.  (Voir  noie  -j.  p.  :;  . 
.Montluc  regardait  la  défense  de  Sienne  . -111111111'  la  plus  belle  page  de  -a  vie. 

(2)  Le  cardinal  de  Ferrare. 


[JUILLET    1554]  DOMINIQUE   DU    fiABRE  95 

lettre  de  monseigneur  de  Lanssac  que  jay  receue  aujourdhuy,  il  me 
mande  que  toutes  choses  y  sont  bien,  et  que  les  ennemys  ne  ses- 
sayent  jamais  a  faire  quelque  faction  quilz  ny  soient  batuz  et  quilz 
nayent  du  pire,  et  quilz  avoient  faict  quelque  monstre  de  vouloir 
aller  assiéger  Luzignan,  mais  quilz  ont  laissé  lentreprinse  ne  scai- 
chant  que  faire.  Il  mescript  aussi  que  le  Pape  est  tout  jour  malade 
et  en  ung  estât. 
Cest  de  Ferrare  ce  xxvir*  mars. 

(Arch.  de  Modène.  Gancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   A    DOMENICHO    D  ACRILLE 

72.  —  [Ferrare],  10  juillet  1554.  —  Magc0  messer  Domenicho. 
Jo  vi  ho  mandato  troggi  un  plico  per  il  Sor  Duca  di  Mantoa;  et  dipoi 
ne  ho  ricevuto  un'altro  del  Re  per  Madama  la  Duchessa,  il  quale  vi 
priego  dare  a  Sua  Eccelentia.  La  presa  di  Mariahourg  (1)  mi  è  fatta 
certa  per  lettere  di  sua  Maesta,  et  io  mando  a  Vostre  Signoria  una 
copia  del  discorso  del  suo  esercito,  et  di  quanto  s'e  fatto  dipoi  ch'egli 
é  in  campagnia  ;  gïi  dirù  di  piu  che  per  lettere  ch'io  ho  havuto  da 
un  nostro  gentilhuomo  ch'é  in  Lucca:  mi  vien  scritlo  che'l  S01'  Carlo 
di  Gasolo  (2),  dette  un'  assalto  générale  venerdi  matina  a  Monteca- 
tino(3),  ma  fu  valorosamenle  ributato  per  quei  di  drentro,  con  per- 
dita  di  cinque  cento  huomini  et  de  nostri  ne  sono  morti  quatro 
solamente  :  mi  scrive  anche  che  lanostra  armata  lia  preso  sette  navi 
carghe  di  fromento,  sino  a  12000  salme  (4),  et  40  perzae  d'artigliaria 
di  bronza,  le  quali  erano  a  Genovesi  et  Fiurentini  ;  et  se  ne  seppe  la 
nuova  da  un  capitan  genovese  quale  era  scampato  con  sette  altri 
huomini  et  ritirato  si  in  Livorna,  per  quello  ,si  debbe  credere  che  il 
tedeschi  et  guasconi  che  venivano  di  Marsiglia  sopra  le  nostre  galee 
son  giunti  a  Porto  Hercule  (5);  et  vinti  che  saranno  col  S01"  Pietro.  Jo 
spero  di  sentir  presto  qualche  buona  nuova  di  quelle  bande;  corne 
anche  di  quelle  Franza,  et  del  tutto  vi  scrivcro;  Ben  vi  priego  di 
rallegravidi  queste,  et  délia  buona  sorte  di  sua  Maesta  la  qualle  dio 
gli  voglia  continuare,  et  a  Vostra  Sgnoria  dare  contento. 

Di  Ferrara  a  di  x  di  luglio  m.  d.  liiii. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

(1)  Marienbourg,   ville   fortifiée  de  Belgique,  près   de   Namur,   prise  par  les 
Français  en  1554. 
(2i  Carlo  de  Gasola,  capitaine  italien  au  service  de   l'Empereur. 
(4)  Montecatini,  village  de  Toscane  à  40  kil.  de  Florence. 

(4)  Salmée,  ancienne  mesure  de  capacité  équivalant  à  quatre  sétiers. 

(5)  Porto  Ercole,  province  de  Grossetto  (Toscane),  dans  la  partie  Est  de  la 
presqu'île  de  Montargentaro.  sur  une  baie  dans  la  mer  Tyrrhenienne,  à  24  lieues 
S.-E.  de  Sienne. 


96  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE    1554^ 


GABRE   AU   CARDINAL    DE    TOURNON 

73.  —  [Ferrare],  10  septembre  1 Ô54.  —  Madame  la  Duchesse  a 
este  si  obstinée  que  jamais  ne  se  vouleust  renger  a  ouyr  la  messe, 
nous  ayant  donne  a  tous  tant  de  peyne  et  denuy  ala  y  persuader 
quil  nest  possible.  De  plus,  Monsieur  le  Duc  se  resoleust  a  la 
(in  de  commencer  a  quelques  exécutions,  et  chasse  les  officiers  et 
quelque  damoiselle  qui  estoient  deceste  sotte  I):  pour  tout  cela  elle 
ne  semeust  de  rien;  a  la  lin,  il  se  resoleust  de  mètre  les  princesses 
ses  filles  a  ung  monastère  ou  il  y  a  une  sienne  seur  abbesse(2) 
et  faict  venir  madame  a  son  vieulx  logiers  au  chasteau,  faict  fere 
inventaire  de  ses  cofres,  et  croy  quon  ne  scauroitt  trouver  liber  (3) 
en  vulgaire  des  doctrines  dallemaigne  quelle  neust  avec  infinies 
lettres  de  tous  les  principaux  hommes  qui  ont  escript  en  Germaine 
et  a  Genève.  Monsr  Ory  les  aveuz  et  ny  en  atrouve  un  seul  bon, 
mais  tous  ceulx  quon  peult  appeler  les  pires  du  monde;  voyant  cela 
elle  a  demande  la  messe  et  en  estre  contente  de  louyr  les  dimenches, 
mais  nions,  le  duc  dit  que  ce  nest  pas  assez,  et  que  avant  ceste  exé- 
cution, il  se  fut  contente  de  cest  acte  extérieur,  et  laisser  la  créance 
et  la  foy  a  sa  discrétion,  et  que  maintenant  il  ne  sen  peult  contenter 
avec  son  honneur,  ne  luy  rendre  ses  filles  si  elle  ne  se  remect  du 
toust  en  leglise  et  si  elle  ne  se  confesse,  et  se  comunicque,  accu- 
sant son  erreur,  et  faisant  telle  démonstration  et  changement  dévie, 
aladvenir  quon  cognoisse  quelle  oyt  la  messe  pour  lhonneur  de  dieu 
et  pour  la  vérité,  et  non  pour  sestre  réduite  par  force,  et  il  nya  or- 
dre de  luy  pouvoir  jamais  fere  dire  quelle  ayt  estre  en  erreur  ny 
user  d'une  seulle  submission  en  lendroil  de  nions,  le  duc  son  mari. 
Je  luy  en  parle  franchementet  nie  travaille  aultantque  lest  possible 
pour  luy  fere  cognoistre  ce  quelle  doibl  fere  pour  acomoder  icy  el 
ne  lay  flatte  rien  ;  elle  dit  que  je  suys  toul  de  nions,  le  due  et  uen 
veult  croyre  conseil  dhomme  qui  vive,  et  en  suis  >i  lâche  que  je 
vouldrois  estre  hors  dicy.  Monseigneur  le  duc  veult  despecher  ex- 
prez  devers  le  Roy  pour  ladvertirdu  tout;  quant  a  moy,  Monseigneur, 
je  suis  délibère  de  ne  rien  escripre,  mais  vous  dire/  de  moi  ce  qu'il 
vous  plaira  et  a  qui  vous  plaira,  car  je  vous  en  escriptz  la  pure 

vérité. 

(Arch.  de  Modène.  Arch.  île  lu  famille  Fieschi  . 

i,  Secte. 

(2)  Éléonore  d'Esté,  fille  d'Alphonse  d'Esté  et  ,1c  Laura  Eustochia,  3  Femme 
d'Alphonse,  fille  d'un  ouvrier  de  Ferrare.  Elle  n'était  que  la  demi-sœur  d'Hercule  II. 
lequel  était  ne  du  second  mariage  d'Alphonse  avec  Lucrèce  Borgia. 

(3)  Livre. 


[septembre  1554]  Dominique  du  gabre  97 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

74.  —  [Ferrare],  sans  date  (1).  —  Monseigneur,  Je  feuz  hier  assez 
long  temps  avec  Madame,  aprez  vostre  partement,  et  la  trouvay 
fort  dolente  et  travaillée  en  son  esprit  de  ceste  grande  mutation  en 
son  endroict,  disant  que  encores  que  nous  vueillons  croire  quelle 
vous  en  aye  donne  quelque  occasion,  la  qualité  de  sa  personne  est 
telle  quon  y  debvoit  procéder  plus  modestement.  Ses  doléances 
et  ses  plainctes  seroient  trop  longues  a  escripre,  et  encores  plus 
mes  remonstrances  et  mes  argumens  contreres,  parquoy,  Mon- 
seigneur, je  nen  feray  icy  mention,  pour  venir  a  la  conclusion  de 
nostre  dialogue,  la  quelle  me  semble  bien  bonne,  et  den  pouvoir 
espérer  tout  bien,  car  je  veoy  que  la  dite  dame  cognoist  avoir  fort 
failly,  et  désire  se  reconsillier  et  vivre  en  paix  et  en  amour  avec 
vous,  mayant  donne  charge  expresse  de  vous  dire  ou  fere  entendre 
de  sa  parte  quelle  vous  suplie  lexcuser  du  passé,  et  ne  lui  vouloir 
user  toute  la  rigueur  et  maulvaistractement  quil  luy  semble  que  vous 
luy  préparez,  et  quelle  est  résolue  du  cueur  et  de  bouche  de  vouloir 
dores  navant  vivre  au  faict  de  la  religion  et  envers  vous  de  telle  façon 
quelle  vous  fera  perdre,  et  a  chacun,  la  maulvaise  opinion  qu'on  a 
délie.  Quant  aux  livres  reprouvez  qu'on  a  trouve  en  ses  coffres  (2) 
et  aux  lettres  missives  aussi  des  gens  suspectz,  elle  vous*  asseure 
bien  de  deux  choses,  que  ceulx  qui  luy  ont  escript  ne  scauroient 
monstrer  avoir  eu  une  seulle  responce  délie,  et  quant  aux  livres,  que 
elle  ne  les  a  guieres  usez  comme  il  se  peult  veoir,  et  ne  pense  en 
avoir  leu  aucun,  et  quil  soit  vray  elle  est  contente  de  ne  les  ravoir 
jamais,  ne  dautres  semblables,  se  resolvant  de  vivre  dores  navant 
sans  toutes  ces  curiositez,  mais  avec  la  simplicité  qui  siet  fort  bien 
a  toutes  femmes.  Veult  et  entend  que  la  messe  se  dye  tous  les  jours 
en  sa  sale,  publiquement,  et  résolve  de  se  confesser  et  communiquer 
a  la  première  bonne  occasion,  et  le  plus  tost  quelle  le  pourra  pré- 
parer et  y  disposer  sa  conscience.  Elle  s'asseure  bien  quelle  na 
point  despendu  son  bien  a  nourrir  et  entretenir  les  héritiques 
comme  vous,  Monseigneur,  cuydez,  et  que  vous  nen  trouverez  rien 
par  ses  livres  de  despence  et  pour  lavenir  elle  a  encores  moins  den- 
vye  de  leur  en  donner.  Et  sil  vous  semble  que  le  faict  de  sa  despence 
et  de  sa  maison  soit  mal  conduyte,  elle  recevra  a  très  grand  plaisir  et 
honneur  quil   vous  plaist  la  conseiller  et  luy  ayder,  car  il  y  a  long 

(1)  Vraisemblablement  du  11  septembre. 

(2)  Ces  ouvrages  défendus,  manuscrits  ou  imprimés,  au  nombre  d"une  centaine^ 
furent  livrés  aux  flammes.  'Voir  Rodocanaghi,  Renée  de  France,  Op.  cit.,  p.  248). 

10 


98  NÉGOCIATIONS    DE  [NOVEMBRE    1554] 

temps  quelle  désire  y  veoyr  quelque  bon  ordre.  Par  tous  ces  lan- 
gaiges  la,  Monseigneur,  je  veoy  une  fort  bonne  disposition  en  la 
dite  dame  de  se  reconsilier  avec  Dieu  et  avec  vous,  et  d'obeyr  au 
désir  et  a  la  volonté  du  Roy.  Et  je  lui  ay  dit  que  si  elle  prent  ce  bon 
chemin  la, que  jay  opinion  que  vous  ne  sçauriez  avoir  pour  le  présent 
ung  plus  grand  contentement  en  ce  monde  et  quelle  doibt  espérer 
que  vous,  Monseigneur,  luy  lairrez  dispo>er  de  son  bien  et  du  vostre 
a  sa  volunté;  elle  se  trouve  fort  incomodement  logée,  mais  celapeult 
estre  remis  a  vostre  retour.  Cependant  je  vous  suplie  très  humble- 
ment me  respondre  chose  qui  la  puisse  consoler  et  qui  luy  donne  a 
cognoistre  quelle  ne  doibt  pas  estre  sans  espérance  de  retorner  en 
vostre  bonne  grâce;  le  mary  et  la  femme  doibvent  couvrir  et  excuser 
les  faultes  lung  de  lautre,  et  vous,  Monseigneur,  qui  avez  plus  de 
puissance  sur  elle,  y  userez  sil  vous  plaist  de  lamour  que  dieu  vous 
a  commandé  luy  porter,  et  de  la  bonté  et  cortesie  qui  doibt  estre  en 
tous  princes. 

(ArcM.  de  Hodène.   Arcli.  de  la  famille  Fiesclii). 


GABRE   AU    DUC    DE    FERRARE 

75.  —  [Venise],3  novembre  1554. —  Monseigneur,  Je  receuz  avant 
hier  ce  qu'il  vous  pleust  m'escripre  par  le  Capitaine  Malacrida,  et 
par  là  ay  veu  la  responce  que  vous  aviez  eue  de  MonsrRosset.  rt 
quand  je  verray  quelque  bon  effecl  de  ce  cousté-là,  je  y  croiray, 
autrement  non.  Mais,  il  ne  peult  venir  que  grand  bien  que  Vostre 
Excellence  face  toutjour  quelque  presse  de  cest  accord,  car  tant  plus 
tost  on  fera  parler  clair  le  Duc  de  Florence  et  l'Empereur  et  verra 
l'on  s'ilz  ont  envie  dudit  accord,  ou  s'ilz  pensent  nous  mener  par  le 
nez  et  fere  cependant  leurs  besoignes.  Quant  à  moy,  j'ay  opinion 
que  si  le  Pape  vous  donne  occasion  de  luy  aller  parler,  il  vouldra 
aussi  y  fere  trouver  le  Due  de  Florence  pour  essayer  d'accomoder 
tout  ce  qui  luy  peult  toucher,  et  par  adventure  mettre  en  avant 
aliances  et  mariaiges  entre  voz  deux  maisons,  car  il  esl  bien  a  croire 
que  le  Duc  de  Florence  ne  vouldra  pas  abandonner  l'espérance 
qu'il  a  d'avoir  bien  tost  Sienne,  s'il  n'aceomode  et  n'asseure 
pour  l'avenir  du  tout  ses  afferes  avec  le  Roy  Vous  verrez  aussi, 
Monseigneur,  qu'on  tiendra  la  responce  de  l'Empereur  sur  cesl  ac- 
cord en  longueur  et  incertaine,  ou  bien  qu'elle  scia  sur  la  braveure 
espaignolle.  Par  ainsi  commence/,  s'il  vous  plaist,  de  bonne  heure 
à  penser  quid  agendùm,  et  à  dire  clairement  vostre  résolution  à  la 
Court,  car,  selon  l'espérance  qu'ilz  verront  en  vous,  il/  feronl  leurs 
desseingz  plus  grandz  ou  moindres;  ci  s'il  vous  plaist  nie  1ère  en- 
tendre ce.  que  leur  en  aurez  mande,  et  qu'il  y  aye  chose  de  laquelle 


[novembre  1554]  Dominique  du  gabre  99 

se  puisse  ensuyvre  quelque  bonne  conclusion  et  que  vous  la  desiriez, 
j'en  escripray  de  ma  part  de  la  façon  qu'il  fault  pour  bien  ayder  le 
tout.  Si  aussi,  Monseigneur,  vous  avez  volunté  de  vous  en  demesler 
sans  conclusion,  vous  ferez  fort  bien  cela,  sans  que  je  m'en  mcsle. 
Quant  à  ces  Seigneurs,  je  ne  puis  me  garder  d'espérer  tout  bien 
d'eulx,  et  s'ilz  vous  voyent  résolu  de  corir  la  mesme  fortune  du 
Roy,  ilz  n'endureront  jamais  vostre  ruyne  de  l'ung  ny  de  l'autre,  car 
il  est  certain  que  cela  leur  importeroit  trop,  et  ce  qu'ilz  ne  vou- 
droient  maintenant  fere  par  élection,  ils  le  feront  lors  par  nécessité, 
car  vous  auriez,  Monseigneur,  mille  occasions  de  leur  fere  cognoistre 
chascun  jour  que  vous  auriez  prins  la  charge  des  afferes  du  Roy  en 
Italie  principallement  pour  ne  laisser  prendre  occasion  à  Sa  Mate 
d'abandonner  la  protection  de  l'Italie  et  pour  vous  conserver,  et 
qu'il  n'en  peult  reuscir  à  ceste  Seigneurie,  sinon  utilité  et  grandeur 
et  jamais  aucun  domaige,  et  que  non  seullement  eulx,  mais  toute 
l'Italie  vous  en  debvra  eslre  obligée.  Cesditz  Seigneurs  ont  esté  fort 
desplaisantz  de  ceste  nouvelle  de  Casoli(l),  que  vostre  Ambassadeur 
leur  porta,  et  me  la  ditz  le  Prince  avec  grand  regret  Sur  quoy  je  ne 
failliz  à  luy  fere  une  particulière  et  privée  remonstrance,  pour  ce  que 
nous  estions  à  la  messe  parlans  à  part  le  jour  de  la  teste.  Nous 
verrons  ce  que  le  Pape  vous  fera  entendre,  et  selon  cela,  chescun  se 
gouvernera,  car  si  Fompeultune  foizse  résouldre  quenoz  adversaires 
ne  veullent  entendre  à  l'accord,  je  viendry  à  estraindre  de  si  prèz 
ces  Seigneurs,  que  je  leur  feray  dire  le  si  ou  le  non. 

Je  n'ay  rien  de  la  Court,  et  quant  aux  nouvelles  de  Sainct  Marc  (2), 
je  lesremetz  à  vostre  Ambassadeur,  car  aussi  je  vous  asseure  que 
si  l'on  ne  m'en  vient  dire,  je  ne  suis  guières  curieux  d'en  entendre. 
C'est,  Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous  diray  pour  ceste  heure. 

De  Venize,  ce  me  de  novembre  1554. 

(Arcli.  de  Modènc.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE  AU   CONNETABLE 

76.  — [Venise],  23  novembre  1554. —  Monseigneur,  Je  ne  vous 
feray  longue  lettre,  sinon  de  vous  asseurer  que  le  Baron  Cochart  (3) 
qui  arriva  icy  avant  hier  partira  demain  au  soir  secrètement  et 
seurement  despeché  et  avec  les  cedules  de  l'argent  de  Monsieur  de 
S1  Ciergue  dont   vous  voulez  secourir   Monsieur  de  Codignac  (4), 

(1)  Casoli,  bourg  de  Toscane  à  12  kil.  0.  de  Sienne. 

■1    Venise. 

:i    Pierre  Cochart,  résident  à  Raguse. 

14)  Michel  de  Codignac,  dauphinois,  valet  de  chambre  du  Roi;  devint  ambas- 
sadeur en  Levant  après  M    d'Aramon,  à  la  suite  duquel  il  était  en  1551.  Le  Roi, 


100  NÉGOCIATIONS    DE  [NOVEMBRE    1554 

lesquelles  cedules  jay  retirées  non  sans  grand  mistere  et  difficulté; 
larrivee  dud.  Cochard  sera  fort  a  propoz,  car  ces  seigneurs  ont  eu 
nouvel  advis  de  la  trefve  faite  entre  le  Sophy  (1,  et  le  grand  sei- 
gneur (2)  et  que  on  commencoit  a  Constantinople  a  préparer  des 
allégresses  pour  le  retour  dudit  Grand  Seigneur.  M.  de  Lanssac 
arriva  hier  icy  qui  vous  escript  de  ses  nouvelles.  Au  reste,  Monsei- 
gneur, j'ay  este  icy  assailly  d'une  fièvre  fort  fascheuse  qui  m*atenn 
quatorze  jours  au  lict,  mais  Dieu  mercy,  depuis  deux  jours  j'en  suis 
dehors  et  vous  puis  asseurer  que  ces  seigneurs  mont  faict  aussi 
honnestes  démonstrations  de  bien  veuillance  qu'ilz  firent  jamais  a 
homme,  mestans  venuz  visiter,  deux  des  plus  grands  dentre  eulx,  de 
la  part  de  la  seigneurie  avec  aultant  honneste  langaige  quil  est  pos- 
sible. J'espère,  Monseigneur  de  dans  deux  jours  les  aller  veoir  et 
vous  escripre  après  plus  amplement  de  toutes  choses. 
De  Venize  ce  xxme  de  novembre  1554. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  135)  (originale  . 


GABRE   AU    DUC    DE   FERRARE 

77.  —  [Venise],  28  novembre  155  4.  —  Monseigneur,  Je  ne  vous 
feray  point  longue  lettre  pour  ceste  heure,  encores  que  j'en  aye 
receu  deux  qu'il  a  pieu  à  Vostre  Exellence  m'escripre,  et  sera  seul- 
ement pour  vous  asseurer  que  je  suis  fort  bien  gnéry  de  ma  mala- 
die et  ay  déjà  commencé  à  négotier  en  Seigneurie.  Mais,  craignant 
de  me  travailler  trop  tost,  je  remettray  à  vous  fere  le  tout  entendre 
à  sabmedi  prochain  que  je  ne  fauldray  de  vous  escripre  amplement; 

De  Venize,  ce  xxvme  novembre  155ï. 

Monseigneur,  J'espère  que  à  vostre  retour  de  Modena  je  seray. 
s'il  plaist  à  Dieu,  en   estât  pour  aller  fere    bonne   chère  avecqucs 

ayant  des  soupçons  sur  sa  conduite,  envoya  M.  de  la  Vigne  pour  le  remplacer  en 
1556,  et  chargea  Hureau  de  Boistaillé  de  le  ramener  en  France  ;  mais,  en  passant 
à  Venise,  il  réussit  à  s'échapper,  et  se  retira  au  service  du  roi  d'Espagne. 

(1)  Tliomasp  I«,  deuxième  souverain  de  la  dynastie  persane  des  Supins.  suc- 
céda  en  1524  au  Schan  Ismaël  l"r  et  régna  jusqu'à  sa  morl  en  1576. 

(2)  Soliman  II,  le  Magnifique,  empereur  des  ottomans,  né  en  1494,  succéda  a 
son  père  Selim  1er en  1520,  dompta  la  Syrie,  lit  capituler  l'Ile  de  Rhodes,  envahit 
la  Hongrie,  s'empara  de  Rude,  mit  le  siège  devant  Vienne  en  1529,  marcha  contre 
la  Perse,  s'empara  de  Tamis,  puis  de  Bagdad  (1534  :  réunit  ensuite  a  son  empire 
Alger  et  Tunis.  Il  entra  avec  François  I"  dans  une  ligue  offensive  et  défensive 
contre  Charles-Quint.  En  1547,  il  renouvela  la  guerre  contre  la  Perse  et  conquit 
le  Schirwan  et  la  Géorgie.  Soliman  mourut  au  siège  île  Sigeth  en  1566,  après  avoir. 
durant  son  règne,  doté  son  empire  de  lois  excellente-,  tait  construire  des  canaux. 
des  hôpitaux,  des  collèges ,  fondé  des  bibliothèques  ci  rédigé  de  ti 
règlements  pour  I  administration  de  ses  Fatals. 


[DÉCEMBRE    lo54j  DOMINIQUE    DU    GABRE  101 

vous  et  ne  fauldray  de   vous  remborser  des  mc  escuz   que   Vostre 

Exellence  a  baillez  à  l'Ambassadeur  de  Sienne.  Il  vous  plaira  escripre 

ung  mot  à  Monsr  vostre  Ambassadeur  à  Florence  pour  le  paquet 

que  je  luy   envoyé   pour  quelque  affere   particulier  de   Monsr  de 

Forquevaulx. 

Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    ROI 

78.  —  \  Venise],  1tT  décembre  1554.  — Sire,  Monsieur  de  Lanssac 
sera  porteur  de  la  présente  qui  a  esté  ycy  quelques  jours,  autant 
bienvenu,  caresse,  et  honnore  de  ces  seigneurs  qu'il  est  possible,  et 
vous  pourra  dire  le  bon  et  affectionné  langaige  qu'ils  luy  ont  tenu 
de  l'obligation  qu  ils  vous  portent  et  du  désir  quils  ont  de  la  pros- 
périté de  vos  affaires  ;  ils  sont  fort  officieux  en  telles  bonnestetes, 
mais  ils  ne  sont  gueres  eschauffés  a  mettre  la  main  aux  armes 
pour  leurs  amys,  ne  pour  eulx  mesmes,  et  vous  supplye  très  hum- 
blement, Sire,  croire  que  sur  ce  propos  la  je  leur  donne  de  grandes 
alarmes  et  que  je  pense  ny  avoir  oublye  raison,  ne  persuasion  qui 
les  puisse  mouvoir  et  ne  fauldray  de  donner  advis  a  Vostre 
Majesté  de  tout  ce  qui  en  succédera,  et  de  toutes  occurences  de 
deçà.  Il  y  a  icy  un  jeune  Duc  de  Brunsvic  (1)  qui  m'est  venu  parler 
secrettement,  et  pour  ce  que  le  dit  sieur  de  Lanssac  a  este  présent 
at  tout  ce  quil  a  dict  je  ferois  tort  a  sa  suffisance  de  vous  en  faire 
autre  discours;  seullementvous  diray  Sire  que  pour  un  allemand  il 
dict  aussi  bien  son  faict  quil  est  possible,  et  monstre  s'estredellivré 
du  service  de  l'E  (2)  honnorablement  et  avec  juste  et  bonne  occa- 
sion. Du  faict  de  Syenne  et  des  tinances  n'est  rien  survenu  depuis 
que  j'ay  escript  dernièrement  parle  boyteux. 

De  Venise  ce  premier  Décembre  1554. 

(Ms.  de  Grenoble,  fol.  37,  v°). 


GABRE    AU    CONNÉTABLE 

79.  —  [Venise],  1"  décembre  1 554.  —  Monseigneur,  Je  croy  que 
Monsieur  de  Lanssac,  présent  porteur,  vous  trouvera  tous  rassem- 
blez avec  le  Roy,  et  que  comme  il  est  fort  aise  et  désire  d'estre 
auprès  de  vous  pour  vous  faire  service,  vous  serez  aussy  bien  aise 
de  le  y  veoir  pour  les  bonnes  qualitez  qu'il  a  de  très  suffizant  et 

1    Henri  II  dit  le  Jeune,  duc  de  Brunswick  Wolfeubutel,  né  eu  décembre  1489. 
mort  le  12  juin  1568. 
(2)  L'Empereur,  Çharles-Quint. 


102  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1555" 

digne  ministre  du  Roy,  et  tant  vostre  serviteur  comme  il  est,  il  a  eu 
ceste  fortune  de  sa  prison  pour  vouloir  faire  service,  mais  pour  cela 
il  n'est  pas  recreu  (1)  et  se  mettra  en  plus  grandz  dangers  quant  il 
vous  plaira  l'employer.  Ces  Seigneurs  icy  lont  veu  fort  volontiers  et 
l'ont  caresse  et  honnore,  et  pour  ce  que  j'escrips  au  Roy  ung  petit 
mot  de  lettre  et  auzsi  quil  scaura  vous  rendre  compte  de  toutes 
nouvelles  par  deçà;  je  feroys  tort  a  sa  suffisance  de  vous  faire  longue 
lettre. 
De  Venize  ce  1er  de  Décembre  1554. 

Bibl.  nat..  Fr.  20456,  fol.  137)  (copie  . 


GABRE    AU    DUC    DE    FF.RRARE 

80.  —  [Venise],  5  janvier  I ,">.">. ">.  —  Monseigneur.  Je  presupose 
que  vous  aurez  entendu  la  responce  que  lEmpereur  a  faicle  au  Pape 
sur  le  faict  de  lacord  de  Sienne,  duquel  les  ministres  de  Rome  disent 
que  Sa  Sainteté  veult  mettre  la  main  a  bon  escient.  Il  semble  que 
le  Roy  désire  tout  jour  ledit  acord  et  quil  soit  manye  par  vous.  .Mon- 
seigneur, il  vous  en  aura  faict  entendre  son  intention  par  Monsieur 
de  la  Cbapelle  des  Ursins  (2),  mais,  a  toutes  aventures,  je  vous 
envoyé  coppie  de  ce  que  Sa  Majesté  men  escript;  il  vous  plaira  veoir 
le  tout,  et  sil  se  faict  traicte  je  croy  que  le  Roy  desireroil  que  vous 
allissiez  jusques  a  Rome,  car  vostre  présence  donneroil  grand  répu- 
tation et  effect  audit  acord,  et.  si  bien  il  ne  succedoit  poinct.  vostre 
assistance  et  vostre  tesmoniaige  seront  tout  jour  de  grand  des- 
charge pour  Sa  Majesté,  envers  Dieu  el  le  monde,  et  vous  plaira, 
Monseigneur,  me  mander  la  dessu>  vostre  intention  et  hou  plaisir. 
Je  suis  fort  esbahy  que  mon  secretere  ne  soit  encores  icy  de  retour. 
De  Monsieur  le  Mareschal  de  Rrissac  (3  ,  nous  nen  avons  icy  une 
seulle  nouvelle  et  semble  que  nostre  fureur  soit  passée.  11  se  parle 
icy  dung  assault  donne  a  Sienne  ou  ilz  ont  este  rudement  repoulsez 

(1)  Novice. 

■2   Christophe  Jouvenel  des  Ursins.  seigneur  de  la  Chapelle  des  Ursins,  baron 
d'Armenonville,  capitaine   de   chevau-légers,  chevalier  du  Saint-Esprit    î 
lieutenant    du    Uni    dans   l'Ile    de    France,  gouverneur   de   Paris,   morl  en   1588. 
Envoyé  par  le  Roi  à  Montluc,  à  Strozzi  el  au  duc  de  Guise. 

:s  Charles  de  Cossé-Brissac,  né  en  1505,  maréchal  de  France,  servit  dans  le 
Roussillon,  en  Piémont  et  en  Flandre  ;  défît  les  Anglais  près  ne  Boulogne  1! 
l'ut  désigné  comme  successeur  de  Coligny  dans  ic  gouvernement  de  la  Picardie 
(1552k  el  comme  gouverneur  de  Normandie  1562).  Il  mourut  à  Paris  le 31  décembre 
1563,  à  57  ans.  Brantôme  (édition  Lalanne,  Vie  des  grands  capitaines)  dit  de 
Brissac  :  «  Ses  actes  ont  esté  telz  et  si  hauts,  qu'ils  le  tirent  mareschal  de  France 
et  lieutenant  du  roi  en  Piedmont;  là.  il  s'acheva  de  se  parfaire  un  très  grand 
capitaine,  et  tel  qu'on  l'a  renommé  parmy  nous  et  les  nations  étrangères,  etc.  ». 


[JANVIER    1555]  DOMINIQUE    DU    GABRE  103 

et  avecques  perte  de  beaucoup  dEspaignolz;  silz  avoient  envye  de 
se  partyr  du  tout  de  la.  Je  diroyz  quilz  sont  gens  de  bien.  Monsei- 
gneur, je  ne  suis  point  encores  bien  de  ma  santé  et  est  force  que 
j'attende  le  beau  temps.  Cependaut,  je  ne  laysse  pas  de  servir, 
escripre  et  negotyer  afferes,  mais  que  je  ne  me  monstre  point  a 
layr;  si  je  me  voyois  bien  confirmer,  je  ne  fauldrois  incontinent 
vous  aller  trouver  en  me  recommandant  Monseigneur,  très  hum- 
blement, a  Vostre  Excellence. 

De  Venize  ce  cinquiesme  de  janvier  1555. 

Monseigneur,  Comme  je  voulois  fermer  ce  paquet,  est   arrive  le 
secrétaire,  et  pource   quil   est   fort  tard,  je   remetlray  ademain  ou 
aprez  demain  sil  aura  apporte  quelque  chose  qui  mérite  responce. 
(Arcli.  de  Modène.  Arcli.  de  la  famille  Fieselii). 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

81. —  [Venise],  4 9  janvier  1555. —  Monseigneur,  .layveu la  lettre  de 
vostre  main  que  le  sieur  Alexandre (1)  ma  communiquée,  et  la  pre- 
mière chose  que  je  vous  veulx  respondre  sur  cela  cest.  Monseigneur, 
quil  vous  plaise  nentrer  point  en  opinion  ne  def fiance  que  Ion 
vueille  retenir  voz  deniers  contre  vostre  volunte,  car,  puis  que  vous 
les  demandez  avec  si  grande  instance,  jamais  on  ne  reffuzera  de  les 
vous  payer,  et  sil  se  peult  fere  que  le  Roy  nen  sçaiche  rien,  je  vous 
asseure  quil  se  fera.  Dez  aujourdhuy,  on  donnera  advis  a  messer 
Albiza  de  tenir  largent  prest  a  Lyon  quant  vous  lenvoyerez  quérir 
ou  il  est  ohlige  de  le  vous  payer,  et  vous  espargneres  douze  mille 
escuz  du  change  que  vous  cousteroit  a  le  fere  remettre  par  deçà,  et 
d'ailleurs,  la  difficulté  de  le  remettre  est  si  grande  entre  marchans, 
quil  fault  beaucoup  de  temps  a  en  fere  les  provisions,  et  le  dit  Alhizo, 
si  ce  nest  pour  vous  fere  service,  sera  plus  ayse  que  vous  le  faciez 
remettre  par  autre  que  par  luy.  Mais,  Monseigneur,  je  vous  ay  sou- 
vant  dit  que  je  vous  estois  serviteur  très  fidelle  et  affectionné,  et  le 
voulant  estre  en  effect,  il  fault  que  je  vous  dise  que  je  ne  vouldrois 
pour  tout  mon  bien  que  le  Roy  sceust  la  façon  don  vous  demandez 
cest  argent,  en  ce  temps  ou  il  en  a  plus  de  besoing  quil  neust 
jamais  ;  il  verroit  par  la  au  descouvert,  peu  ou  rien  damytié  de  vos- 
tre cousté  en  son  endroict,  et  grande  mutation  de  vostre  volunté 
accostumee,  scaichant  bien  (comme  il  est  notoire  a  tout  le  monde) 
que  vous  navez  nul  besoing  de  cest  argent  que  pour  le  tenir  dans 
ung  coffre  inutile,  et  que  par  la  on  peult  inférer  que  vous  seriez 
marry  que  le  Roy  eust  argent  ne  moyen  de  continuer  la  prospérité 
de  ses  afferes.  Vous,  Monseigneur,  qui  estez  prince,  pourrez  consi- 

(1)  Alexandre  Guerin. 


104  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    15oO~ 

derer  que  les  autres  princes,  mesmes  les  pluz  grandz,  rendent  ce 
qui  nest  point  a  eulx  quant  il  leur  plaist  et  quant  ilz  nen  ont  point 
de  besoing,  silz  en  ont  bien  a  fere  ilz  le  retiennent  et  sen  aydent  et 
vous  nen  feriez  pas  moins  si  vous  trouviez  en  nécessite,  dont  Dieu 
vous  vueille  garder.  Mais  en  vostre  endroict,  je  mettray  ma  teste 
que  si  le  Roy  voyoit  vostre  lettre,  il  commanderoit  que  Ion  vous 
portast  vostre  argent  en  poste.  Je  suis,  Monseigneur,  marry  que 
vostre  personne  ne  vostre  esprit  se  mecte  en  poyne  de  mamona 
iniquitatis  (1\  qui  ne  doibt  servir  que  a  fere  des  amys,  et  vous 
vouliez  quelle  vous  acquière  ennemys,  et  encores  que  vostre  altéra- 
tion soit  fondée  sur  le  procéder  de  Monsieur  Albizo,  si  est  ce  que 
leffect  sen  adresse  au  Roy  qui  est  le  seul  protecteur  de  vostre  mai- 
son, et  qui  ha  faict  tant  de  liberalitez  et  de  bienfaictz  a  voz  frères 
et  a  vos  enfans  pour  vostre  respect.  Et  vous  diray.  Monseigneur,  en- 
cores ce  mot,  sil  vous  plaist, pour  Albizo,  que  le  plussouvant  il  vous 
a  remborse  du  sien,  avant  que  avoir  recouvert  largent  du  Roy,  qui 
est  bien  loing  de  fere  son  profit  du  vostre.  et  quant  a  moy,  je  croy, 
comme  je  croy  en  Dieu,  quil  na  jamais  gaigné  avec  vous  ung  liart, 
et  si  vous  a  faict  gaigner  cinquante  mille  escuz  en  peu  de  temps  et 
avec  peu  dargent,  il  est  force  de  dire  les  choses  comme  elles  sont. 
Monseigneur,  quelque,  foiz  les  princes  font  bien  de  se  desmestre 
de  leurs  affections  et  des  choses  basses  sur  leurs  serviteurs,  je  vous 
conseillerois,  non  pour  le  service  du  Roy,  car  je  ne  vous  en  veulx 
plus  parler,  mais  pour  vous  conserver  sa  bonne  grâce,  et  pour  ne 
mouvoir  beaucoup  de  choses  que  vous  estez  content  quon  ne  sçai- 
che  pas,  que  vous  laissisiez  passer  ces  choses  icy  doulcement,  reti- 
rant vostre  argent,  peu  a  peu,  tant  que  vous  viendrez  a  avoir  tout  ce 
qui  est  a  vous  sans  que  le  Royen  scaiche  rien.  Je  me  doubte,  Mon- 
seigneur, que  vous  ayez  prins  quelcque  desdaing  de  la  responce 
qu'on  a  faicte  a  vostre  ambassadeur,  et  je  vous  suplie  très  humble- 
ment d'y  user  de  vostre  prudence  accoustumee,  el  passer  cela  soubz 
silence  comme  vous  scavez  bien  fere.  Car  sil  failloil  disputer  de- 
vant des  juges  qui  a  tort,  je  me  doubl  que  vous  ne  gaigneriez  pas 
vostre  cause,  et  excusez  moy.  Monseigneur,  si  je  parle  trop  libre- 
ment, car  la  ou  je  suis  serviteurs  de  vraye  amour,  il  est  impossible 
de  forcer  autrement  mon  naturel,  et  si  le  monde  voultoil  san  dessus 
de  soubz,  je  ne  veulx  faillir  de  vous  estre  tout  ma  vie  très  humble 
et  affectionne  serviteur. 

Monseigneur,  jay  dit   beaucoup   dautres   particularité/,  au  sieur 
Alexandre. 

De  Venize  ce  xixe  de  janvier  1555. 

[Arch.  de  Modène.  Aivh.  de  la  famille  Fieschi 

(l)  Mainmou.  dieu  des  richesses. 


[JANVIER    15551  DOMINIQUE   DU    GABRE  105 


GABRE    AU   CONNETARLE 

82. —  [  Venise],  30  janvier  1555.  — Monseigneur,  je  receuz  hier  ung 
pacquet  de  Monseig1  le  Maresclial  Strozzi  avec  une  coppie  de  lettres 
de  Monsieur  de  Montluc,  par  laquelle  jay  veu  quil  asseure  de  n'avoir 
point  faulte  de  vivres  de  tout  le  mois  de  février,  et  ledit  sieur  Mares- 
chai,  ainsy  quil  m'escript,  espère  de  la  faire  tirer  jusques  a  la  fin 
de  Mars  ;  s'il  est  ainsy,  vous  pouvez  estre  asseure  que  Sienne  ne  se 
perdra  jamais,  car  il  est  quasy  impossible  que  ceux  qui  la  tiennent 
assiégée  y  puissent  plus  demeurer,  ne  trouvant  rien  a  manger  par 
tout  ce  pays  la,  sans  les  autres  occasions  qui  peuvent  survenir 
pour  leur  faire  laisser  l'entreprinse  ;  je  vous  puis  bien  dire.  Monsei- 
gneur, une  chose  quilz  n'ont  point  faulte  d'argent  pour  payer  les 
bledz  qui  se  trouvent  dans  Sienne,  comme  ledit  sieur  de  Montluc  le 
demande,  car  ilz  ont  en  reserve  quelques  payes  de  la  garnizon  de 
Sienne  pour  ce  que  l'argent  n'y  peult  entrer,  et  encores  ay  je  fait 
partir  d'icy,  aujourdhuy,  30  mil  escuz  pour  y  envoyer  et  davantaige. 
Je  ne  trouve  pas  quil  soit  grand  pèche  mortel  ny  trop  malaisé  de 
prendre  les  vivres  qui  sont  dans  une  place  assiégée  a  crédit,  car, 
ou  bien  ilz  en  recouvrent  les  deniers  en  vendant  le  pain,  ou  bien  le 
Roy  leur  en  demeurant  débiteur.  Je  ne  scay  comme  ilz  usent  de  ces 
munitions  acheptées  des  deniers  de  Sa  Majesté,  car  j'ay  bien  veu  la 
despence  de  l'achapt,  mais  je  n'ay  jamais  veu  aulcune  recepte 
dargent  provenant  de  la  vente  ;  ce  sont  choses  qui  se  verront  puis 
après  a  loisir,  mais  qu'on  soit  ung  peu  hors  de  ces  extrémitez.  Je 
ne  scay,  Monseigneur,  que  vous  dire  de  cest  accord,  car  ny  de  Rome 
ny  de  Ferrare  je  n'en  ay  eu  une  seule  nouvelle  depuis  ce  que  je 
vous  en  ay  dernièrement  escript.  Jay  bien  veu  icy  advis  de  la  Court 
de  l'Empereur  contenant  quil  avoit  mande  aDom  Jehan  Manrigues  (1) 
de  tanter  s'il  pourroit  forcer  Sienne  avec  une  grande  batterie  et,  en 
cas  que  non,  qu'il  s'en  allast  trouver  le  Pape  pour  donner  ordre  a 
l'accord  ;  toutesfois  je  n'en  veoy  point  encores  aulcunz  commence- 
ment de  leur  coste,  je  n'ay  nulle  nouvelles  de  Monsieur  de  Soubize 
dont  je  suis  fort  esbahy. 

De  Venise  ce  30  janvier  1555. 

Monseigneur,  Vous  recevrez,  avec  la  présente,  une  lettre  de  Pom- 
payo  de  la  Croce  qui  escrit  dans  Cazale  (2)  et,  a  ce  que  j'entendz,  il 

(1)  Jean  Manriquez  de  Lara,  marquis  de  Saria,  ambassadeur  de  l'Empereur  vers 
le  Pape,  envoyé  par  le  marquis  de  Marignan  pour  négocier  la  capitulation  de 
Sienne.  [Commentaires  de  Montluc,  Op.  cit.,  t.  il,  p.  93). 

(2)  Casale,  place  forte  du  Piémont,  sur  la  rive  droite  du  Pô. 

11 


106  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1555] 

n'a  fait  a  la  reddition  de  ceste  place  chose  qui  soit  contre  son  devoir 
ny  son  honneur,  et  est,  avec  Monsieur  le  Mareschal  (1),  pour  rendre 
bon  compte  de  soy;  il  m'a  prié  vous  en  escripre  aflin  quil  vous  plaise 
luy  faire  cest  honneur  de  lire  sa  lettre,  il  est  Milanois  et  a  ce  que 
j'endendz  de  bonne  maison  et  bien  apparenté. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20643,  fol.  127)  (copie). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

83. —  [Tenise],  9  f écrier  1555.  —  Monseigneur,  Jeuz  hier  une 
lettre  de  Monsieur  d'Avanson  (2)  escripte  à  Ysée  (3),  dont  il  partist,  à 
ce  que  j'entendz,  mercredi.  Il  me  mande  avoir  commission  du  Roy 
de  passer  en  ceste  ville  pour  entendre  de  ses  afferes,  mais  qu'il 
vouloit  plus  tost  aller  fere  la  révérence  et  recevoir  voz  commande- 
mens.  J'ay  dépesché  pour  veoir  si  l'on  le  pourroit  encores  atteindre 
en  chemin,  et  luy  remonstrer  qu'il  va  avant  et  puis  tourne  «en 
arrière,  et  qu'il  debvoit  plustost  passer  icy  pour  éviter  les  maulvais 
chemin  et  s'en  aller  aprèz  par  eaue  vous  trouver.  Je  ne  scay  si  mon 
homme  le  trouvera  assez  à  temps  pour  luy  fere  torner  bride.  Bien 
vous  asseure  je,  Monseigneur,  que  j'ay  grand  regret  à  mon  indis- 
position qui  me  garde  de  ne  pouvoir  voyaiger,  car  j'eusse  voluntiers 
prins  ma  bonne  part  de  la  bonne  chière  que  je  scay  que  vous  luy 
ferez.  Vous  aurez,  Monseigneur,  entendu  l'bereuse  faction  de  noz 
lansquenetz  de  Sienne  et  je  faiz  encores  ung  coup  ce  pronostique 
qu'elle  ne  se  perdra  point.  Icy  ne  se  dit  rien  de  nouveau,  et,  par 
lettres  qu'on  escript  de  Trente,  il  n'y  a  point  encores  nouvelles  de 
gens  prestz  pour  passer. 

De  Venize,  ce  ix  de  février  1555. 

\  en.  de  Modène.  Caneelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AL     DUC    DE    FERRARE 

84. —  [Venise],  1J  février  1555.  —  Monseigneur,  S'en  allant 
Monsr  de  Serres  à  Parme  avec  l'assignation  de  ce  mois  de  février, 
je  n'ay  rien  de  nouveau  à  vous  dire,  sinon  que  j'en/,  hier  lettres  de 

(1)  Strozzi. 

(2)  Jean  de  Saint-Marcel,  sieur  d'Avanson,  conseiller  au  Parlement  de  Grenoble, 
maître  des  requêtes,  président  au  Grand  Conseil,  surintendant  des  finances,  am- 
bassadeur à  Rome.  Voir,  sur  1rs  négociations  auxquelles  ci'  diplomate  l'ut  mêlé 
durant  l'été  de  1555:  G.  Duruy,  Le  Cardinal  Carafa,  |>.  55  sq.) 

(3)  Isée,  bourg  de  Lombardie,  à  ig  kil.de  Brescia,  sur  la  rive  droite  du  lac  du 
même  nom. 


[FÉVRIER    1555]  DOMINIQUE   DU    GABRE  107 

l'ambassadeur  du  Roy  en  Levant,  qui  me  mande  luy  avoir  esté 
accordé  la  traicte  desbledz  pour  si  grande  quantité  qu'on  en  vouldra, 
et  que  si  les  amys  et  serviteurs  du  Roy  en  ont  besoing,  et  nommé- 
ment me  parle  de  vous,  il  les  en  fera  servir,  mais  qu'on  face  dili- 
gence de  l'aller  lever  et  d'y  envoyer  argent.  Il  m'a  semblé  de  vous 
en  debvoir  dire  ung  mot  d'advis,  pour  ce  qu'il  semble  que  cest  yver 
promet  avec  ces  grandz  pluyes  la  racolte  procbaine  fort  maulvaise 
en  Italie.  11  m'escript  aussi  d'ung  propoz  que  m'en  avoit  tenu  ung 
qui  alla  dernièrement  en  Levant,  qui  estoit  de  fere  ouster  le  bayle(l) 
des  Florentins  comme  ennemys  du  Roy,  et  d'y  fere  mettre  ung 
bayle  du  Duc  de  Ferrare,  et  m'asseure  qu'il  disposera  tellement  le 
Grand  Seigneur,  qu'il  ne  tiendra  que  à  vous  que  cela  ne  se  face.  Ce 
bayle-làauroit  grand  auctorité  sur  toutes  les  marchandises  qui  vien- 
nent deçà,  et  n'y  auroit  point  de  mal  que  vous,  Monseigneur,  en  de- 
visissiez  ung  peu  avec  le  S''  Marcantonio  Palevecin  (2),  pour  vous 
resouldre  d'y  envoyer  quelcun.  Il  est  vray  qu'il  m'escript  aussi  que 
le  Grand  Seigneur  est  contrainct  s'en  retorner  à  la  guerre  contre  les 
Géorgiens,  qui  luy  ont  préparé  de  grandz  afferes.  Je  croy  que  Mon- 
sieur d'Àvanson  doibt  estre  maintenant  avec  vous,  et  que  aprèz  il 
ne  fauldra  de  venir  icy  comme  il  m'a  escript.  Je  vous  asseure,  Mon- 
seigneur, que  si  je  pouvois  aller  par  pays,  je  ne  luy  donnerois  pas 
ceste  peyne,  car  j'ay  bonne  envye  de  vous  aller  veoir  ;  mais  il  faict 
ung  temps  du  diable,  qui  ne  sçauroit  sinon  empirer  mon  mal.  Le 
Madruche  (3),  nepveu  du  Cardinal  de  Trente  (4),  est  entre  les  mains 
de  nostre  Ambassadeur  à  Constantinople. 
De  Venize,  ce  xne  de  février  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleiïa  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    ROI 

85.  —  [Venise],  12  février  1555. —  Sire,  Suyvant  ce  quil  vous  a 
pieu  me  commander,  j'ay  entendre  a  Milord  Cortenay  (5)  qui  est  en 

(1)  «  Bayle  »  ou  «  Baille  »,  nom  donné  généralement  au  magistral  vénitien  chargé 
de  défendre  les  intérêts  de  ses  compatriotes  auprès  de  la  Porte.  Il  résulte  de 
cette  correspodance  que  le  duc  de  Ferrare  pouvait  conférer  le  titre  de  bayle  à 
des  agents  investis  des  pouvoir  analogues  à  ceux  des  agents  de  la  Seigneurie. 

(2)  De  l'ancienne  et  noble  famille  italienne  des  Pallavicini  qui  a  produit  diverses 
branches  à  Borne,  à  Gênes  et  en  Lombardie. 

(3)  Nicolas,  baron  de  Madruce,  capitaine  général  au  Tyrol,  mort  pendant  la 
guerre  de  Sienne. 

(4)  Cristophe  Madruce,  évêque  de  Trente  (1539),  cardinal  (1542)  ;  fut  employé 
dans  plusieurs  négociations  en  Italie.  11  mourut  en  1578. 

(5)  Edouard  de  Courtenay,  comte  de  Devon,  pelit-tils  de  Guillaume  de  Courtenay 
et  de  Catherine,  fille  d'Edouard  IV  roi  d'Angleterre.  Longtemps  prisonnier,  il  fut 


108  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1555] 

ceste  ville,  que  j'avois  a  luy  dire  quelque  chose  de  vostre  part,  et 
quil  advisast  en  quelle  façon  il  vouldroit  que  nous  partissions  em- 
semble.  Une  s'en  est  volu  fyerahomme  dumonde  des  siens,  et  s*en 
vint  tout  seul  a  trois  heures  de  nuict  chez  Messer  Pietro  Pomara  ou 
je  me  trouvay  aussy,  et,  la,  luy  feiz  entendre  ce  quil  vous  avoit  pieu 
me  commander;  et  afin  qu'il  y  adjouxtat  plus  de  foy,  je  luy  monstray 
le  propre  original  de  vostre.  lettre,  signée  de  vostre  main,  combien 
que  ce  qui  faisoit  mention  de  luyfust  en  chiffre  ;  il  fust  merveilleu- 
sement ayse,  Sire,  de  l'honneur  et  de  la  faveur  qu'il  vous  a  pieu  de 
luy  l'aire,  ayant  mémoire  de  luy,  et  me  prya,  fort  expressément,  de 
vous  en  remercier  très  humblement  de  sa  part,  et  vous  asseurerque 
se  paravantil  a  eu  bonne  volonté  et  désir  de  vous  faire  service;  que 
maintenant  il  en  a  encore  plus  grande  obligation,  et  que,  en  toutes 
choses  ou  il  vous  en  pourra  faire  sans  préjudice  de  son  honneur,  il 
n'y  espargnera  jusques  a  sa  propre  vie,  congnoissant  que  Vostre 
Majesté  continue  en  sa  bonne  coustume  de  fa vorizer  et  embrasser 
l'action  de  tous  les  oppressez.  Il  m'a  fort  prié  de  tenir  nostre  parle- 
ment secret  et  de  ne  faire  aucun  semhlant  de  le  congnoistre  pour 
tous  les  respectz  que  chacun  peult  bien  penser,  et  comme  je  luy  ay 
dit,  il  me  desplait  que  nous  ne  puissions  converser  emsemble  pour 
luy  faire  quelque  foiz  compagnie,  et  service  comme  Vostre  Majesté 
me  le  commande,  et  aussy  que  je  lay  trouvé, a  mon  gre,  fort  honneste 
et  saige  prince,  et  monstre  en  son  parler  et  en  ses  actions  estre  de 
sang  royal.  Nous  sommes  entrez  bien  avant  en  discours  du  fait 
d'Angleterre,  et  tient  pour  très  facile  chose,  a  vit  le  temps  et  vostre 
bonne  ayde,  de  remuer  les  choses  en  lestât  qu'elles  doivent  être,  et 
a  qui  elles  appertiennent  de  droit,  ayant  bonne  espérance  que,  Dieu 
et  le  monde,  luy  seront  en  cela  favorables,  m'ayant  dit  que  pour 
eschapper  de  la,  et  saulver  sa  vie,  il  a  estre  contrainct  de  se  feindre 
homme  de  peu  de  cueur  et  d'entendement,  et  de  ne  cognoistre  ne 
estimer  l'honneur  et  le  bien  que  de  droit  lui  aperlient,  ayant  imite 
en  cela  Junio  Bruto  (1),  mais  que  quand  Dieu  lui  amènera  les  occa- 
sions de  mettre  a  etfect  son  intention,  il  fera  cognoistre  a  Notre 
Majesté  et  au  monde  qu'il  n'est  pour  manquer  a  ses  amys  ne  a  soy 
mesmes,  et  qu'il  fera  son  deboir.  Le  Roy  Philippe  luy  avoit  baillé 
ses  lettres  de  laveur  a  tous  ses  Ministres  de  Milan,  de  Naples  et  de 
Sicille,  aux  Ducs  de  Ferrare  et  de  Mantua    -  .  comme  s'il  ne  venoit 

mis  en  liberté  par  la  reine  Marie  el  remis  en  sa  dignité  île  COmte  île  DevOD  le 
3  octobre  1553;  mourut  vraisemblablement  empoisonné.  Histoire  généalogique 
<i<>  la  Maison  de  France,  par  le  Père  Anselme,  i.  vu,  p.  841). 

i    Lucius  Junius  Brutus  échappa  au  massacre  de  sa  famille,  que  Tarquin  le 
Superbe  avait  tait  assassiner  pour  s'emparer  des  biens  de   Marcus  Junius.  son 
père,  en  contrefaisant  l'idiot  (en  latin  brutus  .  D*où  lui  vient  le  -m  nom  de  Brutus. 
(2)  Mantoue. 


[MARS  1555]  DOMINIQUE  DU  GABRE  109 

en  ce  pays  que  pour  veoir  le  monde,  mais,  puis  qu'il  se  trouve  icy 
en  port  de  seureté  et  de  liberté,  il  m'a  dict  que  j'assurasse  Vostre 
Majesté  que,  suivant  son  bon  conseil,  il  ne  se  mettra  plus  en  lieu  ou 
ses  ennemys  ayent  puissance:  je  l'ay  fort  conforte  d'aller  a  Ferrare 
pour  ce  qu'il  aura  la  compagnie  de  ses  semblables,  commodité  de 
chevaux  et  moyen  de  s'exerciter  et  passer  le  temps,  et  y  sera  encore 
plus  sûrement  qu'icy,  et  le  voy  résolu  de  ne  se  promener  plus  avant 
que  de  cest  estât  et  du  Ferra  roi  s.  Il  a  pris  ung  beau  palaiz  en  ceste 
ville.  Si  Vostre  Majesté  me  commande  autre  chose  en  son  endroit, 
j'auray  toujours  bonne  commodité  de  luy  parler. 
De  Venize,  ce  12  de  février  1555. 

(Bibl.  liât.,  Fr.  2045G,  fol.  155)  (copie). 


GABRE   AU    DUC   DE   FERRARE 

86.  —  [Venise],  16  février  1555.  —  Monseigneur,  J'ay  receu  la 
lettre  quil  vous  a  pieu  m'escripre  par  Marseille,  et  j'espère  que  en 
peu  de  jours  ma  santé  sera  telle  que  je  vous  pourray  aller  fere  la 
révérence  pour  parler  des  choses  que  vous  remetez  à  me  dire  de 
bouche,  et  si  me  doubte  bien  que  c'est.  Cependant  j'ourray  parler  et 
attendray  à  festier  icy  Monsr  d'Avanson  qui  est  arrivé  assez  à  l'im- 
proviste  fort  satisfaict,  et  des  propoz  et  des  faveurs  de  Vostre  Excel- 
lence, et  le  trouve  comme  vous.  Monseigneur,  capable  et  parlant 
bien  des  afferes  du  monde  ;  mais  qu'il  suit  parti,  vous  aurez  inconti- 
nent de  mes  nouvelles.  Icy,  il  n'y  a  rien  de  nouveau  digne 
d'escripre. 

De  Venize,  ce  xvie  de  février  1555. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE   FERRARE 

87.  —  [Venise],  7  mars  1555.  —  Monseigneur,  Ceste  lettre  sera 
pour  satisfere  à  Monsieur  d'Avanson,  qui  à  son  partement  d'icy.  me 
pria  vouloir  escripre  à  Vostre  Excellence  en  recommandation  de  la 
mesme  chose  pour  laquelle  il  vous  ;i  escript.  C'est  de  Madonna  Giu- 
lia  Gigliola  et  de  Mr  Marco  Trevigian  (1),  qui  disent  que  en  contem- 
plation des  services  que  les  précédesseurs  de  ladite  Madona  Giulia 
ont  faict  depuis  cent  ans  à  la  maison  d'Est,  ilz  ont  toutjour  eu  leur 
habitation  en  vostre  maison  de  Venize  pour  dix  ducatz  l'année,  si 
ce  n'est  depuis  quelques  ans  que  vos  ambassadeurs  leur  ont  creu 

(1)  Marc  Antonio  Trevisani,  doge  de  Venise  en  1553. 


110  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1555] 

le  louaige,  et  maintenant  veult  on  qu'ilz  en  payent  trente  escuz. 
Monsr  d'Avanson,  pendant  qu'il  a  esté  icy,  a  receu  tout  plein  de 
faveurs  de  ladite  Madonna  Giulia  qui  est  fort  gentille,  et  son  mary 
est  venu  souvant  à  moy  pour  recouvrer  ceste  lettre.  Ainsi,  Monsei- 
gneur, il  vous  plaira  avoir  pour  recommandé  leur  affere,  et  si  en 
cela  ilz  recevront  quelque  bienfaict  de  vous,  j'auray  ma  part  à 
l'obligation. 
De  Venize,  ce  vne  de  mars  1555. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.». 


GABRE   AU    DUC   DE   FERRA RE 

88.  —  Ven ise],  5  avril  1555.  —  Monseigneur,  J'entendiz  de  vos 
nouvelles  par  Monsieur  de  Selve  qui  passa  par  icy  et  n'y  a  guières 
arresté  ;  depuis,  est  arrivé  Monsieur  de  Vilandry,  présent  porteur, 
qui  s'en  va  vous  trouver  et  vous  dire  les  causes  de  son  voyaige,  et 
vous  comptera  quelque  commencement  et  quelque  espérance  qu'on 
avoit  d'accord  avec  l'Empereur..  Si  ces  grand/.  Ministres,  d'une  part 
et  d'autre,  parlent  ensemble,  j'ay  opinion  qu'ilz  feront  quelque  chose 
de  bon,  car  tous  ensemble  ont  grand  désir  de  se  reposer,  et  je  croy 
que  aussi  bien  ont  leurs  maistres.  Dieu  leur  en  doinct  la  grâce.  Je 
m'attendz  que  dans  quatre  ou  cinq  jours  nous  aurons  nouvelles  si 
aucuns  de  nos  Cardinaulx  français  viendront  à  ceste  elleclion  du 
Pape.  Je  veiz  ce  que  l'aultre  jour  il  vous  pleust  me  fere  escripre  par 
le  Sr  Alexandre,  mais  je  n'ay  nulle  souspeçon  ne  oppinion  de  ceste 
pratique,  et  le  lengaige  que  ces  Seigneurs  me  tiennent  tous  les  jours 
y  est  fort  contrere.  Nous  sommes  si  prochains  à  ceste  sepmaine 
saincte,  que  je  n'iray  poinct  empeschervoz  dévotions,  et  remeltray 
aprèz  Pasques  à  vous  aller  fere  la  révérence,  auquel  temps  je  croy 
que  passeront  noz  Cardinaulx,  si  aucuns  en  doibvent  venir. 

De  Venize,  ce  ve  d'avril  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FEHRARE 

89. —  [Venise],  17  avril  15.').').  —  Monseigneur,  Ce  matin  sonl 
arrivées  les  lettres  qu'il  vous  a  pieu  m'escripre,  el  incontinent  j'ay 
faict  partir  mon  secrétere,  présent  pourtour,  pour  vous  pouvoir 
trouver  avant  vostre  parlement  et  recepvoir  voz  commandemens. 
J'ay  esté  en  grand  volunlé  d'estre  moy  mesmes  le  messaiger,  mais 
j'ay  crainct  de  non  y  arriver  à  temps  si  je  ne  me  aydois  de  la  auict, 
et  je  ne  suis  pas  encores  assez  gentil  compaignon  pour  m'y  azarder. 


[MAI    1555]  DOMINIQUE   DU    GABRE  111 

J'ay  dict  à  cedit  pourteur  et  baillé  par  mémoire  tout  ce  qui  se  pré- 
sente icy  à  ma  cognoissance,  et  seray  bien  ayse,  Monseigneur,  d'en- 
tendre de  voz  bonnes  nouvelles,  pour  suyvre  et  accompaigner  toutes 
voz  intentions  et  désirs  de  tout  le  service  qu'il  me  sera  possible. 
De  Venize  ce  xvne  d'avril  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC   DE   FERRARE 

90.  — [Venise],  4  mai  1555.  —  Monseigneur,  Hier  matin,  nous 
eusmes  icy  la  nouvelle  de  la  mort  du  Pape  Marcel  (1).  C'est  grand 
pitié  de  ce  monde  et  j'ay  opinion  que  c'est  grand  perle  pour  l'Eglise 
et  pour  la  Créstienté.  Toutesfoiz,  nostre  Seigneur,  s'il  luy  plaist, 
fera  le  tout  pour  le  mieulx.  J'estime  vostre  présence  à  Rome  fort 
heureuse  et  de  très  grande  importance  pour  le  service  du  Roy  et 
pour  la  grandeur  de  Monseigneur  le  Cardinal  vostre  frère,  car  c'est 
à  ce  coup  qu'il  doibt  parvenir  à  ceste  dignité  ou  jamais  non,  et  je 
me  doubte  bien  que  les  Farneses  ne  luy  seront  guières  favorables, 
mais  j'ai  espérance  que  vous  pourrez  bien  acoustrer  cela  par  le 
moyen  du  Duc  d'Urbin.  La  commune  opinion  de  chacun  est  que 
mondit  Sr  le  Cardinal  y  doibt  parvenir  à  ceste  foiz,  et  je  prie  nostre 
Seigneur  qu'il  luy  en  doinct  la  grâce,  et  à  vous  aussi,  Monseigneur. 
Partenay  a  volu  aller  veoir  quel  il  faict  à  Rome  durant  le  Siège 
vaguant,  et  je  vous  envoyé  par  luy  une  lettre  du  Grand  Seigneur, 
que  m'a  apportée  n'a  guières  le  secrétere  Cochart,  qui  porte  au  Roy 
asseurance  comme  il  avoit  veu  septante  cinq  gallères  tirées  hors 
de  Tarssenal  du  Grand  Seigneur  pour  partir  à  ceste  Sainct  George 
et  s'en  venir  droict  à  la  Preveza  (2)  attendre  nouvelles  de  noz  gal- 
lères pour  les  conduire  aprèz  là  où  ilz  vouldront  pour  le  service  du 
Roy.  Ledit  Cochart  m'a  dit  et  asseuré  que  s'il  vous  plaist  envoyer 
ambassadeur  vers  le  Grand  Seigneur,  que  le  Consul  de  la  nation 
florentine  sera  chassé  et  que  le  vostre  y  aura  fort  grande  auctorité 
sur  toute  la  nation  italiane. 

De  Venize  ce  ime  de  may  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

(1)  Dans  la  nuit  du  30  avril  au  1"  mai,  après  un  règne  de  21  jours.  (Au  sujet  des 
intringues  auxquelles  la  succession  de  ce  pontife  donna  lieu,  voir  l'Introduction 
qui  précède,  p.  xvi). 

'2)  Preveza,  ville  de  Turquie  d'Europe  (Albanie),  avec  petit  port  à  l'entrée  du 
golfe  d'Arta.  Les  Turcs  l'nvaienl  prise  en  1338  contre  les  Vénitiens. 


112  NÉGOCIATIONS   DE  MAI    1555] 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

91. —  [Pacloue],  11  mai  1555.  —  Monseigneur,  Le  Sr  Alexandre 
Guerin  m'envoya  dernièrement  la  lettre  qu'il  vous  pleust  d'escripre 
du  premier  de  ce  moys,  avec  l'aultre  que  Nicquet  avoyt  oblyée,  et 
vous  mercye,  Monseigneur,  tant  et  si  très  humblement  que  je  puys 
de  la  souvenance  qu'il  vous  plaist  avoir  d'ung  vostre  très  humble 
serviteur.  Je  ne  faiz  douhte  que  vous  n'ayez  grand  travail,  et  d'es- 
prit et  de  personne,  en  ce  vostre  voiaige  de  Rome,  et  pour  les  acci- 
dentz  qui  y  sont  survenuz,  et  bien  souvent  je  me  suis  désiré  d'estre 
auprèz  de  Vostre  Excellence  pour  vous  y  faire  service  et  vous  sou- 
laiger  de  quelque  chose.  On  nous  avoyt  donné  quelques  adviz  à 
Venize  et  quelque  espérance  que  vous  aviez  déjà  convertys  les 
Farnezes,  mais  par  les  dernières  lettres  que  j'ay  eues,  il  semble 
que  cela  soit  tout  renversé.  11  y  a  des  gens  qui  se  disent  fort  servi- 
teurs du  Roy  pour  en  avoir  du  bien  et,  aprèz  quand  il  fault  faire 
service,  ilz  le  font  comme  il  leur  plaist.  Je  vouldrois  que  ung  jour 
le  Roy  s'en  ressentist  et  se  monstrast  sévère  envers  quelcung  pour 
donner  exemple  aux  mesmes.  J'ay  perdu  déjà  quasi  toute  espérance 
que  Monseigneur  le  Cardinal  de  Ferrare  puisse  parvenir  à  ce  ponti- 
ficat et  vouldrois  de  bon  cueur  que  Vostre  Excellence  feust  de 
retour  à  Ferrare  et  bien  son  ayse  à  la  montaigne,  sans  attendre  ces 
grandz  chaleurs  de  Rome  et  du  Papat  en  laysser  1ère  à  ces  prestres 
qui  ne  valeurent  jamais  rien.  Je  n'ay  peu  encores  scavoir  si  vous 
attendrez  à  Home  la  nouvelle  création,  mais  si  vous  n'y  voiez  grand 
espérance  pour  Monseigneur  le  Cardinal  vostre  frère,  j'eusse  fort 
loué  vostre  paretment.  à  la  charge  de  remectre  vostre  obédience 
ung  an  aprèz  la  feste.  Vous  aurez,  Monseigneur,  entendu  l'abbocque- 
ment  (t)  qui  se  doibt  fere  pour  la  paix  au  xxc  de  moys,  et  cependant 
j'ay  quelques  adviz  que  l'Empereur  faict  gros  préparât» fz  en  Alle- 
maigne  pour  la  guerre.  Cela  ne  s'accorde  pas  bien  ensemble  et 
crains  que,  de  nostre  part,  nous  en  trovons  trompez.  Je  suis  venu, 
Monseigneur,  icy  prendre  l'eaue  des  bains  (2)  et  commencera) 
demain,  ne  voiant  aultre  remède  pour  me  desfere  de  mesdoleurs  el 
catarres.  et  à  vostre  retour,  j'espère  estre  en  bonne  disposition 
pour  vous  aller  fere  la  révérence,  qui  ne  sera  jamais  >i  tost  qne  j<' 
le  désire. 

De  Padoa  ce  xvne  de  May  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Caticelleria  Ducale,  etc.). 

(1)  De  l'italien  abbocamento:  abouchement,  entrevue. 
■2   Sources  thermales  sulfureuses  renommées.    Géographie  générale,  par  I.. 
Grégoire. 


[JUIN    1555  DOMINIQUE   DU    GABRE  M3 


GABRE    AU    DUC    DE    GUISE 

92.  —  [Venise],  13  juin  1555.  —  Monseigneur,  j'ay  veu  ce  qu'il 
vous  a  pieu  m'escripre  par  le  secrétaire  Cochart  avec  la  despeche  du 
Roy,  suyvant  laquelle  il  s'est  faict  icy  toute  dilligence  pourle  faire 
partir  bientost,  et  seurement  comme  il  vous  plaira  veoir  par  la  des- 
peche que  je  faiz  au  Roy,  en  laquelle  vous  trouverez  nouvelle  du 
partement  de  l'armée  de  Levant  et  toutes  aultres  choses  qui  se  pré- 
sentent pour  ceste  heure  par  deçà,  dont  je  ne  vous  feray  redicte  ne 
plus  longue  lettre,  sinon  doffrir  à  Yostre  Excellence  tout  le  service 
quil  vous  plaira  me  commander.  Je  m'en  veoys  visiter  Monsieur  le 
Duc  de  Ferrare  a  son  retour  de  Rome  et  espère,  Monseigneur,  que 
vous  nous  ferez  donner  advis  de  la  conclusion  prinse  a  cest  aboc- 
quement  des  maistres  pour  le  faict  de  la  paix,  laquelle  je  supplye 
nostre  Seigneur  nous  donner. 

De  Venize  ce  xme  de  Juing  1555. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20545,  fol.  135)  (originale). 


GABRE    AU    DUC  DE    FERRARE 

.  93.  —  [Venise],  15 juin  1555.  —  Monseigneur,  Je  cuydois  partir 
hier  et  aujourd'huy  pour  vous  aller  fere  la  révérence,  mais  il  m'est 
survenu  un  gentilhomme  dépesché  du  Roy  vers  l'armée  de  Levant 
et  ung  autre  dépesché  de  ladite  armée  vers  Sa  Mate,  que  j'ay  estré 
contrainct  différer  mon  partement  pour  dépescher  l'ung  et  l'autre 
et  négotier  quelque  chose  avec  ceste  Seigneurie;  mais  j'espère  partir 
demain  ou  lundi,  et  vous  aller  rendre  compte  de  toutes  choses  avec 
un  grand  désir  de  veoir  Yostre  Excellence.  La  dépesché  de  la  Court 
est  du  ine,  et  dans  deux  ou  trois  jours  après  l'on  attendoit  une  réso- 
lution ou  d'une  tresve  ou  de  la  guerre.  L'armée  turquesque  deslogea 
du  tout  le  xvme  et  xixe  may,  le  mieulx  fournye  de  gens  de  guerre  et 
de  munitions  que  jamais  ayt  esté  armée,  et  en  grande  délibération 
de  fere  quelque  chose  de  bon,  et  le  Roy  de  son  cousté  a  faict  partir 
son  armée  de  Marseille  pour  aller  au  devant  avec  force  provision 
d'argent,  de  sorte  qu'il  s'en  peult  espérer  tout  bien,  pourveu  que 
cependant  Pothercules  ne  soit  point  perdu,  lequel  il  semble  que  ces 
Impériaulx  tiennent  tout  asseuré.  Le  demourant  sera  remis  à  quant 
nous  nous  pourmènerons  à  la  montaigne. 
De  Venize,  ce  xve  de  Jung  1555. 

Areh.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


114  NÉGOCIATIONS    DE      [JUILLET-SEPTEMBRE    1555] 


GABRE   AU    DUC    DE   FERRARE 

94. —  [Venise],  22  juillet  1555.  —  Monseigneur,  J'envoye  ce 
porteur  à  Ferrare  pour  veoir  Monsieur  de  Lanssac  en  passant,  qui  m'a 
donné  advis  du  jour  qu'il  arrivera  là,  pensant  que  je  feusse  en  estât 
de  l'aller  trouver  pour  me  communiquer  sa  dépesche.  Mais  j'en  suis 
fort  mal  prest,  puis  qu'il  plaist  à  Dieu.  Ce  dit  porteur  vous  mons- 
trera  ce  que  le  Roy  m'a  escript  et  ne  vous  cèlera  rien  de  ce  qu'il 
entendra  dudit  Sr  de  Lanssac,  et  me  remetant  du  surplus  sur  luy. 

De  Venize,  ce  xxne  de  Juillet  1555. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

95. — [Carpinel],  11  septembre  1555.  —  Monseigneur,  J'ay  eu 
ce  matin  ung  pacquet  de  France,  que  Monsieur  Boucher  a  layssé 
a  Luna  (1),  et  y  ay  trouvé  ung  gros  pacquet  de  Monsieur  vostre  Am- 
bassadeur, dont  j'ay  esté  bien  marry,  car  il  y  a  trois  jours  que  vous 
l'eussiez  receu,  s'il  eust  esté  baillé  audit  Boucher  pour  le  vous 
apporter.  Je  le  vous  envoyé  par  l'ordiniere  qui  a  acoustume  de 
partir  ce  soir,  affin  de  vous  escripre  tout  d'un  train  ce  que  j'auray 
de  Borne.  Quant  à  ce  que  j'ay  eu  de  France,  ilz  ne  me  respondent 
à  ung  seul  poinct  de  lettre  que  j'aye  escript  il  y  a  trois  moys.  el 
vous  plaira  veoir  la  coppye  de  la  lettre  du  Boy  et  de  Monseigneur 
le  Conestable,  lesquelles  je  vous  suplye  très  humblement  rompre 
aprèz  les  avoir  veues,  aflin  que  aultre  que  vous  ne  puisse  entendre 
les  intentions  de  Sa  Mate.  Je  veoy  par  là  qu'ilz  n'avoient  encores 
receu  noz  lettres  ny  nouvelles  des  choses  du  Pape,  et  ne  peult  estre 
qu'il  ne  vienne  bien  tost  quelque  aultre  dépesche  pour  ce  faict-là, 
car  cela  leur  aura  faict  changer  résolution  sur  les  afferes  de  Tos- 
cana,  desquels,  à  ce  que  je  veoy,  ilz  ne  se  veullent  guières  travailler 
ne  y  faire  aulcun  desseing  s'ilz  ne  sont  asseuréz  de  l'armée  de  mer 
pour  cest  yver.  Hz  mandent  que  Monsr  de  Soubize  casse  les  gens 
superfluz  ;  il  eust  esté  bon  de  le  fere  il  y  a  trois  moys,  et  maintenant 
seroit  temps  de  le  renforcer;  tout  nostre  cas  va  toutjour  en  confu- 
zion,  mais  viderint  ipsi.  Je  vous  mercye  très  humblement,  Monsei- 
gneur, de  la  dépesche  qu'il  vous  pleust  fere  par  mon  secrétere  ; 
j'ay  grand  espérance  que  vous  serez  fort  content  de  l'avoir  f aie  te, 
et  que  le  Boy  vous  en  scaura  ung  très  grand  gré.  .l'attend/.  <mi  grand 
dévotion  les  advis  de  Borne  pour  scavoir  comme  les  choses  conti- 

(l)  Lonato,  ville  forte  d'Italie,  à  20  kil.  de  Brescia,  près  du  lac  de  Garde. 


[septembre  1555]  Dominique  du  gabre  115 

nuent  et  la  venue  de  Perrot  pour  la  résolution  de  l'armée,  et  de 
tout  ce  que  j'entendray  digne  de  Vostre  Excellence,  je  ne  fauldray 
vous  donner  advis. 
De  Carpinel  (1)  ce  xie  septembre  1555. 

Monseigneur,  J'avois  faicte  ceste  lettre  estant  aux  champz  et  avant 
que  recevoir  les  lettres  de  Rome,  lesquelles  m'ont  incontinent  faict 
desloger  et  partir  pour  ne  fer  attendre  Monsieur  de  Lanssac  qui  m'a 
mandé  voulloir  passer  icy.  J'entendray  voluntiers  sur  quoy  sont 
fondées  les  altérations  de  ce  Pape,  qui  monstre  d'en  voulloir  aultant 
aux  François  que  aux  Impériaulx,  et  ay  trouvé  fort  estrange  ce  qu'il 
a  faict  en  l'endroit  de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Ferrare,  ne  pou- 
vant croire,  ne  penser  que  ledit  Seigneur  luy  en  ayt  donné  occasion. 
Je  présuppose,  Monseigneur,  que  vous  aurez  sceu  toutes  choses 
dudit  Seigneur  de  Lanssac  et  en  aurez  mandé  vostre  advis  au  Roy, 
et,  mais  que  je  l'aye  ouy  parler,  je  vous  escripray  aussi  ce  que  m'en 
semblera,  et  si  je  ne  change  d'oppinion,  je  suis  pour  dépescher  ung 
courrier  en  diligence  à  Rome  et  révoctjuer  ce  qu'on  y  a  porté  n'a 
guières. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GaBRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

96.  —  [Venise],  14  septembre  1555.  — Monseigneur,  Hier  arriva 
icy  Monsr  de  Lanssac  qui  est  party  ce  matin  et  me  bailla  la  lettre 
qu'il  vous  avoit  pieu  m'escripre.  Je  prenois  en  fort  maulvaise  part, 
comme  je  veoy  que  vous  faictez,  ce  que  le  Pape  a  faict  en  l'endroict 
de  Monseigneur  le  Cardinnl  vostre  frère  (2),  mais  depuis  est  arrivé 
Marseille  présent  porteur,  qui  ne  partist  que  mardi  de  Rome,  et  dit 
beaucoup  de  choses  sur  le  faict  de  mondit  Sr  le  Cardinal,  qui  me 
faict  croire  que  tout  passera  bien,  et  nous  a  semblé,  Monseigneur, 
renvoyer  ledit  Marseille  devers  vous,  pour  vous  dire  ce  qui  est  sur- 
venu depuis  le  partement  de  Monsieur  de  Lanssac,  où  vous  verrez 
les  choses  que  nous  désirons  bien  acheminées,  et  veu  la  nature  de 
ce  Pape,  qui  faict  toutes  choses  soubz  prétexte  de  bonté  et  de  reli- 
gion, Vostre  Excellence  ne  se  doibt  point  monstrer  altérée  de  la 
rigueur  tenue  à  mondit  Sr  le  Cardinal,  mais  laisser  couler  quelques 
jours  pour  veoir  ce  qui  succédera  du  cousté  de  Rome  et  les  actions 
des  Impériaulx.  Monsr  d'Avanson  demandoit  quarante  mille  escuz 

(1)  Carpi.  village  d'Italie  sur  l'Adige  i  Vénerie). 

(2)  Paul  IV  (Ca'rafa).  élu  pape  le  23  août  1555,  avait  intimé  l'ordre  au  cardinal 
d'Esté,  frère  d'Hercule  II  et  son  concurrent  au  conclave,  do  se  retirer  à  Ferrare. 
(Voir  l'Introduction  qui  précède,  p.  xvn). 


116  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE    1555] 

et  vous  en  escript,  mais  je  luyfayz  responce  que  cela  n'est  pas  paya- 
ble tout  à  ung  jour  et  qu'ilz  ont  largement  de  quoy  fournir  pour  le 
commencement,  que,  s'il  sera  nécessere  je  luy  envoieray  le  surplus 
jusques  à  la  somme  qu'il  demande.  Cependant  nous  aurons  quel- 
ques nouvelles  du  Roy;  tout  le  malheur  que  je  veoy  en  nos  afferes, 
Monseigneur,  est  que  ceste  mauldicte  armée  de  mer  s'en  soit  re- 
tournée, et  que  nous  n'avons  encores  aulcunes  nouvelles  de  la  réso- 
lution du  Grand  Seigneur.  Ces  Seigneurs  eurent  hier  lettres  du  xvmc 
de  Constantinople,  contennant  l'exécution  que  le  Grand  Seigneur 
avoit  faict  fere  de  ce  nouveau  Mostafa,  mais  je  n'ay  veu  aulcunes 
lettres  de  Perrot,  qui  me  faict  croire  que  le  Grand  Seigneur  aura 
refuzé  ce  que  nous  demandons,  et  s'il  est  ainsi,  il  vault  mieulx  que 
ladite  armée  s'en  soit  allée  d'elle  mesmes. 
De  Venize  ce  xime  de  septembre  1555. 

(Àrch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

97.  —  [Venise],  16  septembre  1555.  —  Monseigneur,  .le  feuz  hier 
longuement  avec  Monsr  vostre  Ambassadeur,  qui  me  descouvrist  le 
travail  où  il  estoit  pour  le  bruict  qui  avoit  coreu  du  faict  de  sa 
femme,  et  qui  estoit  venu  jusques  à  vous,  et  veoy  bien  qu'il  n'en 
avoit  rien  sceu  que  quant  il  a  esté  à  Ferrare,  où  il  a  entendu  qu'il 
s'en  faisoient  des  comptes.  Il  ;i  volu  icy  chercher  si  le  scandalle 
avoit  esté  mis  publiquement  et  aux  portes  de  vostre  palays,  mais  il 
ne  s'en  treuve  rien  et  a  esté  seullemenl  a  quelque  sienne  paincture 
par  personnes  malignes,  et  pour  leur  avoir  esté  ledit  ambassadeur 
ung  peu  trop  sévère  en  chose  qui  estoit  de  vostre  service,  .le  vous 
diz,  Monseigneur,  que  je  veoy  ce  pouvre  homme  si  fasché,  que  je 
luy  ay  compassion,  et  Vostre  Excellence,  comme  bon  prince  et  son 
bon  maistre,  le  doibt  plus  favoriser  et  consoler  en  telle  tribulation, 
que  non  pas  de  mettre  affliction  sur  affliction,  luy  monstrant  par 
effeetz,  que  vous  estez  contenl  de  luy  el  que  n'avez  point  si  maul- 
vaise  opinion  de  sa  femme,  el  qu'il  attende  à  fere  son  debvoir,  car. 
à  la  vérité,  il  me  semble  qu'il  sert  fort  bien  icy  :  et.  au  reste,  je  luy 
ay  conseillé  que  de  telz  propoz  on  en  parle  le  moins  qu'on  pourra 
et  qu'il  vive  joyeusement  et  honnestement  avec  sa  femme  comme 
il  avoit  acoustumé.  Je  ne  me  suis  peu  tenir,  Monseigneur,  de  vous 
en  escripre  ce  mot  en  sa  recommandation. 

De  Venize,  ce  xvie  de  septembre  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


[SEPTEMBRE  15551       DOMINIQUE  DU  GABRE  117 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

98.  —  [Venise],  17  septembre  1555.  —  Monseigneur,  J'ay  esté 
tant  importuné  de  ceste  Briande  Pourtugoise,  que  j"ay  esté  contrainct 
envoyer  mon  secrétere  avec  son  principal  facteur  pour  luy  ayder  à 
négotier  son  sauf-conduict  pour  demeurer  à  Ferrare,  et  je  l'ay  faict 
tant  plus  voluntiers  que  j'espère  que  Vostre  Excellence  en  pourra 
tirer  quelque  commodité  et  nous  pourra  aussi  ayder  à  en  tirer  pour 
le  Roy.  Vous  voyez,  Monseigneur,  les  afferes  qui  se  présentent,  et 
pourveu  qu'on  luy  asseure  bien  ses  deniers  et  qu'on  n'aye  point  in- 
tention de  luy  en  fere  tort,  on  faict  beaucoup  pour  elle  de  les  luy 
asseurer  entre  les  mains  des  princes  qui  en  ont  maintenant  besoing. 
Vostre  Excellence,  donques,  s'il  luy  plaist,  ne  se  rendra  point  difiicile 
de  retirer  telles  gens  en  sa  vile,  regardant  de  négotier  le  tout  pour  soy 
et  pour  ses  amys,  comme  vous  voyez.  Monseigneur,  que  le  temps  le 
requiert,  luy  faisant  cognoistre  que  la  faveur  que  le  Roy  luy  porte, 
comme  vous  aurez  entendu  par  moy,  vous  sera  toutjour  en  considé- 
ration. J'attendz  les  lettres  de  Rome  demain  matin,  et  incontinent  je 
ne  fauldray  vous  fere  part  de  ce  qu'on  m'escripra.  Ces  Seigneurs 
ont  eu  ung  corrier  éxprèz  de  France  et  semble  qu'il  y  aye  quelques 
nouvelles  que  le  Roy  doibt  venir  en  Piedmunt,  dont  je  n'ay  encores 
aucun  advis,  comme  je  n'ay  aussi  du  cousté  de  Levant,  qui  me  faict 
croire  que  la  résolution  du  Grand  Seigneur  n'a  pas  esté  telle  que 
nous  désirions,  et  vient  fort  mal  à  propoz  d'avoir  perdu  ceste  armée 
au  besoing.  Qui  est,  Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous  diray  pour 
ceste  heure. 

De  Venize,  ce  xvne  de  septembre  1555. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

99.  —  [Venise],  18  septembre  1555.  — Monseigneur,  Depuis  mon 
autre  lettre  escripte,  est  arrivé  ma  dépesche  de  Rome,  et  j'ay  faict 
prendre  à  ce  porteur  ce  que  Monsr  d'Avanson  m'escript,  pour  le 
monstrer  à  Vostre  Excellence.  Je  croy  que  le  Pape  sera  pour  vous 
rechercher  d'entrer  en  ligue  avec  Sa  S'e,  laquelle  se  tient  comme 
asseurée  du  Roy,  et  pour  cest  effect  ledit  Sr  d'Avanson  me  prioit 
d'aller  devers  vous,  comme  il  vous  plaira  veoir  par  sa  lettre  ;  mais 
il  m'a  semblé  n'y  devoir  aller  si  souvant,  sans  premièrement  en 
avoir  vostre  commandement,  et  aussi  que  nous  ne  pouvons  bien 
enfoncer  ce  propoz  sans  avoir  nouvelles  de  l'intention  du  Roy,  Si 


IIS  NÉGOCIATIONS    DE  SEPTEMBRE    1555 

cependant  il  vous  semble  que  j'aille  trouver  Voslre  Excellence  soubz 
prétexte  d'aller  fere  la  révérence  à  Monseigneur  le  Cardinal,  ou  au- 
trement, je  suyvray  vostre  commandement,  car  je  vous  pourrois 
servir  d'escripre  et  proposer  à  nostre  Court  et  à  noz  Ministres  de 
Rome  des  partiz  et  des  conditions  que  par  adventure,  vous,  par 
modtstie,  ne  vouldriez  proposer  et  qui  sont  meilleures  venant  de  la 
main  d'ung  turc,  et  me  semble,  Monseigneur,  que  ceste  partie  ne  se 
doibt  jamais  conclurre  sans  vous,  et  si  les  Vénitiens  vous  voyent 
avec  le  Roy  et  le  Pape,  asseurez  vous  qu'ilz  en  vouldront  estre  et  ne 
chercheront  jamais  le  party  de  l'Empereur  qu'ils  verront  le   plus 

(bible. 

De  Venize.  ce  xvme  de  septembre  1555. 

(Arch.  de  .Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRI-    AU    DUC    DE    FERRARE 

400.  —  [Venise],  21  septembre  1555.  —  Monseigneur,  .l'ay  receu 
une  lettre  qu'il  a  pieu  m'escripre  du  xvme  de  ce  mois  et  entendu  la 
créance  du  gentilhome  que  le  Cardinal  Carraffe  (1)  avoit  dépesché 
vers  Voslre  Excellence,  et  quant  au  faict  de  Monseigneur  le  Cardinal 
vostre  frère,  je  veulx  croire  et  espérer  que  Sa  Sle  fera  encores  mieulx 
qu'on  ne  vous  a  dict.  Quant  à  l'aultre  point,  il  l'aull.  Monseigneur, 
comme  vous  dictez,  star  ancor  n  veder,  et  pour  le  moins  fault-il 
veoir  comme  le  Roy  entend  ce  faict  de  Rome,  dont  j'attendz  nou- 
velles d'heure  à  aultre.  J'ay  lettres  de  Lyon  du  xin1'  et  veoy  que 
Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon  tient  son  voiaige  de  Rome  pour 
rompu  par  deux  raisons  :  l'une  que  la  mer  n'est  guières  seure  pour 
nous  maintenant  que  l'armée  turquesque  s'en  est  allée,  et  l'aultre 
pour  ne  voulloir  endurer  le  tort  qui  est  faicl  à  Monseigneur  le  Car- 
dinal de  Borbon  (2)  et  a  luy  du  doyene  des  Cardinaulx.  Je  suis  lus 
marry  que  son  voiaige  soit  rompu  pour  le  seul  service  du  Roy.  Hz 
m'escripvent  aussi  de  Lyon  que  Monsieur  d'(  >male  (3)  avoit  desfaicl 

1)  Le  cardinal  Carlo  Carafa,  neveu  du  pape  Paul  IV,  né  en  1517,  mort  exécuté 
à  Rome  le  o  mars  1561.  Voir,  sur  le  rôle  politique  et  les  intrigues  de  ce  curieux 
personnage,  G.  Duruy,  Le  cardinal  Carlo  Carafa. 

(2)  Charles,  cardinal  de  Bourbon,  frère  d'Antoine  de  Bourbon,  roi  de  Navarre 
et  oncle  de  Henri  IV.  ne  le  ■<■!  décembre  1523,  fut  nommé  archevêque  de  Rouen. 
Les  ligueurs  ne  voulant  pas  accepter  pour  roi  Henri  de  Navarre  qui  était  hugue- 
not, donnèrenl  au  cardinal  de  Bourbon  le  titre  de  roi.  après  la  mort  du  dur 
d'Alencon.  dernier  héritier  de  Henri  III.  Bélenu  au  château  de  Fonlenay,  il  fut 
proclamé  sous  le  nom  de  Charles  \  après  le  meurtre  du  roi.  11  mourut  en 
captivité  en  1590. 

(3)  François  de  Lorraine,  due  de  (luise. 


[novembre  1555]  Dominique  du  gabre  119 

tous  ces  Espaignolz  qui  voulloient  entrer  dans  Volpian  (1),  et  que 
la  batterie  estoit  si  avancée  que  les  nostres  avoient  grand  espérance 
d'avoir  la  place  par  force  en  bien  peu  de  jours   De  Levant,  je  n'en  ay 
aulcunes  nouvelles. 
De  Venize  ce  xxie  de  septembre  1555. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

GABRE  AU  CARDINAL  DE  LORRAINE 

101.  —  [Ferrare],  29  novembre  1555.  —  Monseigneur,  pour  ce  que 
nous  sommes  tousjours  attendant  de  voz  nouvelles,  desquelles  les 
nostres  de  ce  lieu  deppendent,  je  ne  vous  feray  longue  lettre  ny  ne 
vous  parleray  d'affaires  particulières,  sachant  que  vous  estes  assez 
occupe  a  en  desmeler  déplus  importantes;  seullement  je  vousdiray 
que  je  voy  tous  les  jours  le  Seigneur  que  savez,  fort  content  de  ce  qui 
est  passe,  et  faisons  de  beaux  discours  de  ce  qui  est  a  faire  pour  l'ad- 
venire.  Jay  bien  voulu  depescher  Chemaus(2),  présent  porteur,  avec 
ce  peu  d'argent  qui  nous  restoit  a  Venize  pour  la  fin  de  cette  année, 
affin,  Monseigneur,  que  vous  puisssiez  envoyer  a  Monsieur  de  Soubize 
quelque  chose  pour  temporizer  et  contenter  ses  soldatz  le  mieulx 
quil  pourra.  Je  ne  sais  quel  reste  peut  avoir  Monsieur  d'Avanson 
des  trente  mil  escuz  qui  furent  envoyez  d'icy,  et  si  vous  ne  trouvez 
la  quelque  secours,  je  ne  scay  ou  prendre  ce  quil  fault  pour  satisfaire 
a  tou  ce  quil  seroit  besoing  pour  ce  moys  de  Décembre,  car,  je  ne 
vous  puis  envoyer  que  quinze  mil  escuz  et  si  vous  asseure  quil  ne 
nous  en  reste  gueres  plus  de  quatre  mil  pour  Parme  et  Lamyran- 
dola,  ou  il  nous  en  fault  xmm.  Sans  plusieurs  parties  extraordinaires 
que  le  Roy  m'a  commandées,  je  n'en  oze  emprunter  du  lieu  accous- 
tumé,  le  reservant  pour  vous  secourir  au  deppost  que  vous  savez  et 
l'on  le  y  peult  conduyre,  et  ny  a  point  d'apparence  aussi  de  fonder 
toutes  noz  despences  sur  luy.  Le  Roy  mescript  de  bailler  xvm  escuz 
a  Morengy  qui  sera  bientôt  a  Venize  pour  mesner  une  lictière  et  dix 
mulletz  au  Grand  Seigneur,   il    me    commande  aussi  de  paier  par 
deçà  a  Monsieur  le  Mareschal  Strozzy  ses  estatz  de  Mareschal  et  sa 
pension  qui  montent  ximm  livres  tournois  et  que  j'achayte  pour 
faire  deux  canons  au  conte  de  Lamyrandola,  et  touttesfoiz  ilz  envoient 
les  provisions  d'argent  si  petites  qu'il  n'y  en  a  pas  assez  pour  les 
despences  de  la  guerre  qui  sont  forces  et  nécessaires.  J'ay  escript  a 
Monseigneur  le  Connestable  que  nous  ne  scavions  donner  ordre  a 

(1)  Volpiano,  ville  d'Italie,  à  20  kil.  de  Turin,  l'ut   prise  sur  les  Impériaux,  en 
1555,  par  le  duc  d'Aurnale  el  le  maréchal  de  Brissac. 

(2)  François-Brigitte-René  Errault,  Sr  de  Chemans,  marié  en  1561  à  Louise  de 
Scépeaux. 


120  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

cella  s'ilz  ne  nous  envoyé  dequoy.  Vous  avez  sceu,  Monseigneur,  de 
Mr  de  S1  Ferme  (1),  comme  Monsieur  de  Villemontez  (2)  avoit  été 
dépesché  en  Levant,  il  ma  envoyé  coppie  de  la  lettre  que  le  Roy  es- 
cripvoit  au  Grand  Seigneur,  laquelle  luy  servoyt  d'instruction;  je 
vous  envoyé  ladite  copie  pour  ce  que  par  adventure  vous  pourriez 
avoir  besoing  de  parler  de  ceste  négociation  au  lieu  ou  vous  estes. 
Au  reste,  je  ne  bougeray  d'icy  jusques  a  ce  que  vous  me  le  comman- 
diez, n'ayant  aucun  affaire  d'importance  a  Venize  et  en  ayant  icy 
beaucoup,  cependant  je  confirme  ma  santé  et  suys  desja  assez  sain 
et  fort  pour  aller  et  venyr  partout  ou  il  vous  plaira  me  commander. 
De  Ferrare  ce  xxixe  de  Novembre  1555. 

Monseigneur,  je  ne  scay  quelle  justice  vous  espérez  avoir  du 
pappe  pour  le  faict  du  Comte  de  Bagny  (3),  mais  du  temps  du  pappe 
Julie  j'aurays  disposé  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  a  achapter  les  pla- 
ces dudil  comte;  et  a  nous  en  bailler  xxxmescus  qui  eust  esté  vimescus 
pour  nos  dommaiges  et  interestz,  mais  il  voulloit  que  la  confisca- 
tion fust  premièrement  adjugée  a  la  Cbambre  apostolicque  (4)  et  que 
ladite  Cbambre  fust  après  la  vente  et  se  obligeât  a  la  garentyr,  je  luy 
en  ay  encores  parlé  ces  jours  passez,  et  si  du  coste  de  Rome  vous 
pouviez  faire  juger  ladite  confiscation,  je  pense  (pie  ledit  sieur  Duc 
y  pourroit  entendre,  qui  nous  seroit  tousjours  advantage  et  commo- 
dité de  avoir  argent;  je  vous  en  ay  bien  voullu  toucher  ce  mot  pour 
vous  donner  plus  d'occasion  d'en  faire  par  delà  poursuicte. 

(Bibl.  nat,  Fr.  15881.  f  217)  ^originale). 


GABRE    AU    ROI 

102.—  [Fenwe],  4  janvier  1556. — Sire,  je  depescbay  dès  le 
vingtneufviesme  du  passé  un  de  mes  gens  exprès  vers  Vostre  Ma- 
jesté, vous  rendant  compte  de  la  négociation  de  Monsieur  le  Car- 
dinal Caraffe  avec  ces  seigneurs  et  vous  envoiay  le  duplicata  d'un 
pacquet  qu'on  m'avoit  destroussé  dans  lestât  de  ces  seigneurs  Mon- 

(1)  Etienne  Boucher,  d'abord  abbé  de  Saint-Ferme  au  diocèse  de  Bazas,  secré 
taire  de  Catherine  de  Médicis,  puis  en  L560  évêque  de  Quimper,  en  récompense 
des  soins  qu'il  avait  donnés  durant  de  longues  années  aux  affaires  de  Catherine 
de  Médicis  en  Italie;  mourut  le  20  juillet  1573.  Voir  II.  dk  la  Ferrière,  Corres- 
pondance de  Catherine  de  Médicis,  t.  i.  p.  loi). 

(2)  Agent  a  Constantinople. 

(3)  Sans  doute  Antoine  Carafa,  neveu  de  Paul  1\.  marquis  de  Baguo. 

(4)  La  Chambre  apostolique,  foui-  ecclésiastique  siégeante  Borne,  composée  du 
camerlingue,  d'un  vice-camerlingue,  d'un  auditeur  général,  d'un  trésorier  général 
et  du  doyen  des  clercs  de  la  Chambre.  Ainsi  constituée,  cette  assemblée  Formail 
le  Conseil  des  finances  du  Pape. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  121 

dict  homme  s'en  alla  en  compagnie  du  sieur  Adrien  Bâillon  (1).  Dieu 
veuille,  comme  je  l'espère,  qu'ils  ayent  passes  seurement  dont  je 
ne  suis  pas  sans  quelque  crainte,  car  l'on  tient  icy  pour  certain  que 
le  Cardinal  de  Trente  a  révolté  au  service  du  Roy  d'Espaigne  une 
des  principalles  villes  des  Grisons,  lesquels  descendent  tous  les 
jours  a  grands  trouppes  pour  aller  a  Milan  secourir  le  Roy  d'Espai- 
gne a  cette  guerre.  Monsieur  d'Asnois  >2),  a  qui  j'ay  escript  de  me 
mander  si  nos  arriers  (3)  et  n<>s  pacquets  esloient  seurs  par  leurs 
pais,  ne  mi  a  encores  respondu.  qui  est  cause  que  j'envoie  un  cour- 
rier exprès  devers  luy  pour  porter  ce  pacquet  et  scavoir  de  luy  la 
seureté  ou  le  danger  en  quoy  sont  nos  pacquets  et  nos  arriers  et 
puis  qu'il  face  courir  cetlui  cy  par  les  postes  ordinaires.  Cette  depes- 
che,  Sire,  est  pour  aceompaigner  un  pncquet  de  Monsieur  de  Selve, 
lequel  sera  avec  la  présente,  et  pour  vous  dire  aussi  que  Monsieur 
le  Cardinal  Carafïe  eut  hier  responce  de  ces  Seigneurs  et  pour  ce 
qu'il  leur  sembloit  quil  avoit  parle  un  peu  en  termes  généraulx  de 
la  chose  de  Ravenne.  Ces  Seigneurs  luy  repondirent  de  mesme  avec 
force  belles  parolles,  mais  sans  conclusion  ni  responce  de  sy  ni  de 
non,  qui  fut  cause  que  le  dict  sieur  Cardinal  leurreplicqua  a  limpro- 
viste  en  termes  plus  exprès  de  loffre  de  Ravenne,  c'est  a  scavoir 
qu'on  leur  hailleroit  Ravenne  et  Seruya(4)  en  engaigement  pour  la 
somme  de  trois  cent  mille  escus  a  la  charge  que  si  on  venoit  a  con- 
quérir la  Puglia  '5),  on  la  leur  consigneroit  pour  propre  et  ils  ren- 
droient  a  l'Eglise  le  dict  Ravenne.  et  si  la  Puglia  ne  se  pouvoit  con- 
quérir, que  le  dict  Ravenne  leur  demeurcroit  jusques  a  ce  que 
l'Eglise  les  eust  remboursés  de  leur  prest,  leur-  remonstrant  que 
sils  ne  vouloient  entendre  a  cette  praticque  et  se  resouldre  de  leur 
déclaration,  le  Pape  estoit  contrainct  de  mettre  en  Italye  si  grand 
nombre  de  François  que  par  adventure  il  seroit  malaisé  de  les  en 
faire  après  sortir,  et  que  ne  pouvoit  avoir  forces  de  mer  pareilles  a 
celles  de  l'ennemy,  Sa  Sainclete  etoit  forcé  de  se  servir  des  Turcs 
qui  estoit  une  meslange  fort  dangereuse  et  qui  luy  deplaisoit,  mais 
quil  ne  pouvoit  faire  de  moins,  voyant  la  façon  dont  on  luy  voulloit 
commander  et  tyranniser,  et  que  ces  Seigneurs,  avec  leur  armée 
de  mer,  pouvoient  remédier  a   cest  inconvénient,  et,  après  cela,  il 


(1)  Adriano  Baglione,  commandant  des  troupes  italiennes  au  service  de  la 
France. 

(2  Louis  II  de  Salazar,  seigneur  d'Asnois.  gentilhomme  ordinaire  de  la  chambre 
du  Roi,  ambassadeur  en  Suis-c  auprès  du  canton  des  Grisons  de  1555  à  1557; 
mourut  en  1561 . 

(3)  Erriers,  voyageurs,  courriers.  Godefroy,  Dictionnaire  de  l'ancienne  langue 
française). 

(4)  Cervia. 

(5)  La  Pouille. 

12 


122  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

leur  a  faict  entendre  soubz  mains,  par  un  de  leurs  gentilshommes 
mesmes,  que  sils  laissoient  échapper  Ravenne  de  leurs  mains,  il 
estoit  résolu  de  la  bailler  au  Duc  de  Ferrare  qui  en  ofFroit  tant 
d'argent  que  Ion  vouldroit,  de  sorte  que  ces  Seigneurs  ont  remis 
la  chose  en  nouveaux  pregays  (1)  et  le  dict  Cardinal  sera  icy  enco- 
res  trois  ou  quatre  jours  pour  veoir  sil  s'en  pouvoit  tirer  quelque 
bonne  resolution  de  laquelle  je  ne  fauldray  vous  donner  bon  advis 
par  courrier  exprès.  Par  les  dernières  lettres  de  Rome  que  le  dict 
sieur  Cardinal  m'a  communiqué,  il  semble  que  le  Duc  dAlve  veuille 
changer  la  guerre  de  Rome  du  cosle  do  la  Marque  et  dAnconne  (2) 
et  avoit  on  envoyé  de  ce  cote  la  le  Marquis  de  Monlebel  (3)  avec  une 
bonne  partie  des  forces  du  Pape,  et  sil  ne  nous  vient  bientost  quel- 
que bonne  nouvelle  de  Monsieur  de  Guise  par  laquelle  Monsieur 
le  Cardinal  puisse  espérer  de  sabbocquer  avec  luy.  il  est  pour  s'en 
aller  de  ce  coste  la  de  la  Marque  pour  veoir  comme  celte  guerre  se 
doibt  conduire.  J'y  voy,  Sire,  quelque  confusion  et  mouvais  ordre 
si  Monsieur  de  Guise  ne  sapproche  bientost.  et  qu'on  ne  face  une 
bonne  délibération  de  ce  que  les  uns  el  1rs  autres  doibvent  faire  en 
cette  guerre.  Si  on  use  de  dilligence  a  faire  marcher,  j'av  espérance, 
Sire,  que  commanderés  aux  amys  et  ennemys.  Jay  eu,  Sire,  quelque 
advertissemenl  de  bon  lieu  que  le  Roy  dEspaingne  avoit  escript  a 
tous  les  Cardinaulx  Espaignolz  et  autres,  ses  confidents  el  partiaux. 
qui  se  trouvoient  hors  <h'  Rome,  de  regarder  quelque  lieu  ou  ils  se 
puissent  assembler  pour  taire  une  congrégation  ou  forme  de  concile 
pour  y  Iraicter  de  la  privation  du  Tape  comme  non  esleu  canoni- 
quement.  et  pour  son  mauvais  goi  ver,  leur  nommant  quant  a  luy  la 
ville  de  Pisa  ou  pareille  assemblée  avoil  este  autrefois  faicte  contre 
le  Pape  Julie  second  '<  et  que  scachanl  le  dit  Roy  dEspa igné  que 
le  Pape  vouloil   user  de  privations,  il  le  voulloit  prévenir  et  les  luy 


î  Le  Pregay  ou  Conseil  des  Pregadi  (c'est-à-dire  de  citoyens  priés  d'assister 
le  Doge  constituait  le  Sénal  de  Venise  el  dirigeai!  la  politique  de  la  République. 
Il  avait  été  organisé  sous  le  gouvernemenl  de  Flabanico  en  1032,  comptai!  soixante 
membres  el  des  membres  de  dro:t  pris  parmi  les  dignitaires  el  les  hauts  fonc- 
tionnaires. Chaque  membre  élail  élu  pour  un  an,  mais  restai)  toujours  rééligible. 
Ce  Conseil  connaissait  de  toutes  les  grandes  affaires  de  l'État,  telles  que  décla- 
rations de  guerre,  conclusions  de  traités  «le  paix  nominations  d'ambassadeurs 
(Voir  Baschri  :  Archives  de  Venise.  Paris,  Pion,  1870,  in  8n,  p. 

2  t.  ancienne  Marche  d'Ancône  forme  aujourd'hui  la  province  el  l'arrondisse- 
ment d'Ancône,  capitale  Ancône,  à  190  kilomètres  N  -N.-E   de  Rome. 

:;    Antoine  Carafa,  marquis  de  Montebello,  neveu  de  Paul  IV. 

I  Allusion  au  Concile  convoqué  par  Louis  \ll  à  Piseen  1511,  pour  combattre 
Jules  n  julien  de  la  Rovère,  ne  en  1 441,  moi!  en  1513).  Ce  Concile  échoua  hon- 
teusement, el  le  Pape  y  répondit  en  ouvrant,  I  année  suivante,  le  premier  Concile 
de  Latran,  pour  l'extinction  du  schisme,  la  réforme  <le  l'Église  el  la  guei  re  contre 
les  Turcs. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  12.3 

rendre  invalides  J'ay  dict  a  Monsieur  le  Cardinal  CarafTe  cest  adver- 
tissement,  et  lay  escripta  Monsieur  le  Cardinal  du  Bellay  qui  est,  a 
ce  que  l'on  dict,  des  grands  favoris  du  Pape,  avec  les  remèdes  quil 
ine  semble  bien  l'acilles  a  sa  Saincteté,  et  je  veux  croire  qu'elle  y 
pourvoira.  Cela  me  faict  prendre  opinion  que  si  de  vostre  cosle, 
Sire,  il  ne  se  trame  quelque  praticque  pour  accommoder  tous  ces 
troubles,  on  ne  peut  espérer,  sinon  guerres  et  schismes  en  1  Eglise, 
On  scait  bien  que  vous,  Sire,  y  estes  entré  forcés  et  mal  volontiers, 
mais  puisqu'on  y  est,  je  croy  que  ce  sera  une  bonne  résolution  de  la 
faire  a  bon  escient,  car  d'une  bonne  guerre  sortira  une  bonne  paix. 
Monsieur  de  la  Vigne  (lj  partit  le  trentiesme  de  ce  mois  passe  avec 
une  gallere  de  la  Seigneurie  bien  armée... 
De  Venise  ce  quatriesme  de  Janvier  15oG. 

Ms.  de  Grenoble,  fol.  39.  —  Ribier  donne  aussi  cette 
dépêche  presque  in  extenso,  ainsi  qu'un  extrait  de  celle 
du  5  janvier.  De  ces  deux  lettres  il  n'en  fait  qu'une 
seule,  datée  du  5  janvier  1536;. 


GABRE   AU    CONNETABLE 

103.  —  [Venise],  4  janvier  1 556.  —  Monseigneur, je  ne  vous  feroy 
reditte  de  ce  que  jescript  au  Roy,  seullement  je  vous  diray  que 
Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  est  fort  mal  content  de  veoir  venir 
ici  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine,  sans  passer  plus  tost  par 
luy,  et  luy  semble  quon  luy  faict  grand  tort  puis  quil  se  veult  déci- 
der de  tanter  nouvelles  praticques  sans  luy  en  communiquer  quel- 
que cbose,  car.  il  faisoit  son  compte  de  venir  icy  en  personne  et 
avoir  cest  honneur  de  faire  entendre  le  premier,  a  ces  Seigneurs, 
sa  déclaration  et  les  autres  choses  [tassées,  cbose  qui  luy  sembloit 
bien  importes  pour  le  service  du  Roy  et  pour  son  particulier  inte- 
rest,  et  adresse  toutes  ses  plaintes  a  moy  qui  metz  toutte  la  peine 
que  je  puiz  pour  le  rappaizer  et  lui  persuader  davoir  patience  jus- 
ques  a  ce  que  nous  ayons  de  voz  nouvelles  et  jusques  a  larrivee  de 
Mondit  Sieur  le  Cardinal  de  Lorraine,  qui  luy  est  parent  si  prudent 
et  grand  ministre  du  Roy,  quil  se  peult  assurer  quil  le  contentera, 
il  est  fort  nécessaire,  Monseigneur,  de  prendre  bien  tost,  et  sans 
perdre  heure  ne  temps,  quelque  bonne  resolution  aux  affaires  de 

ili  Jean  Garcenacdit  La  Vigne,  abbé  de  Hautviller,  du  diocèse  d'Amiens,  en  1551, 
ambassadeur  à  Constantinople;  mourut  au  retour  de  son  ambassade,  à  Raguse, 
le  -22  octobre  1339. 

Brantôme  Édit.  Lalanne.  t.  v,  p.  68  dit  que  M.  de  La  Vigne  s'était  considéra- 
blement enrichi  pendant  sa  mission  auprès  de  la  Porte  et  qu'il  laissa  plus  de 
trente  mille  écus,  ainsi  que  des  ineuules  très  rares.  Il  frustra  ses  parents  de 
^on  héritage  et  donna  tous  ses  biens  à  .Madame  de  Savoye,  sa  bienfaitrice. 


124  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

deçà  et  de  donner  ordre  aux  provisions  nécessaires:  autrement  vous 
verrez  que  pendant  que  nous  consulterons,  les  ennemis  feront  leurs 
grandz  effortz,  voyant  que,  commençant  de  ceste  heure,  ilz  ont  six 
mois  fort  commodes  avant  que  l'armée  turquesque  vienne,  ne  que 
voz  forces  par  terres  puissent  leur  venir  donner  grand  empesche- 
ment. 

Monseigneur,  voyant  la  grand  presse  dargent  quon  me  faict  du 
cousté  de  Rome,  je  faiz  partir  aujourd'huy  dix  mil  pscuz,  oultre  les 
24  mil  que  je  y  envoyay  4  jours  il  y  a,  lesquelz  dix  mil  escuz  le  Sr 
de  Nazy  ma  advansez  sur  la  paye  de  février  qui  est  anticipation 
d'ung  mois  entier,  et  l'a  volontiers  comme  il  a  faict  par  cy  devant 
beaucoup  de  telles  advances  dont  il  ne  demande  oncques  ung  escu 
de  proffit,  et  si  vous  respondz,  Monseigneur,  quil  m'a  semble  quil 
me  le  donne,  pour  le  grand  presse  que  m'en  faisoient  Messieurs  les 
Cardinaulx,  je  ne  vous  veulz  pas  celer  telz  services,  aflin  que  quand 
occasion  se  présentera,  il  vous  plaise  le  faire  entendre  au  Roy  et 
tenir  la  main  a  les  faire  recognoistre. 

De  Venise  ce  4e  de  Janvier  1556. 

Monseigneur,  il  est  venu  sy  a  propoz  que  voulant  clorre  ceste  des- 
peche  j'ay  receu  la  vostre  du  20e  du  passe,  et  pour  ce  que  je  ne  scay 
encores  en  quoy  l'on  a  failly  au  trailté  de  Ferrare.  je  ne  scay  q  1e 
vous  y  respondre  et  atlendray  la  venue  de  mondit  Sieur  le  Cardinal 
de  Lorraine,  qui  doibt  estre  icy  d;ms  trois  eu  4  jours,  pour  après 
m'employer  en  ce  qu'il  me  recommandera  en  cela  et  en  autres  cho- 
ses, car  le  Hoy  m'a  commande  qu'on  luy  obéit  comme  a  sa  personne. 
Quant  a  mes  mémoires  pour  la  reformation  des  despenses  de  deçà, 
il  vous  plaira  n'en  prendre  que  la  bonne  volonté.  Plaise  a  Dieu  que 
je  vous  puisse  veoir  ung  jour  bien  déchargez  de  tous  ces  troubles 
et  confusions  de  deçà,  car  il  ne  fust  jamais  argent  plus  mal  employé 
a  mon  advis  et  crains  que  a  la  longue  il  ne  soit  force  monstrer 
nostre  foiblesse  au  monde  qui  gastera  toutes  les  belles  choses  pas- 
sées, mais  il  semble  que  Dieu  permect  tous  les  jours  naistre  quel- 
que occasion  qui  empescbe  de  vous  en  retirer  et  vous  contrainct  de 
continuer  la  guerre  sans  en  avoir  guères  de  volonté.  Cela  me  lait 
aussy  espérer  que  Dieu  vous  excusera  des  maux  qui  en  adviendrait 
et  vous  sera  tant  plus  favorable. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fot.  10)  (copie). 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU   GABRE  125 


GABRE   AU    ROI 

104.  —  [Venise],  4  janvier  1556.  —  Sire,  je  suis  venu  icy  faire  les 
festes  de  Noël  comme  je  vous  escripviz  de  Ferrare,  et  ay  tenu  bonne 
compagnie  a  ces  seigneurs  en  toutes  leurs  cerymonies  et  festins.  Je 
n'ay  point  cognuen  leurs  raisonnements  publicques,  ne  privez,  quils 
ayent  presenty  aucune  chose  de  ce  qui  est  passe  a  Ferrare  et  a  Rome, 
et  s'ilz  en  scavent  quelque  chose  ou  qu'ilz  en  doubtent  ils  mons- 
trent  n'en  rien  scavoir;  il  est  vrai  que  la  longueur  des  resolutions  de 
Rome, soit  qu'elle  aye  procéddé  du  Pape  ou  d'ailleurs,  pourroiteous- 
ter  cher  a  sa  Saincteté  et  a  vosire  réputation  aussi,  car  les  impé- 
riaulx  qui  doibvent,  a  mon  advis,  avoir  descouvert  les  choses  qu'on 
mettoit  en  termes,  ne  veullent  pas  donner  loisir  de  leur  malfaire  et 
se  sont  resoluz  de  commencer  les  premiers  a  offendre  ;  et  a  ce  que 
je  veoy  par  les  adviz  de  Rome  et  d'ailleurs,  le  Duc  de  Florence  a  mis 
toutes  ses  forces  emsemble  pour  essayer  de  reprendre  la  montaigne 
du  Sennoys  (1)  et  occuper  tous  les  passages  par  ou  les  nostres  ont 
accoustumé  d'avoir  nouvelles  et  argent.  Cependant,  les  Espagnolz  et 
Allemens  qui  esloient  à  Gayette  (2)  sont  embarquez  pour  venir  se 
joindre  avec  lesdites forces  de  Toscane;  lesnouveaulx  Espagnols  qui 
sont  nagaires  eschappez  du  rencontre  de  vos  galères  s'y  acheminent 
aussy,  et  si  tout  cela  est  ung  coup  ensemble,  ce  sera  une  grosse 
trouppe  pour  faire  une  belle  peur  au  Pape  qui  se  trouve  fort  mal 
pourveu  et  voz  forces  trop  loing.  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  est 
assez  voisin  et  auroit  moyen  et  de  quoy  empescher  toutes  leurs  en- 
treprises, mais  je  le  veoy  fort  malcontent,  car  de  vostre  part  il  n'est 
encores  venu  une  seule  response  de  son  faict,  et  il  ne  scait  s  il  est  a 
vous  ou  s'il  ny  est  pas,  ne  s'il  doit  disposer  ses  affaires  a  la  guerre 
ou  a  la  paix;  il  se  plaint  aussy  que  Messieurs  voz  ministres  de  Rome 
tiennent  fort  peu  de  compte  de  luy,  nayaut  donne  aucun  ordre  que 
le  Pape  aye  envoyé  un  seul  homme  desvers  luy  pour  le  rechercher 
de  servir  a  la  ligue.  De  sorte  quil  m'a  icy  despéché  corriers  exprès 
l'ung  sar  l'aultre,  avec  fort  mauvais  lengage  et  parle  dernier  m'a 
escript  une  lettre  que  j'ay  bien  voulu  pour  ma  desch.irge  envoyer  à 
Vosire  Majesté,  afin  qu'elle  voye  son  malc<>ntentement,  et  que,  au 
lieu  d'avoir  de  luy  le  secours  de  largent  pour  le  deppostz,  il  me 
faict  très  grande  instance  de  luy  faire  payer  incontinent  les  30  mil 
escuz  qui  luy  sont  deubtz.  D'ung  aultre  cousté  Messeigneurs  les 
Cardinaulx  me  mandent  que  je  leur  envoyé  force  argent  pour  payer 

(1)  Siennois. 

(2>  Gaete.  anciennement  Cajeta,  ville  ^d'Italie,  très  fortifiée,  avec  port  sur  le 
golfe  du  même  nom  dans  la  Méditerranée,  à  7u  kil.  N.-O.  de  Naples. 


126  NÉGOCIATIONS    DE  JANVIER    1556] 

tous  arrérages  et  croistre  voz  forces  en  Toscane.  Tellement  qu'il 
semble  quej'aye  icy  uns  trésor  pour  fournir  a  toutes  les  nécessitez 
du  monde.  etjepuisasseureraVostre  Majesté  qu'il  ny  a  pas  uns:  seul 
escu  qui  ne  soit  tout  despendu.  Car  Nazy  a  paye  sur  celte  assigna- 
tion de  janvier  seullement33  mil  escuz.  j'en  ave  envoyé  a  Parme  et 
a  la  Mirandola  11  mil  qui  estoient  encores  deubz  pour  Décembre  et 
24  mil  que  jenvoya  il  y  a  quatre  jours  a  Rome  :  et  si  le  Duc  de  Fer- 
rare  se  retire  de  nous  presler,  je  ne  scay  de  quel  lieu  en  prendre 
par  deçà.  Les  affaires,  Sire,  sont  reduiclz  a  telz  termes  quil  ne  lault 
pas  user  de  dilations  et  faull  faire  grosses  provisions  dargent  et 
faire  marcber  grosses  armées,  autrement  on  verra  le  Pape  reduict 
en  grande  nécessite  et  vous.  Sire,  en  aurez  grand  desplaisir.  Je 
confesse  que  c'est  grande  fascberie  que  a  lbeure  que  l'on  pensoit 
guerre  deubt  finir,  il  la  faille  recommencer  plus  que  jamais,  et  Dieu 
m'en  est  témoing.  Sire  si  je  n'ay  eut  toujours  opinion  que  ce  grand 
désir  que  le  Papeavoit  de  faire  guerre  vous  estoit  plus  préjudiciable 
que  prouffitable  en  ce  temps  icy,  et  toutesfois  il  m'est  impossible 
de  reffuser  honnestement  telles  occasions  Monseigneur  le  Cardinal 
de  Lorraine  me  mande  que  je  l'attende  icy  et  qu'il  pense  y  venir 
droit  de  Rome  avant  que  passer  a  Ferrare.  .le  presuppoze  par  la 
qu'il  y  vient  avec  intencyon  de  parler  a  ces  seigneurs,  et  ne  scay 
s'ilz  se  pourroient  mouvoir  a  quelque  chose  pour  veoyr  le  Pape  en 
nécessité.  Mais  vous  debvez,  Sire,  tenir  pour  certain  qu  ilz  ne  bou- 
geront pour  ung  ne  pour  aullre  et  qu'ilz  vous  lairronl  Ions  faire 
jusques  a  ce  qu'ilz  voyenl  passées  en  Italie  les  armées  des  deux 
parts,  et  qu'ilz  puissent  faire  quelque  jugement,  lequel  des  deux 
pourra  avoir  du  meilleur.  Le  Duc  d'Urbin  a  prins  congié  du  service 
du  Pape  et  ces  seigneurs  monslrenl  ne  vouloir  se  charger  de  luy  ne 
d'aultre,  de  sorte  que  son  ambassadeur  qui  esl  en  ceste  ville  m'est 
venu  parler  forl  expressément  du  désir  que  son  maitre  a  toujourseu 
de  s'accorder  a  vostre  service,  me  priant  de  mettre  la  chose  en  ter- 
mes; je  l'ay  remis  à  en  parler  a  la  venue  de  Monseigneur  le  Cardinal 
de  Lorraine:  mais  quant  toul  est  dit,  Sire,  si  vous  voulez  prendre  la 
protection  de  tous  ces  potentatz  d'Italie  tout  vostre  Royaulme  n'y 
basteroit  (1),  et  je  n'ay  jamais  veu  ung  -cul  deux  qui  s'y  suit  pré- 
senté pour  désir  de  vous  faire  service,  mais  pour  tirer  de  \uus  le  plus 
d'argent  qu'ilz  peuvent  et  faire  leurs  affaires  les  premiers,  el  puys 
des  vostres  qu'il  en  advienne  ce  qu'il  plaira  a  Dieu. 
Sire,  par  tous  les  advis  qu'on  a  de  Flandres,  l'Empereur  doibl 

(1)  «N'y  suffirait  pas».  —  Les  Italiens  disent  « bastare ■  pour  suffire.  Nous 
avons  emprunté  d'eux  le  verbe  «baster»  pris  eu  ce  sens,  Noir  Lagurni  di 
Sainik-I1. \i.avi:.  Glossaire  de  l'ancienne  langue  française,  i.  u.  p.  cji 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  127 

faire  carneval  a  Auguste  (I)  et  se  trouver  a  une  diette  a  Ratis- 
bonne  (2)  ou  il  se  doibl  traiter  des  preparatifz  contre  les  Turcqs  pour 
la  guerre  de  Transilvanie;  j'en  advertiray  M.  de  Codignac  affîn  qu'il 
le  face  entendre  a  ce  Grand  Seigneur  et  que  cela  luy  donne  tant  plus 
d'occasion  aussi  de  se  préparer  de  son  costé  et  se  resouldre  a  ceste 
guerre  s  il  en  esloit  refroidy  ;  escript-on  aussy  que  ledit  Empereur 
passera  certainement  en  I lai  ve  pour  aller  s'embarquer  a  Gennes  et 
s'en  aller  en  Espagne  s'il  ne  change  d'opinion  entre  cy  et  la.  Par 
lettres  de  Milan  on  escript  l'arrivée  du  Cardinal  de  Trente  pour  gou- 
verner cet  estât  la  et  le  parlement  du  Duc  d'Alve  pour  aller  a  Naples; 
quant  a  la  promotion  dernière  de  Cardinaulx,  je  ne  vous  en  diray 
aultre  chose  sinon  que  si  le  Pape  ne  se  resoult  de  faire  mieux  pour 
sa  maison  meMiies  et  pour  Vostre  Majesté  veu  l'âge  ou  il  est.  j'exti- 
merois  bien  peu  toute  sa  ligue  ne  ce  qu'il  scauroit  faire,  et  une  des 
plus  grandes  guerres  qu  il  puisse  aujourd'huy  faire  a  l'Empereur  est 
de  faire  tant  de  Cardinaulx  affectionnez  a  vostre  part  que  vous  soyez 
asseuré  de  faire  ung  Pape  après  luy,  tel  que  vous  vouldrez ,  et  s'il  ne 
le  faicl.  ung  malin  il  se  mourra,  et  son  amylié  ne  vous  aura  servy 
que  de  confusion  et  de  despence. 
De  Venize  ce  4e  de  Janvier  1556. 

Sire,  despuis  ma  lettre  escripte,  comme  je  revenois  ce  matin  de 
parler  a  la  Seigneurie,  j'ay  receu  la  despeche  qu'il  vous  a  pieu  me 
faire  envoyer  du  20e  du  passé,  je  n'ay  encores  jamais  rien  veu  ny 
entendu  de  la  despeche  de  Monsieur  de  Vilandry,  lequel  lenvoya 
droit  a  Rome  par  ung  de  ses  gens,  et  s'il  en  est  de  retorne  malade 
de  my  chemin  comme  Vostre  Majesté  aura  sceu,  mais  par  ce  qu'il 
vous  plaist  m'escripre,  je  veoy  bien  que  nous  avons  faict  quelque 
erreur,  chose  qu'on  voit  advenir  aux  plusadvisez,  et  le  plus  souvent 
a  lheure  qu'ilz  cuydent  avoir  le  mieulx faict;  les  jugemens  du  monde 
sont  ainsy  divers,  et  l'intention  bonne  rend  telles  faultes  excusa- 
bles et  ceulx  qui  les  ont  faictes  aussy  ;  joinct  que  Dieu  mercy  il  n'y 
a  rien  de  gasté,  car  quelque  presse  qu'on  m'en  ayt  faicte  qui  a  esté 
fort  grande,  je  me  suys  bien  gardé  de  rien  innover  ny  entrer  en  au- 
cunes exécutions  des  choses  passées  et  promises,  mais  comme  Vos- 
tre Majesté  désiroit,  ay  toujours  cherché  doulcement  de  gaigner  temps 
attendant  de  vos  nouvelles  avec  remonstrances  et  bonnes  raisons 
que  j'avois  de  mon  cousté,  car  a  la  vérité  il  ny  avoit  aucune  appa- 
rence que  de  laultre  part  on  deubt  tant  presser  les  choses,  mais  en 
cela  il  fault  quelquefois  excuser  le  naturel  du  pays  et  des  personnes 

vl)  àugsbourg,  ville  de  Bavière,  chef-lieu  du  Cercle  de  Souabe,  à  63  kil.  N.-O. 
de  Munich. 

(2)  Ratisbonne,  ville  de  Bavière  (Cercle  du  haut  Palatinat),  à  105  kil.  N.-O.  de 
Munich. 


128  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

a  qui  on  a  affaire,  et  depuis  que  je  suis  icy,  par  deux  courriers  qu'il 
m'a  despechéz,  je  Tay  toujours  payé  de  raisons  et  de  dilations  et 
non  d'aultre  chose,  et  aussy  tout  le  monde  ne  m'eut  pas  faict  passer 
outlre  sans  commandement.  Je  suis  bien  ayse  que  l'arrivée  de  mon- 
dit  seigneur  le  Cardinal  de  Lorraine  sera  bientôt,  car  je  presuppoze 
qu'il  scail  l'intention  secrète  de  Vostre  Majesté  et  ce  sera  a  luy 
d'asseurer  et  de  rompre  ceste  praticque  et  s'il  luy  plaist  m'en  com- 
muniquer je  luy  endiray  franchement  mon  advis  beaucoup  mieulx 
quejenel'oze  escripre,  et  vous  supplie  très  humblement,  Sire, 
croire  une  chose  que  la  ou  il  sera  question  de  vostre  service,  je  ne 
cognoiz  ne  Duc  ne  Duchesse  ne  homme  qui  vive  qui  me  sceut  faire 
changer  la  volunté  que  doibt  avoir  ung  bon  serviteur  et  ung  homme 
de  bien.  Je  vous  ay  bien  volu  dire  ce  mot.  Sire,  pour  ce  qu'on  veoit 
que  ledit  seigneur  Duc  me  porte  quelque  affection  et  qu'il  escript  en 
ma  faveur  et  recommende  mon  particulier  et  me  fort  que  par  la  on 
entrast  en  quelque  oinbraige  de  mon  faict,  car  j'estime  plus  mon 
honneur  que  je  ne  faiz  un  cardinal,  ne  le  Papat;  avec  je  seray  tou- 
jours assez  riche  et  assez  honnoré.  mais  que  vous  congnoissiez  ma 
bonne  volunte  et  que  je  soys  en  vostre  bonne  grâce,  je  donneray  or- 
dre que  Monseigneur  le  cardinal  de  Lorraine,  s'il  est  en  chemin, 
recepvra  demain  vostre  pacquet  qui  estoil  avec  le  mien;  la  seigneu- 
rie a  déjà  despeché  10  gentilzhommes  pour  le  recevoir  a  Chioggia(l) 
etle  Duc  et  toute  la  seigneurie  liront  aprez  recevoir  avec  le  Bucen- 
tore(2  au  monastère  de  S'  Espril  3  etm'onl  dit  luy  vouloir  faire  tout 
l'honneur  qu  ilz  pourront  et  le  vouloir  loger  el  de  frayer  pour  estre 
ministre  favorisé  d'un  si  grand  Roy  el  pour  estre  prince  verlueulx 
et  prince  de  la  maison  d'où  il  est;  loutesfois  il  vouldra  éviter  toutes 
ces  obligations  et  cerymonies,  je  liens  a  toutes  adventures  le  palays 
dUrbin  ou  je  suis  logé,  bien  préparé  avecques  barques  el  ce  qui  luy 
fait  besoing  pour  le  bien  recevoir. 
De  Venise,  ce  î    de  janvier  1556. 

(Bibl,  nat..  Fr.  20456,  fol.  14)  (copie). 

(1)  Chioggia,  ville  de  Vénétie,  à  l'embouchure  de  la  Brenta. 

(2)  Le  Bucentaure,  navire  officiel  de  la  République  de  Venise.  C'est  à  bord  <le 
ce  vaisseau  que,  chaque  année,  au  jour  de  l'Ascension,  le  Doge,  entouré  du  légal 
du  Pape  el  de  l'ambassadeur  de  France,  célébrail  son  mariage  avec  l'Adriatique 
en  jetant  un  anneau  d'or  dans  la  mer 

(3)  Le  couvent  du  Saint-Esprit,  situé  dans  l'Ile  «le  Dorsudoro,  était  occupé  par 
les  religieux  Augustins  (Voir  Venezia  el  le  Sua  Lagune.  Venise,  1845,  t  u,  p  '< 
et  6).  —  «Celles  des  iles  qui  sonl  aux  environs  de  Venise  sonl  occupées 
par  un  seul  couvent  dont  l'eau  environne  les  murailles  de  toutes  parts,  comme 
est  celui  du  Saint-Esprit»...  (Voir  /.'/  Ville  et  la  République  de  Venise,  parle 
chevalier  de  Saint-Didier,.  La  Haye,  1G85.  p.  M  . 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU   GABRE  129 


GABRE    AU    CARDINAL    DE    TOURNON 

105.  —  [Venise],  4  janvier*  1556.  —  Monseigneur,  je  n"escript 
plus  a  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine,  presuposant  quil  soit 
party  de  Rome  et  que  nous  l'aurons  icy  dans  deux  ou  trois  jours, 
non  toutesfois  que  je  le  scaiche  sinon  par  les  advis  que  la  Seigneu- 
rie en  a  euz  de  leur  Ambassadeur.  Il  est  vray  que  par  voslre  lettre 
commune  de  samedy  dernier,  ledit  sieur  me  mandoit  l'attendre  icy 
sans  me  dire  le  temps  quil  y  pourroit  arriver  et  en  quelle  façon  il 
y  vouloit  venir,  et  la  raison  eust  bien  voullu  que  j'eusse  plustost 
donne  advis  a  la  Seigneurie  de  ces  particularitez  que  d'estre  con- 
traint de  les  aller  apprendre  d'eulx  qui  luy  font  préparer  logiz  et 
tout  ce  qu'ilz  peuvent  pour  le  recevoir  honnorablement.  Toutes  foiz 
ilz  ne  laissent  pas  davoir  bien  préparé  le  palais  dUrbin,  la  ou  je 
suis  loge,  et  qui  est  capable  pour  luy  et  pour  toute  sa  court,  s'il  me 
vouldra  faire  cest  honneur  dy  loger,  et  seroit  en  plus  grande  liberté 
qu'il  ne  sera  ailleurs  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  trouve  fort  mau- 
vaise la  venue  dudit  sieur  Cardinal  icy,  avant  que  de  passer  a  Fer- 
rare,  car  il  faisoit  son  compte  davoir  luy  mesme  cest  honneur  et 
gaigner  le  gré  de  ces  Seigneurs  pour  les  venir  le  premier  advertir 
de  sa  déclaration,  et  dit  que  cela  luy  importoit  grandement,  et  pour 
le  Roy  et  pour  son  particulier:  de  sorte  quil  m'a  despeche  ung  cour 
rier  exprès  avec  une  lettre  toute  pleine  de  colère  et  de  fort  maul- 
vais  langaige,  laquelle  j'ay  bien  voulu  envoyer  au  Roy  pour  ma 
descharge,  me  faisant  grand  instance  que  j'eusse  a  luy  payer  incon- 
linant  les  30  mil  escuz  quil  presla  il  y  a  six  mois,  et  si  mondit  sieur 
le  Cardinal  de  Lorraine  ne  vient  avec  quelques  bons  effectz  pour 
son  particulier  qui  le  puissent  contenter,  ne  faictes  estât  qu'il  vous 
preste  jamais  ung  liard  et  tenez  hardiment  les  choses  passées  pour 
toutes  rompues,  qui  seroit  un  fort  grand  dommaige  aux  affaires  du 
Roy  et  mesmement  puisque  lEmpereur  vient  en  Italie,  comme  con- 
tiennent les  derniers  avis  de  Flandres:  et  si  ledit  Sieur  Duc  demeure 
mal  content  du  Roy.  je  vous  asseure  quil  regardera  d'accommoder 
ses  affaires  avec  lEmpereur,  a  quoy  il  sera  toujours  reçu  en  la  sorte 
que  luy  mesme  vouldra.  Il  ma  escript  quelques  motifs  d'armes  que 
le  Duc  de  Florence  a  faict  commencer  en  la  Romaignes,  aux  terres 
du  Comte  de  Bagny,  ou  il  a  faict  venir  quelques  compagnies  de 
chevaulx  légers  et  de  gens  de  pied  ;  cela  pourroit  bien  rendre  le 
grand  chemin  de  Rome  'ort  dangereux  pour  l'argent  et  pour  les 
corners  que  nous  vous  debvons  envoyer  et  est  fort  nécessaire  que 
sa  Sainteté  pourvoye  en  toutte  dilligence,  car  nous  n'avons  chemin 
seur  d'icy  a  Rome  que  cestuy  la,  et  si  les  nouveaulx   Espaignolz 


130  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

arrivez  a  Germes  vont  en  Toscane,  comme  l'on  asseure  pour  certain, 
avec  ceulx  qui  sont  parti  de  Gayeste,  comme  vous  aurez  entendu, 
le  Duc  de  Ferrare  se  trouvera  partoul  comme  vous  estes  a  Rome, 
car  sa  Sainteté  ne  peult  faire  que  dltaliens.  et  a  licentié  le  Duc 
dUrbin  duquel  il  pouvoil  avoir  les  meilleurs  soldatz  de  ceste  nation. 
Le  Duc  de  Ferrare  est  bien  assez  voisin  et  auroit  quelque  moyen  de 
divertir  tous  ces  dangers,  mais  s'il  veoit  que  le  Pape  et  voz  autres. 
Messieurs  les  Ministre-  du  Roy,  tenez  si  peu  de  compte  de  luy 
comme  il  dit  que  vous  avez  fait  jusques  icy,  je  vous  asseure  quil 
en  tiendra  encores  moins  de  vous  autres.  Les  cboses  Monseigneur, 
sont  réduites  a  telz  termes  quil  ne  faut  plus  user  de  dilations  ny  de 
parolles,  et  s'il  n'est  usé  de  dilligence  et  a  faire  marcher  une  grosse 
armée  du  Roy,  je  crains  fort  que  nous  vous  verrons  tous  en  grand 
peine;  j'en  ay  de  ma  part  escript  et  sollicité  nostre  Court  le  mieux 
que  jay  peu.  Mondil  sieur  If  Cardinal  de  Lorraine  me  mande  par 
un  post  scriptz  de  vostre  dernière  lettre  que,  a  tout  le  moins,  je  lare 
tout  effort  de  trouver  dix  mil  escuz  de  Nazi  ou  d'ailleurs:  je  les  av 
recouvertz  dudit  Nazi  et  prunus  de  luy  en  bailler  quittance  sur 
l'assignation  de  Février  Mars  :  je  vous  assure  que  cela  a  este  avec 
toute  la  difficulté  du  monde,  et  si  vous  n'eussiez  este  a  Rome  et  le 
désir  quil  a  devons  faire  service,  je  croyquil  ne  les  eut  point  baillez, 
car  il  les  advance  ung  mois  avant  le  terme,  et  si  n'a  encores  aul- 
cune  commission  de  les  debourcer,  il  faict  souvenl  de  telz  services 
et  sy  n'en  demande  jamaiz  ung  escu  d'intérêt.  .le  vous  les  envoyé 
par  M''  Langlade,  présent  porteur,  qui  ne  tait  «pie  arriver  de  France 
et  s'en  va  faire  la  charge  de  controolleur  ordinaire  en  Toscane;  je 
l'ay  conneu  a  Parme  faisanl  tort  loyaumenl  sa  charge  et  quand  vous 
vouldrez  entendre  quelque  particularité  du  mesnaige  quon  fera  la, 
vous  pourrez  adjouster  foy  a  ce  quil  vous  en  dira,  car  il  entend  tort 
bien  toutes  ces  pratique-  et  façons  de  vivre,  el  sy  ne  vouldroil  point, 
a  mon  advis,  tenir  la  main  a  une  mauvaise  chose.  Monseigneur,  icy 
nous  n'avons  rien  de  nouveau  pour  ceste  heure,  sinon  larrivee  de 
M.  le  Cardinal  de  Trente,  a  Milan,  et  le  parlement  du  Duc  dAlve pour 
s'aller  embarquer  a  Gennes  et  de  la  a  Naples. 
De  Venise  ce  4e  de  Janvier  LS56. 

l'.il.l.  nat..  Fr.  20644,  toi.  S    copie  . 

',  \IUU-.    .\r    ROI 

106.  —  [Venise],  .')  janvier  1556.  —  Sire,  j'av  esté  ce  matin  en 
Seigneurie  en  audience  secret  te,  après  avoir communicque a  Monsieur 
le  Cardinal  (1)  ce  que  je  voulois  dire  pour  ayder  sa  négociation,  et 

(1)  Le  cardinal  de  Lorraine. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  131 

mon  propos  a  esté,  que.  encores  que  Monsieur  le  Cardinal  ne  leur 
ave  propose  chose  quelconque  qui  ne  soit  avec  bonne  participation 
et  consentement  vostre,  et  sans  in*en  faire  bonne  communication 
comme  de  chose  qui  n'est  qu'une  et  comme  entre  Sa  Sainteté  et 
Vostre  Majesté;  neantmoins,  il  me  semhloyt  ne  point  faire  entière- 
ment mon  debvoir  envers  vous.  Sire,  et  ne  vous  en  donner  assés 
suffisant  advertissement,  si  je  n'enlendois  d'eux  mesmes  leur  reso- 
lution, laquelle  vous  esclairciroit  de  beaucoup  de  chose  a  ladvenir 
et  vous  feroit  par  adventure  resouldre  de  procéder  en  cette  guerre 
et  en  la  paix  dune  autre  façon  que  vous  n'aviés  délibère,  car,  vous. 
Sire,  y  mettes  la  réputation,  vos  forces  et  tout  l'argent,  et  estoit 
raisonnable  que  vous  sceussiés  ce  que  vous  debves  espérer  d'eulx 
qui  y  ont  plus  dinterest  que  vous,  Sire,  n'avés  ;  et  ladessus  leur  ay 
replicqué,  en  termes  clairs  et  intelligibles,  les  partis  proposez  par 
mondict  sieur  le  Cardinal,  les  conditions  et  la  façon  de  leur  bailler 
Ravenne  et  layde  qu'on  vouldroit  avoir  deux,  leur  faisant  toucher  au 
doigt  quil  ne  falloit  avoir  aucune  espérance  de  la  paix  sur  laquelle 
ils  fondent  leurs  desfaites  et  deslays,  si  ce  nestoit  après  une  bonne 
guerre,  et  que  si  les  choses  avoïent  été  entendues  de  la  Seigneurie, 
de  la  sorte  que  ledit  Cardinal  les  me  disoit.  et  quils  eussent  la 
dessus  consulté  et  resollu,  ledict  Cardinal  estoit  prest  de  partir  pour 
s'en  aller  à  Ferrare,  et  moy  en  sa  compaignie,  pour,paradventure 
faire  les  affaires  d'autruy  a  leur  grand  regret,  et  s'il  leur  sembloit 
que  les  choses  n'eussent  ete  entendues  de  cette  sorte  par  toutte 
leur  compaignie,  et  quils  les  voulussent  de  nouveau  disputer,  ledict 
Cardinal  altendroit  encore  quelques  jour,  amployant  a  propos  de  là 
plusieurs  persuasions  pertinentes  et  qui  seroient  longues  a  escrire. 
Leur  responce  a  esté  quils  avoient  advisé  pour  le  mieulx  de  différer 
leur  entière  resolution  jusques  a  ce  qu'on  vit  ce  que  dureroit  l'allée 
du  Fantuccio  près  le  Roy  d'Espaigne,  d'autant  quil  sembloit  qu'il  fut 
allé  pour  entendre  aux  pourparlers  de  l'accord,  et  que,  par  les  lettres 
de  leur  Ambassadeur,  ledit  Roy  d'Espaigne  avoitassés  bonne  volonté 
et  les  ayant,  par  ma  replicqué  et  avec  bonnes  et  palpables  raisons, 
dissuadés  de  cette  opinion  de  la  paix  et  rechercher  d'attaquer  vive- 
ment la  praticque  avec  ledict  sieur  Cardinal,  puisqu'il  estoit  icy 
présent,  pour  la  conclure  ou  la  rompre,  quand  ils  seroient  esclaircis 
de  la  vérité  et  négociation  du  Fantuccio  Le  Duc,  sur  cela,  ma  faict 
responce  que  ces  Seigneurs  s'assembleroient  encores  de  nouveau  et 
repondraient  audit  sieur  Cardinal  et  a  moy,  ainsy  que  Dieu  leur  ins- 
pireroit.de  sorte  que  la  chose  n'est  encores  du  tout  désespérée  et  sera 
force  que  ledit  sieur  Cardinal  soit  encores  icy  deux  ou  trois  jours(l), 

(1)  Ribier  donne  cette  dépêche  jusques  y  compris  les  mots  «dédit  sieur  Cardinal 
soit  encore  icy  deux  ou  trois  jours  ». 


132  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

combien  qu'il  a  grand  regret  de  ne  pouvoir  plustost  partir.  Voila, 
Sire,  ce  que  je  puis  vous  en  dire  pour  cette  heure  et  envoyé 
courrier  exprès  jusquesa  Coyre  (1)  pour,  de  la,  faire  courir  le  pacquet 
par  les  postes  ordinaires  pour  éviter  despence. 

Sire,  j'envoye  un  pacquet  de  Monsieur  le  Cardinal  Caraffe,  adres- 
sant au  Nonce,  dans  lequel  il  y  a  une  lettre  inscripte  du  Duc  de  Flo- 
rence et  des  chiffres  par  LEveque  de  Pela  qui  est  en  ceste  ville.  Le 
Cardinal  me  l'a  communicqué  et  me  semble  que  vous  verres  par  la 
que  ledit  Duc  est  en  grand  peine  et  n'est  guères  content  des  impé- 
riaux, et  y  verres  aussi  son  discours  et  oppinion  sur  le  faict  de  ceste 
guerre.  Il  vous  plaira,  Sire,  faire  incontinent  chercher  ledit  Xonce, 
car  vous  serés  bien  ayse  de  veoir  ledit  deschiffremenl. 

De  Venise,  5  janvier  1556. 

Ms.  de  Grenoble,  fol.  40  v). 


GABRE    AU    ROI 

107. —  [Venise [,  9  janvier  1556  —  Sire,  .l'ay  veu  une  ordonnance 
quil  vous  a  pieu  menvoyer  sur  le  fait  des  plus  values  des  escuz  et 
des  autres  espèces  d'or  el  d'argent,  laquelle  ne  pourra  avoir  gueres 
lieu  en  ce  pays  ou  il  ne  fault  faire  estât  que  de  grand  perte  pour  les 
moins  values.  J'ay  escripl  du  p:issi'  si  souvent,  que  je  pensois  estre 
mieulx  entendu  ;  mais,  puisqu'il  vous  plaist  me  le  commander,  je  le 
rediray  encores  icyaffin  que  Messieurs  de  vostre  conseil  n'en  soient 
plus  en  doubte:  l'escu  d'Italie  s'est  depuis  trois  ou  \  ans  mis  pour  iS  s. 
et  l'escu  sol  pour  49a  Parme,  a  la  Mirandola  et  en  Toscana.  tellement 
que  pour  payer  la  simple  paye  «le  deux  soldat/,  on  leur  bailloit  seule- 
ment cinq  escuz  qui  font  douze  livres;  les  trésoriers  vous  ont  toujours 
tenu  bon  compte  de  ces  plus  valeurs,  ayant  fait  recepte  el  avalation 
des  escuz  en  leurs  quittances  a  la  raison  que  dessus  de  18  et  '•'.»  el 
ne  leur  en  peut  en  rien  demande'*.  Si  vous.  Sire,  avez  faict  bailler 
les  escuz  a  Lyon  a45et  '<<>  il  y  a  toujours  3  souz  par  escu  de  plus  value, 
lesquels.  Sire,  ne  sont  venuz  a  vostre  proffict.  mais  de  ceulx  qui  vous 
prestoient  l'argent,  comme  du  Due  de  IVrrare,  du  général  Delbene 
et  autres;  aussy  je  croy  qu'il/  ne  prenoient  point  d'autres  interestz 
pour  l'attente  de  leurs  deniers.  Ainsy,  Sire,  si  vous  faisiez  point  le 
gaing  avec  argent  d'aultruy  aussy  se  peull  dire  que  vous  ne  perdiez 
rien  de  vostre  propre,  car  vous  mettiez  au  lieu  de  voz  despences  les 
escuz  pour  le  mesme  prix  et  valeurs  que  vos  ministres  les recevoient, 
mais  maintenant  il  en  vaaultrement.  car  ha  il  la  ni  les  escuz  a  vos  comp- 
tables et  aux  presteurs  pour  les  prix  convenu/  en  vostre  ordonnance, 

(1)  Coire,  chef-lieu  du  canton  des  Grisons,  où  résidait  l'ambassadeur  français. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  133 

le  marchant  qui  preste  n'y  peult  rien  gaigner  et  vous  demourez 
perdant  grassement  et  mesmement  du  couste  de  Rome  ou  je  voiz 
que  vos  comptables  ne  niellent  l'escu  que  pour  onze  Jules  (1)  qui 
font  44  s.,  et  aultant  l'escu  au  soleil  que  l'escu  d'Italie,  de  sorte  que 
sur  chacun  escu  vous  perdez,  Sire,  4  soulz,  qui  est  sur  cent  mil 
escuz  justement  vingt  mil  francs  de  perte.  Monseigr  le  Cardinal 
de  Lorraine  se  peult  souvenir  que  je  luy  en  parlay  quant  il  ala  a 
Rome  pour  faire  que  le  Pape  fit  quelque  altération  de  monnoye 
comme  tous  princes  doihvent  sur  des  commencemens  de  guerre, 
mais  il  le  y  trouva  ung  peu  difficile.  Maintenant  j'en  ay  parle 
bien  longuement  au  cardinal  Caraffe,  et  faict  cognoistre  l'insterest 
sien  et  vosti  e  et  le  moyen  d'y  remédier,  qui  est  de  faire  leur  monnoye 
a  l'esgal  de  celle  de  Bologne  ou  l'escu  se  met  pour  12  Jules  ;  il  en  a 
volu  ung  mpmoire  que  je  luy  ay  baille  et  a  promis  d'y  donner  ordre, 
disant  bien  qu'il  le  falloit  faire  dextrement  pour  ne  pas  faire  crier  le 
peuple,  car  ceste  mutations  avec  tant  d'aultres  qu'on  leur  donne 
quant  aux  realz  et  testons  l'on  n'en  peult  icy  envoyer  sans  grosse 
perte  ;  quant  à  la  recepte  et  dépense  de  l'année  passée,  j'en  ay  fait 
icy  ung  estât  que  j'envoye  avec  ceste  despeche,  accompagnée  du  vray 
original  qui  est  le  commis  principal  de  l'extraordinaire,  lequel  a 
receu  icy  toutes  les  assignations,  puis  a  le  soing  de  les  envoyer  la  ou 
je  luy  ordonne,  et  luy  ay  veu  toujours  faire  fort  bon  debvoir  et  dili- 
gemment sacquitter  de  sa  charge  ;  il  rendra  fort  bonnes  raisons 
à  M'5  de  votre  Conseil  de  son  fait  et  de  ce  qu'on  vouldra  savoir  de 
luy.  estant  capable,  Sire,  de  plus  grand  charge  quand  il  vous  plaira 
le  y  employer. 

De  Venise  ce  9  janvier  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  14)  (copie). 


GABRE    AU    ROI 

108.  —  [Venise],  10  janvier  1556.  —  Sire,  je  vous  escripvit 
du  5ule  de  ce  mois  et  envoyé  mon  pacquet  par  courrier  exprès 
jusqu'à  Coyre,  et  hier,  Monseigneur  le  Cardinal  Caraffe  eust  sa 
seconde  responce  de  la  Seigneurie  qui  a  esté,  a  ce  qu'il  m'a  dict, 
assez  bonne  ;  c'est  que  ceste  Seigneurie  a  toujours  désiré  et  este 
en  ferme  opinion  de  maintenir  le  Pape  et  le  Siège  apostolicque 
en  sa  grandeur,  et  qu'ilz  avoient  espéré  jusques  icy  pouvoir  des- 
mesler  Sa  Sainteté  du  travail  ou  elle  estoit  par  la  voye  de  la  paix, 
de  laquelle  ilz  ne  vouloient  du   tout  désespérer,  veu   le    langaige 

(1)  Jules,  monnaie  ayant  cours  en  Italie  et  principalement  à  Rome,  valant  environ 
trente  centimes  actuels. 


134  NÉGOCIATIONS    DE  JANVIER    1556 

que  le  Roy  d'Espagne  en  tenoit  a  leurs  ambassadeurs,  choses  que 
ce  esclairciroit  bientost,  et  mesme  pour  quelques  offices  fort  gail- 
lards qu'ilz  y  avoient  naguères  faict,  mais  qu'ilz  vouloient  bien 
asseurer  ledit  Cardinal  que  leur  deffaillanl  la  paix  toutes  les  foiz  et 
quant  qu'ilz  le  pourroient  faire  sans  mestre  leur  estât  en  dangier, 
a  quoy  tous  princes  doibvent  avoir  esgard  ;  ilz  ne  fauldroient  de- 
der(l)  la  protection  et  delfence  de  Sa  Sainteté  et  de  Testât  de 
l'esglise,  comme  du  leur  propre,  et  comme  je  entendu  de  lieu  bien 
certain,  ilz  sont  resoluz  d'armer  avant  qu'entendre  ny  respondre  aux 
partis  qui  leur  sont  présentez,  qui  est  le  meilleur  effect  que  j'y 
voye,  car,  maiz  qu'is  soient  en  despence  qualche  cose  sara,  et  quant 
pour  leurs  parolles  généralles  de  la  protection  du  Pape,  en  cas  qu'il 
ne  puisse  succéder  accord,  cela  les  obligera  aulcunement,  mais  non 
pas  tant  qu'il  y  faille  faire  grand  fondement.  Je  ne  me  veult  venter 
de  rien  et  en  donneray  l'honneur  a  qui  le  voudra,  mais  je  scay  bien 
que  cest  ung  expédient  que  je  leur  proposay  en  ma  dernière  au- 
dience, leur  conseillant  de  ne  laisser  partir  ce  Cardinal  mal  content, 
et  pour  tout  doucement  les  embarquer,  car  de  l'ung  on  vient  plus 
aisément  a  l'aultre,  et  cependant  Votre  Majesté  aura  entendu  les 
marches  que  l'on  met  en  avant,  et  sellon  que  je  verray  qu'elle  les 
trouvera  bon  ou  maulvais,  je  pourniy  les  aider  à  la  conclusion  ou 
les  rompre  ou  gaster;  ce  malin,  j'ay  este  avec  ledit  sieur  Cardinal 
qui  est  tout  contant  et  luy  a  semble  bien  avoir  fait  bon  voyage,  il 
veult  encore  estre  icy  demain  et  dimanche  pour  aller  au  Conseil  - 
de  ces  Seigneurs  comme  gentilhomme  vénitien.  Lundi  matin  qui  sera 
11e  de  ce  mois,  il  ira  prendre  congé  d'eulx  <•!  après  montera  eu  bar- 
que pour  aller  coucher  a  Chioggia  et  de  la  a  Ferrare,  et  moy  en  sa 
compaignie.  et  si  me  fusl  for!  volontiers  passe  d'y  aller,  niais  il 
m'en  prie  et  Monsieur  le  Duc  m'en  escripl  ave,'  tirs  grande  instance. 
Je  scay  bien  que  le  sieur  Duc  me  veult  demander  argent  pour  payer 
sa  garnizon  et  pour  faire  gens  avec  lesquelz  il  puisse  mettre  eu 
campaigne,  se  trouvant  déjà  en  peine  pour  quelques   forsqueles 

(l)  Mot  vraisemblablement  mal  transcrit  par  le  copiste. 

2)  «. . .  Fut  reçu  «'il  cérémonie  au  Collegio,  le  déjà  célèbre  cardinal  de  Lorraine 
qui,  revenant  «le  son   importante  mission  a  Rome,  avait  à   s'entendre  avec  la 
Seigneurie  avanl  «le  rentrer  en  France»,  t Voir  A.  Baschet,  Les  Archives  de  Ven 
p.  î->9  . 

Le  collège  est  le  tribunal  où  réside  toute  la  majesté  du  prince  ;  le-  ambassa- 
deursyvonl  à  l'audience,  on  \  Ml  les  lettres  des  affaires  étrangères  on  y  présente 
toutes  les  requêtes.  Le  collège  esl  la  porte  paroùil  faut  que  toutes  les  affaires  du 
dehors  entrent  cl  c'esl  Im  qui  prépare  le-  matières  qui  doivent  être  agitées  par 
le  Sénat  Le  collège  esl  composé  du  Doge,  de  6  conseillers  du  Dogi 
grands,  5  sages  de  terre  ferme,  etc.  /.</  Ville  et  lu  République  de  Venise, 
partie  II,  p.  115.  Paris,  1080;. 


[JANVIER    1556J  DOMINIQUE   DU   GABRE  135 

Imperiaulx  font  faire  a  Cazal  (1)  pour  luy  faire  une  frontière  a  Bres- 
seil.  et  escript  qu'il  ne  peult  penser  que  le  Pape  ni  vous  sur  luy 
veuilles  manquer  de  protection  ;  je  luy  ay  fait  responce  qu'en  ces 
petites  choses  il  fault  que  luy  même  séde  le  premier  et  qu'il  monstre 
sa  puissance  et  ses  moyens  qu'il  a  de  vous  faire  service,  allant  ou 
mandant  tailler  a  Preslanza  quelque  peu  d'Italiens  a  la  faveur  des- 
quels on  fait  lesdits  fors  et  luy  se  impatroniser  en  lieu  et  le  fasce 
fortifier  sur  la  faveur  de  Monsieur  de  Guise,  et  avec  quelque  quatre 
mil  hommes  et  sa  cavallerie  qu'il  peut  mettre  de  son  cousté  en 
campaigne,  il  pourra  bien  estre  quil  me  dira  que  l'on  luy  baille  pour 
ce  faire  et  je  luy  montreray  pour  tout  payement  une  lettre  qu'il  vous 
a  pieu  m'escripre  du  20e  du  passé,  par  laquelle  Vostre  Majesté  dit 
qu'elle  pourvoira  bientost  a  l'argent  qu'il  fault  pour  sa  despence, 
et  lui  pourroit  dire  que  s'il  attend  a  chaque  allarme  vous  luy  tenez 
la  une  armée  preste,  qu'il  se  pourroit  par  adventure  bien  tromper; 
mais  que  s'il  faict  quelque  avance  et  despence  nécessaire  et  bien 
employée,  qu'il  peult  estre  asseuré  que  vous.  Sire,  luy  en  serez 
bon  rendeur  comme  vous  avez  été  d'autres  fois  et  de  grosses 
sommes  a  quoy  il  n'avoit  rien  perdu.  Je  verray  alors  comment  il  a 
délibéré  de  faire.  Ledit  Cardinal  est  bien  résolu  de  l'escorter  a  Rome 
a  bon  escient  et  de  mettre  la  main  a  ces  millions  qu'il  a  ;  je  verray 
quelle  resolution  ilz  en  prendront  emsemble  et  y  seroit  spectateur 
et  non  conseiller  jusques  a  ce  que  je  sache  vostre  volunté,  affin  qu'il 
ne  puisse  point  dire  qu'il  aye  l'ait  quelque  despence  a  ma  réquisi- 
tion, mais  je  vous  veulx  bien  dire,  Sire  qu'il  est  fort  nécessaire  que 
les  ungs  et  les  autres  scachent  ce  qu'ilz  ont  afaire  en  ceste  guerre, 
c'est  a  dire  mondit  sieur  de  Guise,  le  Duc  de  Ferrare  et  ceulx  de 
Rome  et  de  Toscana,  car  desja,  a  ce  qu'on  escript  de  Florence, 
Monsieur  de  Montluc  a  rompu  la  guerre  (2)  pour  avoir  revanche  de 
quelque  maltraitement  qu'on  avoit  faict  a  ung  François  dans  Sienne, 
et  ne  scay  s'il  sest  trop  hasté  ny  s'il  en  avoit  commandement.  Le 
Duc  d'Alve  vient  recommencer  la  guerre  du  coste  d'Abruccio  et  de 
la  Marque,  comme  vous  avez  veu,  Sire,  par  la  dernière  despeche  de 
Rome,  et  s'est  renforcé  avec  la  commodité  de  la  mer  de  quinze  cens 
Allemand/,,  cinq  cens  Fspaignolz  et  environ  mil  Italiens,  qui  sont 
ceulx  qui  estoient  embarquez  longtemps  y  a  :  vous  et  le  Pape  paye/ 
en  lestai  de  l'esglise  vingl  un  mil  hommes,  donl  on  feroil  une  bonne 
armée  en  campaigne  s  ilz  estoient  accompagnez  ung  peu  mieulx  de 
cavalerie.  Monsieur  le  Cardinal  est  lort  sollicité  de  Rome  pour  son 
retour  H  seroit  bien  nécessaire  qu'il  fusl  desja  la.  et  comme  je  luy 
ây  dit  souvent  se  resouldre,  que  vous  deux  n'avez  qm-  une  mesme 

(1)  Casale. 

(2)  Erreur  de  copiste  ;  il  iaut  lire  «  trêve  ». 


136  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

intention  ou  de  guerre  ou  de  paix,  car  s'il  y  a  division  de  voluntez 
ne  deffidence  les  ungs  des  autres  et  que  l'ung  veuille  la  paix  et 
l'autre  la  guerre,  on  n'y  verra  que  confusion,  perte  et  mocquerir 
d'accepter  uni-  paix  pour  abandonner  ce  Pape  et  le  laisser  en  proie 
a  ses  ennemis.  Je  me  tiens  asseure.  Sire,  que  vous  ne  le  feriez 
jamais  pour  tout  le  monde,  pour  la  grande  offence  qui  se  f'eroit  a 
vostre  gloire  et  réputation  de  la  guerre  ;  c'est  grand  desplaisir  de 
l'avoir,  mais  on  est  quelquefois  contrainct  de  la  faire  pour  avoir  une 
bonne  et  honnorable  paix:  il  est  vray,  Sire,  que  vous  pouvez  avoir 
faulte  d'argent,  et  vostre  ennemy  a  ce  qu'on  voil  enaencores  moins, 
que  vous  estes  riches,  Sire,  de  grandz  chefz  et  ministres  de  guerre, 
et  on  voit  l'ennemy  n'en  avoir  pas  ung  qui  soit  de  réputation  ;  vous 
avez  les  principaulx  potentatz  d'Italie  pour  amis,  vostre  ennemy 
n'en  a  aulcung;  vostre  armée  est  prompte  et  preste  a  exécuter,  et 
l'ennemy  mal  pourveu  et  ne  le  scauroit  estre  bien  de  deux  bons 
mois:  je  veulx  dire  par  cela,  Sire,  qu'il  me  semble  que  vous  avez 
grand  advantage  el  debvez  espérer  tout  lion  succès  de  ceste  guerre. 
L'Ambassadeur  du  Roy  d'Espagne  1 1)  fusl  avant  hier  en  Seigneurie 
et  demanda  passaige  pour  vingt  mil  Allementzel  trois  mil  chevanlx, 
que  le  Roy.  son  maistre,  faisoit  passer  en  Italie  pour  deffendre  la 
liberté  dicelle.  laquelle  le  Pape  cl  vous  voulez  usurper  et  la  vous 
despartir  emsemble,  a  quoy  ces  seigneurs  debvoient  bien  penser 
[tour  la  conservation  de  leur  estai .  car,  quant  vous  ailliez  occupez  ce 
que  le  Roy  d'Espagne  y  tient^  vous  vous  adresseriez  après  a  eulx. 
C'est  uni1  l'oit  honneste  harangue  ci  qui  leur  pari  de  bon  cœur, pour 
le  moins  c'esi  bien  renversé  noz  chansons,  mais  je  n'auray  pas 
grand  peine  a  ousler  celle  impression  a  ces  Seigneurs  el  leur  en 
parleray  plustost  en  m'en  riant  el  en  mocqueries  que  autrement. 
De  Venize  ce  10e  de  Janvier  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  16)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

109.   —   [Venise],  9/10  janvier  1556.   —  Monseigneur,  il  vous 
plaira  veoir  par  ce  que  j'escript  au  Roy  la  tin  de  la  négociation  de 


(1)  François  de  Var.ua-.  jurisconsulte  espagnol,  membre  «lu  Conseil  souverain 
de  Castide,  envoyé  a  Bologne  en  1548  peur  protester  contre  la  translation  du 
Concile  de  Trente  «lans  cette  ville;  délégué  au  Concile  de  Trente  en  1550. 

Après  la  dissolution  «lu  Concile,  il  lui  envoyé  comme  ambassadeurà  Venise,  ou 
il  restaprèsde  8  années;  il  alla  ensuite  à  Rome  pour}  remplacer  l'ambassadeur. 
Après  sa  mission  en  Italie,  il  fui  nommé  conseiller  d'État,  puis  il  se  relira  ilans 
le  monastère  de  Ceslos,  près  de  Tolède. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  137 

Mr  le  Cardinal  Caraffa  icy.  Il  m'a  dicl  avoir  quelques  adviz  d'amis  se- 
crelz  en  ce  colleige  que  ces  seigneurs  sont  resoluz  d'armer  avant  toute 
œuvre  et  puis  respondre  aux  parties  qu'on  leur  propoze,  lesquelz 
ledit  sieur  Cardinal  leur  veult  laisser  par  escript  le  jour  qu'il  prendra 
congé  de  la  Seigneurie.  Je  verray  les  effectz  d*une  part  et  d'autre  et 
puis  vous  en  donneray  advis,  car  en  matière  de  parolles  de  gens  de 
ce  pays  je  me  veulx  resouldre  de  n'en  croire  pins  sinon  ce  que  je  ver- 
ray. Ledit  sr  Cardinal  aura  demoure  icy  vingt  deux  jours,  et  quelque 
sollicitation  qu'on  luy  ay  faict  de  Rome  pour  son  retour,  ni  quelque 
alarme  qu'on  escripve  que  le  Duc  dAlve  va  recommencer  la  guerre 
du  cousté  de  lAbruccio  (I),  ne  pour  le  renfort  qui  luy  est  venu  par 
mer  d'Allemantz  et  d  Espaignolz,  je  ne  l'enay  veu  eschaufferni  parler 
de  hâter  son  retour,  non  plus  que  s'il  n'y  avoit  rien  afaire,  de  sorte 
que  je  suis  entré  en  opinion  qu'il  feisl  son  séjour  ainsy  long  a 
escient,  pour  quelque  sien  desseing  ou  pour  attendre  nouvelles  du 
Fantuccio  ou  du  progrez  de  Monsieur  de  Guise,  mais  je  luy  pro- 
testay,  dez  le  premier  jour,  que  je  ne  mettray  point  d'espyes  pour 
savoir  ses  intentions  ne  sa  négociation  et  que  je  m'en  rapporterois 
toujours  a  ce  qu'il  m'en  diroit.  Je  ne  veulx  point  soupçonner  le  mal 
ny  aussy  asseurer  le  bien  sans  en  avoir  quelque  fondement,  et  n'ay 
sceu  pénétrer  plus  avant  en  son  faict  que  ce  qu'il  vous  plaira  veoir 
en  la  lettre  du  Roy  ;  on  luy  envoya  l'aultre  soir  ung  courrier  de 
Rome  en  grand  dilligence,  il  me  dict  après  que  e'estoil  pour  lui 
envoyer  une  lettre  du  Duc  d'Alve,  laquelle  le  Duc  de  Paliano  (2) 
n'avoit  voulu  ouvrir,  et  ne  me  communiqua  point  ceste  lettre  la 
pour  ce  qu'il  me  dit  l'avoir  renvoyée  audit  Duc  son  frère,  mais  il  me 
monstra  bien  la  responce  qu'il  luy  faisoit,  en  laquelle  il  se  cour- 
roussoit  presques  a  luy  de  ce  qu'il  n'avoit  ouvert  ladite  lettre,  et 
qu'il  ne  l'avoit  communiquée  aux  ministres  du  Roy,  et  quil  la  luy 
renvoyoit  pour  respondre  audit  Duc  d'Alve  ce  que  luy  et  lesdils  mi- 
nistres adviseroient,  car,  quant  a  luy,  il  ne  luy  vouloil  respondre  ne 
bien  ne  mal.  Je  verray  ce  qu'on  dira  et  fera  a  Ferrare  et  vous  en 
donneray  advis:  quant  a  lestât,  Monseigneur,  que  vous  demandez  des 
despenses  de  l'année  passée  el  sur  le  faicl  des  plus  valeurs,  j'en 
faict  une  lettre  particulière  au  Roy,  et  ce  porteur  Champdoiseau 
s'en  va  exprès  avec  lestai  que  jay  veu  oultre,  lequel  il  rendra  bonne 
raison  de  toutes  choses,  ayant  este  luy  le  principal  et  premier  qui 
reçoit  tous  les  deniers.  Je  l'ay  trouvé,    Monseigneur,  fort    honeste 

(1)  Les  Abruzzes 

(2)  Jean-Jacques  Carafa  le  premier  des  Carafa),  héritier  du  titre  de  comte  de 
Montorio  à  la  mort  de  sou  père,  Fui  créé  duc  de  Paliano  quand  il  se  Fui  emparé 
du  château  de  ce  nom,  principal  fief  de  la  famille  Colonna,  énergiquemenl  dé 
fendu  contre  ses  entreprises  par  sou  possesseur,  Mare-Antonio  Colonna.  Voir  G. 
Duruy,  Le  cardinal  Carlo  Carafa.  p.  15,». 

13 


138  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

comptable,  et  quant  il  eut  bien  eu  maulvaise  volonté,  il  n'a  pas  eu 
moyen  de  mettre  la  main  a  la  paste  comme  ont  eu  les  autres  clercz 
qui  la  distribuent  après,  et  sy  l'on  luy  commettoit  quelque  bonne 
charge,  je  vous  asseure,  Monseigneur,  quil  s'en  acquittera  fort 
loyaument  et  bien.  Vous  avez  la  le  receveur  Martin,  de  Troyes,  son 
cousin,  empesché  pour  desmesler  le  fait  de  ses  comptes,  je  vuus 
asseure  qu'il  estoit  bien  séant  a  Lyon  pour  les  affaires  du  Roy  et 
nous  autres  de  deçà  nous  apercevons  bien  de  son  absence  ;  il  vous 
plaira,  Monseigneur,  le  favoriser  et  aider  comme  vous  avez  accous- 
tumé  aux  autres  bons  serviteurs  du  Roy. 
De  Venize  ce  9e  de  janvier  1556. 

Monseigneur,  ce  matin,  après  ceste  lettre  escripte,  le  Cardinal 
Caraffa  me  prie  de  luy  aller  parler  et  m'a  dict  qu'il  estoit  arrive  ung 
courrier  du  Roy  d'Espaigne,  a  luy  adressant,  comme  pour  après  le 
faire  passer  au  Duc  d  Alve  ou  il  n'avoil  trouvé  que  une  lettre  a  luy 
adressante  de  Dom  Francesco  Pacheco  (1),  laquelle  il  m'a  monstre 
en  original  et  la  ma  baillée  pour  envoyer  au  Roy  ;  quant  a  ce  qui 
sadressoit  au  Duc  d'Alve,  il  lavoit  ouvert  gentiment  et  puis  refermé 
avec  lesmesmes  cachetz  et  laisse  passer  le  courrier,  ayant  première- 
ment retenu  copie  d'une  lettre  du  Roy  d'Espaigne  et  dudit  Pacheco, 
lesquelles  il  m'a  montrées  et  baillées  pour  en  prendre  une  coppie, 
et  seront  avec  la  présente,  me  disant  que  par  la  je  pourrois  veoir 
qu'il  estoit  en  sa  liberté  de  prolonger  tant  qu'il  vouldroit  la  trefve, 
mais  quil  ny  vouloit  entendre  si  moy  ou  autres  ministres  du  Rov  ne 
le  luy  commandoient.  Usant  de  ce  pro|  re  ternie  la,  je  luy  ay  loué 
ceste  façon  de  procedder  qui  m'a  semblé  ung  peu  plus  naifve  que 
je  ne  l'avois  encores  cogneue  en  luy,  et  luy  ay  touché  la  boute  du 
Roy,  sa  grandeur  et  puissance,  quil  avoil  congneue  telle  que  Sa  Ma- 
jesté pouvoit  aujourdhuy  contracter  contre  tout  le  reste  du  inonde, 
et  qu'ayant  cest  appuy,  ledit  Cardinal  pouvoit  asseurer  et  establir 
grandeur  pour  luy  et  pour  sa  maison,  et  que  le  sang  de  ceste  co- 
ronne  de  France  estoit  si  doulx,  qu'il  ne  se  nourrissoit  que  de  pureté 
et  de  sincérité  avec  laquelle  on  en  pouvoit  espérer  tout  ce  qu'on 
vouloit  et  quil  y  vouloit  l'aire  quelque  fondement  quil  ne  sesloignat 
pas  de  ce  chemin  la,  car.  de/  que  nous  nous  apercevrions  du 
contraire  et  qu'on  voulut  surprendre  noslre  Roy  par  finesse,  par 
braveure,  nous  devenions,  jusques  aux  chatz  en  fiance,  ennemis 
de  telles  gens  tant  nous  estions  affectionnez  a  nostre  Roj  :  que  pour 

fl)  François  Pacheco  de  Cerallo,  né  à  Caste)  Rodrigo,  fut  employé  par  Charles- 
Quint  et  Philippe  il  a  diverses  négociations,  donl  la  plus  importante,  ainsi  qu'on 
le  verra  au  cours  de  la  présente  correspondance,  consista  à  conclure  la  paix 
entre  le  pape  Paul  IV  et  Philippe  II.  PieV  le  lit  cardinal  en  1561;  il  lui  nommé 
archevêque  de  Burgos  en  1567,  et  mourut  le  1  *  »  juillet  1579. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  139 

ceste  cause,  je  le  priois  de  me  dire  franchement  s'il  avoit  en  termes 
quelques  praticques  d'accord,  affin  que  ces  trefves  et  ces  allées  et 
venues  ne  missent  le  Roy  en  peine  et  en  deiïîdence,  et  que,  par  la, 
eulx  et  nous,  feissions  mal  noz  affaires;  que  je  scavois  bien  que  rien 
ne  mettoit  le  Roy  en  ceste  guerre  que  l'honneur  et  vouloir  secourir 
ses  amis  ;  que  en  cecy  il  alloit  de  1  interest  du  Pape  plus  que  du 
vostre,  et  pour  ceste  cause  je  ne  luy  voulois  donner  aucun  advis  de 
paix,  de  guerre,  ny  de  trefve,  mais  que  je  le  priois  de  me  dire  le 
sien  et  que  nous  parlissions  clairement  et  sincèrement  sans  penser 
de  surprendre  l'ung  l'aultre.  Je  vous  prometz,  ma  foy,  Monsei- 
gneur, qu'il  m'a  tant  remercie  de  ce  langaige  et  tant  asseure  de  son 
intention,  que,  a  l'ouyr  parler,  sy  Dieu  parloit  visiblement  aux  hom- 
mes et  luy  commandoit  une  chose  plus  que  une  autre  en  cette  pra- 
ticque,  il  ne  fera  jamais  ne  paix  ne  accord,  n'y  n'en  escoutera  parolle 
sy  le  Roy  ne  le  lui  commande  et  que  je  le  tienne  pour  le  plus  grand 
tristo  (1)  qui  fut  jamais  au  monde  s'il  fait  chose  en  vostre  endroit 
qui  soit  contre  son  debvoir  et  contre  son  honneur.  Je  luy  ay  dit,  pour 
mon  advis,  que  je  ne  scavois  que  dire  de  ceste  tresfve,  n'ayant  nou- 
velles de  M.  de  Guise,  mais  que,  sans  la  conclure,  je  ne  trouverois 
pas  mauvais  qu'on  consumast  douze  ou  quinze  jours  a  la  prati- 
quer et  la  remettre  a  larrivee  dudit  sieur  Cardinal  a  Rome,  affin  que, 
de  ce  coste  la,  on  ne  feist  plus  grand  perte  comme  il  me  semble  que 
l'on  en  est  en  possession,  et,  cependant,  il  est  malaisé  qu'il  ne 
vienne  quelques  nouvelles  de  mondit  Sr  de  Guise  et  de  vous.  Si  le 
Roy  d'Espaigne  avoit  mis  quelque  praticque  daccord  en  avant 
comme  il  semble  qu'il  le  désire,  et  il  nest  pas  possible  qu'il  fasce 
rien  de  bon  avec  ceulx  de  deçà  si  le  Roy  n'est  le  premier  content, 
ainsyjevoy  que  ledit  sieur  Cardinal  se  resoult  d'escripre  au  Duc 
de  Paliano  de  tenir  ce  chemin  la  de  longueur,  et  de  dilayer  en  la 
conclusion  de  ladite  trefve  et,  enfin  den  user  comme  Sa  Sainteté 
et  luy  en  adviseront  avec  les  ministres  du  Roy.  J'aurois  l'œil,  jusques 
à  ce  qu'il  parte  de  Ferrare,  a  tout  ce  qui  se  présentera  et  vous  en 
donneray  advis. 
C'est  de  Venize  ce  10e  de  janvier  1550. 

Monseigneur,  quand  il  a  fallu  monter  a  cheval  avec  ce  parquet, 
Champdoiseau  s'est  trouvé  malade  d'un-  catherre  et  n'y  a  ordre  qu'il 
puisse  partir  encores  <le  quelques  jours;  pourquoy  j'ay  despeche 
ung  corrier  exprès  qui  fera  encores  meilleure  dilligence  jusques  a 
Lyon  et  de  la  a  la  court,  si  le  gênerai  d'Elbenne  ne  vous  en  veult 
despecher  ung  aultre  plus  fraiz  comme  je  luy  escript.  Je  vous 
envoyé,  Monseigneur,  cependant,  Testai  delà  recepteel  despence  de 

(1)  Coquin. 


140  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    tootf] 

l'année  passée  et  bientost  led  Cliampdoiseau  partira  pour  vous  aller 
rendre  raison  de  chacun  article. 

Monseigneur,  je  ne  puis  vous  envoyer  pour  cesre  heure  ledit  estât, 
parce  que  je  l'ay  trouve  ung  peu  mal  correct  et  je  1p  veult  mieux 
revoir  pour  le  vous  envoyer  par  la  première  occasion. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  19)  (copie). 

GABRE   AU   DUC   DE    GUISE 

110.  —  [Venise  .  10  janvier  1556.  —  Monseigneur,  je  vous  ay 
escript  il  ny  a  que  trois  ou  quatre  jours,  et  n'ay  autre  moien  de 
vous  faire  tenir  mes  lettres  que  par  la  voye  de  Lye  I),  ou  j'ènvoye 
la  présente  par  un  courrier  exprès  que  je  depesche  au  Roy  pour 
l'advertir  du  partemenl  de  Monsieur  le  Cardinal  Carrafa  pour  aller  a 
Ferrare,  et  aussi  de  la  dernière  résolution  de  ces  Seigneurs  qui  esl 
telle  que.  en  cas  que  les  choses  ne  se  puissent  accommoder  entre  le 
Pape  et  le  Roy  d'Espaigne,  par  une  voye  de  paix  <>u  de  quelque 
autre  accord  dont  ils  seroienl  éclaircis  dans  bien  peu  de  jours,  ils 
estoient  résoleus  d'ayder  la  protection  et  défence  de  sa  Sainteté  et 
du  Siège  Apostolique  comme  de  leur  estai  propre.  Cependant,  à  ce 
que  nous  pouvons  entendit",  ils  ont  délibéré  d'armer  par  mer  et  par 
terre,  si  d'aventure  ils  ne  voyent  estroittement  attaquer  quelque 
praticque  de  paix  dont  ledit  Roy  d'Espaigne  monstre  avoir  grand 
volonté:  et  la  dessus,  Monseigneur,  je  ue  veulx  faillir  de  vous  dire 
que  ledit  sieur  Cardinal  Caraffa  a  eu  ce  matin  un  courrier  dudit  Roj 
d'Espaigne  pensant  quil  le  deust  trouver  a  Home  avec  une  depesche 
pour  le  Duc  d'Alve,  par  laquelle.  Ledit  Roy  lui  escrit  et  commande 
de  ne  recommancer  ta  guerre  s'il  est  possible,  de  façon  du  monde, 
contre  sa  Seigneurie,  mais  bien  quil  face  tout  ce  qu'il  pourra  pour 
prolonger  la  trefve  encore  quelques  jours.  Ledicl  sieur  Cardinal  m'a 
fort  ouvertement  communicque  tout  cela  el  asseure  sur  son  honneur 
qu'il  n'entendra  jamais  a  aucune  trefve  ne  autre  forme  d'accord 
quant  tout  debvroit  bien  périr,  s'il  n'en  avoil  commandement  exprès 
du  Roy.  Il  est  vray  que  d'autant  que  nous  n'avons  point  icy  de  vos 
nouvelles,  il  luy  a  semblé  quil  ne  seroil  que  lion  d'entretenir  ledit 
Duc  d'Alve  en  longueur  et  en  déliais,  sans  touttefois  rien  conclure. 
et  ainsi  a-t-il  escrist  au  Duc  de  Palliano,  son  frère,  de  le  faire.  De 
sorte,  Monseigneur,  que  pour  chose  que  vous  soj  es  dire  au  contraire, 
il  me  semble  que  vous  ne  debvés  laisser  de  taire  passer  vostre 
armée  el  de  suivre  vostre  entreprise,  si  le  Roj  ne  vous  mandoit  de 
le  faire  autrement. 

De  Venise  ce  dixiesme  de  janvier  1556. 

(1)  Luino,  ville  d'Italie,  à  20  kit.  de  Côme. 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  141 

Monseigneur,  le  Comte  Caraffa  (1)  partira  lundy  unsiesme  de  ce 
mois  pour  aller  coucher  a  Chioggia;  il  arrivera  a  Ferrare  le  mercredi 
et  y  séjournera  le  lendemain;  le  vendredy  il  pense  aller  a  Bolloigne 
et  s'y  arresîer  peu.  S'il  n'a  nouvelles  de  vous.  Monseigneur,  et  si  en 
nostre  Court  on  désire  la  paix,  il  n'y  a  meilleure  recepte  que  vostre 
dilligence;  si  aussy  ils  ne  la  peuvent  avoir  et  qu'ils  soient  contraints 
de  continuer  la  guerre,  c'est  la  volonté  de  Dieu,  et  j'espère  que  ce 
sera  la  grandeur  du  Roy;  si  vous  M.  uses  de  la  dilligence  et  quoiquil 
vous  plaise  l'aire,  de  marcher  ou  retarder, il  vous  plaira  qu'on  scaiche 
de  vos  nouvelles  par  une  voye  ou  par  aultre,  car  jamais  les  choses 
n'iront  hien  que  vous  n'ayés  communiqué  vostre  intention  a  Mon- 
seigneur le  Duc  de  Ferrare,  et  a  ceux  de  Rome,  et  résoleu  ce  que 
les  uns  et  les  autres  doibvent  l'aire. 

(Ms.  de  Grenoble,  fol.  78  r). 


GABRE   AU    CONNETABLE 

111. —  [Venise],  13  janvier  1556. —  Monseigneur,  ce  porteur 
vient  de  Levant,  depesché  de  Monsieur  de  Cotignac,  duquel  vous 
aurez  toutes  nouvelles  ;  il  m'escript  en  particulier  que  toutes 
choses  se  portent  fort  bien  de  ce  couste  la  et  que  le  grand  sei- 
gneur demouroit  satisfaict  de  ses  ministres  et  des  nostres  nonobs- 
tant le  peu  de  services  de  son  armée  ;  a  quoy  le  Bassa  (2)  qui 
estoit  sur  ladite  armée  avoit  faict  fort  bon  office  ;  cela  me  fait 
espérer  que  Mr  de  Villemontez  aura  bonne  responce  de  ce  qu'il 
est  aile  demander,  mais  Dieu  nous  face  tant  de  grâce  que  vous 
n'en  ayez  aulcun  besoing,  a  quoy  j'ay  quelque  espérance  par  ung 
adviz  de  la  Cour  de  l'Empereur  contenant  qu'on  manioit  fort  secret- 
tement  une  trefve  de  deux  ans  ;  laquelle  lEmperevr  avoit  accordée 
et  n'attendoit  on  que  la  responce  du  Roy  et  si  l'intention  est  aussi 
bonne  du  couste  de  lEmpereur,  comme  je  suis  asseure  qu'elle  est 
du  vostre,  il  vous  sera  fort  aise  d'y  comprendre  le  Pape  et  le  mestre 
hors  de  ceste  tempeste,  ou  il  veult  mettre  luy  et  aultres,  auquel  cas 
il  tiendroit  toute  forme  d'accord  pour  la  plus  heureuse  et  sainte 
chose  que  nous  sceussions  demander  à  Dieu  en  ce  temps,  et  pour- 
riez vous  desmeler  de  toutes  ces  despenses  d'Italie  qui  sont  aussy 
mal  employées  ainsy  qu'elles  sont  aujourd'huy  que  sy  l'on  gettoit 
largent  dans  la  mer,  mais  il  est  fort  a  craindre  que  les  ennemis,  a 
leur  manière  accoustumée,  ayent  mauvaise  intention  et  veuillent 

(1)  Antonio  Carafa,  duc  de  Montebello  de  second  de  la  famille),  frère  du  cardinal 
et  cadet  du  duc  de  Paliano. 

(2)  Le  Pacha,  ou  Vizir  de  l'Empereur  des  Ottomans. 


142  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

tenir  en  longueur  cetta  pratique  pour  vous  faire  perdre  voz  envies 
et  retarder  nos  provisions,  cependant  qu'ils  préparent  les  leurs  pour 
faire  ung  maulvais  tour  au  Pape  avant  que  nous  ayons  le  moyen  de 
le  secourir,  et  ce  qui  m'en  donne  quelque  soupecon  est  la  dilligence 
qu'ilz  font  dassembler  en  Toscana  leurs  principales  forces  :  et  dail- 
leurs.  Monseigneur,  j'ay  recouvert  ioy,  au  moyen  de  quelque  servi- 
teur secret  qui  me  baille  la  copie  des  lettres  que  l'ambassadeur  de 
l'Empereur  reçoit  de  Flandres  et  d'ailleurs,  et  dernièrement  il  m'a 
baillé  ung  extrait  de  nouvelles  avec  la  copie  d'ung  jurement  qu'ilz 
dizent  que  le  Roy  a  fait  au  grand  seigneur  qui  toucbe  tant  lbon- 
neur  du  Roy,  et  est  sy  meschant  et  infâme  qu'il  m'a  semblé  que  je 
pourrois  faire  erreur  si  je  le  vous  envoya vs.  car  s'il  est  vray  que 
cela  vienne  de  lEmpereur  ne  de  son  conseil,  c'est  la  plus  mauvaise 
intention  quil  est  possible  devoir,  encores  qu'elle  soit  bien  sote  et 
congnoit-on  aisément  que  cela  est  lait  a  quelque  taverne  de  Flan- 
dres et  a  plaisir  pour  calumpnier  le  Roy,  mais  ils  y  ont  mis  trop  de 
folies  pour  le  rendre  creable  au  monde,  et  s'il  sont  sy  meschantz 
d'inventer  telles  choses,  jugez  par  la  leur  mauvaise  volonté  et  ne 
faites  doute  qu'ilz  ne  lavent  lait  pour  publier  cest  bonorable  jure- 
ment en  leurs  diètes  de  Germanie,  ei  cenciter  les  princes  et  les 
peuples  de  ce  pays  la  contre  le  Roy,  et  seroil  bien  lait  de  lentendre 
pour  y  respondre  par  invectives  ou  aullres  remèdes  convenables. 
Si  je  voye  que  cela  se  publie  icy  en  celle  seigneurie,  il  me  semble 
que  je  n'auray  pas  grand  peine  a  leur  faire  cognoistre  que  cest  une 
faulceté  et  que  la  chose  même  de  soi!  le  monstre. 

Au  reste,  Monseigneur,  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine 
debvoit  partir  jeudi  dernier  de  Rome,  mais  la  despeche  du  boiteux 
l'aura  encores  trouvé  la.  laquelle  y  arriva  Le  mercredy  et  me  double 
bien  (pie  la  dite  despeche  aura  plustost  retardé  que  hasté  son  par- 
lement. A  Ferrare  ne  scavent  point  encore  qu'on  ayl  trouvé  maul- 
vais leur  traictez,  et  je  remetz  toujours  touches  choses  a  la  venue 
de  mon  dit  sieur  le  Cardinal,  mais  si  Dieu  vouloit  «pie  le  Roy  s'en 
peust  passer,  je  louerois  fort  de  voir  tout  cela  rompu  et  Rentrer 
point  en  ceste  despense.  J'entends  que  le  Duc  de  Florence  s'est 
résolu  de  ne  prendre  aulcunement  la  protection  du  Comte  de  Bagny 
contre  le  Pape,  et  que  naguières  ses  ambassadeurs  sont  arrive/  a 
Rome  pour  prester  l'obediance,  je  ne  vous  escripray  plus.  Monsei* 
gneur,  de  la  nécessité  d'argent,  qui  est  par  deçà,  qui  esl  grande  si 
les  affaires  se  disposent  a  la  guerre. 

De  Venize  ce  13e  de  janvier  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr. 30644,  fol.  28;  (copie). 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU   GABRE  143 


GABRE   AU    DUC   DE   GUISE 

112. —  [Venise],  15  janvier  1556. —  Monseigneur,  je  viens  de 
recevoir  tout  maintenant  une  despeche  deMessieurs  les  ministres  du 
Hoy  qui  sont  a  Rome  et  vous  envoyé  un  extraict  de  la  lettre  qu'ilz 
m'ont  escrite,  par  ou  vous  verrez  les  motifs  et  préparatifs  du  Duc 
d'Albe  pour  recommencer  la  guerre  et  se  mettre  en  campagne, 
expirée  que  sera  la  Irefve.  Monsieur  le  Cardinal  Caralfe  est  encore 
icy  attendant  la  résolution  de  ces  Seigneurs  sur  sa  négotiation,  de 
laquelle  je  ne  puis,  pour  ceste  heure,  rien  dire  de  certain,  n'ayant 
jusques  icy  pu  entendre  la  volonté  de  ces  Seigneurs  ;  mais,  sy  nous 
ne  les  pouvons  avoir  de  nostre  costé,  pour  le  moins  nous  pouvons 
nous  asseurer  que  nous  ne  les  aurons  pas  contraires  et  on  a  icy 
opinion  que  sy  une  fois  il/,  entendent  que  vous  soyez  passé  avec 
vostre  armée,  ilz  seront  incontinent  tous  nostres.  Tout  ce  monde 
est  icy  en  grande  expectation  de  vostre  progrez  et  d'entendre  de 
voz  bonnes  nouvelles,  desquelles  il  seroit  bien  nécessaire  que  vous 
nous  fissiez  quelquefois  part  pour  le  service  du  Roy. 

De  Venize  ce  15  janvier  1556. 

(Bibl.  liât.,  Fr.  23236,  fol.  425).  —  Lettre  publiée 
aussi  dans  les  Mémoires  du  duc  de  Guise,  t.  vi, 
p.  264. 


GABRE  AU   CONNETABLE 

113  —  [Venise  ,  11  janvier  1 556.  —  Monseigneur.  Hier  arriva  icy 
Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine  qui  fut  reçu  si  honorablement 
et  en  si  grand  apparat  de  ceste  seigneurie  que  je  feiz  souvent  le 
souhait  semblable  a  celuy  que  Monsieur  du  Prast  (1)  faist  a  l'Empe- 
reur quand  il  luy  dit  quil  le  peut  un  jour  voir  Vice  Roy  de  Naples; 
aussy  je  soubaitois  que  le  Roy  eust  esté,  pour  ce  jour  d'hier,  Car- 
dinal de  Lorraine  ou  Ambassadeur  de  France  pour  voir  l'honneur 
qu'on  faict  icy  a  ses  ministres,  les  grandesses  de  ceste  cité,  et  le 
grand  canal  orné  de  tapisseries  vives  et  mortes,  aussy  superbe  et 
belle  chose  que  je  veiz  de  ma  vie.  Ce  matin  mondit  sieur  le  Cardinal 
m'a  fait  eesl  honneur  «le  me  communiquer  les  derniers  adieux  et 
résolutions  de  Rome  et  le  langage  qu'il  veult  tenir  a  ces  seigneurs 
demain,  qu'il  les  ira  voir,  il  me  semble  que  tout  est  si  bien  pour  le 
Roy  que  vous  en  aurez   grand   contentement  et  trouvez  qu'il  n'y  a 

(1)  Antoine  Duprat,  archevêque  de  Sens,  chancelier  de  France  sous  François  I", 
mort  le  8  juillet  1535  au  château  de  Nantouillet  (Seine-et-Marne). 


144  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

rien  de  gasté,  mais  que  vous  schaichiés  comme  tout  s'est  passe,  et 
si  Dieu  vous  donne  ou  paix  ou  trefve,  le  Roy  est  tant  sur  l'advan- 
taige  que  tout  bon  serviteur  sien  et  tout  homme  de  bien  le  luy  doit 
conseiller  et  trouver  bonne,  et  je  prie  Dieu  qu'il  nous  face  tons 
dignes  d'un  si  grand  bien,  mais  sy  lEmpereur  cuyde  faire  enfin  et 
vous  amuser,  il  ne  lus!  jamais  sy  trompé  et  diray  ce  mot.  que  je 
croy  par  deçà  les  choses  disposées  de  telles  façon  que  vous  aurez 
non  seullement  bon  moyen  de  résister  a  sa  maulvaise  volonté,  mais 
que  jamais  vous  n'eustes  une  plus  belle  commodité  et  occasion  de 
lechastier;  que  maintenant  mondit  Sr  le  Cardinal  s'attend  d'avoir 
ung  corrier  et  de  voz  nouvelles  avant  que  partir  de  ce  lieu  pour  aller 
après  a  Ferrare  prendre  sa  dernière  résolution  selon  l'etal  et  la  mu- 
tation des  affaires  et  selon  l'intention  du  Roy.  Cependant,  il  me 
semble.  Monseigneur,  que  vous  pouvez  avoir  vostre  esprit  en  grand 
repoz  et  vous  asseurer  que  de  deçà  toutes  cboses  sont  très  bien. 
De  Venize  ce  17e  janvier  1556. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20644,  fol.  54)  (copie  . 


GABRE    AU    ROI 

114. —  [Ferrare  .  17  janvier  1556. —  Sire,  je  depescbay  courrier 
exprès  jusque  Lyon  des  le  dixiesme  du  mois  pour  vous  faire  enten- 
dre le  parlement  de  Monsieur  le  Cardinal  Caraffe  de  Venise  et  la  tin 
de  sa  négociation;  a  quoyje  ne  puis  rien  adjouster,  sinon  que  ledit 
Cardinal,  en  se  licentianl  de  la  seugneurie,  leur  répliqua  Le  plus 
expressément  quil  peull  les  partis  et  offres  de  Ravenne  el  enffln  que 
de  sa  pari  il  n'avoil  aucune  espérance  de  la  paix,  leur  offranl  de 
leur  en  bailler  la  possession  maintenant  en  se  retournanl  s'ils  vou- 
laient se  déclarer  ennemis  du  Roy  d'Espaigne  el  ayder  a  mettre 
l'Italye  en  liberté;  ils  sonl  demeurés  en  leur  froideur  accoustumée 
et  pour  le  moins  son!  ils  obligés  par  leur  responce  de  demeurer  en 
leur  nulralile  el  par  adventure,  Sire,  que  loul  esl  pour  le  mieulx, 
car  je  commence  a  me  douter  «pie  l'aide  que  vous  lirez  de  toutes  ces 
ligues  d'Italie  n'es!  pas  si  grande  que  la  despence  qu'elles  vous 
apporlenl  et,  au  lieu  du  secours  qu'on  espère  d'eulx,  il  faudroil 
laisser  vos  propres  entreprises  pour  ayder  les  leurs,  el  entrer  en 
grosses  despencesj)our  les  garnisons  qu'il  fault  a  garder  leurs  estats, 
et  suis  si  mal  édifie  d'eux,  je  dis  de  ers  grands  potentats,  que  la 
chose  qu'ils  desirenl  le  moins  esl  vostre  grandeur  en  Italye  el  de 
vous  avoir  pour  voisin,  el  pour  la  conclure  en  peu  de  parolles,  je 
pense  que,  s'il  esl  nécessaire  quelquefois  de  s'en  servir,  c'esl  aussi 
fort  bien  de  s'en  passer.  Sue.  Monsieur  le  Cardinal  Caraffe  arriva 
icy  jeudy  quatorziesme  bien  lard  el  le  lendemain  on  s'assembla  en 


[JANVIER    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  145 

sa  chambre  pour  parler  dos  affaires  ou  estoient  Monseigneur  le  Duc 
cl  le  Cardinal  de  Ferrare,  Monsieur  de  Fourquevaulx  el  moy  et  fut 
délibéré  de  ce  que  l'on  auroil  a   faire  pour  l'avenir,  de  Monsieur  de 

Guise  el  îles  provisions  qu'il  avoil  mande  par  Monsieur  de  Fourque- 
vaulx qu'on  feisl  desquelles  je  me  remettray,  Sire,  sur  ce  que  mon- 
dil  sieur  le  Duc  et  Monsieur  <le  Fourquevaulx  vous  en  escripront; 
mais  je  y  voy,  Sire,  deux  choses  principalles,  l'une  de  l'aire  levée  de 
quatre  mille  hommes  italiens,  laquelle  se  l'ail  en  toutte  dilligence 
et  se  fera  la  masse  a  Castel  franco  l  sur  les  confins  de  Boullongne  (2) 
et  Modena,  et  fait  on  compte  que  la  plus  part  sera  emsemble 
dans  le  vingtiesme  de  ce  mois,  pour  après  marcher  sur  les  confins 
du  Parmesan  el  favorizer  le  passage  de  mondit  sieur  de  (luise  ainsi 
que  l'on  verra  les  occasions  si1  présenter  ou  bien  pour  aller  expli- 
quer la  Rocque  de  S'  Martin  qui  est  dans  l'état  de  Monsieur  le  Duc 
et  ou  le  sieur  de  ce  lieu  a  mis  quelques  gens  de  guerre  au  nom  du 
Roy  d'Espaigne.  Mondict  sieur  le  Duc  m'a  demandé  argent  pour  le 
paiement  de  son  particulier  et  de  celte  masse  qui  se  l'aict  mainte- 
nant pour  vostre  service;  je  luy  ay  dit  que  je  n'avois  pas  un  liard, 
mais  que  j'attendois  dheure  a  autre  nouvelle  du  second  depost  qui 
se  debvoit  faire  a  Venise  sur  lequel  j'avois  déjà  emprunte  trente 
mil  escus  pour  envoyer  a  Rome  ou  Ton  commençoit  fort  a  cryer 
par  faulte  d'argent;  cela  ne  luy  a  guère  s  pieu;  toutesfois  il  s'est  offert, 
pour  ce  coup  seulement,  de  prester  el  faire  ladvance  de  ce  quil 
faudroit  pour  payer  ceste  masse,  a  la  charge  d'en  estre  remboursé 
incontinent  que  l'argent  dudit  depost  sera  venu,  désirant  fort  que 
Vostre  Majesté  pourvoie  au  deppost  de  sa  protection  et  a  le  faire 
payer  de  ce  qui  luy  est  et  sera  doresnavanl  deub,  affin  qu'il  ne  soil 
tous  les  jours  a  dispu  er  avec  vos  ministres  et  quil  n'aye  a  penser 
qua  vous  bien  servir.  Je  luy  ay  monstre.  Sire,  la  dernière  lettre 
quil  vous  a  pieu  m'escripre  sur  ce  propos  la  et  il  a  bonne  espérance 
que  Vostre  Majesté  ne  luy  manquera  de  rien  comme  aussi  il  ne 
veult  manquer  de  chose  du  monde  a  vous  faire  service  ;  l'aultre, 
provision  que  mondit  sieur  de  Guise  ast  de  l'artillerye  et  de 
grande  quantité  de  boulletz  el  pouldres  pour  faire  une  batterye  dont 
je  croy,  Sire,  que  vous  estes  adverty;  sil  y  veoit  les  occasions  dis- 
posées, ledit  sieur  Duc  na  pas  faulte  d'artillerye  el  en  a  déjà  envoyé 
sur  les  confins  de  son  étal  une  lionne  provision  pour  l'efi'ect  des 
susdict,  et  quant  aux  boulletz  et  poudres,  il  a  offerl  liberallement  de 
liailler  tout  ce  quil  en  a,  mais  il  n'en  a  pas  si  grande  provision  que 
l'on  eust  bien  pensé:  il  a  bien  force  salpestre  pour  faire  la  pouldre 
et  dict  qu'il  y  faict  travailler  toutte  dilligence, mais  il  fault  du  temps 

(1)  Castelfranco,  bourg  d'Italie  (Vénétie),  à  2o  kil.  de  Trévise,  sur  le  Musone. 

(2)  Bologne. 


146  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1556] 

et  du  soleil  dont  on  n'a  gueres  ceste  saison.  Monseigneur  le  Duc  a 
grande  faulte  de  quelques  ministres  auprès  dp  luy  qui  le  soulaigent 
de  beaucoup  d'affaires  et  qui  scaichent  exécuter  ce  qu'il  comman- 
dera, et  a  fort  pryé  Monsieur  de  Fourquevaulx  qui  disoit  n'avoir 
aucune  charge  ne  commission  de  Vostre  Majesté  dp  demeurer  par 
deçà  et  sen  vouloit  retourner  pn  France,  quil  voulus!  s'arrester  icy 
jusques  a  la  venue  dp  Monsieur  de  Guise  el  cependant  allpr  mettre 
ordre  a  ceste  masse  d'Italiens,  a  quoy  ledit  sieur  dp  Fourquevaulx 
s'accordoit  fort  mal  volontiers  si  Monsieur  le  Cardinal  de  Ferrare 
et  moy  ne  l'en  eussent  fort  prie  et  remonstre  le  besoin  quil  en 
estoit  pour  vostre  service.  Monsieur  le  Cardinal  Caraffe  sera  icy 
encore  deux  jours  et  puis  s'en  ira  a  Boullongne  ou  il  se  tiendra  jus- 
ques a  ce  quil  aye  nouvelles  que  Monsieur  de  Guise  soil  sur  le  Plai- 
santin I  ei  puis  il  advisera  de  l'aller  rencontrer  pour  delliberer  ce 
qu'on  auroit  a  faire.  Je  m'en  retournerai  a  Venise  aussitost  que  ledit 
sieur  Cardinal  sera  party  et  que  mondit  sieur  Dur  me  vouldra  don- 
ner congé,  tant  pour  aller  solliciter  le  faicl  des  deniers,  que  pour 
voir  comment  ces  seigneurs  la  l'entendront  maintenant  quils  ver- 
ronl  une  année  vostre  au  milieu  de  l'Italye,  el  celle  de  Monsieur  le 
Mareschal  de  Brissac  en  Piedmont.  Sire.  Vostre  Majesté  aura  veu  la 
lettre  en  espaignol  que  je  luy  ay  envoyé  par  ma  dernière  depesche 
de  Venise;  depuis  ce  Francesco  Paçheco,  qui  devoit  estre  depesche 
du  Roy  d'Espaigne,  esl  passe  par  Mantoue  et  Boulongne  ayant 
publye  partout  et  la  escript  a  Monsieur  le  Cardinal  Caraffe  qui  ma 
montré  sa  lettre  comme  il  portoit  la  paix  au  Pape  telle  que  sa  Sain- 
teté la  voudra  et  scauroit  désirer,  et  sollicitoit  forl  ledit  sieur  Car- 
dinal de  s'en  retourner  a  Home  pour  la  traiter,  et  conclure,  de  quoy 
ledit  sieur  Cardinal  se  mocquoit  a  pleine  bouche,  el  a  dit  devant 
toutte  cette  compagnie  ce  quil  avoit  en  -mi  cœur,  qui  est.  Sire- 
ténue  résolution  de  ne  vouloir  ni  paix  ni  Lrefve,  ni  aucune  sorte 
d'accord  jusques  a  ce  que  vous.  Sire,  le  commandiez,  et  ne  désire 
qu'une  bonne  guerre  puisque  les  choses  en  sont  sy  avant.  11  est  ua\ 
que  mon  advis  il  n'est  pas  niarrv  que  nous  voyons  qu'il  peull  avoij 
du  Roy  d'Espaigne  toutes  les  condition-  quil  voudra  pour  le  Pape 
et  pour  -a  maison  particulière  et  par  la  nostre  chance,  car  au  lieu 
que  nous  disons  que  vous,  Sire,  ne  vous  estes  mi-  en  ceste  guerre 
iiv  en  peyne  .pu-  pour  eulx,  aussy  il  veult  maintenant  que  dous 
COgnoissons  qu'il  ne  demeure  eu  guerre  -mon  pour  VOUS  rendre  la 
pareille  et  pour  préférer  vostre  service  an  repos  du  Pape  et  au 
sien  particulier,  et  de  sa  maison,  et  m'en  ayant  touche  quelques 
mots,  je  croy  que  je  n'ay  rien  oublié  a  luy  dire  ce  qui  en  «'.-t.  et 
quil   doibt   bien   estre   certain   «pie  Imite-  le-   belles  paroi  les   des 

(1)  Le  territoire  de  Plaisance. 


[FÉVRIER   1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  147 

imperiaulx  ne  sont  que  pour  trahir  le  Pape  et  luy  et  les  mettre  en 
désunion  et  deffiance  avec  Vostre  Majesté  pour  en  après  les  ehas- 
tier  a  leur  plaisir. 

De  Ferrare  le  xvnc  jour  de  Janvier  1556. 

Sire,  depuis  ceste  lettre  escrite  est  arrivé  de  Rome  le  boyteux, 
présent  porteur,  et  jay  veu  par  la  copie  de  ce  que  Messieurs  vos 
ministres  escrivenl  a  Monsieur  le  Cardinal  de  Ferrare  comme  les 
choses  passent.  Le  Cardinal  Carafa  m'a  aussi  monstre  ce  que  le 
Pape  et  le  Duc  de  Paliano  luy  escripvoient  et  quelques  advis  en 
chiffres  que  un  sien  secrétaire  Alanante,  qui  est  en  vostre  lettre,  luy 
escrivoit  lequel  faict  a  ce  que  je  voy  fort  bon  office  et  voyt  par  la 
ceux  de  Rome  et  le  Cardinal  fort  contents  de  Vostre  Majesté  et 
tous  résolus  a  la  guerre  et  n'avoir  aucune  volonté  d'accord,  si  vous, 
Sire,  ne  parles  le  premier  et  se  voit  aussi  par  celte  nouvelle  que 
le  Duc  d'Alve  estoit  mallade  a  Naples  et  que  le  Roy  d'Espagne  ne 
commande  autre  chose  que  l'accord  et  ses  ministres  eussent  eu 
besoin  de  quelques  provisions  pour  continuer  la  guerre.  Cela  me 
faict  espérer  que  Monsieur  le  Mareschal  Strossy  qui  est  maintenant 
en  campaigne  les  trouvera  asses  mal  pourvus  et  qu'il  recouvrira 
facilement  ce  qu'on  avoit  perdu,  et  Monsieur  de  Guise  peut, 
une  fois  passé  en  ce  quartier,  et  Monsieur  le  Mareschal  de  Brissac 
de  son  cote  en  campaigne,  il  me  semble  possible  que  vos 
ennemis  se  trouveront  bien  empeschés.  Aujourd'huy,  Monsieur  le 
Cardinal  Caraffe  a  baillé  avecq  les  cérimonies  accoustumées  a  Mon- 
sieur le  Duc  de  Ferrare  et  demain  se  partira  ledict  sieur  Cardinal 
pour  Boullogne  pour  y  attendre  encore  huict  ou  dix  jours  la  venue 
de  Monsieur  de  Guise. 

C'est  de  Venise  ce  dix  septiesme  de  Janvier  1556. 

(Ms.  de  Grenoble,  f"  45  r<). 


GABRE    AU    ROI 

115.  —  [Venise],  4  février  1556.  —  Nous  ne  pouvons  icy  avoir 
nouvelles  de  Monsieur  de  Guise,  sinon  par  la  voye  de  Milan,  d'où 
l'on  a  entendu  comme  il  a  pris  d'assaut  la  ville  de  Valence  (1),  et 
depuis  la  ville  et  Chasleau  de  Tortonne  (2;,  et  quelques  autres  lieux 
d'importance,  quand  ils  seront  fortifiés.  A  quoy  Monsieur  le  Mares- 

(1)  Valenza,  place  du  Milanais,  dans  le  voisinage  d'Alexandrie,  prise  en  1551  par 
le  maréchal  de  Brissac,  puis  reconquise  par  les  Impériaux,  puis  enlevée  à  ces 
derniers  par  le  duc  de  Guise. 

(2)  Tortone,  ville  d'Italie,  sur  la  Scrivia,  à  26  kil.  d'Alexandrie. 


148  NÉGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1556] 

chai  de  Brissac  donne  ordre,  pour  serrer  entièrement  le  passage  a 
tous  les  vivres  et  marchandis  ïs  quon  ponrroit  porter  de  Lombardie 
a  Genncs  el  que  mondit  sieur  de  Guise continuoit  songrand  chemin. 
Tous  les  advis  que  l'on  a  icy  d'Allemagne  sont,  que  l'on  alloit  fort 
lentement  a  ces  régiments,  que  le  Etoy  d'Espaigne  faisoit  lever,  qui 
sont,  a  ce  qu'on  dit,  de  quatre  a  cinq  mil  chacun.  Le  Doge(l)  me  dit 
encores  hier,  que,  par  les  advis  quils  ont  de  Trente,  il  n'y  a  encore 
rien  de  prest.  Le  Cardinal  Caraffe,  qui  est  encores  a  Boulogne. 
m'écrivit  hier  quil  avoit  lettres  du  Cardinal  Farnèse  -1  .  comme 
le  Duc  Octavio  s'en  alloit  vers  Plaisance  donner  ordre,  que  mondit 
sieur  de  Cuise  fut  accommodé  de  vivres  el  de  toutes  autres  com- 
moditez  sur  le  Plaisantin,  pour  sou  passage.  Je  croy  qu'ils  feront 
cette  office  la  plus  par  force  que  par  amour,  e1  de  crainte  quil  leur 
en  prist  mal.  s'ils  faisoienl  autrement;  mais  passe  que  sera  le 
danger,  je  croys  qu'ils  demeureront  aussi  hons  Imperiaulx  qu'ils 
furent  jamais  :  et  si  jen  estois  creu,  Monseigneur  de  Guise  logeroit 
dans  Parme  par  amour  ou  par  foret',  et  ne  seroi!  pas  mal  aisé  a 
faire.  Ces  Seigneurs  icy  ont  lait  quelque  crue  dhommes  darmes,  e1 
levé  mil  cinq  cens  hommes  de  pied,  et  sont  tous  les  jours  occupes 
a  tenir  leurs  Conseils:  je  les  vais  Noir  quelques  lois  pour  voir  s'ils 
ont  quelque  chose  a  dire  :  l'autre  joui,  quand  ils  eurent  la  nouvelle 
de  Valence,  afin  qu'ils  n'entrassenl  en  crainte  ne  jalousie  de  rien, 
je  leur  dis  qu'ils  se  dévoient  resjouir  île  la  venue  de  cette  armée  la 
en  Italie  et  lui  désirer  tout  lion  euccez;  que  vous,  Sire,  ne  la  faisiez 
passer  sinon  pour  le  bénéfice  île  vos  amis  et  confederez,  et  que  si 
personne  les  vouloil  fascher,  il-  se  pourroient  prévaloir  et  servir  de 
vostre  armée,  comme  si  elle  estoit  stipendiée  d'eux  mesmes.  Mais 
pour  en  dire  ce  que  j'en  croy,  j'ay  opinion  qu'ils  se  passeraient 
bien  de  moindre  faveur  et  aimeroienl  mieux  voir  plus  loin,  que  si 
près,  tel  voisinage. 

Sire,  je  croy  que  du  coste  «le  Rome,  Vostre  Majesté  aura  entendu 
la  prise  du  fort  que  les  ennemis  avoienl  tait  sur  la  Marine  a  la 
bouche  d'Ostie  :'>  :  el  voit  on  que  Monseig*  le  Cardinal  Strossy  I 
et  Monsieur  de  Montmorency,  qui  sont  maintenant  en  campagne, 
ne  trouvent  aucune  resi  lance,  sinon  en  quelque  forteresse  ou  le 
Duc  d'Albe  avoil  laisse  garnisons;  et  j'espère  quils  les  recouvreront 


1,1)  François  Venieri,  élu  le  il  juin  1551,  mort  le  2  juin  1556. 

(2)  Alexandre  Farnèse,  fils  de  Pierre-Louis  Farnèse,  né  a  Rome  en  1520  Le 
Pape  Paul  III.  son  grand-père,  le  créa  cardinal  a  14  ans  II  tut.  ensuite,  pourvu 
simultanément  tic  sepl  évêchés  ci  chargé  par  le  Pape  de  diverses  négociations 
en  France,  en  Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas;  mourut  le  -j  mars  1589. 

(3)  Ostic,  ville  d'Italie,  sur  la  rive  gauche  cl  a  ;;  kil.  cl  demi  de  l'embouchure 
du  Tibre,  dans  la  Méditerranée. 

(4)  Ribier  a  mis  ici  "le  cardinal»  pour  »  le  maréchal*  Stroz/.i. 


[FÉVRIER    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  149 

bien  aisément  l'un  après  l'autre,  de  sorte  qu'a  le  bien  prendre,  Rome 
ni  le  Pape  n'ont  plus  grande  haste  de  vostre  secours,  qui  ne  se  peut 
dire  que  trop  grand,  puis  qu'a  Home  même  nous  dépensons  quatre- 
vingt  mil  escus  par  mois;  et  si  au  lieu  de  cheminer  vers  Rome  et 
Naples  mondit  Seigneur  de  Guise  se  tournoit  vers  Testât  de  Milan, 
il  est  certain  quil  y  l'eroit  grand  exploit,  avant  que  l'ennemy  soit 
bien  pourvu,  et  voit  on  bien  quil  ne  le  scauroit  estre  avant  deux 
bons  mois.  Mais  je  croy  bien  aussi  que  Sa  Sainteté  ni  le  Cardinal 
Caraffe,  comme  gens  qui  suivent  leurs  passions,  ainsi  que  les 
autres,  ne  seront  jamais  content  qu'ils  ne  voyent  vostre  armée  dans 
le  Royaume  de  Naples,  m 'ayant  dit  ledit  Cardinal  quand  il  estoit  icy, 
et  sur  nos  distes  disputes  de  la  contribution,  que  par  le  traité  de  la 
ligue,  la  guerre  se  doit  commencer  la,  et  me  montra  l'article  qui  en 
fait  mention;  voulant  par  la  inférer  que  quand  l'armée  de  Monsei- 
gneur de  Guise  feroit  bien  la  guerre  en  la  Duché  de  Milan,  et  hors 
lePiedmont;  que  pour  cela,  le  Pape  ne  sera  tenu  dy  contribuer, 
d  autant  que  ladite  guerre  se  doit  commencer  premièrement  au 
Royaume,  et  larticle  qui  fait  après  mention  de  la  faire  en  Lombar- 
die  dit  que  s'il  advient  mutation  de  temps  pour  lequel  il  faille 
changer  la  guerre  en  Lombardie  ou  en  Toscane,  alors  Sa  Sainteté  y 
contribuera;  tellement  qu'il  prétend  que  cette  mutation  de  temps 
doit  estre  du  consentement  des  deux  parties,  et  non  à  l'élection  de 
celle  de  Vostre  Majesté.  J'ay  bien  opinion,  Sire,  que  je  leur  diray, 
que  si  l'on  renforce  Monsieur  de  Montluc  de  deux  ou  trois  mil 
hommes  plus  quil  n'a,  et  quelque  peu  aussi  de  cavalerie,  on  en 
épargnera  trois  fois  autant  aux  autres  endroits  et  armées,  car  il 
tiendra  les  forces  du  Duc  de  Florence  si  engagées,  qu'elles  en  pour- 
ront abandonner  son  païs,  pour  courir  sur  l'Estat  de  l'Eglise  ou  de 
Ferrare,  comme  il  est  fort  a  craindre  qu'il  fasse,  mesmement  ayant 
un  régiment  d'Allemans  qu'il  fait  venir,  et  cela  seroit  assez  suffisant 
pour  divertir  toutes  vos  autres  entreprises,  car,  pour  peu  que  le  Duc 
de  Ferrare  soit  travaillé  en  son  Estât,  il  aura  bien  a  crier  s'il  n'est 
incontinent  secouru. 

De  Venise  le  4  février  1556. 

(RlBlER,  t.  il,  p.  675). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

116.  —  [Venise],  12  février  1556.  —  Monseigneur.  11  y  a  icy  grand 
bruit  el  grandz  nouvelles  de  la  trefve,  el  la  tient  on  quasy  pour  cer- 
taine; mesme  on  dit  qu'il  n'y  avoit  autre  difficulté,  sinon  que  vous 


(50  NÉGOCIATIONS    DE  ^FÉVRIER    1556| 

voliez  la  restitution  de  Hesdin(l)  en  rendant  Mariambourgi2)  et  de 
quelque  pension  de  trente  mil  escuz  pour  le  Duc  de  Savoye  (3),  en 
attendant  qu'on  eust  autrement  accommodé  les  choses  avec  luy, 
nous  attendons  sur  cela  de  voz  nouvelles  en  grand  dévotion.  J'es- 
criptz  au  Roy  tout  ce  qui  se  présente  pour  ceste  heure  par  ceça  et 
vous  envoyé.  Monseigneur,  des  lettres  de  Levant  :  et.  par  ce  que 
m'escript  Mr  de  Codignac,  il  semble  qu'on  peut  tenir  quasy  pour 
certaine  d'Hongrie.  Mr  de  Morangy  est  encore  icy,  mais  il  part  ce 
soir,  et  d'autant  que  son  voyage  estoit  fort  publié  par  deçà,  jay 
parlé  a  ces  Seigneurs  pour,  s'il  leur  sembloit  que  le  voyage  ne  i'ust 
sans  qu'ilz  y  voulussent  pourvoir,  pour  le  desplaisir  que  ee  seroil 
au  Roy  et  au  grand  Seigneur  sy  tel  présent  alloit  a  mal,  dont  eulx 
mesmes  seroient  les  premiers  marriz  ;  ilz  ont  esté  d'oppinion,  pour 
remédier  a  tous  inconvéniens,  qu'il  seroit  fort  bon  de  le  faire  accom- 
pagner jusques  a  Ragusa  d'une  de  leurs  gallerres  armée  et  sera  force 
que  je  face  quelque  présent  au  cappitaine  de  la  dite  gallerre,  car  ledit 
Morangy  m'a  dit  qu'il  ne  leur  baillera  rien  des  quinze  cens  escus  que 
je  luy  ay  fait  délivrer  et  qu  il  craint  avoir  faulte  d'argent  pour  achep- 
ter  des  chevaulx  (pie  le  Roy  luy  a  commandez.  Je  voudrois  qu'il 
m'eust  cousle  bonne  chose  et  que  ce  présent  fust  desja  arrive  au 
grand  seigneur,  car  j'ay  oppinion  qu'il  l'estimera  fort.  Je  lay  ici  veu, 
il  me  semble  qu'il  n'esl  possible  d'estre  plus  beau,  il  y  a  six  muletz 
aussy  grandz  et  aussy  beaux  que  j'en  viz  jamais. 
De  Venize,  ce  12  février,  1556. 

Monseigneur,  aujourd'huy  on  a  eu  icy  nouvelles  d'une  grosse   e1 
heureuse  exécution  que  les  nostres  ont  fuit  a  Vignal(4),  en  Piedmont, 

sy  la  nouvelle  que  ces  seigneurs  en  ont   eue   esl    vray,    c'est   une 
maulvaise  Irefve  pour  les  impériaulx. 

T.iM.  nal.,  Fr.  20644,  fol.  78)    copie). 

(l)  La  ville  de  Hesdin  avait  été  construite  et  fortifiée  par  le  duc  de  Savoie. 
Philibert-Emmanuel,  en  1554,  près  de  l'emplacement  du  vieux  Hesdin  que  Châftes- 
Quint  avait  fait  raser. 

12  Marienbourg,  ville  forte  de  Belgique  iprès  de  Namur),  prise  par  les  Français 
en  155  i,  rendue  aux  Espagnols  en  1559. 

(3)  Philibert-Emmanuel,  fils  de  Charles  III.  né  à  Chambéry  1528  .duc  de  Savoie 
(1533),  servit  Charles-Quinl  lorsqu'il  fui  dépouillé  de  ses  États  par  François  l" 
(1544),  s'illustra  au  siège  de  Metz  1852),  futinvesti  du  commandement  des  troupes 
impériales  aux  Pays-Bas,  gagna  contre  les  troupes  françaises,  commandées  par 
Montmorency,  la  bataillede  Saint  Quentin  10  aoûl  1557  il  recouvra  son  duché  à 
la  suite  du  traité  de  Cateau-Cambrésis  1559  el  épousa  Marguerite  de  Fiance, 
sœur  de  Henri  II.  Il  mourut  en  1580 

(4)  Vlgnâle,  ville  forte  d'Italie,  à  13  kil.  de  Casale. 


FÉVRIER  1556]         DOMINIQUE  DU  GABRE  151 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

117.  —  [Venise],  13  février  1556.  —Monseigneur.  Je  suis  tout 
confuz  de  ceste  nouvelle  de  la  tresve  1),  laquelle  les  impériaulx, 
par  les  advis  qui  viennent  de  Flandres,  tiennent  pour  toute  certaine 
et  asseuree.  Je  scay  bien  que  mous,  vostre  ambassadeur  dicy  est 
assez  diligent  pous  avoir  envoyé  les  dit  advis;  cela  me  gardera  de 
vous  en  fere  redicte;  seullement,  vous  diray  je  que  de  la  court  ja 
nen  veoy  venir  une  seulle  nouvelle  et  croy  bien  que  vous  serez  le 
premier  aqui  Ion  en  mandera  la  vérité,  et  si  medoubte  que  nous  nen 
aurons  aucun  advis  que  aprez  larrivée  de  monseigneur  le  Cardinal 
de  Lorraine,  lequel,  au  compte  que  je  faiz,  sera  arrivé  a  la  court  le  xe 
de  ce  mois,  et  sera  en  trois  ou  quatre  jours  pour  prendre  resolution 
de  toutes  choses,  tellement  que  nous  naurons  sa  responce  jusques 
sur  la  fin  du  mois.  Cependant  les  ennemys  ont  receu  une  maulvaise 
tresve  en  Piedmont  a  la  prinse  de  Vignal  :  quant  a  la  depesche  de 
nions1'  de  Manne  (2),  qui  est  allé  en  France,  monseigneur  le  Cardi- 
nal de  Tournon  ma  envoyé  coppie  de  sa  depesche,  et  ay  veu,  par  la, 
quilz  sont  en  quelque  crainte  destre  assaillizaRome,  et  si  les  enne- 
mys l'entreprennent,  je  me  doubte  fort  qu'ilz  feront  et  peur  et  do- 
maige  a  sa  Sainteté  tout  a  ung  coup,  car  je  ne  veoy  point  que  nos 
remèdes  soient  si  promptz  comme  ilz  debvoient  estre.  Je  vous  en- 
voyé, Monseigneur,  la  promesse  signée  de  mon  dit  sieur  le  Cardinal 
de  Tournon  et  de  mons.  Davanson  et  scellée  de  leurs  sceaulx;  vostre 
excellence  les  pourra  garder  toutes  deux  jusqu  ace  que  jaille  devers 
vous  pour  retirer  lautre.  Quant  a  vostre  monstre  (3),  jenvoyeray 
commissaire  et  controlleur  quand  vous  me  manderez  estre  du  tout 
presl,  et  puis  que  nous  sommes  si  avant,  se  pourra  fere  la  monstre 
pour  février  et  pour  mars  tout  ensemble.  Cependant,  viendront  nou- 
velles de  la  Court  et  sçaurons  tous  ce  que  nous  aurons  a  fere.  Je  y 
ay  faict  une  depesche  ny  a  que  trois  jours,  mais  je  ny  escripray  plu 
rien  que  je  nay  de  leurs  nouvelles.  Je  parlay  l'autre  jour  a 
lhomme  que  vous  sçavez,  dont  le  roy  mavoit  escript  en  chiffre,  le- 
quel a  délibère  de  vous  aller  voir.  Et  je  lenay  fort  exortépour  ce  que 

(1)  La  trêve  de  Vaucelles,  conclue  pour  cinq  années,  et  signée  le  3  février  1556, 
.entre  Henri  II  et  Charles-Quint.  De  l'ait,  elle  tut  rompue   trois  mois  après,  grâce 

surtout  aux  intrigues  du  cardinal  Carala. 

(2)  François  de  Bouliers,  sieur  de  Manne,  fut  plusieurs  fois  envoyé  en  mission 
vers  le  Pape  par  Henri  II.  (.Voir  H.  de  Laferrière,  t.  i,  p.  71;.  —  Abbé  de  Lerms 
en  1575,  évoque  de  Fréjus  (1579;,  abbé  commendalaire  de  Honport  au  diocèse 
d'Evreux,  mort  en  1587. 

(3)  Montre,  revue  passée  pour  le  payement  de  la  solde  des  troupes. 


152  NÉGOCIATIONS    DE  "FÉVRIER    1556] 

le  roy  Philipe  vous  escript  une  lettre  en  sa  recommandation,  et 
mest  roussi  pour  fort  honneste  el  gentil  seigneur:  et  vouldrois  quil 
eust  déjà  lhonneur  el  le  lieu  qui  luv  appertient,  car  je  spererois  quil 
seroit  ung jour  vostre  gendre.  Je  mesbahis  fort  que  don  Anthonio 
no  vous  est  encores  venu  veoir.  Vous  serez.  Monseigneur,  s'il  vous 
plaist.  content  daller  ung  peu  retenu  a  faire  vostre  cavalleriejusques 
ace  que  vous  ayez  commission  expresse  dû  roy  de  la  mettre  ensem- 
ble, et  quilz  vous  ayent  envoyé  le  pouvoir  de  lieutenant  gênerai;  car 
silz  lentendent  dune  façon  et  vous  dune  autre,  ce  ne  seront  que  dif- 
ferentz  et  au  piz  aller  nous  aurons  dans  la  fin  de  ce  mois,ouplustost, 
advis  de  ce  quon  aura  a  fere.  Je  croy,  Monseigneur,  que  vous  aurez 
bien  entendu  quelque  faction  qui  est  bien  succédée  a  monsr  deSou- 
bize,  ou  il  a  este  desfaict  ung  bon  nombre  de  chevaulx  légers  des 
enneinys,  et  y  esl  demeuré  prisonier  le  capitaine  Jehan  Battista  Mar- 
tin. Les  advis  que  ces  seigneurs  ont  eu  de  Vignal  contiennent  que  la 
prinse  de  cette  place  a  este  fort  sanguinolente  et  cruelle  d'une  par- 
tie et  d'autre. 

Monseigneur,  estant  sur  ce  poinct  de  lettre,  jay  receu  ung  paquet 
de  Lyon  du  11e  de  février,  ou  il  nya  une  seulle  mention  de  trefve  el 
n'est  d'ung  de  noz  tresorierz  que  jattends  icy  dans  deux  ou  trois 
jours. 

De  Venize  ce  xme  de  février  1556. 

Arch.  de  Modène.  Arch.  de  la  famille  Fieschi 


M.  I)  AI.ES.  SECRETAIRE  DE  I.  ÉVEQUE  DE  LODEVE,  Al'  CONNÉTABLE 

118.  —  Venise],  I  /  février  1556.  —  Monseigneur,  depuis  que 
Monsieur  l'ambassadeur  esl  party  de  ce  lieu  pour  aller  trouver  Mon- 
seigneur de  Guise,  il  n'est  rien  survenu  de  nouveau  digne  de  vous 
escripre,  sy  ce  n'est,  depuis  deux  jours,  que  ces  seigneurs  oui  eu 
lettres  d'Andrinople  ou  le  Grand  Seigneur  se  trouve  du  6e  de  janvier, 
par  lesquelles  il/  on1  a<l\is  que  le  dit  Grand  Seigneur  armoil  gran- 
dement par  terre  el  par  mer,  resolul  d'aller  en  personne,  ou  d'en- 
voyer ung  de  ses  premiers  principaulx  chefz  taire  la  guerre  eu 
Hongrie,  a  ceste  prime  vere  el  qu'il  sortiroil  une  armée  de  mer  de 
quatrevingt  a  cent  gallaires,  a  la  préparation  desquelles  on  travail- 
loit  en  toutte  dilligence,  ayanl  déjà  este  envoyé  le  commandemenl 
et  les  commissaires  dudil  Grand  Seigneur  pour  faire  les  provisions 
des  biscuitz  el  des  hommes  de  resme  I  .  El  pour  ce,  Monseigneur, 
qu'il  n'esl  riens  venu  de  Monsieur  de  Codignac  avec  ladite  despeche 

(1)  Les  hommes  de  rames. 


[FÉVRIER    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  153 

ne  par  autre  voye,  jay  este  ce  matin  a  la  Seigneurie  pour  entendre 
lesdits  adviz   a    la   vérité   qui   m'onl   este  leuz,  el  monstrez,  de  la 

sorte,  que  la  dessus,  hormis  qu'ilz  ne  disent  rien  de  l'allée  en 
personne  dudil  Grand  Seigneur,  encore  que  par  autres  lettres 
que  j'ay  veues  escriptes  a  particulier,  on  escripve  cela  pour  tout 
certain:  de  quoy,  Monseigneur,  je  n'ay  voullu  faillir  vous  es- 
cripre  suivant  ce  que  Monseigneur  l'Ambassadeur  me  commanda  a 
-ou  parlement,  présupposant  aussy  que  vous  serez  bien  aise  den- 
tendre  cesle  nouvelle  comme  chose  qui  pourra  aider  et  faciliter 
de  beaucoup  la  négociation  de  Mr  de  la  Vigne  a  son  arrivée  a  ceste 
porte  la.  L'on  faisoit  compte  que  ledit  sr  de  la  Vigne  n'y  deusl  ar- 
river plustost  que  le  8e  ou  le  10e  de  ce  mois,  mais  a  ce  que  j'ay  icy 
entendu,  d'aulcuns  qui  le  rencontrèrent  a  six  joui  nées  de  la  Despa- 
latto(l)  il  y  faisoit  si  grande  dilligence  qu'il  y  sera  arrive'1  le  2e  pour 
le  plus  long.  Il  y  aura, Monseigneur,  avec  la  présente,  ung  extrait  des 
plus  fraisches  nouvelles  qu'on  a  icy  de  Trente  sur  la  levée  et  pas- 
saige  des  Lansquenetz  que  le  Roy  d'Angleterre  fait  descendre  en 
Italie.  J'en  envoyé  aultant  par  ceste  despeche  a  Monseigneur  le  Ma- 
reschal  de  Brissac  comme  j'ay  fait  aussi  a  mondit  sr  l'Ambassadeur. 
De  Venize  ce  14e  de  février  1556. 

[Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  80)  (copie). 


CABRE    AU    DUC    DE    FERRA RE 

119.  —  [Venise],  19  février  1556.  —  Monseigneur,  Hier  matin, 
j'euz  une  dépesche  du  Roy  et  de  Monseigneur  le  Conestable,  dont 
je  vous  envoyé  la  copie,  et  par  là  verrez  confirmation  de  la  nouvelle 
que  vous  aviez  entendue  de  la  trefve,  dont  on  entendra  les  particu- 
laritéz  par  la  publication  de  ladite  trefve  qui  sera  bientosl  envoyée 
par  deçà.  Ils  ont  dépesche  corrier  à  Rome  aveemesme  advis  el  croy 
bien  que  par  ledit  corrier  Vostre  Excellence  aura  eu  aussi  lettres  ou 
du  Roy  ou  de  vostre  ambassadeur.  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lor- 
raine n'estoit  encores  arrivé  du  temps  de  la  conclusion  ne  de  ceste 
dépesche,  et  pourroit  bien  estre  qu'ilz  onl  remisa  von-  fere  entendre 
leur  intention  sur  toute-  choses,jusques  aprèz  qu'il-  auront  ouy  parler 
ledit  Sr  Cardinal,  lequel  pour  certain  y  sera  arrivé  le  \'  de  ce  mois. 
Dans  le  x\\"  jour,  le  plu-  tard,  nous  aurons  une  dépesche  concluante 
et  résolutive  des  altères  d'Italie,  et  de  la  façondonl  ilz  entendent  les 
gouverner  durant  cesl  trefve,  el  n'y  sera,  à  mon  advis,  oblié  ce 
qu'ilz  veullent  fere  de  vostre  particulier,  dont    il  me  semble.  Mon- 

1)  Probablement  Spalato,  ville  et  port  de  la  Dalmalie  sur  un  golfe  de  l'Adria- 
tique, à  115  kil.  E.-S.-O.  de  Zara. 

14 


154  NÉGOCIATIONS    DE  FÉVRIER    15561 

seigneur,  que  je  vous  veoy  en  quelque  peyne  par  les  dernières 
lettres  qu'il  vous  a  pieu  m'escripre,  que  je  receuz  lundi  matin. 
Je  vous  en  escripviz.  comme  vous  aurez  veu,  mon  advis  franche- 
ment et  librement,  comme  vous  sçavez  que  je  suis  en  possession 
de  vous  parler,  et  me  sembleroit  ne  vous  estrebonet  vray  serviteur, 
comme  je  vous  veulx  estre,  si  je  changeois  de  façon  de  fere  et  vous 
dire  une  chose  pour  en  penser  une  autre.  Mais,  comme  'lit  saincl 
Pol  quant  il  conseille  les  mariaiges,  consilium  <1<>  et  non  preceptum, 
car  je  ne  vous  parle  point  de  telles  choses  comme  ministre  du  Roy. 
n'en  ayant  aucune  charge,  mais  comme  vostre  serviteur  particulier. 
Je  vous  diz,encoresungcoup,  que  vous  debvez  plus  penser  à  la  partie 
honnorable  que  à  la  profitable,  el  que  vous  estez  aujourd'hui  seul 
entre  les  princes  de  la  chrestienté,  qui,  a  moins  d'occasion  de  penser 
a  gaing  d'argent,  car  on  sçait,  Dieu  mercy,  que  vous  n'en  avez 
point  faulte,  et  je  eroy  que  si  en  nostre  court  pensoienl  qu'il  vous 
failleust  continuer  tout  l'entretènemenl  promis  par  vostre  cappitu- 
lation,  sans  entrer  en  guerre,  ne  fere  aucun  service,  qu'ilz  se  feussenl 
resoleuz  de  vouloir  plustosl  continuer  la  guerre.  Mais  n'axant  ac- 
cepté ceste  trefve  el  cesl  accord  que  pour  se  mettre  hors  de  des- 
pence, a  grand  peyne  vouldront-ilz  entrer  en  celle  de  vostre  traicté, 
puis  que  de  leur  part  ilz  peuvenl  dire  De  vous  avoir  jamais  pi 
de  vous  déclairer,  De  vous  avoir  donné  charge  d'une  seulle  chose  de 
leur  service;  Je  jurerois  bien  que  s 'ilz  veoyenl  au  conseil  de  Sa  M 
que  par  la  rigueur  il"  la  loy  il/,  soienl  obligez  à  vous  observer  ledit 
tracté,  qu'ilz  n'y  feront  jamais  faulte  ne  difficulté,  car  vous  sçavez 
combien  le  Roy  esl  prince  juste  el  de  sa  parole,  mais  s'ilz  onl  prins 
opinion  que  par  1rs  raisons  de  droicl  el  de  justice  ilz  ne  soienl  obli- 
gez à  l'observation  du  dil  tracté,  je  croy  qu'ilz  s'en  voultront  démes- 
ler.  Parquoy  pour  D'entrer  en  différentz  el  mal  contentemenl  d'une 
part  ny  d'autre,  je  louerois  forl  que  Vostre  Excellence  n'en  puni  de 
soy  opinion  de  si  ny  de  dod,  laissant  ce  jugement  à  gens  de  conseil 
et  de  loix  :  si  d'aventure  on  y  prenoit  résolution  contrere  à  vostre 
intention,  et  quelque  foiz  il  es1  bon  de  donner  libérallemenl  ce 
qu'on  ne  peiilt  vendre.  Ce  que  je  vous  en  diz,  Monseigneur,  est  par 
manière  d'advis,  estant  tout  asseuré  qu'ilz  De  vous  feront  jamais 
tort,  et  qu'ilz  mettrout  tonte  peyne  de  vous  tenir  content,  el  par  la 
première  dépesche  qui  viendra  de  la  court,  dous  verronstoul  ce  qui 
en  ile]i\  ia  estre,  el  de  ma  pari  je  seraj  forl  aysé  que  toul  passe  avec 
vostre  contentemenl  el  y  feray  toutjour  tous  les  meilleurs  offices 
que  je  pourray. 
De  Venize,  ce  xi\c  de  février  1556. 

vcii.  ,|.'  Modène.   \ i «ii .  de  la  famille  Fieschi  . 


FÉVRIER  1556  DOMINIQUE  DU  GABRE  1  ."."> 


GABRE  AU  ROI 

120.  —  [Venise],  .2  4  février  1556.  —  Sire,  j'ay  esté  ces  jours  pas- 
ses trouver  Monseigneur  de  Guise,  ainsi  quil  arriva  sur  lestât  de 
Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  ayant  eu  commandement  de  luy  de 
l'aller  trouver,  et  ne  vous  escriray  rien  de  ce  qui  fut  la  resoleu,  el 
conclud  pour  ce  que  Monsieur  de  Lanssac  se  trouva  présent  a  tout 
et  tut  depesché  de  mondi  sieur  de  Guise  pour  vous  aller  faire  rapport 
de  touttes  choses.  Depuis,  fnondit  sieur  de  Guise  a  passe  par  Ferrare 
et  après  avoir  reveu  son  armée  a  Boullogne(l),  j'entends  quil  a  pris 
la  poste  pour  s'en  aller  a  Rome,  conférer  avec  le  Pape,  des  entrepri- 
ses" ou  son  armée  doibt  estre  emploiee,  cl  cependant  ladite  armée 
s'achemine  tout  bellement  par  la  Romaigne,  côtoyant  la  Toscane  de 
façon  qu'elle  tient  tousjours  en  crainte  el  suspens  le  Duc  de  Flo- 
rence et  donne  réputation  a  la  négociation  pour  laquelle  Monsieur 
de  Vienne  (2)  a  este  despeché.  Monsieur  Viallart  (3)  est  venu  icy 
visiter  cette  Seigneurie  de  la  part  de  Monsieur  de  Guise,  et  a  esté 
bienvenu  et  caressé  comme  vostre  ministre;  nous  avons  icy  dresse 
quelque  mémoire  du  règlement  des  despenses  de  deçà  et  comence 
•l'on  ce  mois  de  mars  a  paier  les  garnisons  de  Monsieur  le  Duc  de 
Ferrare,  car  autrement  il  faisoitde  grandes crieryes  cl  protestations, 
mais  on  a  remis  ce  qu'il  prétend  luy  estre  deub  depuis  le  mois  de 
.Novembre  a  la  despence  de  celle  levée  de  gens  de  pied  quil  a  faicl, 
a  luy  en  estre  baillée  assignation  par  Vostre  Majesté;  quand  il  eu 
baillera  ses  parties.  Vostre  Majesté  pourra  taire  voir  a  son  Conseil 
ce  qui  sera  raisonnable  et  loyaulment  deub,  mais  si  le  Pape  fournisl 
de  sa  part  à  ce  quil  doibt  contribuer,  je veoy  quilypourra  avoir  assés 
dargent  pour  Avril  et  pour  May.  Si  aussi  sa  Sainteté  ne  peult  fournir 
sa  part,  comme  je  crains  fort  qu'il  ne  puisse,  on  se  trouvera  fort 
court  esdicts  mois  d'Avril  et  de  May.  Quant  a  ces  Seigneurs,  Sire,  je 
ne  les  veoy  encores  remuer  ne  esehauffer  de  rien;  on  leur  lient  tou- 

(1)  Bologne. 

(2)  Charles  de  Marillac,  néon  Auvergne  vers  l.ïio,  avocat  au  Parlement  île 
Paris,  ambassadeur  à  Constantinople  ;  à  son  retour  en  France,  conseiller  au 
Parlement  de  Paris,  ambassadeur  en  Angleterre  en  r.:>s.  maître  des  requêtes 
en  1541,  évêque  de  Vannes  (30  octobre  1550  .  archevêque  de  Vienne  \ï\  février 
1556),  ambassadeur  à  Rome,  ensuite  à  la  dicte  d'Augsbourg  en  1559;  mort  le 
2  décembre  1S60. 

(3)  Michel  Viallart,  seigneur  de  la  Foresl  etdeSivry,  lieutenant  civil  au  Châtelet 
de  Paris  (20  janvrier  1546,,  maître  des  requêtes  -i\  août  1553;,  président  au 
Parlement  de  Rouen  (septembre  1567  :  mort  assassiné  le  9  avril  1576.  Il  lui 
ordonné  pour  la  justice  el  conseil  du  duc  de  Guise  en  Italie  (1551).  (liibl.  nat.. 
Fr.  10395,  toi.  169  et  suivants). 


156  NÉGOCIATIONS   DE  rFÉVRIER    1556", 

jours  de  vostre  part  tous  lengaiges  honnestes  et  honorables,  et  ils 
nous  rendent  aussi  de  fort  belles  parolles;  ils  mont  communicqué 
leurs  advis  de  Levant  du  xie  janvier,  par  lesquels  on  asseure  que  le 
Grand  Seigneur  avoit  commande  gens  de  rame  pour  armer  cenl 
gallères,  qui  faict  espère  que  Monsieur  de  la  Vigne  ne  trouvera 
grande  difficulté  a  obtenir  l'issue  de  l'armée  pour  favoriser  vos 
entreprises  :  quant  a  la  guerre  d'Hongrie,  ils  escrivent  nomement 
quil  s'en  parloit  diversement  et  que  cella  n'estoit  pas  bien  resoleu. 
Quant  à  la  descente  d'Allemans  pour  le  R.03  d'Espaigne;  il  n'en  est 
encores  passes  que  trois  mil  cinq  cens  ;  on  diet  bien  qu'il  en  vieni 
beaucoup  d'autres,  mais  il  ne  s'en  voit  encores  grande  apparence; 
de  la  guerre  de  Rome  je  croy  que  Vostre  Majesté  en  esl  asses  adver- 
tye,  par  quoyje  n'en  feray  icy  autre  redite. 
De  Venise  ce  vingtquatriesme  de  febvrier  1556. 

Hs.  do  Grenoble,  fol.  66  r°). 


GABRE    AU    ROI 

121.  —  [Venise],  27  février  1556.-  Sire,  Scipion  de  Castro, 
venant  de  parler  au  personnage  principal  de  la  praticque  que  scavez, 
m'est  venu  retrouver  ie\  a  mon  retour  de  Mons<  igneur  de  Guise  et 
m'a  dit  mu'  nouvelle  resolution  dudil  p  rsonnaige,  tant  prompte  a 
exécuter  sans  y  îiiellre  rien  du  vostre,  sinon  après  le  faict,  que  je 
n'ay  peu  a  la  grand  presse  qui  m'ena  esté  faite,  refuser  de  l'escouter 
et  m'a  semble  ne  devoir  rien  nui. dure  ny  exclure  sans  le  consente- 
ment de  Monseigneur  le  Mareschal  de  Brissac  et  son  bon  conseil  <pu 
est  cause  que  je  depesche  exprez  Monsieur  de  Chemans  qui  estoil 
icy  avec  moy  pour  aller  conférer  toul  le  négoce  avec  le  dit  sieur 
Mareschal,  el  delà  aler  passer  vers  Vostre  Majesté  si  ledit  sieur 
Mareschal  le  trouve  bon.  pour  vous  faire  par  le  menu  entendre  tout 
ce  qu'on  m'a  proposé  el  l'advis  dudit  sieur  Mareschal,  pour  après 
que  chacun  aura  entendu  vostre   bon  plaisir,  surtoul  se  disposer  de 

l'ensuivre,  et  si  ce  Scipi lit  vérité   et  que   le   personnage  aye  la 

mesme  intention  qu'il  m'a  rapportée,  je  croy,  Sire,  qui'  bientost   il 
s'en  entendra  ou  le  bien  ou  le  mal;  et  n'estant  ceste  lettre  que  pour 

autre  etlel   que  pi.lir  VOUS  supplier  Ile-    Il  11  lllbleineii  I   de     donner   |o\ 

ei  créance  audit  Chemans  qui  esl  ûdelle, dextre,et  hommede  I nés 

qualité/. 

De  Venise  ce  '21  lévrier  1556. 

hil.l.  11.1l..  Fr.  20644,  fol.  96    copie  . 


[FÉVRIER  1556]  DOMINIQUE  DU  GABRE  157 

GABRE  AU  CONNÉTABLE 

122.  —  [Venise],  28  février  1 556.  —  Monseigneur.  Il  vous  plaira 
veoir  par  ce  que  j'escript  au  Roy,  la  réception  de  vostre  advis  de  la 
trefve  et  le  contentement  1res  grand  que  ceste  seigneurie  en  a  mon- 
tre;  depuis,  j'ay  dèspeche  en  Levant,  suivant  ce  que  me  commandez 
avec  le  pacquet  du  Roy,  qu'il  m'a  semble  y  devoir  envoyer  en  dilli- 
gence,  pour  ce  que  j'ay  eu  Ici  Ires  que  Villemontée  estoit  desja  arrivé 
la,  et  si  le  Grand  Seigneur  se  resolvoit  à  sortir  son  armée  ilz  com- 
menceront de  ceste  heure  a  la  préparer,  et  entreront  en  grande 
depence  pour  ces(e  cause.  J'ay  fait  partir  le  sr  de  Chemans  qui  estoit 
icy  avecques  moy  aussitôt  que  les  ventz  ont  permis  de  sortir  de  ce 
port,  et  m'asseure  qu'il  fera  bonne  dilligence  car,  il  esl  homme  de 
service  et  nest  que  bon  de  faire  apprendre  atelles  gens  ce  chemin 
la  pour  s'en  pouvoir  mieulx  servir  quant  le  Royenaurabesoing.il  est 
vrai.  Monseigneur,  que  nous  sommes  icy  tous  en  peine  et  suspens 
de  ceste  trefve,  voyanl  que  la  seconde  nouvelle  publication  demeure 
tant  a  venir,  et  aussyque  l'ambassadeur  de  l'Empereur  dit  n'en  avoir 
receu  aulcunes  nouvelle  de  son  maistre;  d'ung  autre  coste,  je  pense 
que  s'il  y  estoit  survenu  nouvelle  difliculte,  et  que  vous  vissiez  les 
ennemis  procedder  avec  finesse  et  malice,  que  vous  en  donneriez 
incontinent  advis  aux  ministres  de  deçà  pour  essayer  de  ne  laisser 
perdre  les  serviteurs  et  amis  du  Roy,  mais  de  les  maintenir  en  bonne 
volonté,  et  pour  contremander  en  Levant.  Par  ainsi  je  yeulx  toujours 
croire  que  Dieu  aura  tant  favorisé  le  Royet  sonroyaulme  de  luy  don- 
ner ce  repoz.et  nous  ne  pouvons  rien  délibérer  ne  résoudre  par  deçà 
que  nous  n'ayons  de  voz  nouvelles.  Je  voy  que  Mr  le  Duc  de  Ferrare 
continue  a  faire  ses  hommes  d'armes,  et  me  somme  tous  les  jours 
d'envoyer  faire  la  montre  de  toute  la  garnison,  mais  ce  sont  choses 
ou  je  ne  toucheray  en  façon  du  monde  sans  attendre  de  vos  nou- 
velles, et  ne  vous  en  diray  aultrement  mon  advis,  sinon  que  je  pense 
«pic  vous  mettrez  en  considération  l'importance  de  son  traité  el  de 
son  service  du  passe,  du  présent  et  de  ladvenir;  et  vous  ferezenten- 
dre  comme  vous  entendez  de  vivre  avec  luy,  eu  ras  de  paix,  de  guerre, 
ou  de  trefve.  Vous  avez,  Monseigneur,  avec  la  présente  un  pacquel  de 
Levant  el  autres  de  Rome. 

De  Venise  ce  28  Février  1556. 

Monseigneur,  il  esl  icy  venu  quelques  advis  de  Flandres  qui  con- 
firment la  trefve,  dont  je  vous  envoyé  copie  emsemble  de  quelques 
autres  advis  que  cette  seigneurie  a  eue  dernièrement  de  tiennes  et 
de  Milan;  par  ou  vous  verrez,  s'il  vous  plaist,  la  perte,  que  les  impe- 
riaulx  ont  faite  de  dix  de  leurs  gallères. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  97)  (eopie). 


158  NÉGOCIATIONS  DE  FÉVRIER  1556 


GABRE  AL'  DL'C  DE  FEKKARE 

123.  --  [Venise],  29  février  1556.  —Monseigneur,  Je  vous  ren- 
voyé la  lettre  dernière  qu'il  vous  a  pieu  m'escripre,  suyvant  ce  que 
vous  m'en  avez  mandé,  et  me  desplaist  de  vous  veoir  en  peyne  pour 
chose  que  par  adventure  n'en  sera  nul  besoing.  Car.  si  la  trefve  n'a 
point  de  lieu  ou  qu'il  y  feusl  survenu  quelque  difficulté,  comme  il 
est  à  craindre,  veu  que  la  seconde  nouvelle  demoure  tant  à  venir, 
les  choses  traictées  de  deçà  passeront  sans  nulle  difficulté,  et  s'il  y 
aura  paix  ou  trefve,  il  fauldra  veoir  comme  chascun  entend  son 
faict,  et  possible  qu'ilz  prendront  toutes  choses  de  leur  cousté  selon 
vostre  désir,  et  qu'il  n'y  aura  aucune  contradiction.  Je  leur  ay  veu 
fere  beaucoup  d'autres  choses  semblables  à  ceste-là,que  je  ne  veulx 
pas  nommer  par  leur  nom.  mais  si  d'adventure  ilz  veullent  fere 
comme  vous, Monseigneur, soit  ditavec  suportation,  de  penser  seul- 
ement à  leurs  afferes  el  ne  se  soulever  de  ceulx  d'aultruy  que  bien 
à  point,  je  vous  asseure  qu'on  n'auroit  pas  faulte  de  bonnes  res- 
ponces  à  tous  voz  argumens.  Je  vous  veulz  bien  asseurer  que  bien 
leur  servira  s'ilz  trouvent  el  les  argumens  et  les  responces,  car  je 
ne  toucheray  pas  ceste  corde-là  ny  prèz  ny  loing,  et  ne  prenez  pas 
opinion,  Monseigneur,  que  je  soye  pour  en  escripre  un.  seul  advis, 
ne  d'y  fere  le  bon  varlet  pour  gaigner  leurs  bonnes  grâces,  car  d'en 
escripre  à  vostre  préjudice  je  ne  le  t'erois  jamais  :  d'en  escripre 
aussi  en  vostre  faveur,  il  fault  pour  infini/,  respeetz  que  je  m'en 
garde  comme  du  f«_u  (1),  qui  a  esté  cause  que  j«'  n'y  volu  rien  es- 
cripre à  la  Court  depuis  la  nouvelle  de  la  trefve,  afin  de  les  veoir 
parler  de  vosire  faicl  les  premiers.  Mais,  je  feuz  contrainct,  avant 
hier,  d'y  fere  une  dépesche,  et  y  en  touchay  quelque  mot  le  plus  so- 
brement que  je  pouvois  et  vous  en  envoyé  nne  copie,  afin  que  vous 
voyez  par  là  que  je  n'y  puis  rien  avoir  gasté,  mai-,  plustosl  accom- 
modé les  choses  à  vostre  intention,  sans  m'y  monstrer  passionné 
ne  intéressé.  De  vous  avoir  mis  en  avanl  les  difficultéz  el  doubtes 
que  je  y  ay  faict,  je  cuyde  certainement  avoir  faict  en  cela  l'office 
que  doibt  tout  bon  serviteur  peur  son  maistre,  h  si  cuyde  avoir 
faict  plus  pour  vous  que  pour  luy,  et  je  sçay  que  vous  louerez  mon 
intention  qui  est  très  bonne  en  vostre  endroict,  niais  que  vous 
m'ayez  ouy.  Il  est  impossible  que  nous  ne  sçaichons  bien  tost 
comme  tout  doibt  passer,  el    si  les  choses   seronl   comme  vous  les 

{i)  Depuis  les  observations  qu'il  avail  reçues  en  mars  1553  au  sujel  de  négo- 
ciations entamées,  en  vue  d'une  ligue,  avec  Hercule  II,  Dominique  «lu  Gabre  vivait 
dans  la  crainte  d'être  soupçonné  de  complaisance  envers  ce  prince. 


[MARS    1556]  DOMINIQUE    DU   GABRE  159 

désirez,  je  vous  prometz  ma  foy,  Monseigneur,  que  j'en  seray  fort 
aysé,  et  s'il  passent  autrement  j'en  seray  fort  marry.  Incontinent 
que  nous  aurons  nouvelles  certaines  de  leur  intention,  je  vous  iray 
trouver,  et  Vostre  Excellence  ne  me  trouvera  jamais  en  faulte  aux 
choses  qui  luy  toucheront,  et  la  suplie  de  me  tenir  pour  personne 
sincère  et  >i  franche  que  je  ne  sçaurois  dire  une  chose  au  contrere 
de  ma  pensée.  Je  ne  veulx  dire  pour  cela  que  je  ne  puisse  avoir  des 
opinions  fallaces  comme  tout  homme  peult  avoir,  car  la  perfection 
est  en  Dieu  seul. 

De  Venize,  ce  xxixe  de  février  1550. 

(Arcli.  de  Modène.  Arcb.  de  la  famille  Fieschi). 

GABRE   AU    CONNÉTABLE 

124.  —  [  Venise],  4  mars  1 556.  —  Monseigneur,  je  vous  escripviz 
hier,  par  Monsieur  de  Fourquevaulx,  et  depuis  j'ay  receu  ung  pac- 
quet  de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon  qui  m'en  recommande 
fort  la  dilligence,  et,  s'en  retournant  en  France,  ung  secrétaire  du  Roy 
de  Navarre  (1)  qui  m'a  dit  voulloir  aller  en  dilligence,  je  luy  ay 
baille  ceste  despeche,  Monseigneur,  par  laquelle  je  n'ay  aulcunes 
nouvelles  a  vous  dire,  sinon  qu'il  semble  que  Monsieur  le  Mareschal 
Strozzi  et  Monsieur  de  Montmorency  ne  sont  plus  en  campaigne  et 
ne  sont  point  allez  a  l'entreprise  de  Neptune  par  faute  de  munitions 
pour  leur  artillerie,  et,  au  demourant,  la  pralicque  de  Florence  est 
tant  publiée  a  Rome  qu'il  ne  sy  parle  d'autre  chose,  et  ung  de  ceulx 
qui  en  scavent  quelque  chose,  m'escript  qu'il  a  bien  peu  d'espérance. 
Je  croy  que  Monseigneur  de  Guise  soit  avec  le  Pape  de  ceste  heure 
et  qu'on  prendra  quelque  resolution  d'employer  la  ou  la,  ceste  pau- 
vre armée,  laquelle  me  mande  de  rien,  demeurant  si  longuemenl 
sans  faire  aultre  chose  (pie  cheminer.  Ces  Seigneurs  icy  n'entendent 
a  autre  chose  que  a  jouir  de  leur  repoz  accoustumé,  et  de  Levant 
il  n'y  a  rien  de  nouveau. 

De  Venize  ce  i  de  Mars  1556. 

l'.ilil.  nal..  Fr.  20644,  fol.  101     copie  . 


GABRE  AU  CARDINAL  DE  TOURNON 

125.  —  [Venise],  6mars  1556. —  Monseigneur.  J'ay  receu  les  deux 
lettres  qu'il  vous  a  pieu  m'escrire  du  pénultième  du  passe,  et  ayl  été 
fort  ayse  de  la  visite  et  consolation  que  vous  avez  eu  de  Monseigneur 

(I)  Antoine  de  Bourbon,  époux  de  Jeanne  d'Albret  et  père  de  Henri  IV.  Il  avait 
recueilli  en  1555  la  couronne  de  .Navarre  à  la  mort  de  son  beau-père  Henri  d'Albret. 


160  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1556" 

le  Cardinal  Caraffe  et  Duc  de  Guise.  On  parle  icy  de  la  praticque  du 
Duc  de  Florence  comme  si  elle  estoit  du  tout  escluse.  M  ayant  Ion 
asseuré  que  le  perre  alla  hier  en  Seigneurie  avec  lettres  et  commis- 
sion pour  dire  que  son  maistre  n'en  avoit  jamais  ouy  parler  et  s'es- 
bahissoit  fort  d'où  estoit  venu  ce  bruicl  ;  de  Rome,  on  m'escrit  aussi 
quil  nen  fault  experer  rien  qui  vaille.  De  sorte  que  je  voudrais  de 
bon  cueur  qu'il  n'en  eut  jamais  été  mention,  ou  que  Ton  eust  laissé 
mener  cella  au  Pape  sans  y  mettre  rien  du  Roy,  ni  de  sa  réputation; 
encores  n'auray-je  pas  grand  regret  a  la  honte  pourveu  que  ledil 
Duc  eust  le  dommage  et  le  châtiment  qu'il  mérite.  Je  crois  que.  des 
cette  heure,  Monseigneur  de  Guise  doit  avoir  pris  quelque  honne 
résolution  avec  nostre  Saint  Père  pour  employer  cette  armée  en 
quelque  lieues  sans  la  faire  plus  consommer  en  despense  inutille  et 
a  voyager.  J'envoyai  hier  vos  pacquets  pour  la  Court  et  pour  Lion 
par  un  secrétaire  du  Roy  de  Navarre  qui  s'en  esl  allé  <mi  diligence, 
estant  venu  par  deçà  pour  un  inconvénient  advenu  entre  Monsieur 
de  Nemours  (1)  et  Mademoiselle  de  Rohan  (2),  et  luy  ait  fort  recom- 
mandé vostre  pacquet.  De  la  Court,  jen'ay  aucune  nouvelle  de  Levant, 
mais  d'heure  a  autre,  j'attends  lettre  de  Monsieur  de  la  Vigne.  Je 
crois,  Monseigneur,    que  vous  soyés  des  cette  heure  a  Pozero  et  ne 


(1)  Jacques  de  Savoie,  duc  de  Nemours,  né  le  12  octobre  1531  à  l'abbaye  de 
Vauluisanl  (Champagne  .  (ils  de  Philippe,  duc  de  Savoie,  el  de  Charlotte  d'Orléans- 
Longueville.  Il  se  distingua  au  siège  de  Lens  1552  .  à  Metz  1553  .  servit  en  Italie 
et  en  Flandre,  fui  nommé  colonel  général  de  la  cavalerie  légère,  combattit  les 
protestants  pendant  les  guerres  de  religion,  mourutle  15  juin  158.:;.  —  Brantôme 
(Vie  des  grands  capitaines,  édil  Lalanne,  t.  iv,p.  )fii-8"î  dit  de  Jacques  de 
Savoie  qu'il  fut  en  son  temps  un  des  plus  parfaicts  el  accompliz  princes,  sei- 
gneurs et  gentilhommes  qui  furent  jamais.  Il  était,  en  outre,  un  prince  élégant, 
arbitre  de  la  mode  à  son  époque,  el  c'est  lui  que  Madame  de  La  Fayette  a  pris 
pour  type  de  son  héros  dans  la  Princesse  de  Clèves. 

(2)  Françoise  de  Rohan,  fille  de  René  de  Rohan,  I"  du  nom.  el  d'Isabelle  d'Àlbrel 
(fille  de  Jean  d'AIbret,  roi  de  Navarre).  Elle  étail  cousine  germaine  d'Antoine  de 
Bourbon  et  de  Jeanne  d'Albret.  L'« Inconvénient»  auquel  du  Cabre  l'ait  ici  une 
indulgente  allusion,  et  qui  lit  grand  scandale  à  son  époque  est  le  suivant  :  Françoise 
de  Rohan,  confiante  dans  la  loyauté  du  duc  de  Nemours,  el  sur  la  foi  du  serment 
qu'il  lui  avait  fait  de  l'épouser,  avait  cédé  à  ses  sollicitations,  étail  devenue 
enceinte  de  ses  œuvres  ei  avait  accouché  d'un  fils.  Nemours,  qui  accompagnait  le 
duc  de  (luise  en  Italie,  fut  averti  de  ce!  événemenl  etmisen  demeure  d'épouser 
M11»  de  Rohan;  mais  le  séducteur  occupé,  au  dire  de  Brantôme,  à  courir  les 
grandes  liâmes  el  les  courtisanes  d'Italie,  se  déroba  à  son  devoir  el  délaissa  la 
jeune  mère.  Françoise,  outrée,  demanda  la  légitimation  de  son  lils  à  la  justice 
devant  laquelle  elle  n'hésita  pas  à  l'aire  la  preuve  de  son  déshonneur.  Ce  pro 
commencé  le  21  janvier  1558,  dura  jusqu'en  1565,  date  à  laquelle  les  conclusions 
de  Françoise  furent  repoussées.  (Voir  sur  ce  curieux  épisode  l'étude  remarquable 
de  M.  H.  dk  La  Ferrière:  •Une  Cause  célèbre  au  w  r  siècle:  Françoise  de  Ko/m  h  ». 
parue  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes,  livraison  du  !"  octobre  1882). 


[MARS    1556]  DOMINIQUE    DU   GABRE  161 

voy  point  par  vos  lettres  que  vous  faciès  mention  d'en  partir:  je 
croy  que  ce  n'est  que  bienfaict  de  ne  voyager  point  durant  ces  froids 
et  temps  inconstant,  et  aussy  vous  verres  cependant  quel  parti  pren- 
dra mondict  Seigneur  de  Guise  pour  employer  son  armée;  et  c'est, 
Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous  diray  pour  cette  heure,  après  vous 
avoir  présenté  mes  très  humbles  recommandations. 
De  Venise  ce  vie  de  Mars  1556. 

Ms.  de  Grenoble,  fol.  101  r). 


GABRE    AU    DL'C    DE   GUISE 

126.  —  [Venise},  6  mars  1556.  —  Monseigneur,  j'ai  receu  une 
lettre  qu'il  vous  a  pieu  m'escripre  pour  regarder  de  trouver  icy  deux 
barques  ou  frégates  armées,  pour  accompaigner  par  mer  vostre  artil- 
lerie. J'en  ay  déjà  parlé,  attendant  que  vous  me  donniez  plus  libre 
commission  comme  il  vous  a  pieu  me  mander,  et  ay  trouve  homme 
suffisant  qui  mènera  deux  barques  a  huit  rames  chacune,  y.  aura 
buit  bons  vogueurs  et  ung  bombardier  (1)  et  veult  pour  leur  sallaire 
et  despens  soixante  dix  escus  pour  barque  le  moys,  et  dix  escus  pour 
un  chef  desdites  deux  barques,  qui  sera  pour  chacune  barque  lxxv 
écus  et  s'il  vous  plaist  qu'il  y  aye  quelques  mosquetz  (2)  ou  petites 
pièces  d'artillerie,  on  en  prendra  a  ceste  vile  a  louaige,  lequel  il  veut 
qu'on  lui  paye  emsemble  la  pouldre  qu'il  y  faudra.  Je  croy  bien  que 
a  Anconna  on  trouveroit  assez  de  ceste  petite  artillerie  sans  la  louer 
icy:  il  se  parloit  en  ceste  ville  si  publiquement  de  la  pratique  de 
Florence,  quant  je  feuz  ici  de  retour,  que  on  la  tenoit  pour  toute  con- 
clute  et  accordée,  mais  maintenant  on  change  de  langaige  et  dit  on 
quelle  est  du  tout  rompue  et  excluse  et  que  le  secrétaire  de  Florence 
qui  est  icy.  fut  hier  matin  en  seigneurie  avec  lettres  de  son  maitre  ; 
dire  que  jamais  son  dit  maitre  n'avoitouy  parler  de  cette  pratique  et 
s'esbahissoit  fort  dou  estoit  sourty  ce  bruit.  Si  est  ce  Monseigneur 
que  je  pense  que  vous  aurez  prins  en  toute  chose  quelque  bonne 
et  saige  résolution  avec  Sa  Sainteté,  pour  ne  laisser  plus  perdre  de 
temps  a  vostre  armée,  qui  me  faict  pitié,  la  voyement  si  longue- 
ment demeurer  sans  estre  employée.  Icy,  Monseigneur  ne  s'entend 
de  rien  de  M.  le  Mareschal  de  Bressac.  ny  de  Levant  ou  jay  escript 
et  continuera}-  encores  par  toutes  les  occasions  qui  se  présenteront 

(1)  Bombardiers  :  nom  donné  aux  hommes  préposés  au  service  des  canons  ou 
bombardes  et  des  mortiers. 

(2)  Mousquet:  arme  à  feu  introduite  en  France  en  1527:  ne  fut,  tout  d'abord, 
employée  qu'à  l'attaque,  sous  le  nom  d'arquebuse  à  mèche.  Plus  tard,  le  mous- 
quet fut  perfectionné,  et,  en  1567,  il  remplaça  définitivement  l'arquebuse. 


162  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1556] 

ce  que  vous  desirez,  mais  il  ne  peut  tarder  que  je  n"ay  bientost  une 
despeche  de  M.  de  la  Vigne,  dont  je  ne  fauldray  incontinent  vous 
donner  advis.  Je  despeche  ce  porteur  avec  tout  le  reste  de  vostre 
assignation  pour  le  moys  de  Mars,  ayant  retenu  ce  qu'il  faut  pour 
les  garnisons  de  Ferrare  et  de  la  Mirandola,  et  dez  ce  aujourd'huy  je 
faiz  partir  les  clercz  pour  aller  audit  Ferrare.  Oultreque  Ion  dit  que 
nous  aurons  icy  demain  Monseigneur  le  Duc,  lequel,  comme  je  croy, 
n'a  pas  intention  de  me  faire  grande  communication  de  ce  qu'il  y 
vient  faire,  car  jamais  ne  m*a  rien  mande  de  sa  venue.  Je  le  lairray 
faire  et  donneray  bon  advis  au  Roy  de  ce  que  je  verray  et  entendray. 
Au  reste,  Monseigneur,  vous  pouvez  faire  estât  que,  pour  Avril  et 
pour  May,  le  tiers  du  dépôt  qui  etoit  icy  ne  vous  manquera  point, 
qui  sera  pour  chacun  mois  xvim  vic  lxvi  écus  et  ne  reserveray  pour 
Ferrare  aux  autres  mois,  sinon  ce  que  vous  me  commanderez,  car 
de  la  court  il  ne  m'a  jamais  ete  commande  luy  payer  ung  seul  escu, 
et  afin  que  vous  puissiez.  Monseigneur,  veoir  comment  et  en  quelle 
sorte  toute  votre  assignation  vous  est  envoyée,  j'en  ay  mis  dans 
ceste  lettre  un  petit  estât,  qu'il  vous  plaira  bailler  a  Monsieur Vialart, 
pour  le  vérifier  avec  les  comptables  qui  sent  auprès  de  vous,  et 
n'ayant.  Monseigneur,  nature  de  quoy  vous  faire  plus  longue  lettre, 
je  la  finiray  de  mes  très  humbles  recommandations  a  vostre  bonne 
grâce. 
De  Venize  ce  vie  de  Mars  1556. 

l'.iM.  nul..  Latin  L7026,  toi.  184)  (originale). 


ilABRE    AT    CONNETABLE 

127.  —  [Venise  .  13  mars  1556.  Monseigneur,  je  vous  envoyé 
uur  lettre  de  Paquier  l  .  commissaire  ordinaire,  que  Monsieur  de 
Guiseavoil  laisse  auprès  de  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  lequel 
vienl  de  me  dire  aujourd'huy  que  ledil  sieur  Duc  luy  a  tenu  un 
langaige  aujourdhuy  forl  farouche  el  ^\^  protestations  si  l'on  ne 
mettoit  entre  ses  main-  le  payement  de  ses  garnisons  pour  ce  mois 
de  mars,  et  ma  dicl  aussy  que  Monsieur  le  Prince  luy  avoil  dicl 
a  Ferrare  qu'on  faisoil  tant  de  difficultés,  que  bientosl  on  feroil  tant' 
une  bonne  folie  a  Monsieur  le  Duc  son  père;  ledict  Pasquier  luy  a 
repondu  que  des  le  premierjour  de  Mai-  javois  tait  mettre  es  mains 
du  Trésorier  douze  mille  escus  pour  paier  sesdites  garnisons,  des- 
quelles il  avoit  faict  la  monstre  et  estoil  prest  "l'en  faire  le  paye- 
ment a  la  banque  suivanl  lordonnance  du  Roy,  laquelle  ses  ministres 

\ndir  Allemand,  sieur  de  Pasquier,  commissaire  ordinaire  des  guerres  à 

l'année  du  duc  de  Guise  en  Italie.    Bibl.  nui..  Fr.  IU395,  toi.    8 


[MARS    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  163 

ae  pouvoient  rompre  sans  commandement  exprès  de  sa  Majesté; 
mais  il  n'y  a  ordre  que  ledit  sieur  Duc  se  veuille  contenter  s'il  n'a 
l'argent  entre  ses  mains.  Sa  façon  de  procedder  el  sod  parler  m'a 
l'aict  craindre  qu'il  aye  quelque  mauvaise  fantaisie  de  se  retirer  du 
service  du  Roy;  il  ne  me  parle  aucunement  de  son  particulier  et  j'en 
laisse  faire  audit  Pasqûier  :  touttefois  nous  le  observerons  de  façon 
et  avec  si  grande  sumission  qu'il  n'aura  juste  occasion  de  se  plain- 
dre que  de  luy  mesme. 

De  Venise  ce  xme  Mars  1556. 

.M s.  de  Grenoble,  fol.  58  r°). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

128.  —  [Venise],  13  mars  1556.  —  Monseigneur,  je  reçus  hier  les 
lettres  qu'il  vous  a  pieu  m'escrire  du  premier  de  ce  mois  avec  le 
discours  imprimé  de  la  rupture  de  la  trefve,  lequel  j'ay  leu  et 
trouvé  a  mon  gré  aussy  bien  l'aict  qu'il  est  possible;  je  le  traduiray 
enltalyenp  our  mieux  le  publier  par  deçà;  il  a  pieu  aussy  au  Roy  et  a 
vous  m'escrire  une  seconde  fois  des  quinze  cens  escus  de  Monsieur 
de  S1  Ciergue,  et  je  ne  vous  supplye  très  humblement,  Monseigneur. 
m'excuser  si  je  vous  ay  respondu  a  la  première  et  croire  que  ce  n'a 
point  esté  pour  n'avoir  este  dilligent  et  soigneux  a  faire  tout  ce 
qui  m'en  a  este  commande,  car  la  Seigneurie  fera  tousjours  bon 
tesmoignage  du  debvoir  que  j'y  ay  faict  et  je  vous  puis  asseurer, 
Monseigneur,  que  ce  négoce  seul  me  donne  plus  de  peine  que  tous 
les  affaires  du  Roy  emsemble;  et  si  n'en  puis  venir  à  bout.  J'en 
parlay  a  la  Seigneurie  aussy  tost  que  j'eus  la  première  lettre  du 
Roy,  mais  pour  ce  qu'ils  ne  peuvent  ny  doibvent  faire  cette  delli- 
vrance  sans  ouyr  la  partie  qui  a  faict  séquestrer  cet  argent,  il  a  fallu 
plaider  par  advocats  devant  la  Seigneurie,  encores  que  la  partie  aye 
fait  tous  ses  efforts  de  tirer  la  cause  devant  leurs  juges,  ce  qui  fust 
toujours  empesché  soubs  la  faveur  du  nom  du  Roy.  La  venue  icy  du 
Cardinal  Caraffe  et  mon  allée  par  deux  ou  trois  fois  a  Ferrare  au 
camp,  ont  faict  defferer  ce  jugement  et  la  responce  de  la  Seigneurie. 
tant  pour  les  occupations  que  eulx  mesmes  avoient.  que  pour  les 
mesmes,  et  ayant  icy  faict  consultation  avec  les  advocats,  ils  furent 
aussy  d'advis  de  lever  une  sentence  que  Monsieur  de  S1  Ciergue 
avoit  obtenu  a  Rome  contre  celte  partie  icy,  laquelle  Monsieur  le 
Cardinal  d'Armagnac  m'a  envoyée  moyennanl  vingl  cinq  escus.  que 
j'en  ay  payé  et  fallu  attendre  quelques  mois  pour  la  recouvrer  final- 
lement.  Il  y  a  cinq  jours  que  je  lis  encores  appeler  la  partie  et  fismes 
une  longue  playdasserye  devant  la  Seigneurie,  et  devant  que  les 
advocatz  entrassent,  et  après,  je  leur  voulus  faire  une  bonne  remons- 


164  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1556] 

trance  de  l'interest  du  Roy  et  de  la  justice  de  nostre  cause,  leur 
remonstrant  doucement,  par  forme  de  protestation,  que  d  une  cause 
privée  ei  particulière  ils  on  pourroient  bien  faire  cause  publicque 
d'estat  et  que  le  Conseil  du  Roy.  qui  entendoit  la  raison  et  les  lois, 
pourroit  interpréter  cette  rétention  d'argenl  violente  et  pour  déné- 
gation de  justice,  et  chercher  la  raison  par  représailles  ou  autres 
voyes  qui  pourroient  engendrer  quelque  altération  entre  le  Roy  H 
eulx;  que  je  les  supplyois  d'y  voulloir  penser  et  que  j'estois  resoleu 
de  ne  leur  en  parler  plus.  Apres  ceste  protestation,  ils  monstrent 
estre  autant  fâchés  que  moy  mesme  de  cette  lascheuse  besoingne  H 
me  proposèrent  party  que  je  me  voulusse  contenter  de  remettre  ce 
jugement  aquelque  homme  de  loix.  tel  que  je  voudrois,  qui  vuidasl 
ce  faict  icy  sommairement,  atlin  d'esvitèr  toutes  despenses  et  le 
soupçon  que  je  pouvois  avoir  d'aucuns  de  la  Seigneurie  qui  préten- 
doient  quelque  chose  sur  cet  argent.  Je  leur  ili-  que  du  différent 
d'entre  le  marchant  et  M'  de  S'  Ciergue,  qui  sont  actions  privées  ei 
particulières  entre  eux.  je  ne  m'en  voulois  aucunement  empescher, 
d'autant  qui1  le  Roy  n'y  avoil  point  d'intérest.  et  que  en  cela  ils  ren- 
voyassenl  le-  parties  devanl  tels  juges  quils  voudrôient,  mais  que 
cependant,  et  an  préalable,  je  voulois  estre  réintégré  de  ces  quinze 
cens  escus  qui  estoienl  desja  acquis  an  Roy  par  la  vente  de  -on 
propre  patrymoine  au  sieur  de  S'  Ciergue,  et  que  la  justice  d  •  ma 
cause  estoil  si  claire  et  si  certaine  en  cela  que  je  ne  la  voullois 
aucunement  mettre  en  dispute,  ei  enarbitre  de  juges.  11/  ne  -curent 
comment  s'en  desmesler  ny  que  m'en  respondre  sinon  que  de  me 
prier  que  je  leur  donnasse  loisir  d'en  parler  emsemble  pour  m'en 
faire  responce,  laquelle  je  leur  demanderay,  mai-  que  Monseigneur 
le  Duc  de  Ferrare  soit  party  d'icy,  car.  tant  quil  y  sera,  ces 
Seigneurs  seront  fort  occupés  et  moy  aussy.  .le  vous  escris  M.  la 
vraye  histoire  de  ce  faicl  pour. s'il  vous  plaist,  la  taire  communiquer 
a  Monsieur  de  S'  Ciergue,  voullanl  bien  vous  asseurer  que  la  vérité- 
et  la  raison  est  du  coste  du  Roy  p  iut  la  dellivrance  il'1  cel  argent, 
mais  la  justice  est  icy  toit  favorable  a  leurs  cytadins  et  Pieu  peu  aux 
estrangers,  ei  vous  veux  dire  davantage,  Monseig',  que  ce  marchant 
qui  prétend  sur  cei  argenl  a  sod  action  si  mal  fondée,  que  devanl 
un  juge  non  suspecl  il  ne  luy  scauroil  jamais  estre  adjuge  deux  cens 
escus  a  mon  advis,  et  si  .Monsieur  de  S  Ciergue  voulloil  envoier  par 
quelque  lettre  de  credicl  d'un  banquier  île  Pari-  ou  de  Lyon,  qu'on 
feisl  icy  cautions  ou  seureté  pour  luj  de  paier  ce  qui  sera  adjuge 
par  sentence  ou  par  arbitres  a  ce  marchant,  les  quinze  cens  escus 
me  seront  dellivres  du  soir  au  matin,  cl  -  il  m'envoyoil  procuration 
pour  alléguer  sa  declinatoire  et  deffendre,  et  respondre  a  celluy  qui 
luy  demande,  on  donneroil  bien  ordre  qu'il  ne  luy  seroil  poincl  faicl 
de  tort  et  la  partie  seroil  forcée  de  se  contenter  de  ce  peu  qu'on  luy 


[MARS    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  16o 

voudroit  bailler,  mais  de  ne  vouloir  plaider  ni  paier,  cela  nest  pas 
fort  raisonnable.  Je  vous  asseure  bien,  Monseigneur, que  s'il  y  alloit 
de  ma  propre  vye,  je  ne  scaurois  faire  davantage  ny  mieux  que  je 
y  ay  faict,  et  le  suis  d'autant  plus  volontiers  que  je  congnois  bien 
que  vous  désirés  faire  bien  et  plaisir  audit  Sr  de  S1  Ciergue.  J'escris 
en  la  lettre  du  Roy  ce  que  nous  avons  de  nouveau  icy. 
De  Venise  ce  xme  de  Mars  1556. 

M  s.  de  Grenoble,  fol.  56  v°). 


GABRE   AU    DUC    DE    GUISE 

129.  —  [Venise],  16  mars  1556.  —  Monseigneur,  ce  jourd'huy  est 
party  d'icy  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  et  crois  que  c'a  esté  sans 
avoir  faict  chose  d'importance,  avec  ses  seigneurs  pour  le  moins;  il 
ne  m'en  a  dict  chose  quelconque,  et  pour  ce  qu'il  couroit  icy  un 
bruit  commung,  quil  estoit  mal  content  du  Roy  et  quil  se  vouloet 
retirer  de  son  service,  et  persuader  ces  seigneurs  a  une  ligue  entre 
eulx,  le  Duc  de  Florence  et  luy,  il  m'assura  que  cela  n'entra  jamais 
en  sa  pensée,  et  quil  n'a  parlé  du  Roy,  ni  du  Pape  a  ces  seigneurs, 
synon  bien  fort  honorablement,  et  avec  la  soubmission  et  obser- 
vance que  doibt  un  leur  serviteur  fidèle  et  homme  de  bien  comme 
il  est  ;  quil  voit  bien  quil  y  en  a  qui  ont  envie  quil  se  retire  de  ce 
service  quoiqu'il  y  veuille  demeurer;  mais  si  on  ne  luy  veult  garder 
ce  quon  luy  a  promis,  il  scayt  bien  ce  qu'il  a  affaire,  et  ne  fauldra 
en  ce  cas  la  de  se  retirer  dudit  service,  demandant  ladessus  argent 
pour  son  mois  de  Mars,  dont  jamais  il  ne  s'estoit  pu  accorder  avec 
Monsieur  Paquier  pour  deux  raisons,  lesquelles  aucun  ministre  du 
Roy  ne  luy  peult  accorder  si  sa  Majesté  ou  vous,  Monseigneur,  qui 
avez  toute  puissance,  ne  le  commandez  :  l'une  est  qu'il  veult  ses 
gens  de  pied  et  de  cbeval  estre  payez  a  plus  grande  solde  que  les 
Papalins(l)  et  autres  Italiens  qui  servent  a  la  Ligue;  l'autre  qu'il 
ne  veult  les  soldatz  estre  payez  en  la  banque,  mais  qu'on  luy  baille 
largent  en  main,  et  faisoit  en  cela  de  fâcheuses  protestations, 
a  quoy  ledit  sieur  Pasquier  et  moy  avons  trouvé  un  expédient  affin 
qu'il  ne  s'excusast  sur  nous  s'il  luy  prenoit  quelque  mal  fantaisie, 
et  luy  avons  baillé  neuf  mil  cinq  cens  escus,  a  quoy  peuvent 
monter  ses  garnisons  et  son  estât  de  Lieutenant  pour  un  mois,  a 
charge  que  sy  le  Roy  et  vous  le  trouvez  mauvais,  ladite  somme  sera 
en  diminution  et  payement  des  trente  mil  escus  qu'il  presta  comp- 
tant a  sa  Majesté  il  y  a  environ  dixbuit  mois.  Cependant  on  scaura 

(1)  Soldai    du  Pape. 


106  NÉGOCIATIONS    DK  [MAI    1556" 

lintention  du  Roy,  sur  la  forme  et  règlement  de  son  payement,  de 
quoy  il  s'est  contenté  et  est  party  pour  aller  donner  ordre  a  ses 
affaires,  ayant  eu  advis  que  les  Impériaux  passoient  le  Pau  (1)  a 
Cazal  Major  (2),  et  qu'il  s'etoit  decouverrt  une  trahizon  en  l'une  de 
ses  places  ou  Monsieur  le  Prince  son  fils  etoit  allé  donner  ordre.  On 
dit  que  lesdits  Imperiaulx  passent  le  Pau  pour  aller  en  Toscane, 
qui  seroit  moindre  mal  que  s'ilz  s'arrestoient  sur  le  Ferrarois.  car  il 
fauldrait  entrer  eh  une  nouvelle  despense  pour  ceste  protection,  et 
je  crois  bon  aussy.  par  ce  qu'on  eseript  de  Home,  que  vous  n'aurez 
que  faire  en  Toscane,  nayant  peu  détourner  le  Pape  de  l'entreprinse 
de  Naples.Cest  grand  desplaisair,  Monseigneur,  que  Ton  vous  tienne 
sy  longuement  à  Rome  sans  résolution.  Ces  seigneurs  ont  nouvelle 
de  leur  Bayle  que  le  Sr  de  Lavigne  est  arrivé  à  Andrinopoli  (3)  le 
un  febvrier.  etquon  faisoit  grande  diligence  d'armer  grand  nombre 
de  galères,  ils  disent  toujours  que  c'est  pour  garder  leur  pays.  Mais 
je  crois  que  ledit  S1  de  la  Vigne  l'aura  aisée  en  leur  remonstrant 
qu'il  n'y  a  meilleure  seurelé  pour  leur  pays  que  de  venir  assaillir 
l'ennemy  dans  le  sien.  Aujourdhuy.  qui  est  le  xvne,  est  venu  la  nou- 
velle a  M.  le  Légat,  qui  est  icy,  de  la  promotion  desCardinaulx  faicte 
lundy,  dont  il  est  du  nombre,  vous  asseurant  que  le  Roy  n'a  un 
meilleur  serviteur  que  luy,  ni  qui  soit  plus  homme  de  bien  :  sy  jay 
quelque  chose  du  costé  de  Levant  digne  de  Vostre  Excellence,  je  ne 
fauldray  vous  en  donner  advis. 
De  Venize  ce  16  mars  1556. 

Itilil.  nul..  Fr.  236  p.  130,  el  Mém.  du  duc  il.'  Guise,  etc.,  p.  271). 


GABBE   AC   CONNÉTABLE 

130.  —  [Ferraré],  a  mai  1556. —  Monseigneur,  je  ne  vous  feray 
longue  lettre  par  ce  porteur,  le  cavalier  de  Frotté,  gentilhomme 
Ferrarois,  lequel  s'en  va  trouver  Monsieur  le  Prince,  ,1e  vous  dirai 
que  le  courrier  Tassin  arriva  a  Venize  le  \.\ir  du  mois  passe  et  feist 
fort  bonne  diligence.  C'estoit  sur  l'arrivée  de  laReynede  Polonya  \  . 
ou  je  assistay  avec  les  aultres  ambassadeurs,  et  pour  accompaigner 
la  Seigneurie  et  le  Bucentore,  et  aussi  pour  recepvoir  Monseigneur  le 
Cardinal  de  Ferrare,  qui  venoil  louger  eu  mon logerz,  et  incontinanl 

(1    Le  Pô. 

(2)  Casai  Maggiore,  place  de  Lombardie,  sur  la  rive  gauche  du  iv>,  a  35  kil.  do 
Crémone. 

:;  Indrinople,  ville  de  Turquie  d'Europe,  à  200  kil.  de  Constanlinople  C'esl 
la  seconde  capitale  de  l'Empire  Ottoman. 

(4)  Bona  siui'/.a.  deuxième  femme  de  si^is ni  Auguste,  roi  de  Pologne. 


[MAI    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  167 

suivant  votre  commendement,  je  m'en  vins  icy,  ou  je  fiz  entendre  a 
Monseigneur  le  Duc  le  contenu  au  mémoire  signé  du  Roy  et,  après 
que  nous  eusmes  longuement  devisé  et  disputé  noz  raisons  et  oppi- 
nions  tousjours  fort  contrères,  la  responce  de  mondit  s'"  le  Duc  fust 
qu'il  ne  pouvoit,  pour  lors,  me  dire  librement  sa  résolution,  et  qu'il 
ne  voulloit  attendre  nouvelles  et  lettres  de  Monsieur  le  Prince  son 
lils  et  la  venue  de  son  ambassadeur,  puis,  qu'il  estoit  sur  son  parle- 
ment et  davantaige  qu'il  ne  voulloit  contraster  contre  la  volunté  du 
Roy,  lequel  il  voulloit  bonorer  et  révérer  comme  son  seigneur  et 
son  maistre,  mais  qu'il  luy  sembloit  bien  qu'on  luy  faisoit  grand 
tort.  Depuis  est  arrivé  Monsieur  le  Chevalier  Sève  (1)  avec  la  nou- 
velle de  cette  cheute  de  Monsieur  le  Prince  (2)  et  de  sa  guerison, 
lequel  nous  a  confirmé  que  sondit  ambassadeur  debvoit  partir  un 
jour  ou  deux  après  luy;  de  sorte  que,  encores  aujourdhuy,  avant  que 
me  mettre  a  escripre  la  présente,  j'ay  reparle  a  mondit  sr  le  Duc, 
qui  de  son  particulier  ma  dicl  que  s'il  ne  fust  intervenu,  cest  incon- 
vénient a  son  fllz  et  que  Sa  Majesté  aye  resoleu  de  ne  vouloir  mieulx 
faire  que  mon  mémoire  ne  contient,  il  estoit  bien  asseuré  que  son- 
dit  fllz  seroit  déjà  de  retour,  le  luy  ayant  ainsi  promis,  et  qu'il  ne 
peult  croire  que  son  ambassadeur  ne  vienne. bientost,  après  lequel 
il  ne  fauldra  de  faire  responce  telle  qu'il  plaira  a  Dieu,  voulant  tou- 
tesfois  toujours  demeurer  bon  serviteur  du  Roy,  et  j'ay  bonne  espé- 
rance que  les  choses  s'accommoderont  et  ne  se  passeront  que  bien. 
J'attendray  encores  icy  troys  ou  quatre  jours  la  veneue  dudit  am- 
bassadeur et  puis  m'en  retourneray  a  Yenize,  et  le  Chevalier  Sève 
pourra  par  aventure  demourer  icy  trois  ou  quatre  jours  après  moy 
et  vous  porter  la  resolution  dudit  sieur  Duc,  lequel  se  fut  trouvé 
fort  désolé  de  la  disgrâce  advenue  a  Monsieur  son  lilz,  si  vous  ne 
luy  eussiez  fait  entendre  tout  en  un  coup  comme  il  estoit  hors  de 
danger.  Nous  n'avons  pas  encores  nouvelles  que  Monseigr  le  Car- 
dinal de  Ferrare  soit  party  de  Rome,  et  remettant  a  vous  escripre 
amplement  par  aultre  voye. 
De  Ferrare  ce  vie  Mai  1556. 

(Bibl.  nat.,Fr.  3117,  fol.  122)  (originale). 


(1)  Le  nom  de  ce  personnage  a  été  mal  transcrit  par  le  copiste  de  la  présente 
dépêche  ;  il  s'agit  ici,  ainsi  qu'on  le  verra  à  la  dépêche  suivante,  du  chevalier 
Michel  de  Seur-re,  néàLumigny  en  Brie,  conseiller  du  roi.  gentilhomme  ordinaire 
de  la  chambre,  capitaine  de  50  lances,  chargé  de  missions  en  Portugal  (1558,,  en 
Corse  (1559j,  ambassadeur  à  Londres  (1569).  —  Voir  Brantôme,  édit.  Lalanne, 
t.  ut,  p.  96  note  2. 

(2)  Le  prince  Alphonse  fut  désarçonné  dans  un  tournoi  par  un  cheval  rétif 
appartenant  à  son  beau-frère  de  Guise  ;  il  resta  sans  connaissance  pendant  plu- 
sieurs heures,  à  tel  point  qu'on  le  crut  mort.  Son  rétablissement  exigea,  d'ailleurs, 
plusieurs  semaines  de  soins.  (Voir  Bodocanachi,  Renée  de  France,  p.  276). 


168  NÉGOCIATIONS    DE  MAI    iooG 


GABRE    AL"    CONNETABLE 

131. —  [Venise  ,  16  mai  1Ô56. —  Monseigneur,  je  vous  escripvis 
de  mon  arrivée  a  Ferrare  par  un  gentilhomme  Ferrarois  qui  alloit 
vers  Monsieur  le  Prince  et  de  mon  parlement  de  la,  par  le  Chevalier 
de  Seure,  et  jusques  a  aujourd'hui  il  n'y  a  encores  nouvelles  de  l'am- 
bassadeur Alvarot,  a  la  venue  duquel  Monsieur  le  Duc  remettoit  a 
dire  sa  résolution,  et  pour  ce  que,  par  les  lettres  que  jeus  hier  de 
Rome,  je  veoy  que  le  parlement  de  Monsieur  le  Cardinal  C  a  rafle 
estoit  résolu  a  mardy  12e  de  ce  moys  et  que,  a  son  arrivée,  vous 
aurez  a  parler  de  beaucoup  de  chose  des  affaires  d'Italie.  Je  n'ay 
plus  volu  différer  de  vous  escripre  au  long  ce  peu  que  j'ay  negotié 
avec  ledit  sieur  Duc.  afiin  que  cela  ne  voue  tienne  en  suspens  et 
que  s'il  veult  demeurer  sur  la  longueur,  vous  puissiez  vous  resoul- 
dpe  de  vous  mesmes.  J'ay  mis  pour  ceste  cause  nostre  dialogue  el 
dispute  par  ung  mémoire  qu'il  vous  plaira  voir  et  après  me  com- 
mander ce  que  je  auray  a  y  faire,  il  esl  vray  que  je  loueray  toujours 
tous  parliz  et  moyens  qui  puissent  rendre  content  ledit  sieur  Duc, 
mais  aussy  je  desirerois  que  Son  Excellence  se  volust  payer  avec  la 
raison  et  non  avec  tant  d'argent  qu'il  demande  ;  il  s'en  peult  fort 
bien  passer,  et  Sa  Majesté  n'a  pas  grande  occasion  ny  obligation 
d'entier  en  telles  despences  nouvelles:  il  dit  qu'on  luy  fait  grand 
tort,  et  je  lui  ay  souvent  dit,  au  contraire,  que  je  n'en  croy  rien  dont 
il  n'est  guère  content  de  moy.  Je  suis  toujours  attendant  l'arriver 
de  M.  de  Villemonlez,  pour  savoir  au  vray  l'intention  du  (irand 
Seigneur,  qui  ne  peull  estre  que  lionne,  cai  ces  Seigneurs  onl  eu 
quelques  advis  de  ceste  porte,  comme  sa  hautesse  avant  entendu  la 
vérité  de  la  trefve  par  ladvis  que  le  Roy  luy  eu  avoit  donne,  avoil 
montré  d'en  estre  fort  contente,  puisqu'elle  estoil  tant  honorable  et 
avantageuse  pour  Sa  Majesté.  J'ay  parle  a  Monsieur  île  Corlenay 
suivant  ce  qu'il  vous  avoil  pieu  me  mander  el  luy  ay  baille  la  lettre 
de  Berlheville  I  .  Il  m'a  prié  bien  fort  que  je  vous  voulusse  mercier 
très  humblemenl  du  bon  el  prudent  record  que  vous  luy  donné, 
lequel  il  est  délibère  d'ensuivre,  el  se  tiendra  toute  sa  vie  vostre 
obligé,  estant  bien  marry  de  l'indiscrétte  el  mauvaise  conduite  de 
ceulx  qui  onl  fait  ceste  dernière  allarme  en  Angleterre,  el  que 
jamais  n'en  adviendra  aultrement,  jusques  a  ce  qu'ilzayenl  ung  chef 


(1)  Bertheville,  ancien  capitaine  français,  passé  jadis  au  service  du  roi  d'An- 
gleterre  :  joua  un  rôle  très  équivoque  sous  François  l,r  el  Henri  il,  el  ue  chercha 
jamais  qu'à  faire  chèrement  payer  ses  services.  Sur  ce  personnage,  voir  Germain 
Lkfebvrb-Pontalis,  Correspondance  d'Odel  de  Selve,  p.  29,  ;•-'.  318,  etc.). 


[AOUT  1556]  DOMINIQUE  DU  GABRE  160 

en  leurs  entreprinse  favorisé  et  aidé  des  forces  d'un  prince  estran- 
ger,  et  que,  quant  le  Roy  verra  qu'il  en  soit  temps,  ledit  sr  Cortenay 
ne  manquera  respondre  a  Bertheville,  et  ne  veult  aulcunement 
entrer  en  pratique  avec  luy  pour  beaucoup  de  bons  respectz  qu'il 
m'a  dict  ;  mais  il  a  ung  homme  a  la  court  auquel  il  a  entière  fiance 
et  m'a  dict  que  le  Roy  et  vous,  Monseigneur,  le  congnoissiez;  il  m'a 
baillé  ung  pacquet  pour  le  luy  faire  tenir;  s'il  vous  plaist  le  faire 
chercher  et  luy  bailler  ledit  pacquet,  il  en  sera  fort  aise.  Nous  par- 
lons emsemble  en  une  maison  ou  il  vient  seul  de  nuit,  et  si  je  le 
rencontre  après  aux  assemblées,  ou  que  l'Ambassadeur  d'Espagne 
ou  d'Angleterre  m'en  parlent,  comme  il  est  advenu  souvent,  je  fais 
semblant  de  ne  le  connoistre  point.  Si  vous  voulez,  Monseigneur, 
que  je  luy  face  entendre  quelque  autre  chose,  j'auray  toujours 
moyen  de  le  faire  bien  secrètement.  Monseigneur,  il  vous  plaira  me 
renvoyer  mon  secrétaire,  si  le  Roy  entend  que  je  demeure  encores 
par  deçà. 
De  Yenize,  ce  16e  de  Mai  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  206  44,  fol.  146)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

132. —  [Terme],  16  mai  1556. —  Monseigneur,  je  vous  escriptz 
de  l'affaire  de  Ferrare  par  une  autre  lettre,  accompaignée  d'un  mé- 
moire, auquel  je  n'ay  pas  dit  tout  ce  que  j'en  pense,  pour  les  res- 
pectz que  je  veoy,  Monseigneur,  que  vous  avez  très  bien  considérez 
a  la  despeche  que  vous  porta  mon  secrétaire,  dont  je  vous  mercye 
très  humblement,  mais  il  est  forcé  que  je  vous  en  dye  franchement 
mon  oppinion  par  ceste  cy  que  j'adresse  a  Monsieur  de  Beauregard 
pour  la  lire  a  vous  seul  et  puis  la  retirer,  affln  que  autre  que  vous, 
Monseigneur,  ne  la  puisse  veoir,  si  d'avenlure  vous  ne  pensiez  qu'il 
fut  bon  de  la  montrer  au  Roy.  A  ce  que  j'ay  peu  entendre,  Monseigr 
Monsieur  le  Duc  (1)  est  pour  se  contenter  de  ce  que  le  Roy  luy  a 
offert,  s'il  n'en  peuct,  faisant  le  mal  contant,  en  tirer  davantaige; 
mais  il  veult  tacher,  a  ce  qu'on  m'a  dit,  que  vous  luy  faciez  bailler 
le  payement  de  cent  hommes  d'armes  par  sa  quictance,  sans  faire 
monstre  comme  l'on  faisoit  sa  garnison  de  Bressel,  et  convertir 
ceste  despense  en  pension  avec  les  cinquante  mille  livres  ;  mais  il 
se  garde  bien  de  m'en  parler,  car  je  luy  diz  fort  ses  veritez  et  ne 
suis  plus  de  ses  favoritz.  Je  crois  certainement  que,  avec  celte  pen- 
sion, il  ne  mectroit  pas  un  homme  davantage  a  garder  son  estât, 
mais  cella  seroit  pour  d'autant  augmenter  son  trésor,  et  je  vous 

(1)  Le  Duc  de  Ferrare. 

15 


170  NÉGOCIATIONS    DE  [MAI    1556J 

laisse  a  penser  si  cette  liberallité  est  ny  bien  deue  ni  bien  employée 
et  si  le  Roy  a  besoing  d'entrer  en  une  telle  despence,  de  laquelle  sa 
Majesté  ne  se  déchargera  pas  après  aisément  si  elle  est  une  fois 
introduicte  et  commencée.  Je  pense  que  Sa  Majesté  ne  se  lairra  pas 
aller  jusques  la,  et  vous  supplie,  Monseigneur,  excusez  moy  si  je 
vous  diz  deux  mots  de  mon  advis  sur  tous  ces  broillemens  d'Italie, 
car  ayant  veu  durant  ces  guerres,  le  procédé  de  ses  potentatz  et  de 
ceste  nation  envers  le  Roy,  quand  ilz  l'ont  veu  en  grand  travail  pour 
leurs  affaires  propres,  j'ay  désir»'  souvent  une  chose  que.  Dieu 
mercy  et  vous,  je  veoy  aujourd'huy  :  c'est  de  les  veoir  en  nécessite 
et  avoir  besoing  du  Roy  et  que  Sa  Majesté  se  peult  passerd'eulx  pour 
leur  rendre  la  pareille.  Vous  avez  en  cella  fait  le  plus  fort  et  m'ac- 
tendz  que  vous  conduirez  bien  le  reste.  La  ligue  du  Pape  et  la 
cappitulacion  de  Ferrare  ont  esté  faictes  au  temps  de  nostre  néces- 
sité, et  est  impossible  qu'il  n'y  ait  quelque  chose  trop  desadvan- 
tageux  pour  le  Roy,  car  nous  estions  contrainctz  de  s'accommoder 
a  toutes  leurs  complexions  et  voluntez  et  maintenant.  Dieu  mercy, 
c'est  a  eulx  a  s'accommoder  aulx  voslres.  Le  Pape  ne  se  peult  plain- 
dre de  la  tresve  faicte  sans  son  sceu  et  au  préjudice  de  la  ligue,  car. 
oultre  ce  que  le  y  avez  fort  bien  comprins,  vous  la  luy  feistes 
entendre  avant  que  de  la  conclure,  et  Sa  Sainteté  faict  responce 
qu'il  en  estoit  très  content,  conseilloit  et  persuadoit  Sa  Majesté 
d'accommoder  ses  affaires  s'il  povoit  avoir  paix  ou  trêves.  11  me 
souvient  bien  que  Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon  me  l'escrivit 
et  si  bien  Sa  Saincteté  avoit  autre  intention  en  son  cueur.  et  ses 
nepveuz  avec,  ilz  eussent  eu  honte  de  dire  autrement.  J'enlendz 
que  le  Turcq,  qui  est  infîdelle,  n'a  peu  faire  de  moins  que  de  la 
louer,  puisqu'elle  eloit  a  l'advantaige  du  Roy.  Maintenant  le  Car- 
dinal Caraffe  s'en  va  trouver  Sa  Majesté  el  ne  sauroit  on  oster  de 
l'opinion  du  inonde  qu'il  n'aille  la  pour  essayer  par  tous  moyens  de 
vousremectre  en  la  guerre,  et  vous  attirer  a  leur  imprese  de  Naples 
et  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  se  veult  en  son  particulier  forl  ayder 
delà  faveur  du  Pape  el  dud  Cardinal  en  vostre  endroit,  non  qu'il 
désire  la  guerre,  car  il  n'en  vouldroil  jamais  03 1  parler,  el  scait  bien 
aussi  que  vous  vous  y  remettrez  mal  volontiers,  mais  ils  se  voul- 
droit  ayder  de  piedz  et  de  mains  pour  avoir  un  grand  traitement  du 
Roy  sans  riens  faire.  Nous  devez,  Monseigneur,  bien  honorer  et 
caresser  le  Cardinal  Caraffe  et  monstrer  de  trouver  bon  tout  ce  qu'il 
proposera,  mais  surtout  avoir  vostre  inteneion  principalle  de  rompre 
el  nieclre  a  néant  les  traielez  de  la  ligue  et  de  Ferrare,  pour  les 
faire  d'une  aultre  façon,  mainctenanl  que  c'esl  a  eulx  a  vous  recher- 
cher, el  qu'ilzont  besoing  de  vous  el  vous  nul  besoing  d'eux,  el  voua 
ferez  fort  aisemenl  cella  si  vous  les  embarquez  l'ung  el  l'autre  en 
nouveaulx  partyz.  Je  veoy  que   le  Pape  a  procédé  a  la  privation  <le 


[MAT  1556i  DOMINIQUE  DU  CABRE  171 

Testât  d'Ascanio  Colonna  (1),  quy  est  de   trente  mil  escuz  de  rente, 
et  en  a  investy  le  comte  de  Montorio  ;  il  en  veult  faire  aultant  de 
Julien  Cesarin  et  de  beaucoup  d'autres  choses  qui  ne  peuvent  durer, 
après  la  mort  de  ce  Pape,  si  ces  nepveuz  ne  sont  deffenduz  du  Roy. 
Sa  Saincteté  fait  fort  mauvais  traitement  a  l'Ambassadeur  de  l'Em- 
pereur (2)  et  au  Duc  de   Florence,  et  semble  qu'il  cerche  toutes 
occasions  de  guerre  et  est  malaysé  que  l'Empereur  ny  son  filz  sup- 
portent tout  cella,  s'ilz  ne  sent  gardent  pour  le  respect  du  Roy.  Les 
nepveuz  de  Sa  Sainteté  voyent    bien  aussi  qu'ilz  ne  peuvent  fonder 
ne  assurer  grandeur  en  leur  maison  sans  l'appuy  du  Roy.  Il  ne  fault 
aussi  jamais   craindre  que  le  Duc  de   Ferrare  se  mette  du   costé  de 
l'Empereur,  prenant  exemple,  comme  je  luy  ay  dit  souvent,  sur  les 
Ducz  de   Savoye  et  de  Mantoue,  qui  se  voyent  ruinez  pour  avoir 
suivy  ce  party  la.  Et  la  ou  le  Roy  se  contente  de  donner  gros  entre- 
tenement  audit  sr  Duc,  l'Empereur  vouldroit  avoir  tribut  de  luy  et 
de  son  argent  pour  le  recevoir  en  sa  protection  ou  en  son  service; 
je  veulx  dire  par  la  que  le  pape  et  ses  nepveuz,  et  ledit  Duc  aussi, 
sont  réduietz  a  telz  termes  qu'ilz  ne  se  peuvent  passer  de  la  protec- 
tion et  faveur  du  Roy,  et  que   c'est  a   eulx  maintenant  de  paieret 
rechercher,  et  avons  de  demourer  sur  la  repputation,  et  ferez  beau- 
coup pour  eulx,  quant  vous  leur  offrirez  une  ligue  deffensive  pour 
les  estats  de  l'église  et  de   Ferrare,  et  pour   ceulx  que   Sa  Majesté 
tiendra  en  Italye  ou  en  son  obéissance  et  protection  hors   le  Pied- 
mont  sans  y  faire  aucune  mencionde  guerre  offensive.  Ce  seroit  ung 
traitté  sans  despence,  qui  pourroit  estre  publyé  et  seroit  honorable 
et  prouffitable,  car,  vous  scachant  tous  troiz  bien  uniz,  il  est  malaisé 
que  personne  vous  veuille  assaillir,  et  entrant  le   Cardinal    Carrafe 
en  ce  nouveau  marché,  veez  la  sa  première  ligue  oublyée  et  mise  a 
néant,  comme  non  faicte,  qui   n'est  pas  peu   de   chose,  car  vous, 
Monseigneur,  qui  avez  manyé  longtemps  telles  marchandises,  pour- 
riez faire  le  nouvel  traicté  plus  raisonnable  et  plus  advantaigeux  que 
n'estoient  les  premiers,  et  si  d'avanture,   pour  contenter  et  mieulx 
embarquer  ledit  Cardinal  Carraffe,  il  estoit  besoing  de  luy  donner 
quelque  espérance  de  l'imprèse  de   Napples,  vous  en  pourriez  faire 


',1)  Le  cardinal  Carafa.  qui  s'était  acharné  contre  les  Colonna.  avait  sollicité  du 
Pape  que  les  biens  considérables  de  cette  famille  fussent  confisqués,  puis  donnés 
au  comte  de  Montorio,  son  frère,  au  lieu  d'être,  selon  la  coutume,  adjugés  devant 
la  Chambre  apostolique.  Après  quelque  temps  d'hésitation,  Paul  IV,  cédant  aux 
instances  de  Carafa,  fulmina  le  4  mai  1556,  dans  la  forme  ordinaire,  une  huile 
d'excommunication  contre  Ascanio  et  Marc-Antonio  Colonna  el  les  dépouilla  de 
tous  leurs  biens  Quelques  jours  plus  tard,  Giovanni  Carafa  lui  investi  du  duché 
de  Paliano  qui  était  le  fief  de  la  famille  Colonna.  Voir  G.  Duruy,  l.c  cardinal 
Carlo  Carafa,  p.  94  et  131). 

12    François  de  Vargas. 


172  NÉGOCIATIONS    DE  [mai    1 556  i 

articles  secrelz,  lesquelz  le  Pape  signeroit  après  de  sa  main,  et  par 
cella  vous  gaigneriez  tousjours  temps  et  tiendriez  Sa  Sainteté  et  ses 
nepveuz  en  bonne  volunté  pour  vous  en  servir  selon  les  occasions, 
entremeslant  en  voz  marchez  voz  places  de  Tuscane,  au  moings  en 
apparence  et  en  espérance,  si  vous  ne  le  vouliez  faire  en  eff'ect  ;  car 
si  d'avanture  l'Empereur  vous  vouloit  faire  tort  au  faict  des  prison- 
niers, et  que  le  Roy  fust  contrainct  de  se  ressentir  de  la  mauvaise 
foy  et  des  indignitez  et  malices  dont  c'est  Empereur  use  sur  l'exé- 
cution de  la  tresve,  vous  pourriez  tirer  plus  de  services  du  Cardinal 
Caraffe  que  si  le  Pape  estoit  entre  les  mains  d'un  Francoys,  mais 
que  vous  luy  donniez  quelque  espérance  de  sa  grandeur,  et  pour 
ceste  cause,  je  crois  qu'il  n'y  auroit  nul  mal  de  luy  donner  quelque 
espérance  de  la  voix  de  tous  les  Cardinaulx  serviteurs  du  Roy  pour 
le  faire  luy  mesme  Pape.  Et  si  le  Roy  se  vouloit  servir  pour  quelque 
temps  du  port  et  citadelle  de  Civitaveche  pour  y  tenir  partie  de  ses 
gallaires,  il  vous  sera  fort  aisé  de  l'avoir  et  de  toutes  les  autres 
places  fortes  de  l'église  ce  que  vous  en  vouldrez. 

Quant  au  Duc  de  Ferrare,  si  bien.  Monseigneur,  il  vous  faisoit 
entendre  estre  contant  de  ce  qu'il  plait  au  Roy  luy  donner,  il  n'est 
pas  raisonnable  qu'il  aye  cela  sans  qu'il  soblige  a  quelque  chose  au 
service  du  Roy,  et  pour  ce  faire,  il  faut  faire  nouvel  traité  avec  luy 
et  qu'il  entre  en  la  ligue  deffensive  qui  est  la  vraye  seuretté  et  con- 
servation de  son  estai,  luy  disant,  pour  toute résolucion,  que  sa  pre- 
mière cappitulation  est  tenue  pour  non  faicte  e!  entièrement  abolye, 
n'ayant  le  Rov  pour  ceste  heure  aucune  volunté  d'entrer  en  guerre 
offensive,  s'il  n'en  est  bien  fort  provoqué  ;  par  cella  vous  viendrez 
a  vous  descharger  des  promesses  de  Crémone  et  des  autres  con- 
questes,  ou  il  vouloit  avoir  sa  bonne  part  sans  y  riens  mectre  du 
sien,  et  s'il  entre  une  fois  en  ses  nouveaulx  parti/,  il  y  fauldra 
beaucoup  d'allées  et  devenues  avant  qu'il  vienne  a  aucune  conclu- 
sion, et  vous  ferez  durer  ce  marché  la  si  longuement  que  vous  voul- 
drez qui  est  pour  tousjours  gaigner  temps  et  le  conclure  ou  le 
rompre  selon  les  occasions  ou  le  besoin  qui  se  présenteront. Veez  la. 
Monseigneur,  mon  advis,  encores  qu'il  ne  m'appartient  d'en  parler 
si  avant,  mais  vous  en  pourrez  prendre  ce  que  vous  j  verrez  de  bon 
et  laisser  le  reste. 

De  Venize  ce  xvie  Mai  155G. 

lîibl.  nal.,  Fr.  3126,  fol.  99)  (copie  . 


[MAI  1556]  DOMINIQUE  DU  GABRE  173 


GABRE  AU  CONNETABLE 

133.  —  [Ferrare],  1 8 mai  1556.  —  Monseigneur,  il  vous  plaira 
veoir  ce  que  j'escriptz  au  Roy  de  l'affaire  de  Monseigneur  le  Duc  de 
Ferrara,  lequel  renvoyé  pardela  son  ambassadeur  pour  vous  dire  sa 
resolucion  qui  ne  pourroit  estre,  ce  me  semble,  plus  doulce  ne  plus 
bonneste  qu'elle  est,  m 'ayant  pryé  de  faire  particulièrement  office 
envers  vous,  vous  pryer  de  sa  part  que  vous  ne  luy  vueillez  refuzer 
vostre  ayde  et  protection  en  ce  négoce.  Car,  s'il  acceptoit  le  party 
qui  luy  est  offert,  lequel  le  Roy  donne  a  beaucoup  de  princes  et  de 
gentilzhommes  qui  n'ont  que  la  cape  et  la  vye,  il  luy  semble  qu'il 
fait  grand  tort  a  sa  réputation,  a  la  seureté  de  son  estât,  et  à  son 
repoz,  et  que  cela  mesmes  seroit  indigne  de  la  grandeur  du  Roy.  Il 
vous  plaira  veoir  entre  autres  cboses  ce  que  j'escriptz  a  Sa  Majesté 
de  l'ouverture  qui  m'a  este  faicte  par  le  s''  Dom  Francisco  (1),  de  con- 
vertyr  le  paiement  des  gens  de  pied  et  de  cheval  qu'il  luy  fault  pour 
la  garde  de  son  estât  en  argent  comptant;  il  me  semble  que  ce  moyen 
ne  seroit  pas  mal  a  propoz,  car  par  la  le  Roy  auroit  tousjours  meilleur 
marché  qu'il  n'auroit  de  payer  lesdites  garnisons,  et  mondit  Sr  le 
Duc  se  pourroit  contenter  de  quelque  chose  moings  en  argent  que 
en  luy  payant  la  garnizon  promise  et  les  hommes  d'armes,  lesquelz 
ledit  Sr  Duc  est  résolu  d'entretenir  pour  sa  reputacion  et  pour  le 
service  du  Roy,  et  l'occasion  se  présente  qu'il  s'en  faille  servyr.  Il 
vous  estyme  son  amy  et  parle  tousjours  de  vous,  Monseigneur,  avec 
grand  respect  et  convenance,  et  qu'il  ne  veut  entrer  en  ce  service 
sinon  par  vostre  main,  par  quoy  il  se  tiendra  grandement  obligé  a 
vous,  Monseigneur,  s'il  vous  plaist  en  cela  de  l'ayder  et  favorizer,  ce 
qu'il  désire  bien  lVnl.  Affin  que  le  monde  ne  se  puisse  mocquer  de 
luy,  sondit  ambassadeur  sera  porteur  de  la  présente,  lequel  persé- 
vère toujours  a  faire  les  meilleurs  offices  qu'il  peult  pour  le  service 
de  Sa  Majesté,  et  est  bien  informé  de  l'intencion  de  son  maistre  ; 
vous  pourrez  prendre  sur  le  tout  quelque  bonne  resolucion  pardela, 
et  je  m'en  retourne  présentement  a  Venize  attendre  ce  que  vous  m'y 
manderez. 

De  Ferrare  ce  xvni8  Mai  I006. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  3117,  fol.  124)  (originale). 
(1  )  Don  François  d'Esté,  frère  du  duc  de  Ferrare. 


174  NÉGOCIATIONS    DE  JUIN    1556] 


GABRE    AU   CONNÉTABLE 

134. —  [Venise], 2 juin  lôôG. —  Monseigneur,  ce  porteur,  homme  de 
Mr  de  Cambray  (1  ,  vient  de  Levant  ayant  laissé  son  maître  en  chemin, 
arresté  comme  il  m'a  escript  par  ordonnance  des  Bassas,  et  a  ce  que 
j'enlendz,  luy  et  Monsieur  de  Codignac  sont  entrez  en  quelques  que 
relies  et  difïërentz,  chose  qui  ne  peult  porter  aucun  adventaiges  aux 
affaires  du  Roy  et  de  leurs  charges  et  moings  a  eulx  mesmes  :  vous 
y  scaurez  bien  pourveoir.  Le  Duze  (2)  de  ceste  Seigneurie  moreut 
hier  et  croy  que  dans  trois  ou  quatre  jours  il  y  en  aura  ung  aultre, 
et,  dit  on,  que  le  sort  tombera  sur  Lung  des  deux  qui  s'yattendoit  ou 
de  Stephani  Tiepoly  ou  de  Lorenzo  Prioly  (3).  Depuis  quelques  jours 
en  ca,  la  peste  s'est  reveillée  icy  et  tous  les  jours  le  nombre  des 
morts  va  croissant,  desquels  on  met  une  liste  tous  les  matins  en  la 
place  de  Realte  (4).  Si  elle  continue  encore  quelques  jours,  j'espère 
n'estre  pas  des  derniers  qui  deslogeront,  mais  aussi  je  n'en  bougeray 
point  si  je  n'en  suis  bien  pressé.  Monseigneur,  je  vous  escripviz  des 
affaires  de  Ferrare  par  l'Ambassadeur  de  Monseig*  le  Duc,  et  je 
croy  que  vous  aurez  aussi  veu  quelques  lettres  que  je  vous  avois 
escript  par  avant,  et  que  par  la  vous  excuserez  ce  que  vous  pourrez 
trouver  de  maulvais  en  ma  dernière  lettre.  Je  nay  peu  refuser  de 
vous  proposer  les  choses  selon  qu'ilz  le  desiroient,  et  je  ne  m'en  suis 
pas  fait  aussi  fort  prier  pour  entrer  en  nouveaulx  partiz  et  parla  faire 
despartir  de  leur  première  cappitulation,  scaichant  bien  aussi  que 
vous  y  prendrez  la  resolution  selon  Lestât  ou  voz  afferes  se  trouve- 
ront, et  puisque  c'est  a  eulx  maintenant  a  courir,  il  est  raisonnable, 
comme  je  leur  ay  dit,  qu'ilz  facenl  traicter  leurs  afferes  par  leurs 
ministres  avecques  vous  a  la  cour  et  non  icy,  et  vous  aurez  par  la 
moyen  de  faire  tout  avec  plus  grand  advantaige  du  Roy. 

De  Venize  ce  2e  de  juing  1556. 

(Bibl.  nat..  Fr.  '20456,  fol.  165)  ^copie  . 

(1)  Jean-Jacques  de  Cambray,  sieur  de  Soulangy,  chancelier  de  l'Université  de 
Bourges,  puis  doyen  de  l'église-cathédrale  de  Bourges,  vice-ambassadeur  à  Cons" 
tantinople  1552  ,  conseiller  et  maître  des  requêtes  «le  l'hôtel  «lu  Roi,  mort  le  :>  dé- 
cembre 1586. 

«  Cet  agent  (voir  CiiAïutiiiiK.  Négociations  de  lu  France  avec  le  Levant,  t.  u, 
p.  52,  note  ,  dont  la  résidence  dans  le  Levant  remontait  an  delà  des  premières 
années  du  règne  île  François  l  .  avait,  peut-être,  été  évincé  de  ses  prétentions 
au  titre  d'ambassadeur  par  M.  de  Codignac,  jeune  protégé  du  baron  de  La  Garde 
qui  l'avait  amené  à  sa  suite  en  1556.  Cette  rivalité  axait  éclaté  par  des  actes 
publics  dans  lesquels  les  ministres  turc-  avaient  été  forcés  d'intervenir. 

(2)  Le  doge  François  Venieri. 

(3)  Lorenzo  Prioli  succéda  le  li  juin  au  doge  Venieri;  mourul  le  n  août  1559. 

(4)  Le  Rialto,  pont  et  quartier  de  Venise. 


[juin-juillet  1556]  Dominique  du  gabre  173 


GABRE    AU    ROI 

135.  —  [Venise],  1 8  juin  1556.  —  Sire,  j'oublioys  de  vous  dire 
la  création  d'un  nouveau  doge  en  ceste  ville,  qui  a  esté,  après  assez 
longues  disputes,  Messer  Lorenzo  de  Prioly,  homme  d'assez  bon 
âge  pour  durer  quelques  ans  et  d'assez  bonne  condition  et  réputation. 
C'est  une  dignité  de  grand  honneur  icy,  entre  eulx,  mais  son  autorité 
est  si  limitée  qu'il  ne.  peult  quasi  rien  qui  vaille. 

(Bibl.  nat.,  Fr   20456,  fol.  163)  (copie).  (Extrait). 


GABRE    AU    DLC    DE    FERRARE 

136.  —  Venise  .  21  juin  1556.  —  Monseigneur,  Je  croy  que  Vostre 
Excellence  aura  entendu  la  guerre  dont  les  Impériaulx  menassent 
le  Pape,  et  par  tous  les  adviz  qu'on  a  icy,  il  semble  que  c'estoit  à  bon 
escient  et  plus  je  croy  qu'il  ne  feroit  de  besoing.  J'en  ay  adverty  le 
Roy  par  courrier  expiez,  et,  en  attendant  sa  responce,  je  yrois  volon- 
tiers manger  ung  couble  de  perderaulx  a  Ferrare  pour  en  diviser 
avec  Vostre  Excellence,  si  voz  citadins  ne  craignoient  ce  bruit  de 
peste  dont  il  se  parloit  ung  peu  ces  jours  passez  en  ceste  ville,  mais 
je  vous  asseure  bien,  Monseigneur,  qu'il  y  a  plus  de  six  jours  qu'il 
n'y  a  nouvelles  de  rnortz  ny  de  mallades  et  croy  qu'il  n'en  y  est 
jamais  mort  ung  seul  de  peste.  S'il  vous  plaisoit  ordonner  a  voz 
passaiges  de  me  laysser  passer,  je  m'en  yray  vous  1ère  la  révérence 
quant  il  vous  plaira  le  me  commander. 

De  Venize,  ce  xxie  de  Juing  1550. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    CO.NNEÏABLli 

137. —  [Venisr  .  !''''  juillet  1556. —  Monseigneur,  le  porteur  de  la 
présente  lettre  sera  le  sr  de  Marlines  1  ,  qui  vient  de  Levant,  d'où 
il  vous  scaura  dire  toutes  nouvelles,  comme  personne  qui  entend 
bien  la  négociation  de  ce  pays  la,  et  qui  me  semble  bien  capable  et 
suffizant;  il  m'a  (entre  autres  choses)  compté  du  voiage  qu'il  a  t'aict 
en  Transilvanye  et  du  désir  que   ce  jeune  Roy  (2)  et  la  Reyne  sa 

(1)  Pierre-Louis  de  Marlines,  agent  à  Constantinople  (1555),  ambassadeur  en 
Transylvanie  (1558  :  il  avait  un  frère  procureur  du  Roi  au  Cliàtelet  de  Paris. 

(2j  Jean-Sigismond  Zapoly,  reconnu  roi  de  Hongrie  sous  la  tutelle  de  sa  mère, 
après  la  mort  de  son  père,  le  21  juillet  1540  ;  il  n'était  âgé  alors  que  de  quinze  jours. 


176  NÉGOCIATIONS    DE  ["JUILLET    1556] 

mère  (1)  ont  d'entrer  en  alliance  et  parente  avec  Sa  Majesté,  chose 
qui  meritoit  bien  qu*ilz  renvoyassent  demander  avec  plus  grand 
solempnité.  Toutesfois,  c'est  quelque  commencement  d'entrer  en 
telles  praticques  qui  ne  peuvent  porter  que  commodité  et  advantaige, 
encores  qu'on  n'aye  quelquefoiz  intentions  des  effetz  ny  de  la  con- 
clusion. Ce  sont  matières,  Monseigneur,  dont  il  ne  m'appartient 
de  parler  plus  avant,  et  m'en  tairay  pour  vous  dire  que  depuis  la 
despèche  que  je  vous  l'eiz  du  18me  du  passé  par  le  sr  de  Canibes  (2), 
il  semble  que  l'allarme  de  Rome  se  soit  ung  peu  reffroydie,  ce  que 
l'on  attribue  a  la  complexion  du  Duc  d'Alve  (3),  qui  n'a  pas  réputa- 
tion d'estre  fort  résolu,  ne  grand  guerroier,  et  dict-on  que  sa  com- 
mission de  rompre  estoit  limitée,  en  cas  qu'on  eut  les  forces  et  le 
moyen  de  donner  promptement  une  bonne  estrette  (4)  au  Pape,  qui 
sont  condition  lesquelles  donnent  bien  a  penser  a  ung  ministre 
avant  que  se  pouvoir  resouldre,  et  mesmement  en  ung  pays  oulz  ne 
sont  gueres  aymez  (5),  et  ne  se  peuvent  fyer  de  la  noblesse  ny  du 
peuple,  et  que,  pour  vouloir  recouvrer  Paliano  (6),  ilz  pourroient 
bien  mettre  le  Royaume  en  quelque  dangier.  Aulcuns  disent  que 
l'Empereur  donna  cette  commission  de  rompre,  sans  voulloir  qu'elle 
eut  efïect.  Ne  pouvant  honnestement  reffuzer  quelque  ayde  a  Marc 
Antbonio  Colonna,  pour  après  rejetter  la  faulte  et  s'en  descharger 
sur  ses  ministres,  le  Pape  ne  s'en  est  pas  ung  brin  estonné  et  donne 
(ace  que  j'entendz)  assez  bon  ordre  de  s'armer  ;il  est  vray  qu'il  eust 
voulu  qu'on  eust  mis  la  main  a  l'argent  du  Roy  el  vous  aurez  sceu. 
Monseigneur,  la  colère  ou  il  est  entré  contre  Monseigneur  le  Car- 
dinal de  Tournon  (7),  qui  ne  pouvoit  mieulx  respondre  que  ce  qu'il 


(l)  Isabelle,  fille  de  Sigismond  Auguste,  roi  de  Pologne. 

(2}  Courrier  au  service  de  la  France. 

(3)  Le  duc  d'Albe,  lieutenant-général  de  Philippe  II  en  Italie,  se  hâtait,  au 
contraire,  de  fortifier  les  places  d'Italie  el  de  rassembler  des  troupes  et  de 
l'argent;  il  avait  l'ordre  d'envahir  l'État  ecclésiastique  avant  l'achèvement  des 
fortifications  de  Paliano. 

i    En  Italien,  stretta  :  mésaventure;  donner  une  estrette  :  mettre  en  grande 
détresse.  (Dictionnaire  italien-français  u  Nuovo  Alberti  ».  p.  1265). 

(5)  Les  Carafa. 

(6)  Il  avait  semble  nécessaire  au  cardinal  Carafa,  qui  redoutait  les  ressentiments 
des  Colonna,  de  mettre  le  duché  de  Paliano  à  l'abri  d'un  coup  de  main  :  aussi 
Antonio  el  Giovanni  Carafa  confièrent-ils  au  maréchal  Strozzi  le  soin  de  rendre 
celle  place  imprenable.  Marc-Antonio  Colonna  tint  campagne  autour  de  Paliano 
avec  les  troupes  que  le  due  d'Albe  lui  avait  données.  Voir  DURUT,  Le  Cardinal 
Carafa,  p.  131-132,  170). 

(7)  L'ambassadeur  de  France  el  le  cardinal  de  Tournon  ayant  été  reçus  en 
audience  par  le  Pape,  Sa  Sainteté  leur  demanda  trois  Choses,  savoir:  conseil, 
argent  et  soldats.  Voyant  que  le  Cardinal  ne  lui  répondait  même  pas.  le  Pontite 
se  mit  en  colère  contre  lui  et  le  menaça  d'écrire  au  Roi  de  lui  expédier  un  autre 
négociateur  à  sa  place.  (Voir  Duruy,  Op.  cit..  p.  162  . 


[.JUILLET    1556J  DOMINIQUE    DU    GABRE  177 

a  faict  et  quant  le  Roy  mesme  le  trouveroit  maulvais,  ce  que  je  ne 
puis  croire,  s'est  ce  qu'il  ne  pouvoit  entrer  en  ceste  contribution, 
n'ayant  aucuns  fons  ne  argent  du  Roy,  et  ne  le  debvoit  aussy  faire 
sans  en  avoir  exprès  commandement  du  Roy  Je  veoy  que  led  sr 
Cardinal  désire  de  s'ouster  de  la,  se  tenant  offense  de  quelques 
rudes  parolles  que  sa  S.  luy  atenués.  J'en  suysbien  marry  et  devray 
Sa  Saincteté  ne  le  connoit  pas  bien  et  se  faict  grand  tort  ne  faisant 
point  de  différence  d'ung  grand  Cardinal  nourry  avec  Princes,  et 
ministre  d'ung  si  grand  Roy  avec  ung  aultre  Cardinal,  petit  compa- 
gnon, ne  dung  qui  est  homme  de  bien,  a  d'autres  qui  ne  vallent 
gueres,  lesquelz  je  vous  respondz  bien  luy  ont  dresse  ceste  partye, 
et  jamaiz  le  Roy,  Monseigneur,  n'aura  du  couste  de  Rome,  sinon 
travail  pour  le  discord  des  ministres,  comme  j'ay  veu  depuis  beau- 
coup d'années  jusques  a  ce  que  Sa  Majesté  aye  mis  toute  l'autorité 
en  ung  seul  qui  ne  congnoisse  aultre  que  le  ltoy.  Vous  avez  accous- 
tumé.  Monseigneur,  de  prendre  la  protection  de  la  vérité  et  des 
gens  de  bien,  et  me  semble  que  le  Roy  ne  doibt  point  laisser  accous- 
tumer  le  Pape  a  vouloir  les  ministres  des  princes  a  sa  fantaisye,  et 
pour  ceste  cause  ne  laisser  partir  de  la  mondit  sieur  le  Cardinal  de 
Tournon,  sur  ceste  occasion,  pour  ne  donner  cest  ayse  a  ses  enne- 
mys  ;  vous  scavez  qu'il  ne  peult  porter  que  repputation  et  importance 
aux  affaires  du  Roy  partout  ou  il  se  trouvera,  et  si  je  n'estois  mi- 
nistre de  Sa  M,  je  dirois  tout  autrement,  car  je  désire  le  repos  dudit 
Seigneur  Cardinal,  et  sa  santé,  laquelle  je  scay  bien  ne  s'amende 
en  rien  de  ces  travaulx  d'esperit.  Vous  y  aurez,  s'il  vous  plaist,  M 
pour  recommande  l'intérêt  et  les  affaires  du  Roy  et  la  réputation  de 
mondit  Seigneur  le  Cardinal  qui  vous  est  serviteur  et  bon  amy. 

Monseigneur,  j'attendz  de  voz  nouvelles  en  grand  dévotion  après 
le  parlement  (1)  de  Monsieur  le  Cardinal  Caraffa,  qui  vous  sera  très 
obligé  si  Sa  Majesté  prend  la  protection  de  leur  maison,  car  vous 
veoyez  bien  que  dentrée  de  table  ilz  vous  mettront  en  une  guerre 
qui  vous  est  fort  loingtaine,  incommode  et  de  grande  despence, 
sans  que  le  Roy  y  aye  particulier  interest  ;  vous  avez  affriandé  toute 
l'Italie  avec  l'exemple  du  Duc  Otavio(2),  et  si  vous  les  voulez  croire, 
vous  vous  trouverez  en  bien  peu  de  jours  une  despence  ordinaire 
sur  les  bras  d'un  mylion  decuz  ou  pour  le  Duc  Octavio,  ou  pour  le 
Conte  de  la  Mirandola  ou  pour  le  Duc  de  Ferrare,  ou  pour  Sienne  ou 
pour  les  Carafes.  Si  vous  voulez  toute  l'Italie,  je  crois  qu'ace  prix  la 
vous  l'aurez,  et  le  mal  est  que,  quant  telles  despences  sont  une  fois 
promises  et  commancées,  on  ne  peult  s'en  retirer  et  semble  une 
contribution  héréditaire.  En  temps  de  guerre,   on  passe  cela  legie- 

(1)  II  était  parti  de  Rome  le  11  mai. 

(2)  Octavio  Farnèse. 


178  NÉGOCIATIONS    DE  [JUILLET    1556] 

rement  et  semble  qne  ce  ne  soit  rien,  mais  maintenant  je  congnois 
bien  que  c'est  une  cbarge  fort  préjudiciable  aux  finances  du  Roy  et 
a  son  Royaulme,  et  vous  ferez  bien,  Monseigneur,  dy  aller,  fort 
réservé  qui  est  tout  ce  que  je  vous  scauroys  dire  pour  ceste  heure. 
De  Venise  ce  premier  jour  de  Juillet  1556. 

Monseigneur,  je  viens  d'avoir  lettres  de  Rome  du  27e  juing  ou  je 

les  veoy  tous  asseurez  de  ceste  grande  allarme,  et  puisque  les  Im- 

periaulx  ont  mis  temps  et  longueur  a  leur  entreprinse,  il  ne  la  faut 

plus  gueres  craindre.  Je  veoy  aussy  que  Monsieur  le  Cardinal   de 

Tournon  a  ceste  caresse  du  Pape  depuis  son  courroux  et  toutes  les 

choses  y  vont  bien  après  la  lettre  que  vous  avez  escripte  de  larrivée 

du  cardinal  Carafa,  de  l'honneur  qu'on  luy  avoit  fait,  et  de  la  bonne 

intention  et  volunte  du  Roy  envers  sa  Saincteté  et  ceulx  de  sa  maison. 

Ce  sera  grand  plaisir  si  la  faveur  du  Roy  et  la  réputation  que  vous 

avez  achaptée  bien  chèrement  pouvoient  conserver  le  Pape  en  cest 

estât  nouveau  qu'ilz  vont  dresser  sans  y  mettre  de  nostre  argent  ne 

entrer  en  guerre. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20456.  fol.  169)  (copie 


GABRE    AU    ROI 

138.  —  Venise],  3  juillet  1556.  —  Sire,  Dom  Antonio  Caratle.  a 
présent  Marquis  de  Montebelle,  est  venu  vers  ces  Seigneurs  (1),  pour 
les  prier  de  la  part  de  sa  Sainteté,  de  ne  point  donner  passage  aux 
Allemans  et  Luthériens,  qui  se  vantenl  de  passer  en  Italie,  pour 
ruiner  l'Eglise  et  le  Siège  Apostolique.  Que,  1«'  permettant,  il  y  a 
danger  que  cette  barbare  nation  mette  en  Italie  une  confusion  de 
nouvelles  religions,  comme  ils  ont  fait  en  Allemagne,  et  que  n'étant 
pour  ce  jourd'huy  en  Italie  demeure  aucun  Estât  qui  ne  soit  en  ser- 
vitude, et  sous  la  tyrannie  de  l'Empereur,  sinon  le  Siège  Apostolique 
et  r Kstat  de  ces  Seigneurs;  il  est  bien  raisonnable  que  l'un  aide  a 
conserver  l'autre,  d'autant  que  si  l'un  de  ces  den\  esl  opprimé  et 
réduit  en  servitude,  l'autre  ne  sera  gueres  sûrement,  et  que.  l'Em- 
pereur menaçant  de  commencer  guerre,  en  veut  fonder  l'occasion, 
sur  une  querelle  particulière  qu'il  dit  avoir  avec  la  maison  de  Caraffe ; 
mais  que  l'on  peut  bien  considérer  son  intention  qui  n'est  autre,  que 
de   vouloir  ruiner  la   dignité   papale,  et   s'impatroniser  de   l' Estât 

(1)  Antonio  Carafa,  comme  naguère  le  duc  de  Lorraine,  fut  ('0011(11111  par  la 
Seigneurie;  on  lui  til  radeau  d'un  beau  cheval,  d'un  bouclier  ;  eu  lui  conféra 
même,  ainsi  qu'à  ses  Frères,  le  I  ire  de  gentilhomme  vénitien  :  cl  ce  lut  tout  ;  la 
République  ne  sortit  point  de  sa  traditionnelle  neutralité  ! 


[JUILLET    1556]  DOMINIQUE   DU   GABHK  179 

Ecclésiastique,  s'il  y  pouvoit  réussir.  Mais  que,  sa  Sainteté  aussi,  leur 
vouloit  bien  faire  entendre  qu'il  employèrent  toutes  ses  forces  tem- 
porelles et  spirituelles  pour  y  résister,  et  qu'avec  1  aide  de  Vostre 
Majesté,  comme  premier  fils  de  l'Eglise  el  Prince  magnanime,  qui  a 
fait  connoistrea  tout  le  monde,  et  mesmement  a  l'Italie,  une  grande 
puissance,  une  grande  bonté  et  religion,  il  avoit  espérance  de  venir 
a  bout  de  la  ruine  d'un  schismatique  et  mauvais  Prince  comme  est 
l'Empereur.  La  réponse  du  Prince  (1)  a  este  que  jusques  icy  on 
avoit  accouslumé  de  traiter  également  en  ces  guerres  les  affaires  de 
l'Empereur  et  celles  de  Vostre  Majesté,  concédant  passage  pourgens 
de  guerre,  et  a  l'un  et  a  l'autre,  quand  ils  en  ont  demandé  ;  toutes- 
fois  que  cette  Seigneurie  sassembleroit  et  disputeroit  toutes  eboses 
avec  la  raison  et  puis  on  luy  feroit  responce.  C'est  un  semblable 
propos,  Sire,  a  celuy  que  je  leur  fis  une  fois  en  Collège,  au  dernier 
régiment  dAllemans  qui  est  passé  en  Italie  pour  l'Empereur  quant 
les  eboses  de  Sienne  estoient  en  grande  extrémité  !  leur  disant  que 
toute  l'Italie  avoit  occasion  de  se  plaindre  d'eulx,  de  ce  qu'ils  estoient 
si  faciles  a  donner  passage  a  ceux  qui  venoient  pour  l'opprimer  et 
destruire,  et  que,  quand  nous  en  avons  demandé  pour  Vostre  Majesté, 
nostre  demande  etoit  favorable;  d'autant  que  vous,  Sire,  ne  faisez 
passer  gens  en  Italie  que  pour  la  deffendre,  et  conserver  sa  liberté 
et  la  défendre  de  la  tyrannie  des  autres,  le  tout  a  vos  despens.  Il  a 
este  advisé  entre  ledit  Marquis,  le  Légat  qui  est  icy,  etmoy,  que  j'irois 
en  Seigneurie  pour  entrer  en  ce  propos,  et  y  dire  les  mesmes  ou 
autres  nouvelles  persuasions,  et  les  esclaircir,  et  asseurer  de  la  pro- 
tection  que  Vostre  Majesté  prend  du  Pape  et  de  la  Maison  Caraffe, 
afin  que  cela  tienne  les  affaires  de  sa  Sainteté  en  plus  grande  répu- 
tation: ce  que  j'ay  fait,  et  a  este  bien  prise  et  louée  vostre  intention 
pour  très  sainte  et  digne  d'un  si  grand  Prince.  Je  m'attends  bien, 
Sire,  qu'il  n'y  aura  de  ces  Seigneurs  que  réponse  courtoise,  mais 
elle  sera  tellement  générale,  que  cela  ne  les  obligera  a  rien  qui 
soit  (2),  et  après  ils  se  rangeront  selon  le  temps  et  les  occasions.  Ce- 
pendant ledit  Marquis  el  tous  ses  frères  ont  este  faits  Gentilshommes 
Vénitiens,  et  est  entre  ledit  Marquis  au  Conseil  et  a  balote  comme 
les  autres.  Si  ces  Seigneurs  voyent  la  guerre  se  recommencer  a  bon 
escient,  et  passer  en  Italie  nouvelles  forces  d'Allemans,  ils  ont 
délibère  d'armer  grossement  par  mer  et  par  terre,  sans  se  déclarer 
pour  l'un,  ny  pour  l'autre,  pour  faire  appréhender  a  vos  deux 
Majestés  el  au    Pape,  que  du  costé  qu'ils  vouldront  tourner  ils  se- 


(1)  De  la  Seigneurie. 

(2)  La  Seigneurie  trouva,  en  effet,  mille  bonnes  raisons  pour  démontrer  au 
légat  qu'elle  ne  pouvait  s'opposer  au  passage  des  troupes  impériales.  ^VoirDuRUY, 
Carlo  Carafa,  p.  136). 


180  NÉGOCIATIONS    DE  [AOUT    1556" 

roient  pour  donner  la  victoire  ;  et  que,  qui  les  voudra  après  avoir  de 

son  costé,  les  acheptera  bien  chèrement.  Mais  ils  pensent  en  faisant 

cela  s'acquitter  d'une  partie  de  leur  devoir,  envers  le  Pape  et  envers 

Vostre    Majesté   et   favoriser  aucunement  vos   entreprises  ;   parce 

que  lEmpereur  ira  plus   réservé  en  grande  crainte   et  précaution, 

présupposant  bien  qu'ils  ne  seront  pas  entrez  en  ceste  levée  de  gens. 

et  en  ceste  despense,  sans  avoir  quelque  intelligence  avec  ceux  de 

la  ligue;  et  qu'il  n'est  vraisemblable  qu'ils ayent  voulu  faire  cela 

pour  ayder  a  la  ruine   du  Pape.   C'est    un   corps,  Sire,  que  ceste 

Seigneurie,    qui  est  composé   de  plusieurs  testes,  et  il  y  en  a  de 

bien  grossières,   et  d'aucunes  bien  habiles  et  grands  personnages. 

Mais  tout  assemblé,  ils  font  un  sage  et  grand  prince:   ils  ne  veulent 

point  de  guerre,  s'il  est  possible,  et  n'ont  pas  tort  ;  et  avant  que  se 

mouvoir  a  rien  faire,   ils  verront  les  occasions  bien  grandes  et  se 

gouverneront  toujours  selon  le  temps. 

De  Venise  ce  3  juillet  1556. 

(Ribier.  t.  m,  p.  645). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

439.  —  [Vicence],  6  août  1556.  —  Monseigneur,  ,1'ay  receu  ce  matin 
une  dépesche  du  Roy  d'assez  vielle  dacte,  car  elle  est  du  xviume  de 
juillet,  par  laquelle  Sa  Ma,e  me  commande  de  vous  aller  incontinant 
trouver,  pour  vous  faire  entendre  sa  dernière  résolution  sur  voz 
affaires  particuliers:  et,  pour  ce  qu'il  n'y  a  que  trois  jours  que  je 
suys  venu  de  Venize  et  que  je  scay  les  grandes  difficultéz  que  (avec 
bonne  raison)  vous  faictes  de  recevoir  en  vostre  ville  gens  venait» 
de  ce  cousté-là,  pour  le  suspect  et  grand  bruict  qu'il  y  a  de  la  peste, 
tant  plus  craindrois-je  de.  vous  offenser  ayant  à  négotier  et  in  ap- 
procher de  la  personne  de  Vostre  Excellence,  qui  sera  cause  que  je 
ne  me  mecteray  poinct  en  chemyn  sans  premièrement  entendre 
vostre  intencyon  et  bon  plaisir  en  cella.  Cependant,  pour  a'estre  du 
tout  en  contumace,  ayant  trouvé  la  commodité  de  ce  porteur  le 
cappitaine  Jehan  André,  qui  est  serviteur  du  Roy,  el  désire  fort  estre 
le  vostre,  lequel  part  de  ce  lieu  icy  non  suspect,  je  vous  ay  bien 
volu  envoyer  la  lettre  que  Sa  Mate  vous  escript,  réservant  pour  Ions 
bons  respeetz  à  vous  envoyer  par  autre  la  eoppiede  mon  instruction, 
si  Vostre  Excellence  ne  se  contante  (pie  moy  mesmes  en  s<»ye  le 
porteur,  et  d'aultant  plus  (pie  l'on  me  mande  que  Monsr  vostre  am- 
bassadeur estoit  party  de  la  Court,  duquel  je  pense  bien  que  vous, 
Monseigneur,  aurez  entendu  la  mesme  résolution  que  j'aj  a  vous 
dire.  D'une  chose  vous  veulx-je  bien  asseurer,  que  en  mon  boire  frais, 
et   à  manger  des  fruitz,  vous  jugerez  bien  que  je  ne  suys  mallade. 


[AOLT   1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  181 

ny  n'ay  envye  de  l'estre,  et  si  je  voys  devers  vous,  je  faiz  mon 
compte  de  ne  mener  que  deux  hommes,  l'ung  pour  me  apprester  à 
manger  et  l'autre  à  boyre  par  les  chemins.  J'eusse  envoyé  ung  de 
mes  gens  pour  revenir  avec  vostre  responce,  mais  ilz  ne  peuvent 
passer  sans  grans  difficultéz,  et  j'attendray  la  responce  par  ung  des 
vostres  qui  peuvent  aller  et  passer  par  tout,  et  feray  entièrement  ce 
qu'il  vous  plaira  me  commander. 
De  Vicenze,  ce  vie  jour  d'aoust  1556. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU   CONNETABLE 

140.  —  [Vicence',  10  août  1 556.  —  Monseigneur,  le  porteur  de  la 
présente  sera  Monsieur  de  Cambray,  lequel  a  demouré  icy  quelque 
vingt  cinq  ou  trente  jours,  a  son  très  grand  regret,  ayant  bonne 
envie  de  vous  aller  rendre  raison  de  sa  charge  et  de  son  fait  parti- 
culier, mais  il  fut  adverty  qu'on  l'attendoit  sur  le  chemin  pour  l'as- 
sassiner (1),  ce  que  je  ay  trouvé  estre  plus  véritable  que  je  ne  voul- 
drois  et  y  a  este  pourveu,  de  façon  que  celluy  qui  voulloit  taire  ce 
bel  office  a  esté  fait  prisonnier  et  mis  entre  les  mains  de  la  justice  a 
Venise,  ou  il  a  confesse,  a  ce  que  j'entend,  fort  facilement  sa  maul- 
vaise  volonté,  et  sera  châtié  selon  ses  démérites.  Le  procez  qui  en 
sera  fait  vous  fera  un  jour  certain  de  toutes  choses  (2)  ;  il  m'a  suffist 
pour  ceste  heure  d'avoir  mis  ledit  sr  de  Cambray  en  seureté  de  sa 
vie  comme  bon  ministre  du  Roy,  qui  me  semble  très  suffisant  et 
quiaprins  beaucoup  de  peines  en  voyages  si  loingtains,  qu'il  mérite, 
Monseigneur,  qu'il  vous  plaise  le  favoriser  envers  Sa  M.  Il  vous  dira 
de  la  peste  de  Venise  et  du  travail  que  cela  donne  a  toute  ceste  Italie, 
et  par  une  autre  mienne  lettre  qui  ira  par  les  postes,  je  vous  escrip- 
ray  des  autres  choses  qui  se  présentent. 

Vicenza  ce  10e  d'Août  1556. 

(Bibl.  nat,  Fr.  20644,  fol.  188)  (copie). 

1,1)  M.  de  Cambray  avait  été  rappelé  à  la  suite  de  ses  démêlés  avec  son  collègue 
Codignac,  et.  en  passant  à  Venise,  il  faillit  être  assassiné.  Cette  tentative  fut  im- 
putée aux  suggestions  de  Codignac  (Voir  Charrière,  etc.,  t.  n,  p.  409,  note  1). 

(2)  La  situation  de  ce  prisonnier  ne  fut  pas  réglée  aussi  vite  que  semblait  le 
croire  du  Gabre,  car,  le  29  avril  1558,  le  Roi  écrivit  à  la  République  de  Venise 
et  à  M.  de  Noailles,  ambassadeur  auprès  de  la  Seigneurie,  de  faire  justice  d'un 
prisonnier  arrêté  pour  assassinat  commis  sur  la  personne  de  Georges  de  Cambray 
plus  d'un  an  auparavant.  (Bibl.  nat.,  Fr.  20977). 


182  NÉGOCIATIONS   DE  AOUT    1556] 


GABRE    AU    CONNETABLE 

141.  —  [Vicence],  15  août  1556.  —  Monseigneur,  je  vous  escripviz 
il  n'y  a  que  trois  jours,  par  Monsieur  de  Cambray  et  depuis  n*est 
survenu  chose  de  nouveau,  sinon  sur  le  fait  de  Monseigneur  le  Duc 
de  Ferrare,  lequel,  pour  ce  que  j*avois  este  naguerres  a  Venize,  n'a 
pas  trouvé  bon  que  je  luy  allasse  parler,  et  a  falleu  negotier  ce  que 
le  Roy  me  mandoit  avecques  luy  par  lettres  et  par  messaiges,  et  luy 
ayant  envoyé  mon  secrétaire,  il  l'a,  a  la  fin,  laissé  entrer  dans  Fer- 
rare  et  après  le  m'a  renvoyé  avec  une  lettre  qu'il  m'a  escripte,  et 
pour  entendre  bien  comme  tout  est  passé,  il  vous  plaira,  Monsei- 
gneur, faire  lire  la  copie  de  deux  miennes  lettres  et  ses  deux  res- 
ponces  que  je  vous  envoyé  en  original,  par  la  ou,  vous  verrez  qu'il 
n'a  fallu  rendre  responce  résolue,  jusques  a  ce  que  vous  luy  ayez 
encores  interprété  quelques  motz  qu'il  trouve  obscurs  au  commen- 
cement de  l'instruction,  pour  laquelle  interprétation  il  veult  encores 
renvoyer  son  ambassadeur  ou  aultres  de  ses  gens  devers  vous,  pour 
après  me  resouldre  de  sa  volonté,  et  encores  qui]  aye  veu  par  ce  qui 
luy  a  este  communiqué  de  l'instruction,  que,  en  cas  qu'il  n'acceptast 
dès  a  présent  ce  qui  luy  estoit  offert,  le  Roy  entendoit  se  départir 
des  premières  et  dernières  orï'res,  sy  est  ce  que  quelques  remons- 
tremens  que  luy  en  ayt  faite  Monsieur  le  Cardinal  de  Ferrare  et  mon 
secrétaire,  auquel  j'en  avois  baillé  particulières  instructions,  soit,  ou 
pour  estre  en  son  naturel  irrésolu,  ou  pour  aultre  occasion,  il  n'a 
voulu  dire  ne  sy  ne  non.  C'est  au  Roy  maintenant  d'en  user  comme 
il  l'entend,  sur  quoy  je  ne  diray  mon  advis,  ne  bien  ny  mal,  en 
ayant  assez  dit  le  temps  passé. 

Monseigneur,  je  ne  scay  que  penser  ne  dire  sy  nous  aurons  guerre 
ou  paix  (1),  car  d'ung  coste  on  voit  que  les  imperiaulx  n'ont  encores 
commencé  aulcun  acte  dhostilité  contre  le  Pape  ;  on  escrit  aus-\  de 
la  Court  de  l'Empereur  et  de  la  vostre  que  le  dit  Empereur  s'en  va 
en  Espaigne  et  que  Rigoumes  2)  devoit  aller  devers  le  Roy,  que  tous 
voz  prisonniers  seront  délivrez  en  payant  leur  rançon  ;  ce  sont 
toutes  choses  qui  donnent  apparence  de  paix  et  de  voulloir  observer 
la  trefve.  D'ung  aultre  couste,  je  voys  a  Rome  le  langage  que  le  Duc 
d'Albe  a  envoyé  dire  au  Pape,  qui  sont  en  substance  remonstrances 


(l)  L'anxiété  était,  de  fait,  extrêmement  vive  :  Philippe  II  était  résolu  à  continuer 
la  guerre,  le  duc  d'Albe  n'avait  que  quelques  lieues  à  faire  pour  envahir  l'Kia 
Ecclésiastique,  et,  par  contre,  le  Saint-Siège,  loin  d'être  prêt  à  soutenir  l'attaque, 
manquait  totalement  de  ressources  et  «le  moyens  de  résistance. 

2    Nom  francisé  par  <lu  Gabre  de  Don  Ruj  Gomès  de  Silva,  comte  de  Melito, 
prince  d'Eboli,  favori  de  Philippe  11. 


[AOUT   1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  183 

des  actions  de  Sa  Sainteté,  dont  ilz  ont  occasion  de  se  plaindre,  et 
protestations  d'avoir  juste  et  bonne  cause  de  s'en  ressentir,  qui  est 
ung  défilement  et  vraye  denontiation  de  guerre  ;  je  veoy  la  dessus 
l'ambassadeur  de  l'Empereur  party  de  Rome  sans  y  avoir  este  laisse 
aucun  successeur  (1);  je  veoy  aussy,  par  quelques  advis  que  j'ay  eu 
depuis  deux  jours,  qu'en  la  conté  de  Tyrol,  et  plus  avant  en  Alle- 
magne, se  fait  grant  levée  de  gens  de  guerre  et,  m'a-t-on  asseuré, 
que  d'Italie  on  avoit  apporte  cinquante  mil  escuz  a  Trente  pour  les 
premières  avances  de  ladite  levée,  et  ung  gentilbomme  Espagnol, 
nommé  Martin  Alonce,  a  passé  par  Venize  et  est  allé  a  Barry  (2)  re- 
cevoir deux  cens  mil  escuz  que  cesle  vieille  Royne  de  Polonya  (3) 
preste  a  l'Empereur.  Quelqu'un  m'a  dit  aussy  que,  ces  jours  passez, 
l'Ambassadeur  de  l'Empereur  estoit  en  pratique  secrète  avec  la 
Seigneurie  de  Venize,  de  leur  bailler  en  engagement  quelque  estât 
d'importance  qui  leur  est  agréable  et  commode  pour  recouvrer  ung 
gros  prest  d'argent  d'eulx,  qui  seroit  bien  le  seul  moyen  pour  leur 
faire  rompre  le  coup,  et,  si  cela  estoit  vray,  ce  seroit  designer  très 
évident  de  vouloir  faire  la  guerre  en  feignant  de  ne  la  vouloir  point 
faire,  pour  mieulx  surprendre  le  Pape,  parquoy,  affin  d'en  scavoir 
mieulx  la  vérité.  Quant  aux  choses  qui  se  présentent  de  deçà,  j'ai 
résolu  de  faire  deux  choses:  l'une, d'envoyer  unghomme  d'entende- 
ment jusques  Auspurg  (4)  et  plus  avant  en  Allemaigne  pour  descou- 
vrir et  entendre  si  rien  se  remue  par  delà,  car  il  est  bien  possible 
qu'il  se  feroit  quelque  levée  pour  leurs  gallères  d'Allemaigne,  ou 
pour  le  fait  d'Hongrie,  ou  ceulx  du  Roy  Ferdinand  i,5)  ont  eu  nagaires 
quelques  victoires  contre  les  Turcz,  et  vous  ne  trouverez  pas  maul- 
vaise  une  petite  despense  pour  avoir  ces  advis  la  au  vray  et  de  bonne 
heure.  J'espère  aussi  partir  dans  deux  ou  trois  jours  pour  m'en  aller 
a  Venize  veoir  si  je  pourray  descouvrir  ceste  praticque  d'engaige- 
ment,  affin  de  mettre  peine  de  l'embrouiller  et  de  l'interrompre, 
bien  que  j'ozerois  jurer  et  asseurer  sur  ma  vie  que  ces  Seigneurs 
n'entreront  en  aulcun  party  qu'ilz  congnoissent  estre  advantaigeux 
pour  l'Empereur,  s'il  ne  leur  quittoit  quelque  estât  de  si  grande 
importance,  et  si  commode  quilz  ne  le  peussent  refuzer  sans  se  faire 
grand  tort,  et  tout  le  monde  ne  me  sauroit  faire  accroire  qu'ilz  doib- 


(1)  Le  marquis  de  Saria,  qui  avait  solennellement  quitté  Rome  le  2  août.  (Voir 
Duruy,  Carlo  Carafa,  p.  111  . 

(2)  Barri,  ville  au  S.-E.  de  l'Italie,  avec  deux  ports  sur  l'Adriatique. 
(3;  Bona  Sforza. 

(4)  Augsbourg. 
>    Ferdinand  Ier  d'Autriche,  empereur  d'Allemagne,  frère  cadet  de  Charles- 
Quint,  né  en  1503  à  Alcala  de  Bénarès   Espagne  .  roi  de  Bohême  el  Hongrie,  fui 
proclamé  en  1531  roi  des  Romains,  succéda  à  son  frère  comme  Empereur  (1556), 
mourut  en  1564. 


184  NÉGOCIATIONS    DE  [àOLT    1556] 

vent  tout  a  un  coup  irriter  le  Pape,  le  Roy  et  le  Turcq,  car  le  moin- 
dre deux  est  bastanl  pour  le  destruire  :  et  si  je  puis  entendre  chose 
qui  me  puisse  donner  occasion  d'en  rien  souspeconner,  je  leur  en 
parleray  en  termes  generaulx,  de  façon  qu'ilz  auront  occasion  d'y 
penser.  Je  n'ay  pas  voulu  faillir.  Monseigneur,  de  vous  dire  ce  que 
j'en  entendz  encores,  que  je  pense  que  ce  soit  la  plus  part  fables 
et  discours  a  l'italiene;  quant  a  la  peste  de  Yenize,  on  n'y  veoit  point 
encores  d'amendement,  mais  plus  tost  grande  continuation  et  faul- 
dra  veoir  au  plain  de  ceste  lune,  qui  sera,  dans  peu  de  jours,  ce  qu'elle 
fera;  on  escrit  encores  de  Rome  que  l'on  tient  pour  tout  asseuré  la 
restitution  de  Plaisance  au  Duc  Octavio  (1),  et  disent  davantaige  que 
le  Cardinal  Farnèze  estoit  attendu  audit  Florence  pour  traitter  le 
mariage  de  son  nepveu  avec  une  fille  de  Florence  ;  toutes  fois,  ung 
des  clercz  de  l'extraodinaire,  qui  arriva  hier  de  Parme,  m'a  asseure 
qu'on  avoit  voulu  donner  la  corde  a  ung  audit  Parme,  qui  en  avoit 
ouvert  la  bouche,  et  que  ledit  Cardinal  et  Duc  Octavio  estoient  em- 
semble  aux  champs,  sy  est  ce  que  je  n'y  envoyeray  point  la  paye  de 
ce  mois  que  le  plus  tard  que  je  pourray,  et  sans  qu'ilz  me  la  deman- 
dent deux  fois. 
De  Vicence,  ce  15e  d'Août  1356. 

Monseigneur,  le  général  d'Elbane  m'a  escript  que  vous  luy  aviez 
fait  donner  assignation  des  34  mil  escuz  derniers  que  le  Duc  de  Fer- 
rare  presta,  et  il  luy  en  est  deu  encores  autre  30  mil  qu'il  presta  ;i 
ce  mois  de  Septembre  aura  ung  an,  qui  furent  envoyez  a  Rome  pour 
secourir  le  Pape  et  luy  donner  occasion  de  se  déclarer.  Il  vous 
plaira,  Monseigneur,  donner  charge  a  Messieurs  des  finances  de 
pourveoir  au  remboursement  de  ceste  partie  la.  allin  que  le  Sr  Duc 
ne  se  puisse  plaindre  qu'on  lui  retienne  le  sien.  Sy  vous  n'estes  bien 
asseure  de  la  paix,  il  ne  fauldroit  pas  oublier.  Monseigneur,  de 
faire  quelque  bonne  despence  en  Levant,  maintenant  qu'on  trou- 
vera le  grand  Seigneur  en  colère  de  ceste  ruine  qu'il  ;i  reçeue  en 
Hungrie (2),  laquelle  on  dit  estre  grande  et  luy  a  est»''  baillée,  pensant 
luy  estre  en  trefve,  dont  je  croy  bien  qu'il  vouldra  faire  la  vendette 
au  grand  dommaige  de  la  chrestientr. 

(Bibl.  nat.,Fr.  20644,  fol.  160)  (copie 

(1)  Octave  Farnèse  était  duc  de  Parme  et  de  Plaisance. 

(2)  Soliman  II  essuya  une  défaite  a  Erlau  [Agria),  ville  de  Hongrie,  à  181  kil. 
de  Bude,  et  tinit  par  accorder  de  nouveau  la  paix. 


[AOUT    1556]  DOMINIQUE   DU   GABRE  18 


GABRE    AU    ROI 

142.  —  [Vicence],  2.')  août  1556.  —  Sire,  depuys  la  dernière  lettre 
que  j'ay  escripte  a  Monseigneur  le  Connétable  des  afferes  et  nou- 
velles de  ce  lieu  de  deçà,  la  Seigneurie  de  Venize  me  fil  entendre 
en  ce  lieu  ou  je  m'estois  retire  pour  le  suspect  de  peste,  qu'ilz 
avoient  quelque  chose  a  me  dire,  et  (pie  je  fusse  content  daler  jus- 
ques  la,  ou  j'allay  incontinent  et  trouvay  qu'ilz  n'avoient  rien  a  me 
dire  des  afferes  publiques,  mais  seulement  du  faict  particulier  d'ung 
prisonnier  duquel  Monsieur  de  Cambray,  vostre  ambassadeur  en  Tran- 
sylvanye,  se  plaignit  dernièrement  qu'il  passa  icy  cl  qu'il  l'avoit  voulu 
assassiner,  comme  j'ai  reconnu  par  autre  lettre.  La  Seigneurie  l'avoit 
voulu  fait  mettre  entre  les  mains  du  Conseil  des  Dix  (1)  pour  luy  faire 
sonprocez  et  le  juger.  Quant  ilz  y  ont  bien  eu  pensé,  ilz  se  sont  reso- 
luz  de  n'y  toucher  poinct  et  m'avoient  faict  appeller  pour  me  dire,  que 
voulant  procéder  contre  luy,  ils  avoient  veu  et  descouvert  que  la 
matière  dont  ce  prisonnier  la  estoit  accusé  dependoit  de  quelque 
différent  ou  inimitié  qui  estoit  entre  Mr  de  Codignac  et  ledit  sr  de 
Cambray,  tous  deux  ministres,  et  ayans  nom  dambassadeurs  de 
Vostre  Majesté,  parquoy  dez  qu'ilz  entendirent  cela  ilz  n'avoient 
passé  plusoultre  a  vouloir  scavoir  rien  de  ceste  affaire,  leur  semblant 
qu'ilz  n'estoient  pas  raisonnable  qu'ilz  se  meslassent  des  differentz 
de  voz  serviteurs,  et  avoient  résolu  de  mettre  entre  mes  mains  ledit 
prisonnier  pour  le  vous  envoyer,  affin  que  Vostre  Majesté  ordonnast 
de  ce  faict  la  ce  que  bon  luy  sembleroit;  ce  qu'ilz  avoient  délibéré 
de  vous  faire  entendre  par  leur  ambassadeur  et  m'en  avoient  aussi 
bien  voulu  advertir.  Je  leur  feiz  response,  Sire,  que  leur  respect 
ne  pouvoitestre  en  cela  que  avec  bonnes  et  prudentes  considérations 
comme  ilz  les  ont  en  toutes  choses,  mais  je  ne  voulois  pas  me 
charger  dudit  prisonnier  sans  commandement  exprez  de  Vostre 
Majesté,  a  laquelle  j'endonneroisadvis.  Je  croy  que  ledit  de  Cambray 
sera  arrivé  en  vostre  court  et  qu'il  veus  en  aura  dit  quelque  chose, 
et  j'ai  eu,  depuis  peu  de  jours,  une  lettre  dudit  s-  de  Codignac,  par 
laquelle  il  monstre  avoir  et  amy  et  non  ennemy  dudit  de  Cambray, 
ayant  procure  sa  libération  et  sauve  la  vie,  et  pour  ce  «pie  en  la  dite 
lettre  il  fait  mention  du  Roi  des  Romains  (2)    et    du    présent  de  la 

(1)  Le  Conseil  des  Dix,  institué  au  \IV  siècle,  était  composé  «le  dix  patriciens, 
élus  dans  Ip  Grand  Conseil  à  raison  d'un  seul  pour  la  même  famille  :  te  Doge  el 
ses  six  conseillers  y  avaient  voix  délibérative.  (Voir  A.  Baschkt,  \rchives  de 
Venise,  p  513).  Le  Conseil  des  Dix  était  chargé  de  veiller  à  la  sûreté  de  l'État, 
de  déjouer  les  complots,  de  juger  les  crimes  de  trahison  :  mais  cette  magistrature 
finit  par  dégénérer  en  un  tribunal  d'exception. 

(2)  Ferdinand  Ier  d'Autriche. 

16 


186  NÉGOCIATIONS    DE  [AOUT    \  55H] 

litière  fait  au  Grand  Seigneur.  Je  vous  envoyé,  Sire,  la  copie  de  la 
dite  lettre  qu'il  vous  plaira  faire  veoir,  et.  quant  a  ce  prisonnier,  il  ne 
mérite  pas,  ce  me  semble,  la  peine  ne  la  despence  de  renvoyer  en 
France,  car  c'est  un  grand  animal  qui  a  este  toute  sa  vie  esclave,  et 
par  conséquent  de  vie  et  condition  si  misérable  qu'il  ne  doibl  estre 
guières  adjouster  foye  a  chose  qu'il  dye  en  laveur  ou  desavantaige 
de  l'un  ou  de  l'aultre.  11  vous  plaira.  Sire,  me  commander  ce  que 
vous  voulez  que  j'en  face,  soit  de  luy  faire  donner  liberté,  ou  de  luy 
faire  icy  son  procez,  ou  de  le  vous  envoyer.  Car  je  ne  vouldroys  pas 
me  mesler  des  differentz  de  ces  deux  ministres,  mais  aussi  ne 
vouldrois  pas  faillir  de  suyvre  vostre  intention. 
De  Vicence  ce  25  dAout  1556. 

Bibl.  nat..  Fr.  20io6,  fol.  173     copie  . 


GABRE    AU    CONNETABLE 

143. —  Venise],  2$  août  Iô.jG. —  J'avoiseu  quelque  soupçon  que 
ce  qu'on  disoit  de  l'accord  dudit  Octavio  fut  vray  1  .  mais  je  ne 
pouvois  croire  qu'il  ne  vous  en  eust  l'ait  entendre  secretemenl  quel- 
que chose,  pour  vous  persuader  de  lui  laisser  prendre  ce  qu'on  luy 
présente,  pour  avoir  après  plus  grand  moyen  de  faire  service  au 
Roy,  voulant  faire  le  trait»''  double,  el  -'il  eus!  eu  jugement,  il  le  de- 
voit  aussi  faire  pour  sauver  la  chèvre  et  les  choux,  comme  l'on  dit. 
Mais  voyant  la  despeche  que  vous  avez  l'aile  vers  luy  par  Monsieur 
de  Fourquevaux,  el  le  langage  qu'il  luy  tiui  a  son  arrivée,  si  fort 
contrairea  ce  qu'il  eu  avoil  dans  le  cœur,  comme  l'on  levoil  par  les 
effets,  cela  me  luit  croire  qu'il  a  voulu  taire  et  la  pratique  et  la  con- 
clusion si  secrètement  que  vous  n'en  ayez  rien  sceu,  et  d'autant  plus 
est  il  inexcusable.  Ledit  sieur  de  Fourquevaulx  m'a  écrit  qu'il  s'en 
alloit  a  Ferrare  avec  la  nouvelle  de  ceste  mutation,  me  priant  que 
je  m'y  voulusse  trouver,  avant  qu'il  en  partit,  pour  y  résoudre  quel- 
que expédient  ;  mais  pour  vous  en  parler  franchement,  je  n'y  suis 
pas  voulu  aller,  connoissant  la  nature  du  Seigneur  qui  esl  la.  qui  se 
mettra  maintenant  sur  ses  grands  chevaux,  ci  dira  que  nous  u'avons 

(1)  Le  duc.  Octavio  Farnèse,  jusque-là  dévoué  aux  intérêts  Français,  venail  d'être 
secrètement  travaillé  par  le-  agents  de  Philippe  IL  qui  lui  avaient  promis  de  lui  res- 
tituer Plaisance,  il  n "axait  pas  hésité,  devant  cette  offre,  à  abandonner  le  parti  de 
Henri  II  pour  passer  aux  Espagnols.  Le  roi  de  Fiance  et  le  cardinal  Carafa,  craignant 
que  la  défection  de  Farnèse  n'entraînât  celle  des  Vénitiens  et  du  duc  de  Fen  are. 
envoyèrent  à  l'arme  M.  de  Soubise,  gentilhomme  de  la  Chambre,  et  M.  de  Four- 
quevaux. pour  persuader  au  duc  Octavio  de  rentrer  dans  l'alliance  française, 
mais  les  efforts  des  deux  diplomates  furent  vains  et,  dès  ce  jour,  le  duc  resta 
ouvertement  L'allié  de  Philippe.  (Voir  <;.  Doruy,  Carlo  Carafa,  p.  178 


[AOUT    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  187 

pas  épargné  pour  de  petits  compagnons,  quin'ontny  foy  ni  honneur, 
les  millions  et  les  millions,  et  que  pour  luy,  qui  est  parent  et  prince 
d'honneur,  l'on  ne  Ta  rien  estimé,  et  se  voudra  faire  prier  et  enché- 
rir sa  marchandise,  pensant  qu'on  aura  bien  afaire  de  luy,  et  il  m'a 
semblé  devoir  tuyr  toutes  occasions  de  renouveler  la  vieille  pratique 
avec  luy,  jusques  a  ce  qu'on  ave  de  vos  nouvelles.  Car  si  vous  voyez 
les  choses  disposées  a  la  guerre,  et  que  vous  ayez  besoin  ou  volonté 
d'avoir  le  Duc  de  Ferrare,  pour  faire  tant  plus  grand  desplaisir  a  la 
maison  Farneze  et  leur  tenir  le  pied  sur  la  gorge,  ledit  Duc  de  Ferrare 
est  a  vous,  en  observant  sa  capitulation,  de  laquelle  il  ne  se  retirera 
jamais  pour  l'espérance  d'en  jouir  en  temps  de  paix  sans  rien  faire  ; 
et  si  vous  estiez  en  termes  de  paix  avec  le  Roy  Philippe,  ce  sera 
un  grand  plaisir  de  vous  voir  deschargé  de  Parme  et  de  Ferrare  et 
vous  contenter  de  la  Mirandolle,  avec  l'intelligence  du  Pape,  pour 
conserver  ce  que  vous  avez  en  Toscane,  et  que  les  autres,  qui  ne 
veulent  penser  qu'a  leurs  intérests  et  affaires,  les  fassent  a  leurs 
despens  et  non  avec  l'argent  du  Roy.  Je  croy,  quant  a  moy,  que 
ledit  Duc  de  Ferrare  se  contenteroit  ;  pour  le  moins  il  le  devroit 
faire,  quand  on  luy  voudroit  commencer  toutes  ses  dépenses  du 
jour  que  vous  le  feriez  servir  et  non  du  jour  de  sa  ralilication,  de- 
puis laquelle  on  le  pourroit  rembourser  seulement  de  la  dépense 
qu'il  aura  augmentée  pour  ses  garnisons  et  non  de  celles  qu'il  n'a 
pas  faites.  Et  si  vous  jugez,  Monseigneur,  les  Farnèses  dignes  de 
chastiment,  dissimulez  pour  quelques  jours,  afin  de  retirer  cepen- 
dant a  la  Mirandole  environ  quatorze  mille  septiers  du  bled  qu'il  a 
en  la  munition,  et  vingt  pièces  d'artillerie  entre  lesquelles  il  y  a 
dix  canons,  et  faites  seulement  prier  le  Cardinal  Carafi'e  qu'il  les 
veuille  traiter  comme  ils  méritent,  car  vous  verrez  qu'il  leur  ostera 
bientost  Testât  de  Castre  (1),  qui  est  de  trente  mil  escus  de  rente, 
et  qui  seroit  bon  pour  Dom  Antonio,  son  frère,  et  appelleront  le 
Cardinal  Farnese  a  Rome,  qui  se  gardera  bien  d'y  aller,  et  en  bons 
termes  de  justice,  ils  le  priveront  de  laChancellerie  et  des  bénéfices 
et  par  adventive  du  Chapeau,  et  asseurez  vous  que  c'est  luy  qui  a 
dressé,  toute  cette  partie. 

Monseigneur,  si  je  ne  me  trompe,  le  Duc  de  Ferrare  va  entrer  en 
si  grand  peur  et  jalousie  de  son  Estât,  qu'il  ne  dormira  jamais  seu- 
rement  qu'il  ne  se  voye  asseuiv  de  la  protection  du  Roy,  car,  main- 

(1)  Castro,  village  d'Italie,  à  39  kil.  N.-O.  de  Viterbe,  autrefois  évêché  et  chef- 
lieu  de  duché.  Les  Farnèse  avaient  possédé  le  château  de  Castro  pendant  plus  d'un 
siècle,  à  titre  de  vicaires  de  l'Église,  avant  que  Paul  III  ne  le  donnât  à  litre  de 
duché  à  l'ierre-Louis  Farnèse.  Il  comprenait,  outre  Castro  :  Toscanctlo,  Montalte, 
Marta  et  I  orghetto.  La  ville  de  Castro  fui  rasée  en  1648  par  ordre  du  pape 
Innocent  X,  pour  punir  les  habitants  d'avoir  lue  leur  évoque.  Le  duché  lui.  plus 
tard,  réuni  aux  États  de  l'Église. 


188  NÉGOCIATIONS   DE  [AOUT    1556] 

tenant  que  Parme  est  révolté,  l'Estat  dudit  Duc  est  frontière,  qui 
estoit  couvert  et  asseuré  dudit  Parme,  pendant  qu'il  estoit  a  la  dé- 
votion du  Roy  ;  il  ne  se  peut  plus  passer  de  la  faveur  et  aide  de  Sa 
Majesté,  et  sera  contraint  de  se  contenter  des  conditions  que  vous 
voudrez,  et  ne  seroil  pas  mal  employé  qu'on  luy  lit  achepter  chère- 
ment cette  protection,  puisqu'il  pourroit  en  avoir  besoin,  et  non 
que  le  Roy  acheptat  son  amitié,  de  laquelle.  Dieu  mercy,  il  se  peut 
bien  passer.  Vous  devez  scavoir,  Monseigneur,  en  quels  termes  vous 
estes  avec  le  Roy  Philippe,  et,  selon  cela,  vous  conduire  ;  mais  si  vos 
prisonniers  ne  sont  encore  délivrez,  je  me  doute  qu'il  y  aye  de  la 
malice.  Et  cette  mutation  du  Duc  Octavio,  avec  ce  que  tout  a  un 
temps  le  Duc  de  Florence  s'arme,  me  fait  croire  quil  y  ait  quelque 
conjuration  secrète  contre  le  Pape  et  qu'on  aye  l'ait  a  croire  audit 
Duc  Octavio  quelque  grande  ruine,  que  l'Empereur  vouloit  faire  en 
Italie,  qui  l'a  fait  ainsi  oublier  de  son  honneur. 
De  Venise,  ce  28  Août. 

(Ribier,  t.  H,  p.  646). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

144. —  [Vicencé],  Jt>  août  1556. —  Monseigneur,  Le  conte  Ottavio 
de  Thienne  qui  s'en  rêva  a  Ferrare  sera  porteur  de  la  présente,  et 
avec  ceste  occasion  je  n'ay  volu  faillir  de  vous  fere  la  révérence  et 
présenter  mes  très  humbles  recommandations  à  vostre  bonne  grâce, 
n'ayant  pour  ceste  heure  autre  argumenl  digne  d  escripre.  J'ay  esté 
ces  jours  passez  à  Venize  mal  voluntiers,  mandé  de  la  Seigneurie, 
non  pour  affere  publique,  mais  bien  pour  ung  particulier  digne  de 
peu  de  considération  à  Vostre  Excellence,  et,  pour  ce  que  le  suspect 
et  le  danger  de  peste  y  va  plus  lost  en  augmentant  que  autrement, 
je  m'en  suis  incontinent  retorné  icy  où  je  trouve  plusieurs  serviteurs 
du  Roy  et  de  mes  amys  qui  me  usent  tanl  d'honnesteté  et  de  cour- 
toisie, qu'il  n'est  possible  de  plus,  et  mesmes  ceulx  de  ceste  maison 
de  Thienne.  Au  demeurant.  Monseigneur,  il  vous  plaira  de  me  tenir 
touljour  en  la  bonne  grâce  de  Vostre  Excellence  et  me  commander 
voz  bons  plaisirs,  etjemettray  peyne  de  les  accomplir  et  vous  fere 
toute  ma  vye  très  humble  service. 

De  Vicence,  ce  xxvi"  d'aoust  1556. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


[septembre  1556"  Dominique  nu  gabre  189 


GABRE  A  DU  BOURG 

145.  —  rVicence],  9  septembre  1 556.  —  Monsieur  le  Trésorier  de 
l'extraordinaire  des  guerres.  Maistre  Claude  du  Bourg  (1)  ou  son 
commis,  payez  a  Maistre  Jacques  Pecquineau  (2),  trésorier  dicelles 
guerres  en  ce  pays  d'Italie,  la  somme  de  mil  vc  soixante  livres  pour 
icelle,  convertir  et  emplover  au  fait  de  sondit  office  et  mesmes  pour 
payer  les  cent  chevaulx  légiers  du  conte  de  la  Myrande  que  le  Roy 
avoit  par  cy  devant  cassez  durant  le  temps  de  la  trefve  par  ung  estât 
signe  de  luy  et  Duthier  du  xxvme  jour  de  juin  1556,  lequel  depuis 
auroit  mande  par  une  sienne  missive,  en  datte  du  xxvne  août  audit 
an,  aui-si  signée  de  luy  et  dudit  Duthi  t,  que  nonobstant  ledit  estât 
par  cy  devant  envoy  >  il  vouloit  qu'ilz  fussent  continuez  aestrepayez 
et  iceulx  envoyé  a  Rome  pour  le  service  de  nostre  S1  Père  le  Pape. 
Prenez  quittance  dudit  Pecquineau  qui  le  rendra  comptable,  rappor- 
tant laquelle  avec  la  présente  ;  ladite  somme  de  mil  vc  lx  sera  passée 
et  allouée  en  voz  comptes  et  rabattue  de  vostre  recepte  partout  ou 
il  appartiendra. 

Fait  a  Vincenza  le  ixe  jour  de  septembre  mil  vc  cinquante  six. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20970,  fol.  161)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

146.  —  [Vicencé],  12  septembre  1556.  —  Monseigneur,  Je  ne  vous 
feroy  pas  longue  lettre  pour  ne  redire  ce  que  j'ay  mis  en  la  lettre 
que  j'escript  au  Roy,  n'ayant  autre  chose  de  particulier  a  vous  dire, 
sinon  que  mon  homme  qui  est  venu  d'Allemaigne  m'a  rapporte 
avoir  parle  a  ung  aultre  homme  qui  ne  faisoit  que  de  venir  a  Vienne, 
ou  l'on  préparoit  une  grosse  armée  de  gens  de  pied  et  de  cheval 
que  l'Archiduc  d'Austrie,  second  filz  du  Roy  des  Romains  (3),  debvoit 
mener  contre  les  Turcqz  sur  lesquelz  il  avoit  eu  quelque  peu  de 
victoire,  et  je  croy  que  le  service  du  Roy  requerroit  de  faire  solli- 

(1)  Claude  du  Bourg,  sieur  de  la  Guérinc.  trésorier  de  France  à  Lyon  en  1557, 
conseiller  du  Roi  en  1562.  secrétaire  des  tinances,  ambassadeur  à  Constantinople 
sous  Charles  IX. 

(2)  Jacques  Péguineau,  trésorier  des  guerres,  probablement  petit-fib  de  Martin 
Péguineau,  ambassadeur  en  Ecosse  (1512-1513  . 

(3)  Ferdinand,  comte  de  Tyrol,  marquis  de  Burgan,  né  en  1529,  mort  en  1595; 
deuxième  tils  de  Ferdinand  Ier  d'Autriche  et  d'Anne,  tille  de  Ladislas,  roi  de 
Hongrie. 


190  NÉGOCIATIONS    DK  [OCTOBRE    1556' 

citer  le  grand  Seigneur  de  la  revanche  et  pour  ceste  cause  luy  faire 
une  bonne  despeche.  J'ay  envoyé  ung  homme  a  Parme  pour  vpoir  a 
l'œil  la  qualité  et  la  bonle  des  victailles  qui  y  sont  et  le  prix  a  quoy 
est  maintenant  le  bled  par  de  la.  affin  qu'on  puisse  se  resouldre  de 
la  vente  si  le  Roy  la  commandera,  le  plus  qu'il  sera  possible  a  son 
proffit  et  advantaige.  Je  désire  bien  sur  toutes  choses,  Monseigneur. 
de  n'aller  pas  a  Parme  pour  ceste  commission  la,  mais  je  suis  bien 
content  d*y  envoyer,  et  qu'il  ne  se  puisse  rien  vendre  que  je  le 
scaiche,  car  je  garderay  bien  ceux  qui  vouldroient  butiner  la  dessus 
d'y  faire  ce  qu'ilz  auroient  pense,  et  pour  le  moins  je  vous  advertiray 
fort  bien  si  je  veoy  que  personne  y  aille  avec  desseing  particulier. 
De  Vicence  ce  12e  de  Septembre  1556. 

Monseigneur,  Monsieur  de  Soubize  m'a  escript  que  vous  estiez  en 
oppinion  qu'il  avoit  prins  son  estât  de  Parme  depuis  qu'il  alla  en 
Toscane,  voyant  que  le  Roy  lui  escripvoit  ne  le  plus  prendre  et  ne 
scay  de  qui  se  plaindre  qui  vous  ay  donné  cest"  impression.  Je 
luy  ay  fait  responce  que  je  le  priay  de  n'avoir  p  >int  desouspecon  sur 
moy,  et  que  je  m'aimois  trop  moy  mesmes  pour  vouloir  dire  en  si 
bonne  compaignie  qu  '  la  vostre  une  mensonge  si  évidente,  car  tous 
les  mois  le  controll  >ur  qui  t°noit  le  registre  a  Parme  envoyé  a 
Mr  le  Controlleur  général  un  estai  de  la  despence,  ou  l'on  veoit 
bien  que  ceste  partie,  n'est  aucunement  comprinse  et  je  vous  en 
ay  bienvolu,  Monseigneur,  escrip  •  ■  ce  mot.  allin  que  vous  ne  fussiez 
pas  en  ceste  oppinion,  vous  asseurant  hi  mi  qu'i  n'a  pas  receu  ledi* 
estât  de  Parme  depuis  qu'il  commença  a  recevoir  celuy  de  Toscane' 
et  luy  seroit  faict  ung  grand  tort  si  l'on  le  pensoit  aultrement. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20644,  fol.  167]  (copie  . 


GABRE    AU    ROI 

147.  —  [Venise],  .2  octobre  1566.  —  Sire,  il  semble  qu'on  soit  bien 
loin  de  faire  accord  et  que  le  Papn  soit  excusable,  s'il  ne  se  veut 
accommoder  a  choses  si  impertinentes,  que  demande  l"  Duc 
d'Albe  ;  car,  quand  il  tiendroit  Sa  Sainteté  prisonnier,  j  cro  qu'il 
ne  luy  scauroil  demander  davantage.  Les  Impériaulx  onl  enfin 
rompu  la  trefve    1  .  qu'ils  disoient  vouloir  tant  observer  du  coté  de 

(1)  Les  hostilités  avaient  repris  depuis  le  1"  septembre  entre  le  Saint-> 
le  duc  d'Albe.  L'année  du  Duc,  composée  de  plus  de  20000  hommes,  comprenait, 
entre  autres  troupes,  iooo  Espagnols  d'une  bravoure  ;ï  toute  épreuve,  mais  d'une 
rare  cruauté,  qui  exterminaient  les  vaincus  sans  pitié,  brûlaient  les  maisons» 
pillaient  tout  devant  eux.  La  consternation  régnait  a  Rome  et  s'expliquait  «l'autan1 
plus  que  le  Pape  ne  disposait,  en  somme,  que  «le  troupes  peu  nombreuses  et  peu 
disciplinées.  (Voir  G.  Duruy,  Carlo  Carafa,  p.  183). 


[OCTOBRE    1536]  DOMINIQUE   DU    GABRE  191 

Rome,  et  est  a  craindre  qu'ils  la  veulent  aussi  rompre  du  costé  de 
Lombardie.  Ils  vous  ont  eu  bien  peu  de  respect,  Sire,  et  il  sem- 
ble que  le  Roy  Philippe  veuille  commencer  le  chemin  du  père, 
a  vouloir  avec  les  armes  donner  la  loy  au  monde,  et  a  ceux  qui  né 
le  reconnoissent  en  rien,  comme  s'il  estoit  dominateur  de  l'univers. 
Je  ne  scay  rien,  Sire,  de  vos  affaires,  mais  si  vous  nestez  en  quelque 
étroite  pratique  de  paix  avec  luy  et  que  vos  affaires  le  peussent 
porter,  il  meriteroit  bien  qu'on  l'accoustumast  de  ne  plus  croire  en 
celle  grandeur  et  a  vous  porter  doresnavant  plus  grand  respect. 
Car  le  Pape  est  comprins  en  la  tref've  comme  le  principal  de  vos 
alliez,  et  ne  se  peut  dire  que  Sa  Sainteté  les  aye  aucunement  pro- 
voquez par  acte  de  guerre,  car  il  n'a  rien  attenté,  sinon  contre  ses 
sujets,  et  par  les  termes  de  justice,  laquelle  ils  voudront  par  les 
armes  gouverner  a  leur  appétit  en  la  maison  d'autruy,  qui  est  une 
insolence  du  tout  insupportable,  .lentens  que  dans  Rome  on  com- 
mence desja  a  s'asseurer,  et  ne  sont  pas  les  choses  si  mal,  qu'il  ne 
puisse  bien  amuser  les  ennemis  et  les  faire  pourmener  hors  de  Rome 
plus  longuement  qu'ils  ne  voudroient  ;  car  je  veux  croire  que  Sa  Sain- 
teté ne  se  hastera  pas  fort  de  venir  a  composition  quil  n'aie  de  vos 
nouvelles.  Le  Commandon  (1),  son  secrétaire,  qui  avoit  été  icy  en- 
voyé, a  remonstré  a  ces  Seigneurs  la  justification  du  Pape,  la  mau- 
vaise foy  et  intention  des  Impériaulx,  la  conséquence  et  importance 
que  cela  seroit  a  toute  lltalie  et  mesmement  à  cest  Estât  cy,  la  ruine 
du  Siège  Apostolicque  et  la  dignité  Papale,  les  priant  d'y  vouloir 
penser  et  de  ne  laisser  Sa  Sainteté  en  proye  des  ennemis  de  Dieu  et 
de  l'Eglise,  sans  toutesfois  les  recbercher  d'aucune  particularité  ;  mais 
après,  je  leur  suis  aile  remonstrer  que  pour  fuyr  toute  occasion  de 
vostre  part  et  de  celle  du  Pape  de  rompre  la  trêve,  qui  estoit  si  né- 
cessaire a  la  Chrestienté.  V<  sire  Majesté  n'avoit  voulu  envoyer 
aucunes  forces  a  Sa  Sainteté  pour  pouvoir  assaillir  personne,  et  que, 
ce  peu  de  François  qui  sont  a  Rome,  vous  les  aviez  fait  passer  pour 
aller  garder  vos  places  de  Toscane,  lesquels  Sa  Sainteté  avoit  après 
demandé  a  vos  ministres,  qui  leur  avoi  uit  accordé,  pour  garder  sa 
propre  maison.  Que  j'avais  opinion  que  vous,  Sire,  trouveriez  bien 
mauvais  cette  ouverture  de  guerre,  commencée  par  les  Impériaulx, 
et  seriez  pour  vous  en  ressentir  tôt  ou  tard,  estant  aussi  bien  as- 
seuré  que  pour  rien  Vostre  Majesté  n'abandonneroit  Sa  Sainteté.  Mais 
parce  qu'il  y  avoit  qu  lquepourparler  d'accord,  il  me  sembloit  qu'il 
feroit  chose  digne  de  leur  grandeur  et  agréable  a  Dieu  et  au  monde 


(1)  Jean-François  Commendon,  né  à  Venise  en  1524,  fut  mêlé  à  de?  négociations 
importantes  en  Angleterre,  à  Vienne  el  à  Varsovie  ;  envoyé  comme  nonce  en 
l'ologne  (1564),  il  réussit  à  y  taire  accepter  les  décrets  du  Concile  de  Trente, 
et  fut  nommé  cardinal  en  récompense  de  ce  succès.  Il  mourut  en  158  i. 


192  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    15561 

et  de  grand  bénéfice  a  toute  l'Italie,  d'y  interposer  leur  autorité  et 
d'envoyer  en  diligence  un  gentilhomme  exprès  vers  le  Duc  d'Albe 
avec  remonstrances  et  protestations  qui  le  puisse  mettre  en  quelque 
doubte  ou  défiance  d'eux;  ils  m'ont  repondu  d'y  avoir  fait  office  en- 
vers le  Pape  et  le  Roy  Philippe,  et  qu'ils  y  feroient  encore  toutes 
choses  possibles,  et  je  croy  quils  seront  pour  se  résoudre  a  cet  ex- 
pédient, comme  les  gens  du  Pape  m'ont  dit  avoir  senty  quelque 
chose  :  il  en  sera  ce  qu'il  plaira  a  Dieu.  Toute  ceste  Italie  est  en 
grande  expectation,Sire,  de  scavoir  ce  que  vous  direz,  et  ferez,  après 
avoir  entendu  que  les  Impériaulx  ont  commencé  la  guerre,  et  se  fait 
sur  cela  de  beaux  discours. 
De  Venise  ce  2  octobre  1556. 

(RiBlER,  t.  il,  p.  648). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

148.  —  [ Venise],  2  octobre  1556. —  Monseigneur,  il  vous  plaira 
veoir,  par  ce  que  jescriptz  au  Roy,  en  quel  estât  nous  sommes  du 
deppost  pour  secorir  les  affaires  a  Rome,  ou  nous  avons  plustot 
abondance  que  faulte  d'argent.  Dieu  mercy.  et  la  bonne  dilligence 
du  gênerai  d'Elbene  et  des  gens  de  .Nazi,  mais  n'ayez  pas.  sil  vous 
plait,  pour  cela,  opinion  qu'il  s'en  face  plus  grand  desgat,  car  ayant 
bien  volu  pourvoir  au  commencement  ceulx  de  Rome,  comme  il 
estoit  bien  nécessaire,  nous  irons  par  cy  aprez  plus  reservez  et  ne 
s'en  prendra  rien  que  Messieurs  les  Cardinaulx  de  Tournon  et  Fer- 
rare,  comme  vous  entendez  ne  le  bcaichent,  et  je  croys  que  ceulx 
de  Rome  vous  rendront  bonne  raison  de  la  despence  quilz  en  feront. 
Le  Roy  Philippe  a  mande  venir  l'Ambassadeur  de  l'Empereur  (1) 
qui  estoit  icy  pour  se  tenir  auprès  de  luy  et  est  party  ayant  laisse 
icy  ung  secrétaire;  en  son  lieu,  vient  ungaultre  Espaignol  qui  estoit 
ministre  a  Gennes,  et  m'a  l'on  asseuré  quil  ne  vient,  sinon  avec  des- 
peche  du  Roy  Philippe,  et  que  l'Empereur  n'y  en  rien  nommé  ayant 
declaire  ne  vouloir  plus  ambassadeurz  auprès  de  luy  ne  aussy  en 
vouloir  tenir  aulcuns  auprez  des  princes,  mais  que  touttes  choses 
se  feissent  au  nom  du  Roy  son  lilz.  et,  s'il  sera  ainsy.  je  croy  que 
la  raison  veult  que  les  Ambassadeurs  du  Roy  précédent  les  Ambas- 
sadeurs des  autres  Roys,  parquoi  sy  on  y  faisoit  difficulté  ou  que 
nous  entrissions  en  disputes  ne  contraste,  je  suis  résoleu  de  ne 
laisser  pas  perdre  mon  lieu  (2)  pour   la  conséquence  et  réputation 

(1)  M.  de  Vargas. 

(2)  Cette  querelle  de  préséance,  énergiquemenl  soulevée  par  du  Gabre,  ne  se 
termina  pas  durant  la  mission  de  ce  prélat  à  Venise;  el  elle  dul  être  reprise  par 


[OCTOBRE    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  193 

du  Roy,  dont  toutesfoiz,  Monseigneur,  je  vous  ay  bien  volu  dire  ce 
mot  pour  ce  que  vous  scavez,  comme  tout  cela  doibt  aller  et  vous 
plaira  m'en  l'aire  donner  ung  mot  d'advis  affîn  que  je  n'y  face  poinct 
d'erreur.  J'escriptz  aussi  a  Sa  Majesté  d'une  recommandation  que  le 
Cardinal  Pisani  (1)  demande,  lequel  m'a  prie  de  vous  en  escripre 
particulièrement.  Je  croy  bien  que  la  principale  espérance  qu'il  a  de 
faire  son  nepveu  (2)  cardinal,  est  en  desboisant  a  force  escuz  dont 
il  a  bonne  provision,  lesquelz,  le  Pape  ou  par  aventure  ses  nepveux, 
ne  reffuzeront  pas  pour  la  nécessité  et  afferes  la  ou  ils  se  trouvent, 
mais  la  recommandation  du  Roy  lui  pourra  beaucoup  valoir,  et  Sa 
Majesté  vient  a  obliger  de  choses  qui  ne  coustent  rien  ung  vieulx 
Cardinal  et  ung  nouveau.  Je  suyes  esbaby,  Monseigneur,  quil  n'y 
aye  poinct  encores  nouvelles  de  Monsieur  de  Morengy  qui  estoit 
party  de  Constantinople  il  y  a  deux  mois,  mais  quil  soit  arrivé. 
J'envoieray  encores  devers  le  Cardinal  de  Trente  pour  scavoir  si  le 
sauf  conduit  quil  a  baillé  pour  passer  les  chevaulx  du  Roy  sera 
valable,  ayant  eulx  depuis  commencé  la  guerre  du  couste  de  Rome. 
De  Venize  ce  11e  d'Octobre  1556. 

Monseigr,  ces  Seigneurs  ont  eu  quelques  nouvelles,  que  le  filz  du 
Roy  des  Romains  avoit  prins  une  ville  en  Hongrye  (3),  que  les  Turcz 
tenoient  nommez  Kabosse,  dans  laquelle  il  y  avoit  mil  cinq  cens 
turcz  ;  il  est  impossible  que  le  Grand  Seigneur  n'en  entre  en  grande 
colère. 

Monseigneur.  11  y  a  ung  marchant  en  ceste  ville  qui  m'est  venu 
offrir  de  prendre  tous  les  bledz  de  Parme  au  priz  qu'ilz  se  vendent 
maintenant  audit  Parme,  qui  est,  a  ce  que  j'ay  entendu,  de  sept 
Jules  le  cestier,  et  payer  l'argent  comptant,  moytie  en  ceste  ville  et 
moytie  a  Lyon  en  lui  rendant  ce  bled  la  sur  le  Po  qui  seroit  aisé 
a  faire,  car  de  Parme  a  Bresseil  n'y  a  que  buict  ou  dix  mille,  et  a  ce 
compte  la  s'en  pourroit  retirer  environ  unze  mil  escuz  comptants, 
dont  vous  pourriez  faire  estât  et  vous  en  servir  promptement  la  ou 
vous  verriez  qu'il  en  seroit  besoing,  et  avant  que  les  chemins  soient 
plusgastez  pour  le  charoyjusquesauPo.il  seroit  bon  qu'il  vouspleust 


son  successeur,  François  de  ÎS'oailles.  La  Seigneurie,  en  effet,  fidèle  à  ses  tra- 
ditions de  prudence.se  refusant  toujours  à  trancher  ce  différend,  Noailles  réclama 
le  rang  qu'il  estimait  devoir  lui  appartenir  avec  tant  d'insistance  que  le  Sénat 
consentit  enfin  à  le  lui  attribuer  le  2  juillet  1558;  c'est  donc  à  cette  date  que  la 
querelle  prit  réellement  fin.  (Voir  Un  évéque  de  Dax,  François  de  Noailles,  par 
l'abbé  Gabarra  ;  Dax,  linp.  Labèque.  1888;. 

(1)  François  Pisani,  vénitien,  d'abord  évéque  de  Padoue  et  de  Trévise,  cardinal 
en  1517,  archevêque  de  Narbonne  ;  mort  en  1570. 

(2)  Louis  Pisani,  vénitien,  également  évéque  de  Padoue,  promu  cardinal  en  1565. 

(3)  Kabosse,  aujourd'hui   Kaposvar,  ville  de  Hongrie,  au  IS'.-O.  de  Cinq-Eglises, 
au  sud  du  lac  de  Balatou,  dans  le  comitat  de  Suneg,  sur  le  Kapos. 


19  i  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    1556 

y  prendre  resolution  et  nous  donner  advis  de  ce  que  vous  vouldriez 
en  estre  faiet,  car  de  le  vendre  par  le  menu  a  Parme  pour  avantager 
ny  le  Duc  ny  les  citadins  pour  leurs  bons  deportements.  ilz  ne  le 
méritent,  et  tout  se  mangera  en  officiers  et  en  rabaiz  et  diminutions 
et  y  aurez  grand  longueur  de  temps:  il  sera  nécessaire  de  faire  une 
lettre  du  Roy  au  Duc  pour  consegner  lesdits  bledz  a  tel  ministre 
que  vous  adviserez.  Quant  a  l'artillerie  et  munitions,  on  pourroit 
retirer  le  tout  par  ung  mesme  moyen. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20456,  fol.  1T7)  (originale  . 


GABRE    A    H.    DE    BEAUREGARD 

149.  —  [Venise],  24  octobre  1556.  —  Monsieur,  je  vous  mercye 
bien  humblement  de  la  lettre  que  vous  m'avez  escripte  par  M'  de 
S1  Ferme  (1),  et  quant  a  mon  congé,  je  vous  asseure  bien  que  j'en 
escripvois  avec  grand  désir  de  l'obtenir,  et  non  pour  prévenir  ceulx 
qui  désirent  ce  lieu  et  le  procurent  pour  moy;  carjaurois  fort  grant 
besoin  défaire  ung  voyage  en  France  pour  mes  petitz  atfères.  mais 
puis  que  vous  me  mandez  que  mon  service  est  agréable,  encores 
que  j'ay  bien  peu  desperance  qu'il  soit  reconnu,  si  continuera?  je 
tant  que  l'on  vouldra  et  tant  que  vous  me  le  conseillerez;  mais  si. 
daventure,  les  choses  de  Rome  s'accommodoienl  par  quelque  accord, 
et  que  les  affères  cessassent  par  deçà,  je  vous  supplve.  Monsieur, 
de  vous  souvenir  de  me  rappeller  avec  quelque  peu  de  réputation, 
en  apparence,  si  je  ne  la  puis  avoir  en  réalité.  Le  Vicaire  de  S1  Ger- 
main ne  vous  a  poinl  parlé  de  ce  que  je  lui  avois  escripl  pour  qu'il 
en  parla  premièrement  a  Monseigneur  le  Cardinal  de  Chastillon 
qui  fut  d'advis  quon  remist  cela  a  une  autre  fois,  pour  quelques 
raisons  que  j'ay  trouvées  très  bonnes  el  -âmes.  . le  vous  escripray 
une  aultre  fois  ce  (pie  c'estoit. 

Au  reste,  Monsieur,  vous  verrez  que  je  faiz  mention  en  la  lettre 
du  Roy  de  quelques  articles  pour  l'accord  du  Pape,  ausquelz  j 'avois 
lait  une  petite  digression  et  préambule,  et  l'eiz  cela  ung  joui  eu  me 
jouant  en  un  vilaige  ou  je  lais. us  vendanger,  mais  Messieurs 
d'Avanson  et  de  Lanssac,  a  qui  je  l'envoyay  après,  me  mandèrent 
quon  lavoit  fort  loue  a  Rome,  encores  que  l'invention  cl  le  langaige 
fust  d'ung  françois  et  que  voluntiers  ils  ne  trouvent  rien  bon  que 
d'eulx.  Si  vous  prenez  la  peine  de  le  lire,  par  adventure,  (pie  ceux 
que  le  Roy  commettra  pour  disputer  de  ce  négoce  avec  les  gens  du 
Roy  Philippe  y  trouveront  quelque  chose  dont  ilz  se  pourront  ayder 

(1)  Etienne  Bouclier,  abbé  de  Sainl-Fenne    unie  I,  p.  120  . 


[novembre  1556]  Dominique  du  gabre  195 

et  s'il  estoit  trouvé  lion  au  conseil  du  Roy,  ftfunus  nostrum  ornato 
verbis,  et  faictes  valoir,  Monsieur,  nostre  Marchandise  le  mieulx  que 
vous  pourrez,  ,1e  despeelie  un  des  Tassins  exprès  pour  ce  qu'il  me 
semble  que  la  despeehe  de  Levant  est  de  grande  importance  et  peult 
beaucoup  amender  toutes  conditions  d'accord,  si  d'avanture  l'on 
estoit  en  quelque  traicté  de  paix  avec  le  Roy  Pbilippe,  et  vous  plaira, 
Monsieur,  faire  bailler  argent  audit  Tassin  pour  son  voyage,  car  je 
ne  luy  ay  rien  baillé  par  deçà,  et  au  demourant  il  vous  plaira  me 
tenir  tousjours  en  votre  bonne  grâce. 
De  Venize  ce  24  dOctobre  1556. 

(Bibl.  nat.,Fr.  20456.  fol.  181;  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

150.  —  [Venisp],  5  novembre  1556.  —  Monseigneur,  vous  aurez 
toutes  nouvelles  de  Rome  par  ce  pacquel  que  j'envoye  au  Roy  et 
veoit  on  que  les  ennemys  commencent  plustost  a  diminuer  que 
engrossir  leur  camp  et  plustost  contenance  de  se  vouloir  retirer 
que  de  passer  plus  oultre  ;  de  sorte  que  le  Pape  s'en  pourroil  trou- 
ver desmelé  avec  lbonneur  dont  il  seroit  fort  obligé  du  Roy  qui  a 
soubztenu  tout  ce  faiz,  car,  sans  son  argent  et  sans  ses  ministres  et 
gens  de  guerre,  je  croy  (pie  toutes  choses  feussent  fort  mal  alées 
et  si  le  Roy  veut  monstrer  de  se  tenir  offence  de  ceste  ropture  de 
guerre,  je  croy  que  le  Duc  d'Alve  n'aura  faict  gueres  bon  service  a 
son  maistre  de  la  commencer.  Vous  avez  et  le  ïurcq  et  le  Pape  fort 
irritez  contre  vostre  enemy,  et  je  croy  que  vous  n'aurez  de  long- 
temps plus  belle  occasion  de  luy  faire  recongnoistre  son  créateur 
que  maintenant.  Vous  ne  m'avez,  Monseigneur,  encores  riens  mande 
de  ce  qu'on  doibt  faire  de  ce  prisonnier  de  Monsieur  de  Cambray  ; 
il  est  toujours  la  en  prison  et  ny  sera  touché  jusques  a  ce  que  vous 
me  mandiez  la  volunte  et  intention  du  Roy.  L'on  m'a  escript  que 
Monsieur  de  Montmorency  a  n'a  guières  passé  par  Testât  de  ces 
seigneurs  s'en  alant  a  Ferrare  et  de  la  a  Rome  (I).  Je  n'eusse  failly 
de  l'aller  rencontrer  pour  me  présenter  a  luy  faire  service,  n'eust 
este  ce  suspect  de  peste  qui  nous  a  tellement  descriez  que  partant 
de  ceste  vile  on  ne  nous  veult  recevoir  en  aucun  lieu,  mais  je  luy 
ay  escript  et  ne  fauldray  pas  de  luy  faire  tous  les  services  quil  me 
sera  possible  comme  je  y  suis  tenu. 

De  Venize  ce  ve  de  .Novembre  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  185)  (original). 

(1;  On  verra  un   peu  plus  loin  (p.   203)  qu'il  s'agit,  ici,  du    tils    du  Conné- 
table. 


196  NÉGOCIATIONS    DE  [NOVEMBRE    1556] 


GABRE    AU    ROI 

151.  —  [  .  12  novembre  1556 .  —  Sire,  je  receuz,  il  y  a 

deux  jours,  les  lettres  quil  vous  a  pieu  m'escripre  du  24e  et  26e  du 
passé,  et,  de  fortune,  le  courrier  que  Monsieur  de  Forquevaulx  m'en- 
voya avec  lesdites  lettres  me  trouva  a  Padoua  ou  jestois  aile  seulle- 
ment  pour  veoir  ung  logerz  nouveau  que  je  y  ay  pour  me  retirer 
tant  plus  voysin  dicy  si  la  peste  nous  en  chassoit.  Je  monstray  a 
Monseigneur  le  Cardinal  Pisani.  qui  est  la,  ce  quil  vous  plaist  m'es- 
cripre  de  l'office  faict  pour  la  promotion  au  Cardinalat  de  son  ne- 
veu, l'Evesque  de  Padoua,  et  de  la  bonne  volonté  que  Vostre  Majesté 
porte  audit  Cardinal  dont  il  demeura  grandement  oblige  et  satis- 
faict  avec  très  grand  désir  de  continuer  a  vous  faire  service  en  tous 
les  endroitz  quil  pourra. 

Bibl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  187.  Extrait    'copie). 


GABRE  AU  GÉNÉRAL  COEFFIER  (1) 

152.  —  Venise],  12  novembre  1556.  —  Monsieur,  ce  porteur  Jean 
Petit  (2)  vous  va  trouver  passant  premièrement  par  Ferrare  pour  y 
prendre  deux  mille  cinq  cens  escus  qui  serviront  ponctuellement 
pour  fournir  a  ce  que  vous  commanderas  ou  bien  le  bailler  entre 
les  mains  de  qui  vous  advis'erés  pour  en  tenir  le  compte,  '-t  s'il  y  en 
aura  encore  assés  pour  satisfaire  a  tous  vos  frais  et  pour  paier  la 
garnison  de  la  Mirandola.  Ledil  Petil  a  accoustume  den  faire  le 
payement,  et  s'il  ny  a  assés  d'argenl  on  luy  envoiera  nouveau  fons; 
en  effect,  Monsieur,  c'est  a  vous  a  luy  commander  ce  qu'il  aura  a 
faire  et  je  croy  quil  ne  fauldra  d'obéyr  et  de  vous  secourir  et  servn 
fidellement.  M  >sser  Pi  stro  Pamaro,  a  qui  le  Roy  a  presmeu  loffice 
de  Controlleur  général  des  munitions,  vous  va  aussj  trouver  pour 
faire  son  estât  tt  vous  assister,  soulaiger  et  ayder  au  marché  et 
dellivrance  des  vivres  :  je  pense  quil  y  fera  sou  debvoir;  et  quant  a  la 
vente  des  bleds,  le  sieur  Carlo  Salvati  qui  vous  parla  a  Padoue 
m'esl  venu  aussy  parler  icy,  <•!  veoy  quil  persiste  en  la  première 
offre  quil  me  tist  d'envoyer  devers  vous  pour  y  faire  une  conclusion, 

(l)  Gilbert  Coeflier,  sieur  de  la  Bussière,  Chezelle«  el  d'Effiat,  trésorier  de 
France,  général  des  finances,  maître  «les  comptes  en  Piémont,  Savoie  et  Dauphinéi 
lieutenant-général  en  Italie  après  la  bataille  de  Cerisolles.  Bibl.  nal  .  Mss  .  dossiers 
bleus,  vol.  200,  dossier  5079  Coeffier  . 

(2}  Courrier  au  service  de  la  France, 


[novembre  1556]  Dominique  du  gabre  197 

et  suis  davis,  Monsieur,  que  vous  la  faciès  le  plutost  que  vous  pour- 
rez, et  meltiés  en  considération  l'importance  de  prendre  tout  bon 
et  mauvais  et  de  vous  payer  comptant,  de  sorte  que  cela  portera 
toujours  plus  davantage  au  Roy  a  demy  Jules,  moins  pour  cestier, 
qui  ne  feroit  un  Jules  davantage  a  attendre  le  temps  de  la  vente  et 
le  vendre  par  le  menu;  j'ay  veu  les  responces  que  vous  fistes  au 
pied  du  marché  que  Mr  Marco  Vidal  (1)  vous  présenta  a  Padoua  et 
me  semble  que  tout  est  fonde  avec  bonne  raison.  Ledit  Mr  Marco 
vous  vas  aussy  trouver  avec  un  homme  dudit  Salvaty;  vous  regar- 
derés,  Monsieur,  s'il  vous  plaist  a  les  faire  depescher  le  plustost 
que  vous  pourrés.  Au  reste,  nous  sommes,  ce  me  semble,  icy,  hors 
de  tous  suspects  de  peste  et  avons  été  deux  jours  sans  quil  ny  ait 
aucun  mort  ny  mallade,  sinon  de  quelques  fiebvres  tierces  qui  ces- 
seront avec  ce  froid,  s'il  plaist  a  Dieu,  et  si  vous  passés  par  icy 
allant  a  Rome,  il  y  a  un  certain  arcovo  nouveau  miraculoso  (2),  et 
amendrons  les  faultes  passées.  J'ay  baillé  audict  Jean  Petit  uncei- 
tain  mémoire  de  munitions  qui  sont  a  Reggio  deppendans,  de  l'ar- 
tillerye,  lesquelles  sont  de  bonne  valleur  payées  par  le  Roy  et  ne 
tiennent  que  pour  la  gabelle  de  peu  d'importance.  Je  croy  que  vous 
ne  scauries  faillir,  Monsieur,  de  les  faire  retirer.  Je  n'ay  rien  de  la 
Court  depuis  vostre  partement,  ne  de  Rome  aussy,  qui  soit  digne  de 
considération. 

De  Venise  ce  douziesme  de  Novembre  1556. 

(Ms.  de  Grenoble,  fol.  54  r). 


gabre  au  duc  de  ferrare 

153. —  [Chioggia],  17  novembre  1556. —  Monseigneur.  Ce  courrier 
m'a  trouvé  encores  en  ce  lieu  pour  le  vent  contrere  qui  m'empescha 
d'arriver  hier  à  Venize.  J'ay  veu  ce  qu'il  vous  a  pieu  m'escripre  par 
la  longue  lettre  de  vostre  main,  où  je  veoy  que  vous  désirez  une 
chose  qui  ne  se  peult  fere  sans  grand  perte  et  préjudice  pour  le  Roy 
et  sans  mettre,  vous  et  nous,  en  grande  confusion.  Je  vous  diray  en 
premier  lieu,  Monseigneur,  comme  les  choses  passent,  et  puis  vous 
qui  estez  maistre  sur  tous  nous  pourrez  commander  et  ordonner  ce 
qu'il  vous  plaira.  Il  vous  plaira  donques  scavoir,  Monseigneur,  en 
premier  lieu  que  j'escripviz  au  Roy  du  11e  d'octobre  l'offre  que  ce 
marchant  vénitien  m'avoit  faicte  de  prendre  tous  les  bledz  de  Parme 
et  les  payer  comptant  au  priz  de  la  place  de  Parme,  et  faire  tous  les 

(1)  Marco  Vidal,  maître  des  courriers  à  Venise.  (Voir  La  Ferrière,  Lettres  de 
Catherine  de  Médicis,  t.  i,  p.  183). 

(2)  Une  arche  miraculeuse  ;  sans  doute  un  lieu  de  pèlerinage. 


i98  NÉGOCIATIONS    DE  [NOVEMBRE    1556] 

charrois  à  ses  despens,  et  depuis  avant  qu'avoir  eu  responce  de  Sa 
Mate,  le  gennéral  Coeffier  vint  à  Venize,  où  ledit  marchant  persista 
encores  en  la  mesmes  offre  et  luy  faist  accordé  le  marché,  à  la 
charge  que  je  m'obligerois,  comme  je  feiz,  à  mon  propre  et  prins 
nom  à  maintenir  et  ohserver  le  contract  qui  en  seroit  passé  par 
ledit  gennéral,  et  à  réfère,  à  faulte  de  ce  fere,  les  dommaiges  et  inté- 
restz  audit  marchant,  lequel  disoit  que  ledit  gennéral  seroit  difficillis 
conventionis,  et  qu'il  ne  s'en  voulloit  adresser  à  aultre  que  à  moy 
qui  suis  résident  à  Venize.  Il  réserva  seullement  la  condition  d'aller 
veoir  sur  le  lieu  la  qualité  du  bled,  et  nous  aussi  de  veoir  si  cepen- 
dent  nous  trouverions  qui  feist  meilleure  condition  au  Roy  que  luy. 
Depuis,  est  venu  la  responce  du  Roy,  qui  consent  et  commande  parti- 
culièrement ce  contract,  comme  il  vous  plaira  veoir  par  l'extraict 
que  je  vous  envoyé  de  ce  que  Sa  Mate  et  Monseigneur  le  Conestahle 
m'en  ont  escript,  dont  jay  envoyé  semblable  coppie  audit  gennéral, 
lequel  ne  trouvant,  comme  il  fault  croire,  personne  que  luy  en  pré- 
sentast  meilleur  condition,  aura  passé  devant  notere  les  obligations 
du  contract  déjà  accordé  audit  Venize.  Ledit  marchant  s'estoit  déjà 
asseuré  du  donatif  (l)  que  la  Seigneurie  baille  à  ceulx  qui  apportent 
bled  pour  dix-neuf  mille  cestiés  et  recepvant  ledit  donatif,  il  fault 
qu'il  se  soit  obligé  à  la  Seigneurie  de  le  eonduyre  dans  Venize  sur 
peyne  de  rendre  à  ladite  Seigneurie  deux  foys  aultant  que  monte 
ledit  donatif  et  aultres  peynes  (pie  je  ne  scay  pas  bien,  de  sorte  que 
si  l'on  luy  revocque  maintenant  son  contract.  on  luy  est  justement 
et  léalment  tenu  de  toute  ceste  perte,  qui  monteroit  plus  de  trois 
mille  escuz,  et  de  la  despence  que  ses  facteurs  auront  l'aide  aux 
voiaiges  de  Panne,  aux  charroi/,  et  aux  nollaiges  (2)  des  barques,  et 
encores  demandera-il  pour  ses  dommaiges  et  intérestz  lucrum  ces- 
sans,  dont  les  Vénitiens  mesmes  seront  juges,  et  je  vous  laysse 
penser  s'ilz  seront  favorables  en  cela  au  marchant  qui  travailloit 
pour  leur  commodité  et  s'ilz  donneront  adoz  (3)  à  qui  la  leur  em- 
peschera.  En  danger,  Monseigneur,  qu'il/,  veuillent  prendre  cela  pour 
ung  exploit  de  guerre  par  vous  commencée  contre  eulx,  retenant 
pour  vous  et  leur  empeschant  ce  qu'ilz  fout  venir  pour  la  nécessité 
de  leur  ville  non  de  vostre  estât,  mais  d'ung  aultre  où  vou>  n'avez 
intérestz  que  du  passaige  et  de  vozdace(4),etsi  y  a  bien  davantage. 
Monseigneur,  que  le  Roy  et  ses  ministres  principaulx  scavent  bien 
si  Sa  Ma,c  veull  1ère  passer  armée  ou  non,  et  si  ceste  munition  est 
nécessere  pour  ledit  passaige,  auquel  cas  il  ne  la  fauldroil  rendre 


vl)  Donalil'.  du  mot  latin  donativum:  gratification. 

■j  Nolis:  louage  d'un  navire. 

(3)  Donner  a  dos:  battre,  frapper. 

t'*)  Daccs,  de  1  italien  daxio-:  impôt,  péage. 


[novembre  1556]  Dominique  du  gabrE  199 

ne  à  vous.  Monseigneur,  ne  à  aultre,  mais  la  1ère  vendre  audit  pas- 
saige  par  les  ministres  du  Roy  et  prendre  pour  Sa  Ma,e  le  proffict 
que  les  achapteurs  y  veullent  1ère.  Parainsi.  si  vous  y  usez  de  réten- 
tion et  d'auctorité,  quelque  coleur  qu'on  y  scaiche  bailler,  il  y  a 
danger  que  cela  soit  interprété  que  vostre  premier  acte  de  service 
aye  esté  pour  vostre  commodité  el  proffict  parliculier  et  non  pour 
aultre  charité  :  de  sorte,  Monseigneur,  que  je  y  veoy  toutes  ces  dif- 
ficultéz  et  inconvéniens,  lesquelz  je  vous  veulx  bien  proposer  pour 
ma  descharge  envers  le  Roy  et  envers  vous,  etaprèz  vous  en  laysser 
ordonner  et  disposer  comme  il  vous  plaira,  car,  quant  à  moyje  n'i 
ay  aulcune  auctorité,  mais  ledit  gennéral  ne  fauldra  de  vous  bien 
obéyr  et  je  luy  escripray  toutjour  qu'il  le  face.  Pour  ceste  heure,  il 
vous  plaira  m'excuser  si  je  ne  luy  en  escriptz  poinct,  pour  n'estre 
moy  mesmes  cause  de  la  confusion  où  je  m'en  trouverois,  mais  je 
veoiz  cejourd'buy  à  Venize  et  parleray  très  voluntiers  au  marchant 
pour  veoir  si  Ton  le  pourra  persuader  en  une  façon  ou  aultre  de 
vous  céder  libérallement  le  marché,  en  tout  ou  en  partie,  et  en  luy 
refaisant  les  intérestz  et  pertes  raisonnables  ;  et  si  j'en  puis  tirer 
responce  qui  vous  puisse  satisfere,  je  la  vous  feray  entendre  et 
audit  gennéral,  mais  je  vous  suplye  très  humblement,  Monseigneur, 
pour  les  raisons  que  dessus  et  aultres  respeclz  fort  nécesseres, 
n'empescher  poinct  le  bled  qui  se  trouvera  chargé,  pour  éviter  la 
grand  querelle  qui  en  viendroit  à  Venize,  et  ne  nous  mettre  tous  en 
fâcherie,  car  il  fauldra  beaucoup  de  temps  avant  que  tout  soit  chargé, 
rt  cependant  on  verra  s'il  sera  possible,  du  consentement  du  mar- 
chant, vous  accommoder  d'une  partie  <b'  ce  qui  ne  sera  encores 
chargé. 

De  Chioggia,  ce  mardi  matin  xvne  de  novembre  1556. 

Arch.  de  Modène.  Axch.  de  la  famille  Fieschi;. 

GABRE    AU    ROI (1) 

154.  —   [  ],   21    novembre   1556. —  Sire,  il   n'est  point 

encore  icy  venu  aucun  ambassadeur  de  l'Empereur,  ne  du  Roy  Phi- 
lippes,  et  si  celui  qui  viendra  n'apporte  bonnes  patentes  de  l'Empe- 
reur et  non  dudit  Roy  Philippe,  je  le  garderay  bien  de  mettre  le 
pied  devant  moy,  puisque  Monseigneur  le  Connétable  me  mande  que 
ainsi  je  doibt  faire. 

(Bibl.  nat..  Fi\  20456,  fol.  189.  Extrait)  (copie). 

I  D'après  une  noir,  le  présent  extrait  ainsi  que  tous  1rs  fragments  de  la 
correspondance  de  du  Gabre  a  été  copié  par  Gaignières  sur  les  manuscrits  de 
M.  de  Lanioi^non.  La  bibliothèque  de  Lamoignon  fui  vendue  en  Angleterre  ;  elle 
ne  formait  pas  moins  de  1550  volumes  manuscrits  et  800  cartons.  La  Bibliothèque 
nationale  ne  possède  que  la  série  des  registres  du  Parlement. 


200  NÉGOCIATIONS  DE  [NOVEMBRE  1556] 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

155.  —  [  Venise  .  22  novembre  1556.  —  Monseigneur,  J'ay  veu  ce 
qu'il  vous  a  pieu  m'escripre  par  le  Sr  Alexandre  Fiasco,  et  suis  fort 
marry  du  travail  que  vous  avez  de  cest  affere  de  don  Louys  (1),  que 
j'ay  trouvé  bien  estrange  et,  comme  vous  ditez,  Monseigneur,  il 
vous  fault  ung  peu  mieulx  prendre  garde  aux  insides  des  enemys  e1 
vous  déclairer  contre  eulx  comme  ilz  font  contre  vous.  Je  scay  bien 
que  si  vous  voulez  ce  que  vous  pouvez,  que  l'on  les  chastiera  bien. 
Par  adventure  que  Dieu  envoyé  ces  occasions  pour  leur  ruyne  et 
pour  vostre  grandeur.  J'ay  escript  à  la  court  les  propoz  que  nous 
eusmes  dernièrement  ensemble  et  les  solicite  vivement  de  provi- 
sion de  deniers  pour  vostre  despence,  car  nous  n'avons  icy  rien  que 
quelque  petite  reste  des  trois  cens  mil  escuz  du  deppoz,  qui  sont 
obligez  à  la  protection  du  Pape  et  non  à  autres  usaiges.  mais  vous 
aurez  dans  le  xve  de  décembre  les  x\xiinM  escuz  d'Albizo  del  Bene. 
et  entre  cy  et  la  il  sera  venu  nouvelle  provision  d'argent  pour  la 
despence  de  vostre  protection.  Quant  au  froment  de  Parme,  j'ay 
monstre,  Monseigneur,  audit  Sr  Alexandre  l'accord  qui  en  fut  faicl 
icydèz  le  lie  de  novembre,  par  lequel  le  marchant,  dès  lors,  s'obligea 
et  me  feist  aussi  obliger,  réservant  seullement  de  son  cousté  à  veoir 
la  qualité  des  froment/,  et  à  passer  l'obligé  en  meilleur  forme  à 
Parme,  et  nous  estoit  aussi  cependant  permis  de  le  bailler  à  autre, 
si  nous  trouvions  meilleur  condition  pour  le  Roy.  et  si  le  marebant 
a  trouvé  les  bledz  à  son  gré  h  que  le  général  Coiffier  luy  en  aye 
passé  nouvelle  obligation,  il  est  impossible  de  révoquer  cela,  qu'il 
ne  couste  dix  mil  escuz  de  perte  au  Roy.  J'en  ay  parlé  audit  mar- 
ebant, mais  il  m'a  respondu  d'une  belle  protestation,  el  >i  voua  y 
touebez  d'auctorité,  je  scay  bien  que  vous  en  acquerrez  l'inimytié 
de  ces  Seigneurs  el  pour  le  Roy  el  pour  vous,  el  pour  ma  descharge 
j'envoyeray  à  Sa  Maté  la  copie  des  promesses  qui  en  furent  faictes 
icy,  de  ce  que  vous  m'en  avez  escript  et  de  ce  que  je  vous  y  a\  res- 
pondu, et  croy  bien  que  Sa  Mate  ne  vouldra  prfs  porter  ceste  perte. 
J'en  ay  parlé  encores  plus  amplement  audit  S*  Fiasco,  sur  lequel  je 
m'en  remestray  et  des  autres  nouvelles  de  deçà. 

De  Venize,  ce  xxue  de  novembre  1556. 

(1)  Don  Louisd'Este,  deuxième  fils  d'Hercule,  travaillé  en  sous  main  par  l'am- 
bassadeur ilu  duc  de  Florence,  avait  accepté  de  se  mettre  au  service  de  Philippe  II. 
L'intrigue  l'ut  par  hasard  découverte  à  temps,  ri  Hercule  en  témoigna  vivement 
son  déplaisir  au  duc  de  Florence.  Don  Louis  lit  alors  comme  son  frère  Alphonse, 
il  quitta  furtivement  Ken-are,  et  se  dirigea  sur  Paria  ou  il  obtint  son  enrôlement 
dans  l'armée  française.  Les  deux  frères  ne  rentrèrent  a  Ferrare  qu'à  l'automne 
1557.  (Voir  Rodocanachi,  Renée  'le  France,  p.  214  sq.). 


[DÉCEMBRE    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  201 

Monseigneur,  Depuis  ceste  lettre  escripte  est  arrivé  icy  l'homme 
du  marchant  qui  a  faict  le  marché  du  bled,  lequel  j'ay  monstre  au 
Sr  Alexandre  en  propre  original,  où  il  n'y  a  aucune  réservation  de 
ma  volunté,  mais,  au  contraire,  une  pure  obligation  que  je  le  doihve 
trouver  hon  et  le  ratiflier,  et  si  y  a  davantaige  obligation  de  les 
fere  passer  franez  de  tous  daces  par  vostre  estât  et  par  celluy  de 
Mantoua.  de  sorte  que  s'il  ne  vous  plaist  user  du  vostre  de  la  cour- 
toisie, que  les  princes  usent  les  ungs  envers  les  autres,  et  nous  favo- 
riser envers  le  Cardinal  ou  Duc  de  Mantoua,  il  sera  force  que  je  vous 
face  payer  des  deniers  du  Roy,  ce  qui  vous  appert ient  pour  lesdits 
daces.  Vous  en  userez  comme  il  vous  plaira,  et  je  ne  fauldray  de 
fere  entendre  à  Sa  Maté  le  traictement  hon  ou  maulvaiz  ou  tel 
qu'il  vous  plaira  le  fere,  dont  j'ay  plus  amplement  devisé  avec  ledit 
Sr  Alexandre,  luy  ayant  baillé  une  coppie  du  marché  faict  à  Parme 
et  des  premières  promesses  qui  en  furent  faictes  icy. 

(Arcli.  de  Modène.  Arcli.  de  la  famille  Fieschi). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

156. —  [Venise],  2  décembre  1556.  —  Monseigneur,  Le  seigneur 
Alexandre  vous  dira  ce  qu'il  a  negotié  icy  en  voz  afferes  et  mesmes 
sur  le  faict  de  ces  fromens,  lesquelz  je  crains  fort  que  le  Roy.  ne 
vous,  ne  les  marchans  naurez  jamais,  car  ceste  longueur  et  empes- 
chement  donne  loisir  aux  Imperiaulx  qui  les  ont  encores  en  leurs 
mains  de  les  retenir  pour  eulx.  Et  quant  il  vous  eust  pieu  vous  dé- 
sister de  cest  empeschement  que  vous  y  voulez  mettre,  il  seroit 
plus  utile  pour  le  Roy,  plus  juste  et  honeste  pour  vous,  que  de 
forcer  ung  marchant  a  vous  vendre  sa  marchandise  a  votre  mot  et  a 
sa  grand  perte.  Toutesfoiz  vous  en  userez  comme  il  vous  plaira.  Je  y 
ay  faict  ce  qui  mestoit  commandé  et  remetz  le  reste  a  heneffice  de 
nature,  sçaichant  bien,  quant  a  moy,  que  j'en  auray  ma  conscience 
et  mon  honneur  deschargez  envers  Dieu  et  le  monde  et  envers  le 
Roy.  Le  surplus  de  noz  nouvelles,  je  les  remettray  au  dit  seigneur 
Alexandre. 

De  Venize  ce  n'  de  décembre  1556. 

(Arcli.  de  Modène.  Arcli.  de  la  famille  Fieschi). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

157,  —  [Venise],  16  décembre  1556.  —  Monseigneur,  A  mon 
arrivée  icy,  je  Irouvay  une  dépesche  du  Roy  et  de  Monseigneur  de 
Guyse,   apportée  par  corrier  expiez,  par  laquelle  le  Roy  me  mande 

17 


202  NÉGOCIATIONS   DE  [DÉCEMBRE    1556] 

de  vous  aller  trouver.  A  quoy  je  n'eusse  failly,  si  vous  ne  m'eussiez 
déjà  faict  expérimenter  combien  il  faict  maulvais  aller  par  le  monde 
avec  ce  rude  temps,  soit  par  terre  ou  par  eaue  ;  mais  il  vous  plaira 
pour  ce  coup  m'en  excuser,  et  vous  contenter  que  je  y  envoyé  mon 
secrétaire  en  mon  lieu,  lequel  vous  monstrera  la  lettre  que  le  Roy 
m'escript  et  une  patente  qu'il  me  mande  vous  consigner  en  retirant 
de  vous  une  autre  de  réciproque  obligation,  de  laquelle  j'ay  dressé 
une  mynute  que  ledit  secrétaire  vous  monstrera,  et  il  vous  plaira  la 
1ère  dépescber  en  parchemin,   la  signer  et  fere  sceller  ,  et  quant  à 
ce   qui  touche  le  remborsement  de   voz  despences  faictes  pour  la 
souspeçon   où   vous   estiez   depuis   la  cappitulalion,  il  vous  plaira. 
Monseigneur,  suyvant  ce  que  vous  m'en  distes  à  Copare,  m'envoyer 
une  liste  signée  de  vostre  main  desdites  despences,  et  je  l'envoyeray 
au   Roy.   comme   il  me  mande,  pour  en  ordonner  vostre  remborse- 
ment.  Quant  au  faict   des   bléez   de   Parme,    Monsr  de  Serres  en 
admeyne  ung  homme   du  marchant,  avec  lequel  vous  en  pourrez, 
Monseigneur,   parler,  et  aille  la  chose  au  piz  ou  au  mieulx  qu'elle 
pourra,  je  n'y  trouveray  rien  de  maulvais,  mais  que  le  Roy  n'y  face 
la  perte  si  grande  comme  je  la  préveoy,  voulant   user  de  sa  justice 
accoustumée  envers  le  marchant.    Vous  aurez  aussy,  Monseigneur, 
avec  ceste  présente  ung   pàquel  de   Monseigeur  de  Guyse,   lequel, 
comme  je  croy,  vous  fera  entendre  ce  qu'il  a  délibéré  de  fere.  Mais 
par  ce  qu'il  m'escript,  il   semble  qu'il  <•>!  résoleu  de  fere  toute  dili- 
gence   de    marcher,  nonobstant   toutes   les  souspeçons  qu'on  peult 
mettre  en  avant  que  le  Pape  vueille  la  paix,  «'t  les  Suysses  peuvent 
de  ceste  heure  eslre  en  Piedmont.  Ces  Seigneurs  me   demandèrent 
hier  en  Colliége    qu'est  ce  qu'on    t'aisoit  à  Penare  ;   je   leur  diz  que 
vous  aviez  déjà   en  eslre  les  hommes   d'armes   ri   chevaulx  légers 
qui  debvoienl  estre  employez  a  la  conservation  de  vostre  estai,  et 
leur  diz  les  nouvelles  que  j'avois  de  Monseigneur  de  Guyse,  mais  Hz 
ne  me  dirent  pas  que  le  Roy  d'Espaigne  les  eus!  faisl  juger  du  dif- 
férent qu'il  a  avec  le  Pape,  comme  l'on  m'escript  de  Rome  que  leur 
Ambassadeur  l'a  dit  a  Sa  Ste,  laquelle  ne  laillisl  pas  d'y  taire  bonne 
et  saige  responce.   Je   crois  que  vous  en  pourrez  avoir  eu  mesme 
advis,  parquoj  je  m'   vous   en   feray,    Monseigneur,  plus   longue 
lettre,  que  de  présenter   mes   lies   humble-   recommandations  à  la 
bonne  grâce  de  Vostre  Excellence. 
De  Venize,  ce  xW  de  décembre  1556. 

(Arch.  de  Modène.  Cancellerià  Ducale,  etc.  . 


[DÉCEMBRE    1556]  DOMINIQUE   DU    GABRE  203 


GABRE  AU    CONNETABLE 

158.  —  [Venise],  19  décembre  1556.  —  Monseigneur,  Il  vous 
plaira  venir  ce  que  j'escriptz  au  Roy  de  la  veneue  de  M.  1p  Cardinal 
Carraffa  en  ceste  ville,  de  laquelle  je  présuppose  que  vous  estez 
bien  adverty  de  Rome  ;  je  mettray  peine  d'entendre  ses  intentions 
et  sa  négociation  et  ne  fauldray  de  vous  en  donner  bon  adviz.  Je  ne 
scay  si  Monsieur  de  Montmorency  (l)  viendra  avec  luy,  lequel,  en 
ce  cas,  j'espère  avoir  pour  hoste  et  m'essaieray  de  luy  l'aire  tout  le 
service  qui  me  sera  possible,  puisques  c'est  vostre  imaige  et  un  au- 
tre vous  mesmes.  Hier,  ces  seigneurs  feirent  une  despecbe  en  Le- 
vant et  je  ne  faillys  escripre  a  Monsieur  de  Codignac  l'arryvée  de 
Monsieur  de  Guyse  en  Piedmont  et  de  l'armée  quil  mène,  luy  asseu- 
rant  la  guerre  et  luy  oustant  toute  espérance  de  paix,  si  Dieu  n'y 
mect  la  main,  scaicbant  bien  que  c'est  chose  bien  agréable  au  Grand 
Seigneur  et  que  bientost  vous  debviez  depescher  quelqu'un  pour 
aller  demander  l'armée.  Ces  seigneurs  ne  mont  encores  faict  res- 
ponse  du  prisonnier  de  Monsieur  de  Cambray,  s'ilz  veullent  accepter 
le  jugement  ou  non,  ayant  volleu  prendre  temps  et  loysir  pour  en 
parler  entre  eulx,  mais  je  ne  croy  pas  qu'ilz  y  touchent,  car  ilz  ne 
veulent  pas  desplaire  a  Monsieur  de  Codignac  qui  le  leur  pourroit 
par  aventure  bien  rendre  par  delà  et  davantaige.  Quelqu'un  m'a  dict 
que  le  prisonnier  descharge  maintenant  ledit  Sr  de  Codignac  et  dit 
avoir  eu  la  commission  de  ce  bel  exploict  de  Rostan  Bassa,  et  je 
vous  laysse  penser  si  ces  Seigneurs  vouldroient  mettre  la  main  la, 
il  a  eu  assez  de  bon  loysir,  depuis  qu'il  est  prisonnier,  de  penser  a 
ce  quil  a  dire  et  les  autre  a  les  luy  apprendre.  Si  je  n'estois  per- 
sonne ecclésiastique  qui  empesche  que  j>'  ne  puys  me  mesler  des 
choses  criminelles,  ces  Seigneurs  eussent  mieulx  ayme,  a  mon 
adviz,  que  j'eusse  fait  son  procès  juge  et  exécute,  et  s'ilz  ne  s'en 
veullent  point  mesler,  vous  ad  viserez.  Monseigneur,  si  vous  trouve- 
rez bon  que  je  luy  face  son  procez,  pour  aprez  le  faire  juger  par 
l'Ambassadeur  de  Ferrare,  qui  est  docteur  en  loix,  avec  deux  ou 
trois  autres  gens  de  loix,  pour  sourtir  de  ce  meschant  négoce  dont 
il  ne  sourtira  jamais  preuve,  ne  veriffication,  qui  vaille  et  en  cest 
endroict. 

De  Venize  ce  xixe  de  Décembre  1556. 

Binl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  191)  (originale). 

(1)  Il  s'agit  ici  de  même  qu'à  la  page  195  de  la  présente  correspondance)  de 
François  de  Montmorency,  iils  du  connétable,  capitaine  décent  lances  en  1551, 
qui  prit  part  aux  guerres  d'Italie,  et  épousa  en  1557  la  duchesse  de  Castro,  veuve 
d'Horace  Farnèse.  François  de  Montmorency  devint  pair  de  France,  maréchal  et 
grand  maître,  chevalier  de  l'ordre  de  Saint-Michel,  gouverneur  de  Paris;  il  mourut 
le  6  mai  1579. 


-04  NÉGOCIATIONS    DE  [DÉCEMBRE    1556] 


GABRE    AU    ROI 

159.  —  [Venise],  23  décembre  1556.  —  Sire,  je  vous  escripvis,  n'y 
a  que  trois  jours,  de  la  veneue  icy  de  Monseigneur  le  Cardinal  Car- 
rafFa,  de  Rome,  et  pour  ce  que  je  veoy  qu'il  est  pour  y  passer  les 
testes  de  Noël,  avant  que  avoir  résolucion  de  ces  seigneurs  et  que, 
par  aventure,  Vostre  Majesté  trouveroil  estrange  désire  si  longuement 
sans  nouvelles  de  sa  négociation,  je  vous  ay  voleu.  Sire,  faire  ceste 
despeche,  par  les  postes  ordinaires,  pour  vous  dire  que  ledit  Car- 
dinal arriva  lundi  xxie  de  ce  mois  (lj  el  fusl  reçeu  honorablement 
de  ces  seigneurs;  avec  le  Bucentore  et  autres  leurs  cerimonyes  ac- 
coustumées;  j'accompagnay  la  Seigneurie  a  l'aller  recevoir  et  aprez 
avoir  salue  le  Duze  (3),  il  ne  faillit  pas  de  me  faire  caresses  et  em- 
brassemens,  qui  tesmoignoient  a  toute  l'assistence  la  grande  dévo- 
tion et  affection  qu'il  porte  a  tout  ce  qui  est  advoué  de  Vostre  Ma- 
jesté. Arrivez  que  nous  fusmes  au  logiz,  et  le  Duze  et  la  Seigneurie 
retirez,  il  laissa  tout  ce  monde  pour  deviser  avec  moy,  et  fust  ce 
premier  dialogue  de  belles  paroles,  mais  non  tanl  generalles  quil 
ne  voleust  bien  imprimer  en  mon  esprit  que  Vostre  Majesté  n'a,  nv 
n'aura  jamais  en  ce  monde  un  plus  seur  et  plus  vray  amy  que  le 
Pape,  ne  ung  plus  lidel  et  affectionné  serviteur  que  ledit  Cardinal, 
vous  priant  de  ne  vouloir  estre  en  son  endrois  umbrageux  et  ne 
souspeconner  mal  de  ses  allions  comme  d'autres  avoient  volleu 
faire,  me  disant  que  si  le  Pape  lui  avoil  commande  de  vous  estre 
autre  que  serviteur  el  homme  de  bien  en  vostre  service,  il  abandon- 
nerait sa  Sainteté  pour  s'aller  retirer  à  Cuminge  •'!  .  el  plustosl  souf- 
friroit  la  mort  que  de  se  laisser  reprocher  infidélité  envers  vous, 
Sire,  de  qui  il  avoit  esté  affectionné  serviteur  avant  que  vous  avoir 
veu,  et  que  après,  vostre  bonté,  les  biens,  les  caresses  et  l'honneur 
quil  avoil  receu  de  Vostre  Majesté,  l'avoil  tellement  obligé  quil  se 
reputeroit  ingrat  et  indigne  de  vivre  s'il  ne  vous  etoit  tel  qu'il 
disoit;  de  sorte  que,  s'il  faull  croire  aux  parolles  d'un  gentilhomme 
Cardinal  qui  faict  profession  de  cavalerie  el  d'honneur,  le  Pape  el 
luy  ne  sont  pour  jamais  vous  faire  faulx  bon  et,  pour  ce  soir  la, 
n'entra  point  en  autres  particularitez  des  causes  de  sa  veneue.  mais. 
me  pria  que  je  l'eusse  le  lendemain  malin  avec  luy  pour  me  dire, 
avant  qu'il  allas!  prendre  l'audience  de  ces  seigneurs,  la  cause  pour- 
quoi il  venoit  icy  pour  en  avoir   mon  advis  el   proposer  sa  charge 

(i)  Il  fut  logé  dans  un  palais  aux  frais  de  la  République,  et  la  Seigneurie  l'admit 
le  lendemain  au  Conseil.    Voir  c.  Duruy,  Le  cardinal  Carafa,  p.  -»|S  • 

(2)  Lire  «  le  Doge  ». 

(3)  Cumiano,  village  aux  environs  de  Turin. 


[DÉCEMBRE    1556]  DOMINIQUE    DU    CABRE  205 

communément  ou  séparément,  comme  nous  adviserions  ensemble. 
Le  lendemain  malin,  je  l'allay  trouver,  nous  l'usines  seuls  bien  prestz 
de  quatre  heures  pour  ce  qu'il  entra  a  me  faire  un  long  discours  de 
toutte  sa  vie,  depuis  qu'il  commença  a  vous  servir  de  soldat,  les 
commencemens  des  traitiez  de  vostre  ligue  avec  Pape  ;  que  je  savois 
comme  luy  son  allée  en  France,  les  dillicultez  et  les  disputes  et, 
enfin,  la  despeche  quil  y  eust,  la  guerre  qu'il  trouva  a  son  retour 
commencée  a  Rome,  les  progrez  d'icelle,  les  occasions  et  moyens 
de  son  aboqquement  avec  le  Duc  d'Alva  et  les  tresves  depuis  succé- 
dées, les  mêmes  propoz  et  argumens  que  ledit  Duc  d'Alva  et  luy,  eu- 
rent ensemble,  et,  entin,  l'occasion  de  sa  venue  qui  etoit  seullement 
pour  employer  le  temps  desdites  tresves  a  benetice  commung  de 
Sa  Sainteté  et  de  Vostre  Majesté,  et  essayer  de  faire  déclarer  ces 
Seigneurs  et  de  les  rendre  ennemys  du  Roy  d'Espaigne,  m'asseurant 
que  le  Pape  est  tellement  irrité  et  resoleu,  que  si  on  luy  donnoit 
librement  le  Royaulme  de  Naples  pour  sa  postérité  el  sa  maison, 
il  ne  seroit  possible  de  l'appaiser  ni  l'induire  a  la  paix,  et  pour  cette 
cause  il  avoit  commandement  de  Sa  Sainteté  de  remonstrer  a  ces 
Seigneurs  la  justification  de  toutes  ses  actions;  les  remercier  des 
offices  qu'ilz  ont  faitz  pour  l'accord  en  leur  remonstrant  les  injures, 
indignitez  et  dommages  qu'il  a  souffertz  de  cette  guerre,  injustement 
commencée  contre  luy,  les  prier  de  luy  voulloir  ayder  et  en  avoir 
la  réparation  quil  convient,  et  de  vouloir  unir  leurs  forces  avec  les 
vostres  et  les  siennes  pour  chasser  d'Italie  ces  tirantz  et  la  remettre 
en  liberté,  et  que,  pour  leur  en  donner  meilleure  occasion,  il  leur 
voulloit  offrir  leur  bonne  part  au  gâteau  et  pour  la  première  offre 
qui  leur  offriroit  tant  de  décimes  qu'ils  vouldront  sur  leur  clergé 
pour  satisfaire  a  la  despence  de  cette  guerre  silz  y  vouloient  entrer, 
leur  offrira  telle  part  qu'ilz  vouldront  dans  la  conqueste  qui  se  fera, 
et  promettra  faire  en  sorte  que  Vostre  Majesté  l'aura  agréable,  que 
s'il  ne  tient  qu'a  leur  bailler  en  engagement  cependant  quelque  ville 
de  Testât  de  l'Eglise,  que  par  aventure  il  se  leurra  aller  jusques  la  et, 
en  effet,  qu'il  esperoit  ne  partyr  point  d'icy  qu'il  ne  feist  quelque 
chose  de  bon  et  ma  dict  que  le  s1'  Julio  Ursin  vous  aura  donne  advis 
de  toutes  ces  choses  et  que  le  Fantuccio  qui  est  aile  vers  le  Roy 
d'Espagne  n'a  aucune  charge  que  escouter  pour  référer  sans  rien 
proposer  de  sa  part,  et  que  nous  luy  ferions  grand  tort  de  doubter 
de  chose  du  monde  pour  ceste  allée  la,  qui  est  faite  a  bonne  fin,  et 
que  aussitost  que  Monseigneur  de  Guise  seroit  un  peu  avant  en 
campaigne,  il  se  feroit  a  Rome  trois  choses  qui  sont  différées  pour 
bon  respect,  c'est  :  privations,   promotions  de   Cardinaulx  (1)  et  la 

(1)  Cette  promotion  de  cardinaux  n'eut  lieu  que  le  15  mars  1557. 


206  NÉGOCIATIONS    DE  [DÉCEMBRE   1556] 

réception  de  l'ordre  de  S'  Michel  (1)  au  Duc  de  Paliano.  Je  ne  failliz 
pas,  Sire,  de  luy  louer  tout  son  discours  et  les  intentions  du  Pape 
et  les  siènes  et  surtout  sa  fermeté  et  fidélité  en  vostre  service  dont 
je  ne  scaurois  doubler,  pourveu  qu'il  usoit  tousjours  de  son  bon  juge- 
ment, car  toutesfoiz  et  quantes  quil  penseroil  a  l'honneur,  au  profit 
et  a  la  grandeur  sienne  et  de  sa  maison,  il  ne  trouveroit  jamais 
raison  qui  luy  deust  faire  abandonner  vostre  faveur  et  protection, 
et  que,  a  la  vérité,  vous,  Sire,  mettrez  vostre  Royaulme  et  voz  afferes 
en  grand  labérinthe  par  ceste  guerre  en  laquelle,  comme  luy  même 
avoit  peu  cognoistre.  vous  entriez  fort  mal  volontiers  et  ne  se  pou- 
voit  dire  que  vostre  Majesté  y  entrast  pour  aucun  sien  dessein- 
particulier,  mais  seullement  pour  la  deffense  du  Pape  et  protec- 
tion de  ceste  maison  Caraffa.  Parquoy,  d'aultant  plus  estoil  grande 
l'obligation  qu'il  vous  en  debvoit  et  le  confortay  a  persévérer  et  se 
obstiner  en  ceste  sienne  bonne  volunté  et  a  proposera  ces  seigneurs 
le  langaige  dont  il  m'avoit  parlé,  et  que  j'en  esperois  tout  bien  qu'il 
regardast  a  quoy  je  y  serois  bon,  et  je  ne  fauldrois  de  le  seconder 
et  y  ayder  en  tout  ce  que  je  pourrois,  luy  ayant  dit  franchemenl 
mon  ad  vis  et  les  raisons  pourquoy  cela  est  oit  mieulx  proposé  de  la 
part  du  Pape  que  de  la  vostre  qui  seroient  longues  a  escripre.  Ce 
matin,  il  a  eu  sa  première  audience,  ou  il  n'aura  pas  enfoncé  les 
matières  fort  avant:  demain  sera  la  veille  de  Nouel  ;  le  jour  de  la 
feste  »'l  le  lendemain  seront  consumez  en  dévotion  el  en  un  banquel 
que  fait  la  Seigneurie,  tellement  que  je  ne  veoy  qu'il  puisse  avoir  la 
seconde  audience  plustosl  que  dimanche  xxvii"  du  mois,  et  pourra, 
a  mon  advis,  estre  icy  tout  ce  mois  pour,  après,  comme  il  ma  dict, 
sen  aller  a  Ferrare  et  a  Boloigne  -1  .  El  s'il  entend  la  que  le  duc 
(lAlvc  soit  en  ordre  pour  se  remettre  en  campagne  après  les  quarente 
jours  de  la  tresve,  il  s'en  ira  droict  a  Home  pour  luy  résister  et  faire 
a  la  deffence  le  mieulx  qu'il  pourra,  sinon  il  attendra  nouvelles  de 
mondit  Sieur  de  Guyse  pom-  essayer,  s'il  estoil  possible,  de  s'ab- 
bouquer  emsemble  el  résoudre  du  chemin  de  vostre  armée  el  des 
entreprinses.  Il  ne  sera  jour,  Sire,  que  je  ne  le  veoy  pendant  qu'il 
sera  icy  et  le  festieray  chez  moy  el  vous  donnera  y  advis  a  la  journée 
de  tout  ce  que  je  pourray  entendre  de  luy. 

Sire,  le  sieur  de  la  Vigne  arriva  icy    le  xixe  et  n'est  jamais  sourty 
de  mon  logeiz  pour  tenir  son  partement  plus  secret,  .le   demanday 
a  ces  Seigneurs,  en  audience  secrète,  quelque  vaisseau  pour  le  eu 
duire   sûrement  jusqu'à   Etaguze.    Hz  ont  offert   inconlinenl  et  tort 

il)  L'ordre  royal  île  Saint-Michel,  institué  par  Louis  \l  en  i  ;: 59,  comprenait  à 
l'origine,  36  chevaliers.  Plus  tard,  l'ordre  tomba  en  décadence  el  le  nombre  dea 
chevaliers  s'accrul  considérablement;  il  continua  d'exister  jusqu'à  la  Révolution 

de  1830. 
(2)  Bologne. 


[DÉCEMBRE    1556]  DOMINIQUE    DU    GABRE  20? 

courtoisement  une  galère  ou  une  barque  armée  comme  nous  vou- 
drions, et  ce  soir  sans  nulle  faute  il  partira;  et  i'ust  party  des  hier 
n'eust  esté  que  la  veneue  de  ce  Cardinal  a  teneu  ces  seigneurs  un 
peu  empèseriez.  J'espère,  Sire,  qu'il  ira  seurementetque  vostre  Ma- 
jesté sera  servye  de  luy  bien  et  fidellement,  car  il  a  bon  entendement 
et  quelque  expérience  de  ce  pays  la  et  1res  bonne  volunté  ;  il  m'a 
communiqué  de  ses  commissions  et  je  luy  ay  dict  ung  peu  mon 
advis;  il  a  faict  assez  bonne  dilligence  devenir  de  Lyon  icy  et  seroit 
très  nécessaire  qu'il  la  peust  encores  faire  meilleure  au  reste  de  son 
voyaige,  mais  je  vous  asseure,  Sire,  qu'il  ne  fut  veu  jamais  ung  si 
rude  yver  d'extrêmes  froietz  et  neiges,  qu'il  y  a  pardeça  depuis  ung 
mois,  et  fault  avoir  compassion  de  toutes  gens  qui  sont  en  voyaige. 
De  Venize  ce  xxme  de  Décembre  1556. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  3117,  foi.  78)  (originale). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

460.  —  [Venise],  26  décembre  1556. —  ...le  marchand.  Vous  aures 
aussy,  Monseigneur,  avec  ceste  présente,  ung  pacquet  de  Monsei- 
gneur de  Guize,  lequel,  comme  je  croy,  vous  fera  entendre  ce  quil 
a  délibère  de  faire,  mais  parce  qu'il  m'escript  il  semble  quil  est 
résolu  de  faire  diligence  de  marcher  nonostant  toutes  les  suspecions 
quon  peult  mettre  en  avant  que  le  Pape  vueille  la  paix.  Les  Suisses 
peuvent  eslre  des  cest  heure  en  Piedmont.  Ces  seigneurs  me 
demandèrent  hier  en  colliege  que  c'est  quon  faisoit  a  Ferrare.  Je 
leur  diz  que  vous  avies  desja  les  hommes  darmes  et  chevaux  legiers 
qui  dehvoient  estre  employez  a  la  conservation  de  vostre  estât  e} 
leur  dix  les  nouvelles  que  j'avoys  de  Monseigneur  de  Guize;  mais 
ilz  ne  me  dirent  pas  que  le  Roy  dEspaigne  les  eust  faict  juges  du 
différent  quil  a  avecques  le  Pape  (1),  corne  Ion  mescript  de  Romme 
que  l'ambassadeur  la  dict  a  sa  Sainteté,  laquelle  ne  faillist  pas  dy 
1ère  fort  bonne  et  saige  responce  ;  je  croy  que  vous  en  poures  avoir 
eu  mesmes  advis,  parquoy  je  ne  vous  en  feray,  Monseigneur,  plus 
longue  lettre  que  de  présenter  mes  très  humbles  recommandations 
a  Vostre  Excellance. 

De  Venize  ce  xvie  de  décembre  1556. 

(Arch.  de  Modène.  Arch.  de  la  famille  Fieschi)  (fragment). 

(1)  Cela  n'est  pas  scrupuleusement  exact;  ce  qui  est  plus  réel,  c'est  que,  tandis 
que  Carafa  et  M.  de  Lodève  négociaient  avec  la  Seigneurie  pour  faire  entrer  la 
République  dans  la  ligue,  Philippe  II  faisait  secrètement  agir  son  ambassadeur 
à  Venise  et  opposait  aux  offres  de  la  France  et  du  Saint-Siège  des  propositions 
de  nature  à  séduire  aussi  la  République,  afin  de  la  soustraire  à  toute  velléité 
d'alliance   (Voir  Duruy,  Carlo  Carafa,  p.  211). 


208  NÉGOCIATIONS    DE  DÉCEMBRE    1556] 


GABHE    AL    CONNETABLE 

161.  —  [Venise],  29  décembre  1556.  —  Mons  .  il  fault  que  je 

vous  dye  que  je  suis  bien  fort  fasché  d'ung  inconvénient  qui  est 
souvent  advenu  a  d'autres  et  a  Papes  et  a  Roys  et  Empereurs,  mais 
jamaiz  a  moy,  que  ceste  foiz,  et  ne  scay  en  quoy  me  consoler,  sinon 
en  mon  innocence,  scaicbant  n'avoir  failly  en  façon  du  monde, 
sinon  d'avoir  esté  trop  diligent  a  faire  mon  debvoir:  c'est  la  perte 
d'ung  paquet  adressant  au  Roy  que  je  despechay  soubdainque  mon- 
dit  sieur  le  Cardinal  Caraffa  fut  icy  arrivé,  par  lequel  je  rendois 
compte  a  sa  Majesté,  et  a  vous,  de  toute  l'occasion  et  veneue  dudit 
Sieur  Cardinal  et  de  son  intention.  Monsieur  de  Beauregard  sait  que 
ny  vous  ny  nous,  deçà,  navons  point  encore  commencé  a  cbiffrer, 
tenant  ce  cbémin  des  Vénitiens  Grisons,  et  Suysses  seur  comme  il 
a  este  toujours  durant  ces  guerres  passées,  et  pour  ceste  cause  que 
je  vous  disois  librement  et  sans  cbiffre  tout  ce  (pie  je  savois  et  pen- 
sois  comme  j'ay  faict  par  le  passé;  et  ainsi  que  ledict  sieur  Cardinal 
venoit  disner  cbez  moy  avec  toutte  sa  trouppe  en  lieu  de  luy  faire 
bonne  et  joyeuse  chère  (4  .  j'ay  receu  une  lettre  de  Tassin  conte- 
nant le  destrossement  de  mon  paquet  ez  mains  d'ung  sien  serviteur 
qui  le  portoil  de  Lima  (2  a  Bresse,  comme  l'on  faict  de  poste  en 
poste.  J'ay  été  bien  travaillé  do  ceste  nouvelle  en  mon  esprit  et  si 
n'ozois  dire  mon  mal  a  personne  et  moins  a  Monseigneur  le  Cardi- 
nal Caraffa,  qui  en  pourroil  estre  marry  plus  que  personne,  pour 
avoir  descouverl  par  la  sa  négociation  et  ses  secrètes  intentions, 
mais,  toutesfoiz,  je  ne  dois  être  reprins  de  cria,  car  je  rendois 
compte  a  mon  maistre  de  ce  que  je  debvois,  ci  cela  mesmes  etoit 
au  beneffice  commung  du  Pape  et  du  Roy  ;  or,  Monseigneur,  je  ne 
scaurois  que  y  faire  que  prier  Dieu  que  .j'en  puisse  avoir  ung  jour 
ma  revenebe.  Quelquefois  il  advient  d'ung  mal  nu  grand  bien,  car, 
en  premier  lieu,  les  enemy-  n'auront  rien  veu  qui  leur  plaise  en 
ceste  despèche  et  ne  se  fieront  plus  en  chose  mie  le  Pape  n>  ce 
Cardinal  leur  scaiebent  dire.  Il  est  vray  qu'ilz  auront  descouverl  la 
pratique  de  ce  lieu  et  y  pourront  remédier,  mais  j'espère  bien  met- 
tre ces  Seigneurs  en  colère  contre  ceulx  qui  ont  viole  la  franchise 
et  la  seureté  de  leur  estât,  et  pour  ce,  Monseigneur,  que  je  crains  de 
faire  encore  plus  grande  faulte  de  celer  tel  inconvénient  an  Roy, 
je  vous  despeche  ce  corner  exprès  pour  vous  dire  ce  qui  est  advenu 
el  vous  prier   très  humblement   que  vous,  Monseigneur,   qui   avei 

il    Bon  accueil,  bonne  réception. 
-    Lonato,  place  forte  «le  Lombardie,  ;'i  29  Kil.  de  Brescia. 


[DÉCEMBRE:    I006J  DOMINIQUE    DU    GABRE  Ï20D 

veu  souvent  telles  choses  advenir,  me  commandiez  et  conseilliez  ce 
que  j'auray  a  y  faire.  Je  vous  envoyé  la  coppie  de  la  despeche  per- 
due avec  la  coppie  de  l'advis  que  Tassin  m'a  escript,  du  destrosse- 
ment  duquel  la  Seigneurie  a  eu  advis,  et  m'a  envoyé  ung  secrétaire 
m'advertir  et  je  les  ay  prié  de  le  tenir  secret  jusques  a  ce  que 
j'eusse  parle  a  eulx.  Je  n'en  voulois  rien  dire  au  Sr  Cardinal  jusques 
a  son  parlement  d'icy,  mais  craignant  qu'il  l'entende  d'ailleurs,  je 
me  resouldray  de  le  luy  dire  le  plus  dextrement  que  je  pourray, 
me  semblant  que  cela  ne  peut  riens  gaster,  mais  plustost  servir  a 
deux  considérations,  l'une  aflin  qu'il  voye  que  toutes  ses  intentions 
sont  découvertes,  et  qu'il  se  résolve  de  passer  la  carrière  tout  au 
long  et  que  Ton  n'adjouslera  plus  foy  du  couslé  du  Roy  d'Espaigne 
a  chose  qu'il  dye,  l'aullre  aflin  que  si  le  Cardinal  de  Trente  a  tenu 
main  a  cest  assassinemenl,  qu'il  le  face  citer  a  Rome  et  d'aultant 
qu'il  sert  actuellement  contre  le  Pape  (1),  qu'il  le  face  priver  de  son 
chapeau  ou  le  travailler  le  plus  qu'il  pourra.  Cependant,  je  mons- 
treray  n'en  estre  point  en  peyne,  et  seray  demain  avec  la  Seigneu- 
rye  bien  secrètement  pour  remédier  a  l'avenir,  et  leur  demander 
justice,  ou  qu'ilz  me  permettent  de  prendre  ma  revenche  dans  leur 
estât  comme  j'ay  bonne  espérance  de  le  faire,  soit  qu'ilz  le  trou- 
vent bon  ou  maulvais,  et  si  quelcun  se  vante  d'avoir  veu  ce  qui 
estoit  dans  ce  pacquet  la,  il  en  parlera  bien  finement  si  je  ne  des- 
couvre d'où  ce  destrossement  est  veneu.  Reste,  monseigneur,  que 
je  vous  supplye  de  m'excuser  envers  le  Roy,  et  doresnavant  j'es- 
cripray  en  chiffre  et  fauldra  que  messieurs  voz  secrétaires  facent 
le  semblable;  j'envoye  avec  ce  porteur  un  de  mes  gens  a  Lima  pour 
me  rapporter  ce  quil  pourra  entendre  de  ce  destrossement,  ayant 
mande  a  Tassin  que  s  il  ne  me  rend  bon  compte  de  ce  serviteur  que 
portoit  les  paquetz,  je  priveray  lui  et  tous  ses  frères  des  postes 
qu'ilz  tienent,  et  m'en  prendray  a  sa  personne,  et  a  sa  teste.  Yeez 
la,  Monseigneur,  l'occasion  de  la  despeche  de  ce  conier  exprez,  et 
pour  aussi  vous  dire  que  depuis  la  despeche  perdue,  et  hier  xxvne, 
Monseigneur  le  Cardinal Caraffa eu st  sa  seconde  audience  secrète  et, 
au  sortir  de  la,  nous  trouvans  adisner  emsemble,  il  m'en  feist  tout 
le  discours  qui  a  este  de  présenter  a  ces  Seigneurs  la  bulle  de  sa 
légation  et  ung  bref  a  part  contenant  toutes  les  facultez  qui  se  peu- 
vent penser,  avec  clause  expresse  de  faire  tous  traitez  de  paix  et 
entreprinses  de  guerre,  ligues,  aliénations  et  engagemens  du  patri- 
moine de  l'église,  et  lesquelz  pouvoirs  il  m'a  aussy  faict  veoir  et  prié 


(1)  Le  cardinal  de  Trente  était  depuis  longtemps  dévoué  à  la  cause  impérialiste; 
Philippe  II  l'avait  récemmenl  chargé  29  octobre  1556  de  la  cérémonie  de  la 
restiiulion  de  Plaisance  à  Octavio  Farnèse  qui  venait  de  passer  définitivemenl  à 
l'Espagne. 

18 


210  .NÉGOCIATIONS    DE  [DÉCEMBRE    1556] 

de  les  lire.  Aprez  cela,  il  leur  a  faicl  remonstrance  de  la  nécessité 
du  Pape,  de  la  tyrannie  et  sugetion  ou  toute  l'Italie  est  réduicte, 
les  maulvaiz  tours  que  ceste  seigneurie  a  receuz  de  l'Empereur,  le 
procédé  superbe  de  son  filz  en  ceste  guerre,  leur  interestz  a  la  con- 
servation de  leurs  voisins  et  de  Testât  de  l'Eglise,  la  religion  et 
bonne  volonté  du  Roy  pour  ayder  a  la  liberté  de  l'Italie  :  voz  forces 
prestes  et  promptes  a  exécuter,  et,  la  dessus,  les  a  vifvement  re- 
cherchez de  leurs  déclairation  et  de  mettre  la  main  aux  armes,  et 
beaucoup  dautres  langaiges  et  persuasions,  tendans  a  ceste  lin  la. 
leur  ayant  offert,  la  carte  blanche  en  matière  de  conquestes  a  taire, 
et,  s'ilz  ne  vouloient  estre  sur  l'incertain,  leur  a  touche  uni:  mot 
assez  exprez  de  Ravenne  et  de  certaines  autres  petites  commoditez, 
de  sorte  qu'ilz  ont  ung  peu  haulsse  la  teste  et  ont  commence  aujour- 
d'huy  a  tenir  leur  pregay  et  a  consulter  ce  quilz  ont  a  dire  et  a 
pondre.  Je  ne  croy  pas  quilz  soienl  pour  rien  faire  avec  le  Pape, 
ny  pour  cecy  ny  pour  cela.  si  le  Roy  ne  parle,  mais  quoi  quilz  facent 
pour  le  moins,  c'est  ung  os  a  ronger  en  leur  bouche  pour  les  amu- 
sez, s'ilz  ne  veulent  meilleure  proye  pour  se  paistre,  et  si  fauldroil 
qu'elle  fut  bien  friande  et  commode  avanl  qu'ilz  laiss  ssenl  ceste 
ev  qui  leur  peut  estre  présente  et  non  (Mi  espérance.  On  verra  ce 
qui  en  succédera  et  je  mettray  peine  d'entendre,  tant  de  luy  (pie 
d'autres,  comme  tout  passera  pour  en  donner  advis  au  Roy,  nayanl 
faicl  mectre  cette  lettre  en  chiffre  pour  m1  perdre  de  temps,  a  vous 
donner  advis  de  toutes  choses  et  l'envoyer  par  corrier exprez,  auquel 
je  l'ay  si  bien  cachée,  que  s'il  luy  advenoil  rencontre  en  chemin,  on 
ne  luy  ouste  a  que  d'aultres  lettres  de  peu  d'importance,  et,  dores- 
navant,  je  feray  escripre  en  chiffre.  Il  y  a  trois  jours  que  Monsieur 
de  la  Vigne  couche  en  la  galère  qui  le  doibl  conduire,  mais  le  vent 
est  contraire  et  n'y  a  remède  de  sortir  du  port,  dont  il  est  tant  tache 
qu'il  nest  possible  de  plus;  la  faillie  ne  vient  de  luy  ny  de  la  Sei- 
gneurie, mais  du  temps  auquel  on  ne  peult  commander. 

Monseigneur,  je  feuz  hier  avec  Monseigneur  le  Cardinal  sur  le  laid 
de  la  despence  de  home  et  de  la  contribution  que  vous  demandez 
pour  l'armée  que  Monsieur  le  Duc  de  Guyse  meyne;  quant  a  ladite 
contribution,  il  prétend  n'y  estre  tenu  par  le  texte  propre  de  la  ligue, 
jusques  a  ce  que  ladite  armée  soit  hors  de  Piedmont,  sur  quoj  il 
m'a  prie  «pie  nous  feussions  encore  demain  emsemble,  et  de  vray, 
je  croy  que  nous  \  perdrons  nostre  cause,  car.  si  l'armée  s'a  restoil 
en  Piedmont  pour  y  conquérir,  il  est  certain  qu'ilz  ne  doibvenl  neu 
contribuer,  sinon  aux  despences  qui  se  ton!  en  l'Italie  hors  le  Pied- 
mont. par  ainsi,  lorsque  ladite  armée  sera  en  l.oinbardye.  lors  il 
sera  temps  de  leur  demander  la  contribution  ordinaire  pareulx  pro- 
mise, et  il/,  ne  peuvent  la  refuzer,  et  leur  pourra  l'on  aussi  lors  de- 
mander la  despence  faicte  en  novembre  et  Décembre  pour  les  pic- 


[décembre;  1556  Dominique  du  gabre  211 

paratifz  de  ladite  armée,  et  si  bien  ilz  y  faisoienl  difficulté,  je  pense 
qu'ilz  y  pourroient  loyaulment  estre  tenuz,  puisque  l'intention  et  les 
effectz  se  rencontreront  de  l'avoir  dressée  pour  leur  secours.  Je 
verray  ses  argumens  a  ce  qu'il  vouldra  dire  la  dessus,  et  quant  a  la 
despence  de  Rome,  je  luy  ay  remonslréque  par  ung  estât  que  m'ont 
envoyé  Messieurs  de  Lanssac  et  Coitlier,  le  Roy  et  le  Pape  payent 
en  tout  Testât  de  l'esglise  vingt  mille  et  tant  d'hommes,  et  que  le 
Duc  d'Alva  n'en  a  pas  aujourd'huy  quatre  mile  ez  environs  dudit 
Rome,  et  avoit  renvoyé  ses  principales  forces  en  Lombardie  pour 
faire  teste  a  Monsieur  de  Guyse.  Qu'il  me  sembloit  bien  raisonnable 
de  casser  ceste  grande  despense  et  de  lever  les  garnisons  de  certains 
lieux  qui  sont  hors  de  tout  souspeçon.  11  m'a  dit  que  si  l'on  veult 
faire  la  guerre,  il  ne  fault  rien  casser,  maisdespendre  en  trois  mois 
ce  qu'on  vouloit  despendre  en  ung  an,  et  que  si  Monsieur  de  Guise 
peut  passer  en  Lombardie,  et  faire  la  quelque  chose  de  bon  et  y 
amuser  les  énemys,  il  seroit  d'oppinion  de  mettre  toutes  ces  garni- 
sons de  Rome  a  la  Campagne,  et  avec  une  bonne  bande  d'artillerie, 
qu'il  a  fort  bonne  commodité  de  mener,  il  vouldroit  entrer  dans  le 
Royaulme,  ou  il  a  des  pratiques  et  intelligences,  et  metlroit  l'enemy 
dans  une  grande  confusion;  mais  il  remet  toutes  telles  resolutions 
au  bon  jugement  de  mondil  Sr  de  Guyse,  devers  lequel  il  envoyé  le 
S'-  Adrian  Raillin,  affin  qu'on  se  puisse  bien  entendre  emsemble.  11 
ma  asseuré  avoir  laisse  a  Rome  ce  qu'il  fault  pour  le  mois  de  jan- 
vier a  la  part  du  Pape  (1  )  et  que,  par  tout  ledit  mois,  il  aura  encores 
deux  cens  mil  escuz  dans  le  Château  Saint  Ange  (2)  et  a  bonne  espé- 
rance que  luy  manquera  point,  mais  que  voz  forces,  Monseigneur, 
soient  ung  peu  en  avant  en  pays  ou  on  leur  pourra  parler  ung  peu 
plus  a  cheval  en  matière  de  contribution  et  de  ce  qu'ilz  doibvent 
faire. 

De  Yenize,  ce  xxixe  de  Décembre  1556. 

Monseigneur,  j'ay,  depuis  ceste  lettre  escripte,  este  en  Seigneurie 
et  faict  mes  plainctes  et  mes  protestes  de  bonne  sorte  sur  la  perte 
de  ce  pacquet,  n'ayant  point  eu  sur  cela,  faulte  d'argument  pour  les 
prescher,  persuader  et  tenter  de  se  resouldre  a  ce  que  le  Cardinal 

(1)  Cependant,  les  ressources  du  Saint-Siège  étaient  profondément  épuisées. 
En  offrant  Ravenne  à  la  République,  pour  l'attirer  dans  la  ligue,  le  Pape  deman- 
dait, d'autre  pari,  à  la  Seigneurie,  de  lui  prêter  300000  écus.  Sur  ce  point  des 
négociations,  voir  lettre  au  Roi  du  :;  janvier  1557  . 

■l  Le  château  de  Saint-Ange,  au  bout  du  pont  Sanl'Angelo,  avait  été  ainsi 
appelé  parce  que  saint  Grégoire  le  Grand,  étant  sur  ce  pont,  vit.  dit-on,  un  ange 
qui  remettait  son  épée  dans  le  fourreau  après  une  peste  qui  avait  désolé  la  ville. 
Les  papes  firent  île  ce  château  une  véritable  forteresse,  cl  ils  avaient  coutume 
de  s'y  réfugier  quant  il  y  avait  des  troubles  à  Rome;  on  y  enfermait  aussi  des 
prisonniers  d'État. 


212  NÉGOCIATIONS    DE  JANVIER    1557] 

Carafîa  les  en  a  recherchez  ;  ilz  ont  monstre  estre  plus  marriz  que 
moi  mesme  dudit  paquet  perdu  et  m'ont  dit  qu'ilz  ont  envoyé  s'en- 
querir  comment  cela  s'est  passé,  pour  en  faire  justice  ou  se  res- 
sentir contre  ceulx  qui  en  auront  este  auteurs,  et  au  reste  mont 
faict  responce  qu'ilz  faisoient  faire  prières  a  Dieu  a  ce  qu'il  luypleust 
les  illuminer  a  resouldre  ce  qui  seroit  de  sa  volunté.  et  que  ces  sei- 
gneurs estoient  pretz  a  en  consulter.  J'ay  aussi  l'ait  entendre  audit 
sieur  Cardinal  le  destrossement  de  ce  pacquet,  et  ce  que  je  vous  en 
escripvis  ;  il  a  monstre  en  estre  plustot  bien  ayse  que  rnarry.  affin 
que  les  Impériaux  ne  luy  rompent  plus  la  teste  de  nouvelles  prati- 
ques, auxquelles  il  estoit  bien  résoleu  ne  prester  l'oreille,  s'ilz  luy 
donnoient  tout  le  monde,  et  n'eust  fait  ny  tresve  ne  aultre  forint' 
d'accord,  si  le  Roy  ne  l'eust  a  cela  exhorté  et  presse,  continuant 
toujours  que  si  vous  ne  le  trouvez  au  commencement,  au  mylieu.  ;i 
la  fin,  homme  de  hien  et  fort  Qdelle  serviteur,  que  vous  ne  tenez 
jamais  compte  de  luy  ny  d'homme  de  ceste  nation. 

T.ibl.  nat.,  Fr.  3117,  fol.  13    originale  . 


GABRE    A    M.    DE    SELVE 

162. —  Venise],  t  janvier  1557. —  Monsieur.  J'ay  reçu  rostre 
dernière  lettre  du  vingtsixiesme  du  passé,  el  depuis  les  derniers 
lettres  que  je  vous  escrivis  par  Girauld  1  ,  ces  Seigneurs  icy  onl 
été  a  consulter  sur  la  proposte  de  Monsieur  le  Cardinal,  el  tien- 
nent ceste  leur  resolution,  el  tout  le  parlement  qui  s'en  faict,  en 
leur  pregage,  si  secret,  que  chose  qui  y  aye  jamais  este  traictée, 
mais,  ce  matin,  ils  y  doibvent  faire  responce,  et  scaurons  que  c'esl 
bien  me  douté  je  qu'elle  ne  sera  de  sy  ny  de  non,  mais  de  mettre  la 
chose  en  quelque  longueur  el  en  belles  paroles  pour  voir  un  peu  le 
procedder  de  nostre  armée,  el  gaigner  toujours  temps;  il  est  vray 
qu'ilz  sont  reduietz  a  un  extrême  passaige  «le  laisser  eschapper  de 
leurs  mains  Havenne  el  Seruye  (2),  desquels  leur  a  esté  geste  un 
motasses  expressément,  mais  non.  a  ne  m  advis,  si  certain  el  asseuré 
qu'ils  y  penssent  faire  entrer  fondement  Je  ne  sca^  pas  commenl 
ils  peuvent  saigemenl  rompre  du  toul  ceste  praticque  la,  el  s'ils 
l'attaquent  je  la  liens  du  tout  pour  gaignée.  Le  Cardinal  de  Trente 
a  icy  envoyé  un  homme  oultre  l'ambassadeur  d'Espaigne,  Don  <■!"- 
vian  de  Lalala  (3),  qui  est  nouvellemenl  venu,  el  fonl  tout  ce  qu'ils 

(1)  Courrier  au  service  de  la  France. 

(2)  Cervia,  ville  d'Italie,  à  20  kil.  de  Ravenne. 

(3)  Don  Giovani  d'Ayala,   envoyé  de   Philippe  II   à  Venise.    Voir  Dbsjardins, 
Négociations  de  la  France  et  de  la  Toscane,  t.  m.  p.  363  , 


[JANVIER    loôTi  DOMINIQUE    DU   CABRE  213 

peuvent  pour  contreminer  et  empesclier  la  négociation  dudit  sieur 
Cardinal  et  m'a  l'on  dict  qu'ils  ont  propose  en  seigneurie  que  le  Roy 
d'Espaigne  se  contenteroit  a  la  réquisition  de  ces  Seigneurs,  et,  pour 
leur  faire  plaisir,  leur  baillant  un  voisin  tel  quils  l'ont  toujours  de- 
mandé de  renoncer  le  Duché  de  Milan  au  Duc  de  Savoye  et  pour 
mieux  descouvrir  la  négociation  dudit  sieur  Cardinal.  Il  faut  que  je 
vous  die,  avec  bien  grand  regret,  et  avec  un  peu  de  colère  qu'ils 
m'ont  destrossé  un  pacquet  que  deux  hommes  ostèrent  sur  le  grand 
chemin  a  un  voulier  de  Tassin  qui  le  portoit  de  Lima  a  Bresse, 
comme  vous  scavés  qu'ils  ont  accouslumé  de  poste  en  poste  ;  il  n'y 
auront  rien  trouvé  qui  leur  plaise,  ni  chose  secrette  qui  puisse 
porter  préjudice  aux  entreprises  du  Roy,  car  je  nVscrivois  que  l'ar- 
rivée du  Cardinal  icy,  et  les  propos  qu'il  m'avoit  tenus,  fort  certains 
et  exprès  de  la  ferme  et  asseurée  affection  du  Pape  et  syenne  a  l'en- 
droict  du  Roy,  et  qu'il  estoit  venu  ici  pour  chercher  la  déclaration 
de  ces  Seigneurs  et  non  pour  y  parler,  pt  respondre  d'aucun  accord  ; 
cela  est  chose  si  publicque  qu'ils  sont  bien  lourdauts  s'ils  ne  la  sca- 
vent,  et  quelquefois  d'un  mal  advient  un  grand  bien,  comme  je  l'ay 
escript  au  Roy,  car,  si  les  Imperiaulx  voyent  cela,  il  sera  bien  ma- 
laisé quils  croyent  plus  aux  paroles,  ny  aux  amusemens  du  Pape,  ni 
dudit  Cardinal.  J'ay  esté  contrainct  de  despecher  un  courrier  exprès 
a  Sa  Majesté,  luy  ayant  envoyé  le  duplicata  de  la  depesche  perdue, 
pour  ce  que  la  Seigneurie  en  avoit  eu  le  premier  advis,  et  que  je 
duulois  que  Monsipur  le  Cardinal  en  pourroit  avoir  eu  advis  d'ail- 
leurs que  de  moy;  je  me  résolus  de  le  luy  dire  et  luy  communiquer 
la  minutte  de  la  despeche  perdue,  pour  luy  oster  tout  soupçon  et 
bizarrerie,  comme  il  me  semble  qu'il  s'acotre  parfois  ;  mais  il  me 
falloit  en  faire  de  nécessite  vertu,  et  il  montra  d'en  estre  plustost 
bien  ayse  que  marry.  affin,  ce  dit-il,  que  ces  Impériaux  ne  luy  rom- 
pent plus  la  teste  de  nouvelles  pralicques.  J'allay  a  la  Seigneurie  en 
audience  secrette  me  plaindre  de  l'assassinement  faict  en  leur  estât, 
et  par  la  pris  argument  et  occasion  de  les  mettre  un  peu  en  colère 
contre  ceste  génération  la,  leur  disant  que  s'ils  ne  se  vouloient  res- 
sentir et  en  faire  démonstration,  j'en  ferois  porter  la  peine  a  plus 
de  quatre,  qui  par  adventure  n'y  ont  point  de  coulpe,  et  que,  s'il 
est  permis  aux  ennemis  du  Roy  de  violer  ainsi  la  liberté  et  la  fran- 
chise de  leur  estât,  je  serois  contraint  de  faire  venir  icy  et  cappi- 
taines  et  soldats,  et  dont  Sa  Majesté  paye.  Dieu  mercy,  bon  nombre 
en  Italye  pour  faire  scorte  a  ceux  qui  vont  et  viennent  pour  le  ser- 
vice de  Sa  Majesté  et  aspirant  autant  qu'il  me  fut  possible  le  pro- 
cedder  et  la  superbe  de  ces  Espaignols  qui  ont  voulu  commander 
dans  Rome  et  eu  audace  de  commander  pour  cest  effect  une  guerre, 
et  que,  s'il  leur  en  prenoit   bien,  j'esperois  quils  commanderoient 


214  NÉGOCIATIONS    UE  ■    [JANVIER    1557 

un  jour  dans  V  (\).  Quil  n'y  avoit  estât  dans  l'Italye  qui  fut  intact  de 
leur  tirannie,  sinon  de  eestui  cy  et  qu'il  ne  manquoit,  sinon  cest 
estât  que  toutte  l'Italye  ne  fut  en  liberté,  car  sils  vouloient  joindre 
leurs  forces  avec,  celle  du  Pape  et  du  Duc  de  Ferrare.  je  ne  faisois 
nul  doute  que.  avant  quil  fut  la  fin  de  cest  esté,  onn*eut  chassé  ceste 
nation  la  d'Italye,  leurexhortant  d'eslever  les  yeux  et  le  cœur  a  une 
si  honorable  entreprise,  et  quils  considérassent  que  Monsieur  le 
Cardinal  leur  avoit  présente  la  carte  blanche  en  matière  de  con- 
queste  a  faire  et  cependant  otîert  un  bon  gaige  en  main  qui  leur  est 
bien  séant  et  commode,  comme  sont  Ravenne  et  Seruie:  que  je  leur 
asseurois  bien  que  le  Roy  auroil  agréable  et  consentiroit  atout  ce 
qui  leur  seroit  proposé  par  le  sieur  Cardinal,  ne  se  mouvant,  Sa 
Majesté,  en  ceste  guerre  pour  aucun  dessein  particulier,  mais  seu- 
lement pour  la  défense  de  Sa  Sainteté  et  du  Saint  Siège  :  ils  mons- 
trerent  d'estre  fort  marris  et  offencés  du  destrossement  du  paquet, 
ayant  mandé  a  leurs  recteurs  de  Bresse  de  faire  grande  dilligence  a 
trouver  nouvelles  des  assassins,  et  si  on  ne  les  pouvoient  découvrir 
par  aultre  voye,  ils  me  dirent  quils  feroient  un  bando  de  donner 
prenno  (2)  a  celuy  qui  le  révéleroil  et  impunité  du  crime  s'il  estoit 
coupable.  Quant  au  reste,  quils  faisoienl  prier  Dieu  par  toutes  leurs 
églises  a  ce  quil  luy  plust  les  illuminer,  a  telle  résolution  quelle  fut 
agréable  a  sa  divine  bonté.  Nous  scaurons  ce  soir,  el  comme  dit  est 
cy  dessus  quelle  elle  sera,  et  je  vous  ay  voulu  faire  toul  ce  discours 
affîn  que  si  le  Pape  venoit  a  vous  parler  de  la  négociation  dudit 
sieur  Cardinal,  que  vous  luy  en  puissiés  respondre,  dire  el  asseurer 

que  les  ministres  du   Roy  font   ce  qu'ils  peuvent  | ■  seconder  et 

accomoder  les  choses  a  son  intention,  ce  qui  esl  a  bénéfice  comme  de 
la  ligue.  Giraull  vous  porta  l'autre  jour  xxxinécus;  maintenant  je  vous 

envoyé  par  la  Rivière  3  (4),  en  ayant  emprunté  douze  mille  sur 

le  nouveau  deposf  qui  se  fera,  duquel  nous  n'avons  encores aucunes 
lettres  ny  nouvelles;  s'il  en  vient,  je  le  vous  envoiraj  aussytost 
qu'on  le  pourra  recouvrer,  et,  sil  n'en  vienl  point,  faictes  avec  cecy 
le  mieux  que  vous  pourrès,  car  je  ne  scaurois  faire  autre  chose. 
Monsieur  de  la  Vigne  parlist  mardi  au  soir  dans  une  gai  1ère  de  la 
Seigneurie,  el  espère  qu'il  ira  seuremenl  jusqu'à  Ragouse;  de  la 
court  ni  de  Monsieur  de  Guise,  je  n'en  ay  rien  de  nouveau. 
De  Venise  ce  deuxiesme  de  Janvier  1557. 


(1)  Venise. 
*  (2)  Qui  s  faisaient  serment  de  donner  une  récompense,  etc. 

(3)  La  Rivière,  gentilhomme  du  Périgord  ;  il  avail  fait  la  guerre  en  Toscane 
sous  Strozzi;  en  1569  on  le  retrouve  enGuienne.  Voir  Comment  Ifontfwc, 

t.  iv,  p.  G  i  . 
(»)  ->lot  laissé  en  blanc  dans  le  texte. 


[JANVIER    1557]  DOMINIQUE   DU    CABRE  215 

Monsieur,   depuis   celle  lettre  escripte,  j'ay  esté  voir  Monsieur  le 

Cardinal  qui  m'a  die!  la  responce  de  la   Seigneurie,  plaine  de  fort 

belles   paroles,   mais    non    concluantes,   ne    repondans  a    ce   qu'il 

avuit  proposé,  de  sorte  qu'il  leur  a  l'ait   nue   gaillarde    replicque  et 

exhortation,  et  leur  a  baillé  de   quoy  consulter  une  aultre  fois,  leur 

avant  faict  entendre  soubs  main  par  un  de  leurs  gentilhommes  que 

s'ils  ne  veullent  entendre  cite  praticque  de  Ravenne,   il   est   résolu 

de  la  bailler  au  Duc  de  Ferrare,  lequel   en  offre  toute   telle  somme 

que  l'on  voudra  (1),   et  pourroil    estre    que   cetse  jalouzie   la   les 

mouvroit  plus  que  toute  autre  chose  pour  attendre  nouveaux,  pregays 

et  autres   resolutions,  je   croy  que    ledit   sieur  Cardinal   sera  icy 

encore  trois  ou  quatre  jours,  et  après,  selon  les  nouvelles  qu'il  aura 

de  Rome  et  de  Monsieur  de  Guise,  il  se  resouldra  de  prendre  soit  le 

chemin  de  Boullogne  et  de  la  Marque  d'Anconne,  ayant  entendu  que 

le  Duc  d'Alve  veult  recommencer  la  guerre  de  ce   coste  la.  Voila  ce 

•  pie  j'ay  peu  entendre  dudict  sieur  Cardinal  et  demain  je  chercheray 

de  l'entendre.  D'ailleurs,  je  croy  qu'il  est  bon  de  laisser  publier  de  la 

part  du  Pape  et  du  Cardinal  du  i'aict  de  ceste  négociai  ion,  et  comme 

ils  la  voudront  accoustrer,  mais  je  vous  dis  a  la  vérité    ce  que  j'en 

puis  entendre. 

(Ms.  de  Grenoble,  fol.  51  r). 

LABRE    AU    ROI 

163.  —  [Venise],  5  janvier  1 557 .  — Sire,  l'on  lient  icy  pourcerlain 
que  le  Cardinal  de  Trente  ;i  révolte  au  service  du  Roy  dEspagne  une 
des  principales  ville  des  (irisons,  lesquels  descendent  tous  les  jours 
a  grandes  troupes,  pour  aller  a  Milan  servir  ledit  Roy  dEspaigne  en 
cette  guerre.  Monseig'  le  Cardinal  Caraffe  eut  hier  réponse  de  ces  Sei- 
gneurs ;  el  parce  quil  leur  sembloit  qu'il  avoit  parle  un  peu  en  termes 
généraux  de  la  chose  de  Ravenne,  ces  Seigneurs  luy  repondirent  de 
même  avec  force  belle  paroles,  mais  sans  conclusion  ny  response 
de  sy  ny  de  non  :  qui  fut  cause  que  ledit  Caraffe  leur  répliqua  à 
l'improviste  en  termes  plus  exprès,  de  l'offre  de  Ravenne.  C'est  à 
scavoir  que  l'on  leur  bailleroil  Ravenne  et  Cervie,  en  engagement 
pour  la  somme  de  trois  cens  mil  escus,  a  la  charge  que  si  on  venoit 
a  conquérir  la  Pouille,  on  la  leur  consiimeroit  pour  propre,  et  ils 
rendroient  a  l'Eglise  ledil  Ravenne  :  et,  si  la  Pouille  ne  se  pouvoit  con- 
quérir ledit  Ravenne  leur  dem  ureroit  jusques  a  ce  que  l'Eglise  les 
eust  remboursés  de  leurs  prests  ;  leur  remonstrant  que  s'ils  ne  vou- 
loient  entendre  a  ceste  pratique  et  résoudre  de  leur  déclaration,  il 
estoit  contraint  de  mettre  en  Italie  si  grand  nombre  de  François,  que 

(1)  Il  menaça  aussi  la  Seigneurie  de  recourir  à  la  flotte  turque.  (Voir,  sur  ce 
point  des  négociations,  lettre  de  du  Gabre  au  Roi,  p.  144). 


216  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1557* 

par  adventure  il  seroit  malaisé  de  les  en  faire  sortir  :  et  que  ne  pou- 
vant avoir  forces  de  mer  pareilles  a  celles  de  l'ennemy,  Sa  Sainteté, 
estoil  forcé  de  se  servir  des  Turcs  qui  estoil  un  mélange  fort  dan- 
gereux, et  luydeplaisoit,  mais  qu'il  ne  pouvoit  faire  de  moins,  voyant 
la  façon  dont  on  luy  vouloil  commander  et  tyranniser;  que  ces  Sei- 
gneurs avec  leur  armée  de  mer  pouvaient  remédier  a  crst  inconvé- 
nient. Apres  cela,  il  leur  a  t'ait  entendre  sous  mains  par  un  de  leurs 
gentilshommes  mesmes,  que  s'ils  laissoienl  échapper  Havenne  de 
leurs  mains,  il  etoit  résolu  de  le  bailler  au  Duc  de  Ferrare  qui  en 
offroit  tant  d'argent  que  l'un  vouldroit  ;  de  sorte  que  ces  Seigneurs 
ont  remis  la  chose  a  nouveaux  Prégays  et  Conseil  :  et  ledit  Sieur 
Cardinal  sera  arresté  dicy  trois  ou.  quatres  jours,  pour  voir  s'il  en 
pourroit  tirer  quelque  bonne  resolution.de  laquelle  je  ne  manqueray 
de  vous  donner  advis  par  courrier  exprès.  Parles  dernières  lettres 
de  Rome  que  ledit  Sieur  Cardinal  m'a  communiquées,  il  semble  que 
le  Duc  dAlbe  veuille  changer  la  guerre  de  Rome  du  costé  de  la 
Marche  d'Ancone,  ei  que  l'on  avoit  de  ce  coté  la  le  Marquis  de  Mon- 
tebelle  avec  une  bonne  partie  de»  forces  'lu  pape  et  les  vostres;  et 
s'il  ne  nous  vient  bientost  quelque  bonne  nouvelle  de  Monseigneur 
de  Guise  1  par  lesquelles  Monsieur  le  Cardinal  puisse  espérer  de 
s'abboquer  avec  luy;  il  est  pour  s'en  aller  de  ce  costé  de  la  Marche. 
pour  voir  comme  cette  guerre  se  doit  conduire.  J'y  voy  sur  ce  quel- 
que contusion  et  mauvais  ordre,  >i  Monseigneur  de  Guise  ne  s'ap- 
proche bien  lost  et  qu'on  ne  fasse  une  bonne  délibération  de  ce  que 
les  uns  et  les  autres  doivent  taire  en  ceste  guerre  :  et  si  l'on  use 
de  diligence  a  faire  marcher  vostre  armée,  j'ay  espérance,  Sire,  que 
vous  commanderez  aux  armes  ennemies.  Sire,  le  Roy  d'Espagne  a 
esciïl  a  tous  les  Cardinaux  Espagnols  el  autres  ses  con fédérez  et 
partiaux  qui  se  trouvoienl  hors  de  Rome,  de  regarder  quelque  lieu. 
ou  ils  se  puissent  assembler  pour  faire  un  congrégation  ou  forme 
de  concile  pour  y  traiter  de  la  privation  du  Pape  comme  non  eleu 
canoniquement,  et  pour  son  mauvais  gouvernement;  nommant  pour 
cesl  effel  la  ville  de  Pise,  ou  pareille  assemblée  avoil  été  autrefois 
faite  contre  le  Pape  .lule^  sec.nd  ;  et  que.  scachant  ledit  Roy  d'Espa- 
gne que  le  Pape  vouloit  user  de  privations,  il  les  vouloit  prévenir 
et  les  luy  rendre  invalides.  J'écris  a  Monseigneur  le  Cardinal  du 
Rellay  qui  est  a  ce  qu'on  dit  des  favoris  du  Pape,  les  remèdes  qui  me 
semblent  bien  faciles  a  Sa  Sainteté  et  je  veux  croire  qu'elle  y  pour- 
voira. Cela  me  tait  CTOire,  Sire,  (pie  si  de  VOSte  COSté,  il  ne  s,«  Manie 

(1)  Le  due  de  Guise  ciait  entre  en  Italie  depuis  quelques  jouis  avec  1-2000 
fantassins, donnooo Français  commandés  par  le  duc  de  Nemours,  ci  5000 Suisses 
sous  les  ordres  de  René  d'Elbœuf,  de  la  maison  de  Lorraine.  La  cavalerie,  qui 
comptait  400  hommes  d'armes  et  800  chevau-légers,  était  commandée  par  Claude 
d'Aumale.  (Voir  G.  Ddruy,  l.e  c<n-<iin<ii  Carlo  Carafa,  p.  216 


[JANVIER    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  217 

quelque  pratique  pour  accommoder  tous  ces  troubles  on  peut  es- 
pérer sinon  guerres  et  schismes  en  l'Eglise.  On  scail  bien  que  vous 
Sire,  y  estes  entré  force  et  mal  voluntiers  ;  mais  puisqu'on  y  est,  je 
crois  que  ce  sera  une  bonne  resolution  de  la  faire  a  bon  escient  :  c;ir 
d'une  bonne  guerre  sortira,  s'il  plait  a  Dieu,  une  bonne  paix.  Sire, 
j'ay  esté  ce  matin  en  Seigneurie  et  en  audience  secrète,  ou  après  avoir 
communique  a  Monsieur  le  Cardinal  ce  que  jevouloisdire  pour  aider 
sa  négociation,  mon  propos  a  esté  qu'encores  que  ledit  sieur  Cardinal 
n'aye  proposé  cbose  quelconque  qui  ne  soit  avec  bonne  participation 
et  consentement  voslre,  et  sans  m'en  faire  bonne  communication, 
comme  d'une  chose  qui  n'est  qu'une  et  commune  entre  Sa  Sainteté 
et  Vostre  Majesté;  que  neantmoins,  il  me  sembloit  ne  faire  point 
mon  devoir  envers  vous.  Sire,  et  ne  vous  en  donner  assez  suffisant 
advertissement,  si  je  n'enltendois  d'eux  mesmes  leur  resolution, 
laquelle  vous  (croit  par  adventure  résoudre  de  procéder  en  ceste 
guerre  et  en  la  paix  d'une  autre  façon  que  vous  n'aviez  délibéré.  Car 
vous,  Sire,  y  mettiez  la  réputation,  vos  forces  et  tout  l'argent,  et 
qu'il  estoit  raisonnable  que  vous  sceussiez  ce  que  vous  deviez  es- 
pérer d'eux,  qui  y  ont  plus  d'intérest  que  vous.  Sur  quoy  je  leur 
ay  fait  entendre  en  termes  clairs  et  intelligibles  que  les  partis  pro- 
posez par  Monsieur  le  Cardinal,  les  conditions  et  la  façon  de  leur 
bailler  Ravenne,  et  l'aide  qu'on  voudroit  avoir  d'eux,  leur  faisant 
toucher  au  doigt  qu'il  ne  falloit  avoir  experance  a  la  paix,  sur  la- 
quelle ils  fondoient  leurs  défaites,  si  ce  n'estoit  après  une  bonne 
guerre  ;  et  que,  si  les  choses  avoient  été  entendues  de  la  Seigneurie, 
de  la  sorte  que  ledit  Cardinal  me  les  disoit,  et  qu'ils  eussent  la 
dessus  consulté  et  résolu,  le  dit  Cardinal  estoit  prest  a  partir  pour 
s'en  aller  a  Ferrare.  et  moy,  en  sa  compagnie,  par  adventure,  faire 
les  affaires  d'autruy  a  leur  plus  grand  regret,  et  sil  leur  sembloit 
que  les  choses  n'eussent  été  entendues  de  cette  sorte  par  toute  leur 
compagnie  et  qu'ils  les  voulussent  de  nouveau  disputer,  ledit  Car- 
dinal attendroit  encore  quelques  jours.  Leur  réponse  a  esté  qu'ils 
avoient  différé  pour  le  mieux  de  différer  leur  entière  resolution 
jusques  a  ce  que  l'on  vit  ce  que  produiroit  l'allée  de  Fantuccio  (l) 
vers  le  Roy  d'Espagne,  d'autant  quil  me  sembloit  quil  fut  aile  la 
pour  entendre  aux  pourparlers  de  l'accord;  et  que  par  les  lettres 
de  leurs  Ambassadeurs,  ledit  Roy  d'Espagne  en  avoit  assez  bonne 
volonté;  les  ayant  par  ma  réplique  cl  avec  lionnes  et  palpables  rai- 

(1)  Mgr  Fantuccio,  ami  et  confident  ries  Carafa.  était  chargé  par  le  Cardinal,  à 
l'insu  de  M.  de  Lodève,  d'une  singulière  mission.  Il  négociait  un  marché,  aux 
termes  duquel  le  l'ape  accorderait  sa  neutralité  si  Philippe  II  lui  cédait,  à  lui 
Carafa,  la  ville  de  Sienne  En  échange  de  cet  abandon,  le  cardinal  ferait  restituer 
Paliano  à  la  famille  Colonna.  Fantuccio,  pour  traiter  cette  affaire,  s'était  rendli  à 
Bruxelles  auprès  de  Philippe  II.  Voir  G.  Duruv,  Le  cardinal  Carafa,  p.  204,205). 


218  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    15  57] 

sons,  dissuadés  do  cette  opinion  de  paix  et  rafraîchis  d'attacher 
vivement  la  pratique  avec  ledil  sieur  Cardinal,  puisquil  estoîl  icy, 
pour  après  la  conclure,  ou  la  rompre,  quand  ils  seroient  eclaircis 
de  la  vérité  et  négociation  dudit  Fantuccio.  Le  Duc  (lj.  sur  cela, 
m'a  fait  réponse  que  ces  Seigneurs  s'asseinbleroient  encores  de 
nouveau,  et  résoudraient  audit  Seigneur  Cardinal  et  a  moy  aussi  ce 
que  Dieu  les  inspireroit;  de  sorte  que  l'issue  n'est  pas  encores  du 
tout  desespérée  et  sera  forcé  que  ledit  sieur  Cardinal  soit  encores 
icy  deux  ou  trois  jours  (2)'. 
A  Venize 5  janvier  1557. 

Ribier,  l.  il.   \>.  673  . 


UABRK    AU    CARDINAL    DE    TOURNOIS 

164.  — [Venise],  23  janvier  /.">.">7.  —  Monseigneur,  j'arrivay  hier 
icy,  de  retour  de  Ferrari',  et  y  trouvay  vos  Lettres  du  dix  septiesme 
de  ce  moys,  et.  quant  a  l'assemblée  dudit  Ferrare,  nous  y  avons 
este  cinq  ou  six  jours  avec  beaucoup  de  discours  et  bien  peu  il»' 
resolution,  car  la  lin  de  tous  nos  conseils  a  este  dattendre  Monsei- 
gneur de  Guise  el  luy  depescher,  par  diverses  voyes,  messagers  pour 
le  haster  de  venir,  el  Dieu  veuille  qu'il  en  use  t<>ut  autrement  alïin 
qu'il  ne  perde  poinct  temps  a  voiager,  maintenant  que  Rome  n'en  ;i 
pas  grand  besoin  ri  qu'il  excaute  en  Piedmonl  et  en  Lombardye 
quoique  chose  de  bon  pour  le  Roy,  comme  il  a  desja  commencé  par 
los  nouvelles  quon  a  ce  matin  en  cesle  ville  de  la  prise  de  Val- 
lence  (3i  ou  il  y  avoil  trois  mil  hommes  de  guerre;  <»n  nen  scail  pas 
autrement  bien  les  particullarités, mais  la  Seigneurie  a  eu  nouvelles 
par  la  voye  de  Milan  de  la  prise,  et  que  le  camp  de  mondit  Seigneur 
de  (nii>-o  debvoit  aujourdhuy,  qui  esl  samedy,  loger  a  Bognieres  el 
Monsieur  le  Mareschal  de  Brissac  i  inarchoil  avec  une  autre  armée 
d'un  autre  endroicl  el  du  coste  de  Flandres.  <»n  a  icy  aussi  a\is  «le 
la  rupture  de  la  guerre,  de  sorte  que  de  jours  a  aul très  nous  pou- 
vons attendre  grandes  nouvelles  el  mutations  el  espérer  tout  bien 
pour  le  R,oy  pour  se  trouver  le  premier  a  frapper  resolleu  el  armé, 
el  son  ennemy  piis  a  l'improviste  el   asses  mal  pourveu,  S'il  esl 

il)  Le  Doge. 

(?.)  La  mission  de  Carala  échoua  complètement;  le  cardinal  quitta  Venise  le 
12  janvier,  -ans  avoir  obtenu  de  la  Seigneurie  autre  chose  qu'un  présent  de  <ii\ 
mille  ducats. 

(3)  Valenza. 

(4  Brissac  occupai!  le  Piémont;  il  se  joignit  au  duc  de  Guise  à  Turin,  el  les 
doux  généraux  se  séparèrent  a  Valenza  après  la  reddition  de  cette  place.  Alors 
Brissac  revint  en  Piémont  el  Cuise  se  dirigea  sur  li< •  u ^ ' ' • .  où  l'attendaient  le  car 
ilinal  Carala.  le  duc  de  Keiiaie    el   l'évêque  de    Lodève.  C'est  au  cours  de  relie 

entrevue  que  Cuise  remit  a  Hercule  les  insignes  du  généralal  àr  la  Ligue 


[JANVIER    1557]  DOMINIQUE    DU    CABRÉ  219 

passé  quelque  cbose  entre  le  Cardinal  Ca rafle  et  le  Duc  en  matière 
de  deniers,  cela  est  secret  entre  eulx,  pour  le  moins  ils  n'en  ont  rien 
communiqué,  et  je  me  suis  contenté  de  ce  que  l'un  el  laultre  m'en 
ont  dict,  le  Duc  faisoit  lever  quatre  mil  hommes,  el  je  luvav  baillé 
un  trésorier  sans  argent,  de  sorte  qu'il  a  desbourcé  vingt  mil  escus, 
mais  ca  este  avecq  forces  protestations  el  un  peu  de  collere,  tellement 
que  nous  nons  sommes  desparlis  asses  mal  content  l'un  de  l'aullre: 
le  Cardinal  Ca rafla  a  montré  de  s'en  aller  contenl  de  nous  trestous 
et  ne  scay  quels  desseins  il  a  en  son  esprit,  mais  il  ne  parle  aucul- 
nement  d'avoir  haste  de  retourner  a  Rome;  la  ville  de  Bologne  a  ce 
que  j'entends  (1)  un  presenl  de  cinquante  mil  escus;  au  reste,  Mon- 
seigneur, en  matière  de  vostre  remuement  de  logis,  j'en  ay  advise 
avec  Abondio,  présent  porteur,  et  ne  scavoys  a  quoy  m'en  resoul- 
dre,  n'ayant  jamais  eu  trop  de  loisir  de  santé  et  commodité  d'aller 
visiter  ce  pais  vénitien.  Une  chose  vous  diray  je  bien  que  sur  le 
Ferrarois  vous  pourries  avoir  une  maison  de  celles  de  Monsieur  le 
Duc  capable,  belle  et  commode  et  non  loing  dudit  Ferrare,  ou  toutes 
les  postes  de  Rome  et  de  France  passent;  mais  pour  beaucoup  de 
considérations  longues  a  escrire  qui  concernent  le  repos  de  vostre 
personne,  je  ne  serais  point  dadvis  que  vous  cherchissiés  ce  travail 
la  ;  quant  a  Padoue.  je  vois  qu'elle  ne  vous  plaist  guères,  ne  Vicence 
aussy,  et  de  vous  mettre  en  maison  ;  aux  champs,  on  n'en  voit  guè- 
res en  ce  pais  qui  soient  capables  d'une  grande  famille  et  ne  veoy 
lieu  qui  vous  fut  plus  propre  que  Trevise  (2  qui  est  une  bonne 
ville  fort  commode  et  abondante  de  tous  vivres;  n'y  a  point  noblesse 
ne  forme  de  cours,  et,  en  trois  heures,  on  peult  aller  et  venir  de 
Venise  la,  et  s'il  vous  prend  envie  d'aller  a  Conlian  (3),  a  Udine  (4), 
a  Seneda  (5)  et  autres  lieux  du  Friculv  (6),  vous  serès  sur  le  chemin 
et  aurés  de  cette  Seigneurie  toultes  les  faveurs  que  vous  pourriez 
désirer,  mais  je  cuyde  avoir  entendu  que  le  Pape  veult  appeller  et 
faire  venir  a  Rome  tous  les  Cardinaulx  qui  sont  absens  aussitost 
quil  se  verra  supérieur  et  que  Monseigneur  aura  passé  de  Lombar- 
dye,  et  ne  scay  si  vous  pourries  légitimement  estre  excusé  de  n'y 

(i)  Le  copiste  du  manuscrit  de  Grenoble  a  dû  omettre  ici  quelques  mots  dont 
l'absence  rend  la  phrase  inintelligible. 

(2)  Trévise,  ville  d'Italie,  chef-lieu  de  la  province  de  ce  nom,  sur  la  Silletta  et 
le  Bottenigo.  à  30  kil.  de  Venise. 

(3)  Conegliano,  ville  d'Italie,  à  2i  kil.  de  Trévise. 

(4)  Udme,  ville  d'Italie,  chef-lieu  de  la  province  de  ce  nom,  sur  la  Roja,  à 
155  kil.  de  Venise. 

(5)  Ceneda,  ville  d'Italie,  à  32  kil.  de  Trévise,  sur  le  Machio. 

(6  Friuli  :  Frioul,  se  divisait  anciennement  en  deux  provinces.  le  Fn oui  autri- 
chien à  l'est,  et  le  Frioul  vénitien  à  l'ouest  ;  le  premier  avait  Trieste  pour  chef- 
lieu,  le  second  Udine.  Le  Frioul  fut  d'abord  possédé  par  les  Lombards;  les 
Vénitiens  l'acquirent  en  1430;  il  fut  cédé  en  parlie  à  l'Autriche  au  xvi«  siècle. 


220  NÉGOCIATIONS    DE  [JANVIER    1557] 

aller;  on  dict  que  Testât  d'Urbin  est  plus  pour  leste  que  pour  lhy- 
ver,  et  si  le  remuement  de  logis  vous  déplaist  et  que  vous  soyez 
irresoleu  de  nostre  court  de  ce  que  vous  aves  a  faire,  je  pense  que 
si  vous  y  pouvies  avoir  quelque  lieu  qui  ne  vous  portast  ne  sujétion, 
ne  obligation  a  personne,  vous  pourries  mieux  reposer  en  cet  estât 
d'Urbin  que  ailleurs,  pour  estre  spectateur  des  travaux  du  monde 
et  des  actions  des  uns  et  des  autres  et  en  avoir  a  toute  heure  nou- 
velles. Ces  Seigneurs  ont  faict  leur  provéditeur  de  terre (1)  Monsieur 
Tomaso  Contarine  (2)  et  fusl  lever  mil  six  cens  soldats,  paies  sans 
toucher  a  leur  milice  pour  les  despartir  dans  leur  place,  a  la  charge 
den  lever  davantage  quant  il  sera  besoin.  De  Levant,  il  ny  en  point 
de  nouvelles,  sinon  que  Monsieur  de  la  Vigne  estoit  arrive  en  seu- 
reté  a  Spalato,  s.ins  passer  a  Raguse,  et  faisoit  compte  d'arriver  a 
Andrinople  environ  le  cinquiesme  de  febvner;  je  luy  envoyerai 
vostre  pacquel  et  vous  ayant  mon  secrétaire  envoyé  ce  qui  estoit 
venu  de  lettres  pour  vous  durant  mon  absence,  je  n'ay  pour  ceste 
heure  autre  chose  a  vous  dire  que  mes  très  humbles  recomman- 
dations a  vostre  bonne  grâce. 

Ce  xxme  de  Janvier  1557. 

Ois.  de  Grenoble,  f-  93  v° . 


GABKE    AT    M  C    DE    FERRARE 

165. —  [Venise],  24  janvier  1557.  —  Monseigneur,  Il  est  arrivé 
ce  jourd'huy  ung  corrier  dépesché  de  Monseigneur  de  Guyse  ou  du 
Sr  Adrian  Haillon,  avec  ung  paquet  pour  Vostre  Excellence  et  ung 
autre  pour  Monsr  le  Cardinal  Caraffa,  et  une  lettre  que  mondit  Sr  de 
Guyse  m'escripl  avec  ung  peu  de  chiffre,  laquelle  je  n'ay  peu  ren- 
contrer avec  aucun  chiffre  que  j'aye,  ne  avec  le  Roy  ne  avec  autre, 
parquoyje  vous  envoyé  le  propre  original  pour  veoir  si  cela  se  ren- 
contre avec  vostre  chiffre  ou  celluy  de  Monsr  de  Forquevaulx.  11  esl 
vray  aussi  que  les  lettres  sont  d'assez  vieille  date,  estant  venues  par 
la  longue,  et  ne  faiz  double  que  vous  n'en  ayez  eu  de  plus  fresches 
et  mesmes  de  la  prinse  de  Valence  .!  .  dont  ces  Seigneurs  onl  eu 
les  nouvelles,  mais  non  les  parti cularitéz.  11  vous  plaira  envoyer  par 
ce  mesme  corrier  ou  autre  à  Mons'  le  Cardinal  Carafa  les  lettres  qui 
s'adressent   a    luy.  lesquelles,  je   croy,  par  adventure,  sonl    dudil 

l)  Provéditeur  :  magistrature  dans  la  République  de  Venise.  Il  existait  'le  nom- 
breuses charges  du  même  nom;  les  provediteurs  de  la  mer,  delà  terre,  etc. 
Leurs  fonctions  consistaient  à  payer  les  dépenses  de  la  flotte,  île  l'agriculture,  du 
commerce,  etc. 

•i  De  la  famille  noble  ei  ancienne  des  Contarini,  qui  a  donné  à  Venise  plusieurs 
do^es  et  un  grand  nombre  de  sénateurs  ci  d'ambassadeurs. 

:;    Par  les  troupes  du  due  de  (luise  ci  du  maréchal  de  Brissac 


[février  1557!  Dominique  du  gabre  221 

S''  Adrian  Haillon.  Je  n'escripz  rien  audit  Sr Cardinal,  pour  ne  sçavoir 
que  luy  dire  des  intentions  de  inondit  Sr  de  Guyse  qui  sont  audit 
chiffre.  Vostre  Excellence  luy  en  pourra  1ère  telle  part  que  bon  luy 
semblera. 

De  Venize,  ce  xxime  de  Janvier  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.i. 
Même  lettre.  Ms.  de  Grenoble,  fol.  94  r). 


GABRE  au  capitaine  nicolo  losco 

166.  —  [Venise],  1"  février  1557 .  —  Ho  ricevuto  la  lettra  di  V.  S. 
per  il  Sr  Sigismondo  présente  apportatore,  allaquale  non  le  faro 
longa  risposta.  Attendete  solamente  d'aecommodar  in  allé  rose  délia 
Mirandola,  et  non  vi  curate  d'altro  che  quanto  alla  veslro  provisione 
venuto  che  sara  qui  Giovan  petito  io  ci  provedero,  di  modo  che  sa- 
rete  trattato  d'amico  se  un  pirrimo  francese  qualc  desidera  d  intrar 
nella  militia  délia  Mirandola,  et  di  toccar  il  soldo  corne  é  altri  sol- 
dati.  Vi  pregojattelo  accommodare  in  qualche  compagnia  et  babbia- 
telo  per  raccomandato  et  con  questo  a  V.  S.  mi  affero  et  race*0  di 
cuire. 

Di  Venetia  adi  primo  di  febrari  1557. 

(I'.il)l.  nat  .  Fr.  20156,  fol.  203    originale). 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

167.  --  [Venise  .  Ô  février  I  J5~ .  —  Monseigneur,  Je  receuz  hyer 
ce  qu'il  pleust  à  Vostre  Excellence  m'escripre  par  ce  porteur,  et 
quant  au  payement  de  la  compaignye  dez  chevaulx  qu'il  demande, 
je  n'oze  prandre  ceste  auctorité  de  moy  rnesmes,  et  sans  en  avoir 
commandemant  de  Messeigneurs  le  Cardinal  (1)  et  de  Termes,  et  si 
panserois  bien  que  le  Roy  ne  trouveroit  point  maulvays  qu'on  luy 
l'eist  provision  de  cavallerye,  tant  pour  le  besoirig  qu'il  en  pourra 
avoir  à  ce  printemps,  et  l'osteràson  ennemy,  que  pour  n'estre  chose 
trop  aise  à  recouvrer,  et  quant  vous.  Monseigneur,  me  commande- 
ryez  de  le  1ère,  je  n'y  ferois  une  seulle  difficulté,  scachanl  bien  que 
je  serois  avoué  de  tout  ce  que  vous  trouvères  bon:  mais  pour  n'en- 
treprandre  rien  sur  l'auclorité  de  ceulx  qui  me  peuvent  commander, 
j'ay  escript  à  Sienne  à  mondict  Sr  le  Cardinal  et  à  Monsr  de  Termes. 
leur  en  disant  mon  advys,  qui  est  tout  en  faveur  dudicl  Sr  Rodolpho, 
et,  par  mesme  moyen,  escriptz  à  Mons''  de  Forquevaulx,  à  ce  que  ce- 
pandant  il  veuille  donner  logis  et  quelque  commodité  et  consolation 

(1)  Le  cardinal  de  Tournon. 


~'1"1  NEGOCIATIONS    DE  [FÉVRIER    1557] 

audict  Sr  Rodolpho  ;  qui  est,  Monseigneur,  tout  ce  qu'il  m'a  samblé 
debvoir  fere  pour  cest  heure  S'il  vous  plaist  me  commander  que  je 
y  lace  aultre  chose,  je  vous  asseure  que  vous  serez  incontinent 
obéhy.  Je  suis.  Monseigneur,  contrainct  d'attandre  icy  encores 
toutte  cesle  sepmaine  pour  quelque  altère  que  vous  trouverez  bon, 
s'il  reuscisl  bien,  et  cepandant,  je  croy  que  nous  aurons  responce 
de  la  Court  à  noz  lettres  du  \".  Nous  entendons  que  ces  Seigneurs 
ont  eu  fort  agréable  la  proposition  de  la  ligue,  toutesfoys  ils  n'en 
font  encores  point  de  responce. 

De  Venize,  ce  vme  febvrier  1557. 

Monseigneur,  Si  c'est  chose  qui  ne  vous  desplaise  point,  je  vous 
supplierois  voluntiers  et  très  humblemeni  d'envoyer  à  vostre  Am- 
bassadeur, qui  est  à  Florence,  le  paquel  qui  s'adresse  à  Monsr  le  Car- 
dinal, et  luy  commander  de  le  luy  envoyer  seurement,  comme 
chose  qui  vient  de  Vostre  Excellence. 

\irii.  de  Modène.  Cancelleria  Dueale,  etc.  . 


CABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

168.  —  [Venise],  15  février  iôô7,  -■  Monseigneur,  Ce  ponrteur 
Gassot  est  renvenu  <le  la  Court,  par  lequel  j'ay  receu  ung  paquet 
pour  Vostre  Exellence,  lequel  je  vous  envoyé  par  luy  mesmes  qui 
s'en  va  à  Sienne.  Il  vous  plaira,  par  luy,  entendre  toute-  nom  elles 
du  lieu  d'où  il  vient  et  ce  qu'il  a  à  dire  au  Due  de  Florence  tant  de 
la  pari  du  Roy  que  de  Mous1  le  Cardinal  de  Tournon.  Mons'  le  Con- 
nestable  m'escript  qu'il  réservoil  à  me  1ère  plus  grand  dépesche  au 
retour  du  boy.  qui  estoil  allé  en  poste  à  Emboyse(i)  veoyr  mes- 
seigneurs  ses  enfantz.  Je  partiray,  Monseigneur,  demain  malin  s'il 
plaist  à  Dieu,  pour  estre  devers  vous  vendredy  ou  samedj  matin.  Je 
me  double  que  Partenay,  avec  l'argenl  qu'il  conduysoit,  n'auront  peu 
passer  Florence;  le  principal  sera  que  l'argenl  ne  >oil  point  en 
danger,  comme  j'espère  qu'il  ne  sera,  puisqu'il esl  arrivé  a  saulveté 
audit  Florence.  Pour  l'advenir,  je  croy  qu'il  fauldra  prandre  aultre 
chemin,  puis  que  les  ennemys  font  actuellement  la  guerre.  Je  re- 
mettray  le  surplus.  Monseigneur,  a  quanl  je  seray  devers  Vostre 
Exellence. 

De  Venize.  ce  \v""  febvrier  l  r>o7. 

Monseigneur,  Depuys  ma  lettre  escriple,  le  S'  Alexandre  Guarin 
m'a  l'ai«- 1  ceste  faveur  de  me  venir  trouver  et  me  communiquer, 
selon  vostre  commande,  ce  qu'il  vous  a  pieu  luy  escripre,  dont  je 
vous  mercye  très  humblement,  et  quant  à  la  uégotiation  de  nies 

(1)  Amboise. 


[FÉVRIER    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  223 

sieurs  voz  Ambassadeurs  icy,  '.es  serviteurs  du  Roy  qui  sont  icy 
vous  y  feroienl  service  s'il/,  pouvoient  et  scavoient  bien  que  voz 
afferes  n'empescheront  james,  niais  plus  tost  favoriseront  et  ayde- 
ront  les  nostres.  Ce  que  je  vous  en  avoys  escript  n'estoil  pas  serio, 
mais  usant  ou,  par  aventure,  abusant  de  la  privaulté  qu'il  vous 
plaist  me  permettre,  dont  il  vous  plaira  m'excuser.  Mons'  l'Ambas- 
sadeur cl  moy,  eseriprons  à  Mons''  de  Mairepoix  1 1),  selon  vostre  bon 
et  saige  advis,  pour  le  faict  du  S1  Camillo  (2)  et  en  faisons  une 
dépesche  expresse  au  Roy,  nous  semblant  chose  de  grande  impor- 
tance pour  ce  qu*il  semble  que  en  cela  doibt  avoir  quelque  intel- 
ligence ou  pratique  du  Pape,  et  ferons  aussi  entendre  à  Sa  Matéle 
progrès  dez  Impériaulx  sur  le  Senoys  (3)  et  ces  mutations  du  Duc 
de  Florence,  nous  ayant  semblé,  sauf  vostre  meilleur  advys,  que 
ce  porteur  debvoit  aller  jusques  à  Flo  rence,  puys  qu'il  a  à  parler 
audit  Sr  Duc.  Je  ne  puys  croyre  que  nostre  argent  ne  soit  passé  ou 
à  tout  le  moyns  en  seureté,  puys  que  n'avons  encores  nouvelles 
de  Partenay.  Geste  esclusion  du  Comte  de  Ste  Fior(4)  me  desplaist 
et  fault  que  le  Roy  se  résolve  de  myeulx  penser  aux  afferes  d'Italye. 
C'est  de  Yenize,  ce  xvic  matin. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancclleria  Ducale,  etc.). 

GABRE    A 

169.  —  .  23  février  1 557 . —  Nous  n'avons  icy  aulcune 

nouvelle  digne  descripre,  sinon  les  adviz  que  ces  Seigneurs  ont  de 
Levant  du  xie  de  Janvier,  par  lesquelles  on  asseure  que  le  grand 
Seigneur  faysoyi  toute  dilligence  d'armer  cent  gallaires,  lesquelles 
je  ne  pense  qu'il  veult  employer  ailleurs  que  ez  mers  de  deçà  qui 
me  faict  croyre  que  Monsieur  de  la  Vigne  n'aura  pas  trouve  grande 
difficulté  a  obtenir  l'issuee  de  ladite  armée  pour  ayder  les  entre- 
prinses  du  Roy.  Quant  a  la  des  Allemantz,  je  vous  envoyé  la  coppie 
d'ung  adviz  que  jeuz  hier  de  Monsr  le  Maréchal  de  Rrissac,  il  ne 
s'en  entend  rien  de  nouveau,  sinon  qu'il  avoit  rompu  quelques  pontz 
au  Marquiz  de  Pescara  (5),  lequel  ne  pouvoit  aller  avant  ne  arrière, 

(1)  Jean  VI  Suavius,  auditeur  de  rote  en  1555.  Lors  de  son  élection  au  pontifi- 
cat, le  pape  Paul  IV  le  nomma  cardinal  et  évêque  de  Mirepoix  ;  il  resta  à  Rome, 
se  démit  en  1560  de  son  évêché  en  faveur  de  Pierre  de  Villars,  cl  mourut  le  9 
septembre  1566. 

(2  Camillo  Orsino,  capitaine  incapable,  mais  qui  jouissait  d'un  grand  crédi1 
auprès  de  Paul  IV. 

(3)  Sienne  étail  entre  les  mains  de  Philippe  II  ;  la  possession  de  cette  ville 
assurait  au  roi  d'Espagne  la  fidélité  du  duc  de  Florence. 

t    Le  comte  de  Santa  Fiora,  de  la  vieille  famille  des  Stor/.a.  fidèlement  attaché 
à  la  cause  impérialiste  et  ennemi  personnel  du  Pape. 

5  François-Ferdinand  de  Avalos  et  Aquino,  tils  de  Pierre-François  Colonna  et 
d'Isabelle  des  Baux,  devint  marquis  de  Pescaire  et  del  Vasto  et  grand  chambellan 


~24  NÉGOCIATIONS    DK  MA  IIS    1587 

et  cependant  il  faisoit  achever  la  fortification  de  Vallence.  Et  quant 
a  la  practicque  de  Florence,  par  les  ldlres  que  ces  Seigneurs  eurent 
hier  de  leur  ambassadeur  qui  est  en  France,  ilz  tiennent  la  chose  pour 
toute  conclute  et  accordée,  et  je  croy  bien,  en  conscience,  qu'ilz 
nen seroient  pas  trop  aisés;  on  ne  les  voit  pas  fort  eschauffer  en 
matière  de  s'armer  ne  par  mer  ne  par  terre  et  vont  en  ces  chose  la 
fort  bellement.  Adviz  de  la  descente  des  Allemanlz. 
Du  xxme  de  février  1557. 

Inquesta  hora  ch'e  la  ter/.a  di  nolti  gh  S11  Etestori,  hamo  fatto 
chiama,  il  cappitano  Rinaldo  perche  hanno  hanuto  aviso  duTrento 
ch'el  colonello  del  conta  Alberico  di  Lodrone  1  ,  che  vien  in  Italia 
saranel  vel  Veronese,  venerdi  et  per  questo  hanno'ordinato,  a  detto 
cappitano  che  domanda  matina  avanti  di  sene  vada  a  Trento  per  le 
poste  per  condure  detto  collonello. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20529,  fol.  I  '.S.  Extrait    copie  . 
sans  indication  de  lien,  ni  de  destinataire  . 


GABRE    AU    CONNETABLE 

470. —  ]'niisr  ,  il  mars  1557.—  Monseigneur,  j'escris  au  Roy 
la  venue  de  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare,  et  ay  mis  beaucoup  de 
choses  en  chiffre  pour  ce  que  hier  j'eus  encore  advis  des  Tassins  de 
Luna  comme  quatre  hommes  masques  avoienl  assailly  un  de  la 
poste  de  Bresse,  qui  porloil  deux  pacquets  de  mondil  sieur  le  Din- 
de Ferrare,  et  luy  avoienl  donne  quelques  coups  d"espée,  mais  pour 
estre  ledit  postillon  bien  monte,  il  sauva  sa  vie  el  les  pacquets,  de 
quoy  je  lis  hier  plainte  a  la  Seigneurie,  et  inconlinenl  ils  escrivirenl 
a  leurs  recteurs  de  Dresse  quils  lisseni  toute  dilligence  de  trouver 
ces  assassins,  el  quils  lissent  tenir  de  leurs  cappitaines  sur  les 
champs  pour  asseurer  les  chemins;  ils  pensent  bien  que  ce  sont 
œuvres  des  impériaux  et  auroienl  bonne  envye  den  descouvrir 
quelques  uns.  mais  il  y  a  ordre  île  les  pouvoir  surprendre.  Monsei- 
gneur le  Duc  m'a  dict  quil  ny  avoil  poinl  de  ses  lettres,  mais  que 
cesloit  un  pacquel  que  Monsieur  de  Selve  luy  av. .il  adresse  cl  forl 
recommande,  lequel,  a  ce  que  je  veoy,  a  este  en  grand  danger, 
mais  non  pas  perdu  ;  el  se  trouvanl  i<\  l'un  des  Tassins,  je  l'ay  ren- 
voyé avec  ceste  despeche,  al li i »  que  luy  mesme  la  porte  seurement 
et  si  avanl  dans  le  pays  des  (irisons,  qu'elle  soil  hors  de  danger. Je 

du  royaume  de  Naples.  Il  épousa  la  fille  du  duc  dr  .Manlouc.  Isabelle,  cl  mourul 
en  1571. 
(1)  Le  conilc  Alberico  «le  Lodronc,  commandant  d'un  corps  allemand. 


MARS    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  ±25 

viens  d'avoir  une  lettre  de  Monsieur  de  Selve  du   sixiesme  do  ce 
moys   qui   me  mande   que   Monsieur  de   Guise  n'avoit   peu  avoir 
encores  auleune  resolution  du  Pape  de  ce  qui!  avoit  a  faire  (1).  Icy, 
Monseigneur,  ny  a  rien  de  nouveau  digne  descrire. 
De  Venise  ce  unziesme  jour  de  Mars  1557. 

(Ms.  de  Grenoble,  fol.  54  v°  . 


GABRE    AU    MOI 

171.  —  [Venise],  Il  mars  1557.  —  Sire,  Monseigneur  le  Duc  de 
Ferrare  arriva  hier  icy,  qui  fut  receu  de  la  Seigneurie  a  leur  ma- 
nière accoustumée  avec  le  Buxentore;  il  ne  m'avoit  mandé  de  sa 
venue  ne  de  ce  qu'il  y  avoit  a  faire,  dont  on  parloit  en  cette  ville 
assès  diversement  ;  je  ne  scavois  qu'en  penser,  toutesfois  je  l'en- 
voyay  rencontrer  en  chemin  et  luy  escrivis  que  si  j'estois  hon  a  faire 
quelque  service  à  sa  négociation,  fut  pour  Voslre  Majesté  ou  pour 
son  particulier,  je  ne  manquerais  jamais  de  mon  devoir,  et  que  s'il 
avoit  puissance  de  me  commander,  j'avois  encore  meilleure  vollonté 
de  luy  obéir.  Il  ne  me  fist  a  cela  aucune  responce  par  mon  homme 
qui  fut  cause  que  je  ne  me  voullus  ingérer  plus  avant,  et  n'allay 
point  autrement  au  devant  de  luy,  mais  demeuray  avec  la  Seigneu- 
rie ;  et  après  qu'il  fust  arrivé  en  sa  chambre,  je  luy  parlay  fort  lon- 
guement, ou  il  me  dict  asses  franchement  qu'il  ne  venoit  icy  que 
pour  visiter  ces  Seigneurs  et  leur  oster  toutte  mauvaise  opinion  ou 
soupçon  de  son  faict,  et  que,  s  y  moy  qui  les  avoit  pratecqués  lon- 
guement, voyoisquil  fust  bon  qu'il  les  recherchas!  de  quelque  chose 
pour  vostre  service,  il  estoit  prest  de  le  faire,  mais  qu'il  seroit  fort 
content  de  ne  leur  parler  poinct  de  ligue,  s'il  pensoil  en  estre  refusé 
pour  ny  mettre  de  vostre  réputation  et  de  la  sienne.  Je  luy  dis  que 
je  n'avois  aucun  commandement  de  Vostre  Majesté  de  les  recher- 
cher de  rien  et  que  je  les  avois  essaiez  par  tant  de  sortes  que  je 
n'en  esperois  plus  rien,  mais  que  son  autorité  et  sa  présence  pour- 
roient,  par  avanture,  plus  que  Unis  nous  autres  qui  nous  en  estions 
mesles,  et  qu'il  voyoit  en  vostre  service  et  en  touttes  choses  plus 
clair  que  moy.  par  quoy  je  me  remettois  de  les  rechercher  ou  non 
a  sa  prudence  et  bon  jugement;  qu'il  est  vray  que  la  chose  du 
monde  qui  me  faisoit  le  plus  croire  qu'ils    sont   tous  résolus  de  ne 

(1)  Le  désaccord  régnait  entre  le  cardinal  Carafa  et  le  duc  de  Guise  au  sujet 
du  plan  de  campagne-  Guise  voulait  que  la  Lombardie  et  le  Piémont  lussent  le 
théâtre  immédiat  des  opérations;  le  cardinal,  au  contraire,  voulait  que  les  troupQS 
françaises  se  portassent,  de  suite,  à  la  défense  de  l'État  ecclésiastique.  C'est  à 
ce  malheureux  plan  que  se  rallia  de  Guise. 

19 


226  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1557] 

se  mouvoir  contre  le  Roy  Philippe  est  que.  s'ils  eussent  eu  quelque 
volonté  de  se  mettre  en  vostre  ligue,  ils  n*auroient  pas  esté  si  mal 
advises  de  donner  passaige  a  lant  de  régiments  d'Allemants,  qui  ont 
passes  et  qui  passent  tous  les  jours,  pour  avoir  après  a  les  combat- 
tre. Je  croyois,  quant  a  moy,  qu'on  se  debvoit  bien  contenter  d'eulx 
pourvu  quils  demeurent  en  leur  neutralité  comme  je  veulx  espérer 
quils  feront;  ledit  Seigneur  Duc  me  dicl  quil  estoit  forcé  qu  il  s'en 
retournast  bientost  ches  luy  pour  donner  ordre  a  ses  affaires  estant 
menasse  d'avoir  la  guerre  en  son  estât,  el  que  le  régiment  du  Comte 
de  Lodron  qui  passa  avant  hier  sur  Vérone,  après  le  chemin  de 
Casai  Major  et  non  du  Piedmont,  attendoit  un  courrier  quil  avoit 
envoie  vers  Vostre  Majesté  et  un  autre  vers  Monseigneur  de  Guise 
pour  avoir  resollution  de  beaucoup  de  chose,  el  après  se  resouldra 
de  ce  quil  aura  a  faire.  11  est  vray  qu'il  dit  quil  se  defendroil  très 
bien  des  forces  des  ïmpériaulx  s'il  ne  craignoit  le  travail  que  luy 
peult  donner  le  Duc  de  Florence  et  que  si  vous.  Sire,  ne  le  dé- 
tendes, il  se  voit  reduict  a  forl  mauvais  termes;  il  faict  -on  compte 
pour  ne  perdre  point  tamps  ny  d'avoir  demain  son  audience  secrette 
et  n'en  veut  point  autremenl  de  publicque  retourner  lundy,  et.  quand 
il  sera  party  d'icy,  je  vous  donneroi  advis,  Sire,  comme  toutes 
choses  seront  passées  au  moien  de  ce  que  j'en  pourrai  entendre. 
Monseigneur  de  Guise  laissa  a  Ferrare  un  Commissaire  ordinaire  ci 
le  cappitaine  Pacquier  pour  taire  les  monstres  de  mondict  Seigneur 
le  Duc  et,  a  ce  qu'il  me  dict,  il  n'y  a  jamais  eu  dordre  d'arrester  la 
forme  du  paiement  de  -a  garnison,  ne  voulant,  ledit  Seigneur  Duc. 
se  contenter  quils  soient  payes  comme  le-  autres  Italiens  qui  ser- 
vent la  ligue.  Sire,  je  despechay  l'autre  .jour  Monsieur  de  Chemans 
vers  Monsieur  le  Mareschal  de  Brissac  pour  la  praticque  que  menue 
Scipion  de  Castro,  lequel  se  trouve  a  Padou,  et  m'escripvit  hier  une 
lettre  de  quelque  provisoin  que  le  personnage  demande,  laquelle, 
Sire,  je  vous  envoyé  avec  la  présente,  s'il  \oiis  plaist  la  faire  lire. et 
regarder  après  avoir  eu  l'advis  de  M p  le  Mareschal  de  Brissac,  ce 
qu'il  vous  plaira  d'en  l'aire.  Ou  parle  d'embarquer  quelques  Alte- 
rnants a  Triesl  1)  pour  les  iraguetter  _  par  cette  mer  Adriatique 
au  Royaume  de  Naples  ci.  dict  on,  que  pour  favoriser  le  passage, 
doibvenl  venir  dans  le  golfe  de  ces  Seigneurs  un  nombre  de  sal- 
ières imperialles,  chose  que  le  Grand  Seigneur  trouvera  fort  mau- 
vaise et  ces  Seigneurs  s'en  pourroient  un  jour  repentir,  et  si  je  voy 
quils  le  consentent    je  ne   fauldray  de   le  leur  dire  et   d'en  adverlir 

avec  Monsieur  de  la  Vigne,  duquel  il  n'y  a  encores  icy  aulcunes  ÛOU- 

(1)  Triostc,   ville  forte  et   porl   de  l'Illyrie,  sur  le  golte  de  ce    nom.   dana 
L'Adriatique. 

(2)  Tra^ueltcr  :  de  l'italien,  traghettare,   traverser,  passer  d'un  endroit  à  un 
autre,  transporter. 


[MARS    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  227 

velles,  et  j'en  suis  fort  esbahy;  de  Monseigneur  de  Guise,  nous  n'en 
avons  encores  iey  aucunes  nouvelles  depuis  son  arrivée  a  Rome  ;  je 
luy  ay  envoyé  tout  l'argent  quil  m'a  demande  pour  ce  mois  de 
Mars,  qui  est  justement  le  tiers  de  trois  cens  cinquante  mil  escus  du 
second  depost  dont  il  fera  telle  part  qu'il  luy  plaira  a  ceulx  de  Rome 
et  a  ceux  de  Toscane  ;  ceste  armée  est  es  environ  de  Romini  (1)  et 
Nerena  (2)  et  ne  scay  encores  ou  ils  auront  resoleu  de  l'emploier, 
qui  est.  Sire,  tout  ce  que  je  vous  scaurois  dire  pour  cette  heure. 
De  Venise  ce  \ie  de  Mars  15o7. 

fMs.  de  Grenoble,  fol.  10"  v. 


CABRE    AU    DUC    DE    FKRRARE 

172. —  Venise],  19  mars  1557 .  —  Monseigneur,  ce  porteur  vous 
va  trouver  pour  avoir  de  Vostre  Excellence  acquits  de  beaucoup  de 
despences  quil  a  faictes  par  vostre  commandement  :  il  vous  plaira 
ne  trouver  point  mauvais  si  je  vous  disque  telles  choses  se  doihvent 
depescher  promptement  qu'on  en  aye  la  mémoire  fresche,  et  quil 
est  fort  dangereux  de  les  remettre  en  longueur:  pour  ceste  cause, 
il  vous  plaira  veoir  ce  quil  en  a  dressé  et  le  depescher  de  ce  que 
Vostre  Excellence  trouvera  véritable  et  raisonnable.  Je  fus  hier  matin 
en  Collège  pour  entendre  au  vray  de  ces  Seigneurs  ce  quils  avoient 
eu  du  Levant  ;  ils  ont  faict  semblant  de  n'avoir  eu  le  loysir  d'en 
tirer  les  sommaires,  et  m'en  ont  dict  quelques  petits  points  de  peu 
de  conséquence,  et  remis  a  une  autre  fois  a  m'en  faire  plus  certaine 
communication.  De  Monsieur  de  la  Vigne,  je  n'en  ay  rien  eu.  et  de 
Rome  Vostre  Excellence  aura  entendu  la  promotion  des  Cardi- 
naulx  (3)  a  jour  extraordinaire  et  si  le  Roy  ny  a  eu  grand  part,  cela 
seroit  bien  aysé  a  supporter,  mais  que  sa  repputation  fust  un  peu 
mieulx  aydée  par  ceulx  qui  sont  cause  de  l'avoir  faict  passer  sy 
avant.  Je  n'ay  rien  de  nouveau.  Monseigneur,  de  la  Cour  ny  d'ail- 
leurs. 

De  Venise  ce  dixneufviesme  de  Mars  1557. 

(Ms.  de  Grenoble,  loi.    19  v   . 

(1)  Rimini.  ville  forte  d'Italie,  près  de  l'embouc hure  de  la  Marccchia,  dans 
l'Adriatique. 

(2i  Monte  Nerena  :  Apennins),  à  côté  de  Benevente. 

i3;  La  promotion  de  cardinaux  à  laquelle  du  Gabre  fait  ici  allusion  eut  lieu  le 
15  mars.  Le  garde  des  sceaux  de  Fiance  Jean  Bertrand.  Lorenzo  Strozzi,  frère 
du  maréchal.  Alphonse  Carafa,  fils  du  marquis  de  Montebello,  Antoine  Trivulce, 
archevêque  de  Toulon,  et  six  autres  personnages  reçurent  la  pourpe  romaine 
dans  cette  cérémonie.  Sur  ces  dix  nouveaux  membres  du  Sacré-Collège,  les 
quatre  premiers  étaient  manifestement  dévoués  à  la  France  :  les  six  autres  devaient 


NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1557] 


GABRE   AU    ROI 

173. —  [Venise],  20  mars  1557. —  Sire.  Monseigneur  le  Duc  de 
Ferrare  partist  d'icy  l'aultre  jour,  nions  tiant  d'estre  pressé  et  avoir 
grande  haste,  pour  luy  estre  venu  nouvelles  que  les  Alternants,  qui 
estoient  a  Cazal  Major,  passoient  le  Po,  et  que  Monsieur  le  Prince 
son  fils  estoit  aile  a  Modena  pour  remédier  a  touttes  choses,  si  da- 
venture  on  voulloit  faire  la  guerre  en  son  estât;  depuis,  il  ne  s'en 
est  icy  entendu  autre  chose  qui  l'a i c t  croire  que  ces  Allemants, 
comme  aussy  le  hruict  en  estoit.  passoient  en  Toscane,  chose  qui 
duht  oster  au  Pape  toutte  espérance  a  lapraticque  de  Florence.  Ledit 
Seigneur  Duc  ne  vist  la  Seigneurie  qu'une  fois,  et  puis  quant  ilsalla 
licentier  sur  cette  hoste,  a  heure  du  soir  non  accoustumée,  telle- 
ment que  toutte  sa  négociation  n'a  esté, a  mon  advis,  et  par  ce  que 
j'en  ay  peu  entendre,  que  excuses  de  sa  déclaration  et  parolles  gene- 
ralles  entre  voisins,  et  de  inesrne  luy  a  aussi  esté  respondu.  Au  reste, 
Sire,  il  n'y  a  jamais  eu  ordre  d'accorder  avec  luy  la  forme  et  lestât 
des  payera ens  de  sa  garnison,  encores  que  Monseigneur  de  Guise 
eut  laisse  auprès  de  luy  Monsieur  de  Jacquier,  commissaire  ordi- 
naire des  guerres,  pour  cet  effect,  car,  en  touttes  façons,  ledit  sieur 
Duc  vouloit  1  argent  estre  mis  entre  ses  mains  et  ne  permettre  que 
nous  fissions  paier  par  vos  ministres  les  soldats  a  la  banque.  .Nous 
luy  avons  remonstre,  et  réplicqué  fort  souvent,  que  c'esloit  altérer 
et  contrevenir  a  vus  loix  et  ordonnances,  el  que  nous  autres  minis- 
tres ne  pouvions  faire  cela  -ans  expresse  dispence  de  Vostre  Majesté 
ou  sans  nous  mettre  en  grand  danger;  mais  il  a  este  obstine  a  cela. 
et  faisoit  de  grandes  protestations  contre  vous,  tenant  certains  lan- 
gaiges  asses  fascheux.  de  sorte  que.allin  que  ledit  sieur  n'eust  point 
la  dessus  occasion  de  faire  ce  qu'il  disoit,  nous  advisasmes,  ledit 
banquier  et  moy,  de  luy  faire  bailler  ce  que  pouvoil  mouler,  a  peu 
près,  la  despence  de  sa  garnison  pour  ce  mois  de  Mars  en  payement 
et  déduction  des  trente  mille  escus  quil  presta  comptant,  il  y  a 
environ  dixhuicl  mois,  qui  luy  -oui  encores  deus,  et  si  Vostre 
Majesté  se  contentera  que  cela  soit  pour  son  dit  payement  de  Mais. 
il  se  tiendra  pour  receu  et  a  bon  compte,  et  en  a  baillé  aussj  sa  pro- 
messe. Quant  au  mois  d'Avril  si  Vostre  Majesté  ou  mondict  sieur 
de  Guise  ne  le  commande  de  nouveau,  je  n  ay  pas  intention  de  luy 
rien  payer,  parce  que  Vostre  Majesté  ne   m'en  a  jamais  rien  com- 

leur  nomination  à  l'influence  personnelle  du  cardinal  Carafa:  c'est  assez  dire 
qu'ils  avaient  été  choisis  parmi  les  détenseurs  de  la  politique  française.  Le  roi 
de  France  mail  donc  lieu  d'èlre  1res  satisfait  de  cette  promotion- 


[MARS    1557]  DOMINIQUE    DU   GABRE  229 

mandé  ny  ne  luy  eusse  pas  faict  bailler  cest  argent,  si  Monsieur  de 

Guise  n  eust  commandé  qu'on  ne  faillist  pas  de  luy  paier  ce  mois  de 

Mars  pour  la  grande  plainte  que    ledit   sieur  Duc  luy  en  avoit  faict. 

Sire,  ces  Seigneurs  ont  eu  lettres  du   Levant  du  vingtiesme  de  Feb- 

vrier,  comme    Monsieur  de  la  Vigne   estoit   arrive  a  Andrinople   le 

quatriesme,  et  avoit  desja  parle  deux  fois  au  Bascba  (1);  touttefois, 

je  n'ay  encore  aulcunes  de  ses   lettres  et  est  impossible  quil  n'en 

vienne  bientost.  Le  Grand   Seigneur  s'en  alloit  faire  une  chasse  ge- 

neralle,  et  l'on  faict  compte  qu'il  demeurera  bien  quarante  jours  sans 

ouyr  parler  daffaires,  et  preparoit  on  louttefois  l'armée  de  mer.  De 

guerre  en  Hongrie,    il  ne  s'en   parloit  aucunement.  Monseigneur  de 

Guise,  vous  aura  faict    entendre,  Sire,  les  résolutions  de  Rome,  qui 

sont  bien  longues  a  son  très   grand  regret,  a  mon  advis  ;  a  latin,  le 

Pape  sest  resoleu  a  taire   nouvelle  promotion  de  Cardinaulx,  entre 

lesquels  est  Monsieur  de  Tolon  (2  ,  qui  estoit  icy  légat,  lequel,  Sire, 

vous  sera  toujours  affectionne  et  fidelle  serviteur,  aucun  que  aucun 

aultre  de  tout  le  collège,  comme   ont  este  tous  ceux  de  sa  maison. 

Je  pense  que   ledit  sieur   de  Guise    sera  bientost  de  retour  en  son 

camp,  lequel  est  encore  en  Romaigne,  et  icy,  Sire,  pour  ceste  heure 

ny  a  autres  nouvelles  dignes  descripre. 

De  Venise  ce  vingtiesme  Mars  1557. 

(Ms.  Grenoble,  fol.  55  r°). 


GABRE    AU    DUC    DE   GUISE 

174.  —  [Venise \,  29  mars  loôl.  — Monseigneur,  je  receuz  hier 
au  soir  un  pacquet  de  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare  ou  il  y  avoit  un 
paquet  du  Roy,  et  une  lettre  vostre  de  Rome  du  20  mars,  en  laquelle 
il  y  a  quelque  mention  de  m'avoir  donne  quelque  adviz  de  vos 
négociations  a  Rome  par  les  despeches  de  Marseille  et  de  Monsieur 
du  Manne  (3  :  mais  je  n'en  ay  rien  veu  et  s'il  y  a  eu  des  lettres  de 
Vostre  Excellence,  pour  moy  elles  ont  été  portées  en  France,  et 
voyant  que  Monsieur  de  Carnavalet  (4)  ne  vaut  point,  et  que  je  n'ay 
aucun  estât  ni  nouvelle   de  ce   quil  vous   faut  pour  l'assignation 

(1)  Pacha. 

(2  Antoine  Trivulce,  archevêque  de  Toulon  en  1528,  par  démission  de  son 
oncle  le  cardinal  Augustin  :  en  I5ii  vice-légat  d'Avignon  ;  cardinal  en  1557,  alors 
qu'il  était  nonce  à  Venise;  mort  le  26  juin  1559. 

[3    François  de  Bellier,  abbé  de  Manne. 

(  i  François  de  Kemovenoyou  Carnavalet,  chevalier  de  l'Ordre  du  Roi.  premier 
écuyer  <le  Henri  II.  chef  du  Conseil  et  surintendant  du  duc  d'Anjou  ;Henn  lit); 
mourut  en  1511.  Sa  veuve,  Françoise  de  la  Baume,  acheta  du  fils  du  Président 
de  Lignières  le  célèbre  hôtel  de  Paris,  construit  par  Androuet  du  Cerceau  et 
connu,  depuis,  sous  le  nom  d'hôtel  Carnavalet. 


230  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1557] 

davril.  Je  feray  demain  partir  pour  Anconne  un  tiers  de  nostre  depost 
a  la  reserve  de  vingt  mil  escus  quil  faut  pour  payer  un  quartier  des 
hommes  d'armes  de  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  et  le  reste  de 
la  garnison  ordinaire  pour  le  mois  d'avril,  emsemble  aussi  la  garni- 
son de  la  Mirandolle  et  le  reste,  montant  a  quatre  vingt  seize  mil 
escus.  vous  sera  envoyé  entièrement  pour  le  distribuer  en  vosire 
armée  en  la  Romaigne  et  en  Toscane,  ce  qui  est  nécessaire.  Au 
reste,  le  Roy  me  mande  d'aller  trouver  le  Duc  de  Ferrare  pour  ter- 
miner toutes  les  difficultés  quon  a  avec  luy  (1).  mais  jay  nécessai- 
rement affaire  icy  pour  recouvrer  et  envoyer  tout  vustre  assigna- 
tion, et  pour  la  venue  de  Monsieur  de  Montmorency  qui  vient  loger 
chez  moy,  de  sorte  que  je  me  suis  excusé,  a  mondit  Sieur  le  Duc, 
de  ne  pouvoir,  pour  ceste  heure,  aller  devers  luy,  et  pour  en  parler 
franchement,  aussy  iray  je  mal  volontiers,  estant  las  de  n'ouyr  par- 
ler de  son  particulier  et  rien  d'aucun  ayde  au  service  du  Roy,  et 
d'autant  plus  que  Sa  Majesté  nous  laisse  en  mesmes  termes  que 
nous  estions  pour  le  temps  de  guerre,  ne  mettant  aucun  règlement 
sinon  au  temps  de  paix  et  de  trêve,  et  Monsieur  le  Duc  veut  en  tout 
temps  avoir  l'argent  de  sa  garnison  entre  ses  mains  et  payer  ses 
gens  comme  il  l'entend.  Je  luy  escris  qu'aucun  ministre  du  Roy  ne 
peut  changer  les  loix  et  ordonnances,  et  la  police  observée  de  tout 
temps  en  semblables  choses,  s'il  n'y  a  dispence  et  commandement 
exprès  du  Roy,  et  je  ne  scais  si  vous  mesmes,  qui  avez  toute  autho- 
rité  le  voudriez  entreprendre  :  parainsy,  quil  luy  plaise  se  resouldre 
a  laisser  faire  les  monstres  et  payemens  aux  ministres  du  Roy 
comme  on  a  accoustumé,  autrement  que  sa  garnison  ne  sera  poinct 
payée.  Je  luy  envoyé  un  homme  expies  pour  cest  effect  et  ne  scay 
ce  quil  y  fera.  11  se  dit  icy,  et  vous  m'escrivez  aussi  un  mot  de  vos- 
ire voyage  de  Naples.  On  parle  encore  dune  révolte  d'Atrye  (2)  :  sy 
cela  estoit,  ce  seroit  un  grand  advancement  et  grande  espérance 
pour  vostre  armée,  laquelle  pourroit  trouver  la  beaucoup  de  vivres 
et  de  commoditez.  Quant  aux  autres  choses  que  Vostre  Excellence 
avoit  a  faire  a  Rome,  ceste  longueur  qu'on  vous  y  a  tenue  est  gran- 
dement fâcheuse  et  préjudiciable  au  Roj  el  a  eux  mesmes,  et,  a 
l'avenir,  je  louerois  fort  que  vous  prinsiez  conseil  et  resolution  de 
vous  mesme,  autrement  vous  mettrez  vostre  réputation  et  les  affai- 
res du  Roy  avec  son  armée  en  grand  danger.  Je  vous  envoyé.  Mon- 
seigneur, une  despeche  de  Monsieur  de  Lavigne  qui  a  despeche  un 
homme  au   Roy,  du  22  février,  el  depuis   en  est  encore  venu  un 

1)  Hercule  se  détachait  insensiblement  de  la  Ligue;   la  possibilité  d'une  telle 
détection,  survenant  après  celle  d'Octave  Faroèse,  inquiétait  à  bon  droit  M.  de 
Lodève,  qui  prévoyait  que  c'en  était  fait  de  l'alliance,  si  le  due  de  Ferrare  passait 
à  la  cause  du  roi  d'Espagne. 
(2)  Atri,  ville  d'Italie,  à  30  lui.  de  Teramo. 


[MARS    1537]  DOMINIQUE   DU    GABRE  231 

autre  du  Ie'- Mars,  et,  en  effet,  les  nouvelles  de  la  Porte  sont  que 
l'armée  sortira  plus  forte  qu'elle  n'a  encores  faict,  mais  que  cest 
pour  estre  employée  en  leurs  affaires  d'Affrique  et  de  Iloran  (1),  en 
quoy  elle  fera  la  mesme  faveur  aux  affaires  du  Roi  que  si  elle  venoit 
pour  vous,  tenant  les  forces  de  l'ennemy  occupées  a  la  marine  de 
Naples  et  de  Sicile,  et  la  mer  seure  pour  nous  et  suspecte  a  l'en- 
nemy, et  disent  davantage  qu'elle  sortira  de  bonne  heure,  tous  les 
gens  de  Rome  estant  déjà  commandez.  Qu'est  tout  ce  que  je  seau- 
rois  vous  dire  pour  ceste  heure. 
De  Venize  ce  29  Mars  1557. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  23236,  fol.  491)  (Mém.  du  duc  de  Guise,  p.  342). 


cabre  au  duc  de  ferrare 

175.  —  [Venise],  'J9  mars  Jôô7 .  —  Monseigneur.  Je  receus,  cette 
nuict  passée,  le  pacquet  qu'il  vous  a  pieu  m'envoyer  par  vostre 
courrier,  ou  ilyavoit  un  pacquet  du  Roy  avec  quelque  resolution  de 
vos  affaires,  mais  non  pas  telle,  a  mon  gré,  comme  il  feroit  de  besoin 
pour  nous  mettre  tous  hors  de  peine  et  de  disputes.  Je  vous  feusse* 
Monseigneur,  allé  trouver  pour  vous  en  faire  communication,  si  ce 
n'estoit  deux  empeschemens  que  j'ay  nécessaires  pour  huict  ou  dix 
jours;  le  principal  est  de  recouvrer  l'assignation  d'Avril  et  de 
donner  ordre  de  l'envoyer  à  Monseigneur  de  Guise  qui  m'en  faict 
fort  grande  instance,  l'aultre,  que  les  gens  de  Monseigneur  de  Mont- 
morancy  sont  desja  icy,  et  attendent  l'heure  qu'il  arrive  et  venant 
logés  chés*  moy,  je  ne  voudrois  qu'il  pensast  que  je  me  feusse 
absenté  pour  ne  luy  voulloir  faire  service  et  bonne  chère,  et  vous 
vouloys  envoyer  pour  ceste  cause  mon  secrétaire;  mais  il  est  bien 
fort  mallade,  pourquoy  je  vous  envoyé  le  commis  du  Gard,  présent 
porteur,  avec  coppie  d'un  brevet  de  déclaration  de  Sa  Majesté  sur 
vostre  faict  particulier,  et  l'original  vous  sera  baillé  quant  il  vous 
plaira  signer  et  m'envoyer  la  promesse  réciproque  que  le  Roy  veult 
avoir  de  Vostre  Excellence,  laquelle  aussy  je  vous  envoyé  par  ledit 
du  Gard,  pour  la  signer  et  faire  sceller,  s'il  vous  plaist,  car  sans  cela 
je  ne  me  dois  dessaisir  de  lautre,  ny  vous  faire  bailler  aucun  argent, 
et,  dès  que  ledit  Dugard  me  laura  envoyée,  je  feray  partir  ce  quil 
fault  pour  payer  vos  hommes  d'armes  pour  un  quartier,  et  le  reste 
de  garnison  pour  avril,  si  mondit  Seigneur  de  Guise  ne  me  com- 
mande, cependant,  chose  contraire  a  cela.  Vous  verres,  Monseigneur, 
par  ladite  déclaration,  que  le  Roy  faict  de  sa  vollonté  que  Sa  Majesté 

(1)  Oran. 


232  NÉGOCIATIONS    DE  [MARS    1557] 

ne  vous  donne  reigiement,  sinon  en  temps  de  paix  et  de  trefve, 
auquel  Ion  vous  payera  en  cette  ville  xxvm  escus  par  quartier,  sur 
lesquels  seront  payés  par  les  ministres  du  Roy  vos  cent  hommes 
d*armes  qui  feront  monstre  et  serment  a  Sa  Majesté,  et  le  reste  sera 
mis  entre  vos  mains  pour  payer  vos  gens  de  pied,  chevaux  légers 
et  vostre  estât  et  de  vostre  Lieutenant  en  la  façon  que  vous  voudres; 
mais,  quant  au  temps  de  guerre,  nous  demeurons  toujours  aux 
mesmes  termes  ou  nous  estions,  car  nous  voulions  payer  vostre 
garnison  a  la  bancque  comme  le  Roy  faict  pour  tous  ses  soldats,  et 
ne  le  pouvons  faire  autrement,  et  vous  voullés  avoir  l'argent  entre 
vos  mains  pour  les  faire  payer  a  vostre  façon,  vous  ne  trouvères 
ministres  du  Roy  qui  consente  jamais  a  cela  sans  expresse  dispense 
de  Sa  Majesté,  car  cest  contrevenir  a  toutes  ses  loix  et  ordonnances, 
et  changer  nos  polices  et  ordres  aux  payemens  des  gens  de  guerre. 
et  ne  scay  si  Monseigneur  de  Guise  mesme,  qui  a  loutte  autorité. 
le  vouldroit  entreprendre,  et,  résolves  vous,  Monseigneur,  s'il  vous 
plaist,  de  laisser  passer  cela  de  ceste  façon,  autrement  vous  mesmes 
serés  cause  de  la  longueur  et  empeschement  si  vostre  garnison  ne 
sera  point  payée.  Quant  a  ce  qui  vous  est  deub  pour  les  mois  de 
Novembre  et  Décembre  a  raison  du  temps  de  trefve,  en  Janvier  et 
febvrier,  a  raison  de  la  cappitulation.  et  aussy  pour  la  despence  de 
vostre  levée  de  trois  mil  hommes  de  pied,  Monsieur  de  Lanssac, 
a  son  arrivée  a  la  cour,  leur  bailla  un  estai  dont  il  fus!  parlé  en 
vostre  garde  robbe  a  Reggio,  sur  lequel  ils  ont  faict  le  compte  que 
Sa  Majesté  vous  doibt  pour  sa  part  lxxi1"  i.xxiim  1.,  desquels  t'insem- 
ble  des  xxxm  escus  du  prest  dont  vous  avés  l'obligation  de  Messieurs 
les  Cardinaulx  de  Lorraine  et  de  Tournon.  Sa  Majesté  me  mande  que 
le  General  d'Elbene  a  promis  el  s'est  chargé  de  les  rembourcer  et 
quil  luy  en  a  esté  ou  sera  baillé  assignation,  et  je  croy  que  1.  dit  d'El- 
bene vous  en  pourra  escripre  bientost,  et  a  moy  aussy.  et  ont  faict 
leur  compte  aussy  la  dessus,  que  le  Pape  vous  doit  pour  sa  part 
xxxm  vc  n  1.,  desquels  ils  disent  que  mondil  Sieur  de  Guise  a  pris 
charge  vous  faire  rembourser  par  les  ministres  de  Sa  Sainteté. 
Mondit  Sieur  de  Guise  me  mande  que  Monsieur  de  Carnavalet 
debvoit  bientost  passerpar  icy  et  m'apporter un  estai  du  reigiement 
de  toutes  nos  despences,  tels  qu'ils  l'ont  arresté  a  Rome,  qui  est 
aussy  cause  que  je  ne  puis  abandonner  ce  lieu  icy  quil  n'ave  passé; 
nous  avons  eu  lettres  de  Levant  du  premier  de  Mars  et  Monsieur  de 
La  Vigne  a  despeché  un  homme  exprès  au  Roy,  la  résolution  est 
certaine  que  l'armée  sortira  en  plus  grand  nombre  qu'elle  n'a  en- 
cores  faict  ;  il  est  vray  qu'ils  la  veullent  premièrement  employer  en 
leurs  affaires  d'Africque  et  de  Horan,  mais  elle  fera  la  même  faveur 
a  nos  affaires  que  si  elle  ne  venoit  que  pour  nous  et  tiendra  la  hum 


[MARS  1557  DOMINIQUE  DU  GABRE  233 

seure  pour  nous   et   suspecte  a  l'ennemy;  qui  est,  Monseigneur, 
toutes  les  nouvelles  qu'on  a  icy  pour  ceste  heure  en  me  recomman- 
dant très  humblement  a  vostre  bonne  grâce. 
De  Venise  ce  vingt  neufviesme  Mars  1557. 

Mv.  de  Grenoble,  fol.  50  r°). 

GABRE    AU    CONNÉTABLE 

176.  —  [Venise  ,  31  mors  1557.  —  Monseigneur,  s'estant  présenté 
la  commodité  du  parteinent  de  Monsieur  Derdoy  (1),  présent  por- 
teur, je  luy  ay  baille  un  pacqnet  que  je  reçus  hier  de  Levant,  et  a 
ce  que  je  voy,  on  peult  tenir  pour  certaine  l'yssue  de  l'armée  et  en 
espérer  quelque  service,  d'autant, que  un  qui  vienl  delà, ma  dicl  que 
Monsieur  de  la  Vigne  et  Monsieur  de  Cottignac,  qu'estoient  emsem- 
ble  a  Andrinople,  faisoient  compte  de  venir  tous  deux.  Sur  ladite 
armée,  il  n'y  a  encores  icy  nouvelles  que  Monsieur  de  Guise  soit 
party  de  Rome,  et,  par  la  dernière  lettre  quil  m'a  escripte,  il  estoit 
autant  resoleu  de  ce  quil  avoit  a  négocier  avec  le  Pape  comme  le 
premier  jour  qu'il  y  arriva,  qui  est  une  longueur  fort  préjudiciable 
a  ceste  pauvre  armée,  et  aux  affaires  communs  du  Roy  et  du  Pape. 
Je  reçus,  hier,  une  despeche  du  Roy  du  quatorziesme  de  Mars,  pour 
le  faict  de  Monseigneur  le  Due  de  Ferrare,  lequel  je  n'ay  peu  aller 
voyr  pour  estre  icy  occupé  a  recouvrer  et  envoyer  l'argent  de  l'assi- 
gnation dAvril  pour  touttes  ces  dépenses  dllalye  et  mesme  pour  la 
grande  presse  que  m'en  faict  mondit  sieur  de  Guise,  mais  j'ay 
envoyé  un  homme  a  Ferrare  avec  bonne  instruction  de  tout  ce  que 
le  Roy  me  commande  faire,  bien  que  vous  nous  laisses  toujours  en 
dispute  et  en  différent  avec  ce  Prince  la,  ne  nous  ayant  baille  règle- 
ment sinon  a  temps  de  paix  et  de  trefve,  car,  en  temps  de  guerre 
comme  l'on  est  maintenant,  il  veult  sa  capitullation  luy  estre  obser- 
vée, comme  le  Roy  le  commande,  et  nous  le  luy  offrons  et  luy 
monstrons  quil  ne  tient  ne  a  bonne  volonté  ne  a  argent,  mais  il 
veut  que  les  ministres  du  Roy  luy  baillent  l'argent  par  ses  quietan- 
ces  pour  faire  après  parer  par  ses  ministres  les  gens  de  sa  garnison 
comme  ils  l'entendent  et  nous  luy  disons  que  c'est  rompre  touttes 
nos  loix  et  formalités  de  France,  et  que  le  commissaire  et  le  con- 
trolleur  doibvent  certifier  d'avoir  veu  faire  ledit  payement  en  leur 
présence  qui  seroit  une  faulceté  si  l'on  faisoit  comme  il  veut,  luy 
ayant  dit  franchement  que  s'il  ne  le  veult  laisser  faire  a  nostre 
usance,  luy  mesme  sera  cause  de  la  longueur  et  du  retardement  si 
sa  garnison  n'est  payée.  Je  ne  scay  comment  il  se  resouldra,  mais  je 

(1)  Dardois  ou  d'Arbois,  basque,  secrétaire  du  connétable. 


234  NÉGOCIATIONS   de  [avril    1557] 

vous  asseureray  bien,  Monseigneur,  quil  y  sera  procédé  de  telle 
sorte  qu'il  ne  se  pourra  plaindre  que  de  luy  mesme.  Monsieur  de 
Carnavalet  doibt  passer  bientost.  a  ce  que  m'escript  mondict  Sr  de 
Guise,  qui  vous  portera  touttes  nouvelles  de  Rome,  et  entre  autres 
choses  de  deçà,  qui  sera  cause  que  je  ne  vous  en  escriray  aultre 
chose  et  m'en  tairay,  encores  qu  1  y  ait  beaucoup  de  choses  a  dire. 
De  Venise  ce  trente  ungniesme  Mars  1557. 

Ms.  de  Grenoble,  fol.  16  v°). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

177.  —  [Venise],  11  avril  1557.  —  Monseigneur,  oultre  ce  que  je 
vous  ay  escript  par  le  sieur  Bendidio  (1),  je  nay  a  vous  dire  davan- 
taige,  sinon  quil  semble  que  ce  matin  on  aye  icy  nouvelles  certaines 
de  larrivee  de  quelques  gens  de  guerre  a  Correggio  (2t.  Je  scay  bien 
que  vous  cognoislrez  toutesfois  quelle  différence  il  y  a  do  ces  petit z 
seigneurs  la  et  de  leurs  voysins  a  vous,  et  s'il/,  sr  vantent  davoir  la 
laveur  dun  roy  Philipe,  vous  avez  la  protection  dun  aultre  Roy  qui 
ne  recognoist  poincl  de  supérieur.  Je  vous  suplye  très  humblement, 
Monseigneur,  vous  rejouyr  plustosl  de  ceste  bravade  que  do  vous 
en  fâcher,  et  croire  que  tous  commencemens  semblent  avoir  en  soy 
plusieurs  diticultez,  mais  si  quelcun  voulloil  dir  que  vous  oeussiez 
bien  commence  el  continue  la  guerre,  je  veulx  dire,  croire  et  asseurer 
que  vous  la  tinerez  fort  bien  et  avec  honneur,  grandement  et  con- 
tentement, et  sil  vous  vient  travail  digue  de  considération,  vous 
trouverez  et  le  Roy  et  tous  ses  ministres  affectionnez  a  vousdeffen- 
dre,  et  a  ayder  votre  grandeur  et  protection.  Monseigneur  de  Guyse 
nest  pas  si  loing  quil  ne  vous  puisse  bien  tost  revenir  trouver  et  le 
temps  et  les  afferes  le  requièrent,  chose  que  je  veulx  escripre  au 
Roy  et  audit  sieur  de  Guyse,  si  debvoir  luire,  .le  vous  suplye  très 
humblement  renvoyer  ce  pointeur  le  plustosl  quil  sera  possible  et 
hi\  depescher  ses  estatz  pour  les  despences  que  Votre  Excellence 
luy  a  commandées,  aultremenl  vous  le  mettries  en  nécessite.  Nous 
uavons  par  de  ca  aubaines  nouvelles  d importance,  pur  quoy  je  pré- 
sentera}' a  votre  bonne  grâce  mes  très  humbles  recommendacions. 

De  Venizo  ce  xie  davril  1557. 

Vich.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc. 


(l)  Bandidio  :  homme  du  cardinal  de  Ferrare.  [Lettre  du  cardinal  de  Ferrare  ta 
Roi:  «Comme  par  mon  homme  Bandidio,  etc.».    Mém.  -/</  <luc  de  Guise,  p.  168), 
(2V,  Correggio,  ville  d'Italie,  à  16  kit.  de  fteggio. 


[AVRIL   1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  235 


(JABRE    AU    DUC    DE    FERRARK 

178. —  [Venise],  17  avril  1557.  —  Monseigneur.  Je  viens  de 
recepvoir  ce  soir,  estant  en  contemplation  et  en  dévotion,  les  deux 
lettres  quil  vous  a  pieu  mescripre,  et  avois  trouve  estrange  que 
Votre  Excellence  neust  escript  ne  dit  a  du  Gard  chose  quelconques 
pour  responces  a  mes  lettres,  de  sorte  que  je  faisois  mon  compte  de 
ne  plus  continuer  cest  office.  Jay  veu  tout  ce  quil  vous  a  pieu  me 
scripre  sur  le  faict  du  travail,  ou  vous  dictez  estre  pour  avoir  la 
guerre  en  vostre  estât  et  du  deppotz  que  vous  desirez  du  Roy  pour 
cest  effect  suyvant  vostre  capitulation  et  de  la  protection  que  vous 
experez  de  Sa  Majesté  en  ce  grand  besoing,  et  quoy,  Monseigneur, 
je  ne  vous  respondray  que  deux  mots  :  Que  jay  advis  que  ceste 
masse  de  Corregio  s'est  retirée  en  Piedmont,  reserve  quatre  cens 
hommes  de  pied  quon  y  a  laysse  en  garnison,  et  quil  y  a  ceste  crue 
quon  ne  face  aulcun  acte  de  guerre  sur  vostre  estât.  Le  sieur  Camillo 
et  ce  jeune  enfant  de  leur  mayson  avec  les  vingt  citadins  de  Corre- 
gio qui  estoient  a  Carpi  (I)  vous  sont  tous  eschapez  des  mains  et  en 
quelque  façon  que  ce  ay  teste.  Ces  seigneurs  de  Corregio  font  leur 
debvoir  de  se  mettre  en  liberté  silz  peuvent,  et  fortifier  leur  place 
sans  empeschement,  puis  que  vous  ne  lavez  volleue  pour  vous, 
quant  vous  la  pouviez  avoir,  et  quant  ilz  estoient  faibles  et  sans 
protecteur,  ainsi,  je  creoy  quilz  seront  si  bien  advisez  de  ne  vous 
commencer  poinct  de  guerre,  et  vous  si  doulx  prince  que  vous  les 
lairez  en  paix.  Par  quoy  vous  n'aurez  aulcun  besoing  du  deppotz 
que  vous  demandez,  ny  de  layde  du  Roy  pour  vostre  protection,  et 
quant  au  post  scripto  qui  est  de  vostre  main,  je  vous  suplye,  Mon- 
seigneur, considérer  en  quel  estât  se  trouve  le  Roy,  en  quelle  des- 
pense il  est  entre,  et  quel  secours  il  tire  de  Vostre  Excellence  pour  vous 
avoir  accepte  a  son  service  ;  si  vous  ny  faictez  mieulx  quant  bien  le 
Roy  se  tayra,  Dieu  et  le  monde  fera  la  plaincte  pour  Sa  Majesté,  et 
pour  laysser  en  ces  sainctz  jours  les  afferes  du  monde  et  attendre 
ung  peu  a  la  conscience.  Il  vous  plaira  mexcuser  si  je  ne  vous  faiz 
plus  longue  lettre. 

De  Venize  ce  xvne  davril  au  soir  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleiïa  Ducale,  etc.). 
(1)  Carpi,  ville  d'Italie,  à  22  kil.  de  Modène. 


236  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1557] 


GABRE    AU    DUC    DK    FERRARE 

179.  —  [Venise],  20  avril  /  .3 .3  7 .  —  Monseigneur.  J"ay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  par  le  sieur  Bendidio,  lequel  ma  baille  la 
promesse  que  le  Roy  demandoit  de  Vostre  Excellence  signer  de  vos- 
tre  main,  el  je  lui  ay  aussi  baille  laultre  signée  aussi  de  la  main  de 
Sa  Majesté  pour  la  vous  porter.  Je  trouve  estranges  les  advis  que 
vous  avez.  Monseigneur,  de  ces  gens  de  guerre  que  les  Imperiaulx 
envoyent  a  Correguio.  et  ne  puis  croire  quilz  y  mettent  forces  bat- 
tantes pour  1ère  guère  en  vostre  estât,  car  ilz  ne  le  peuvent  faire 
sans  laysser  le  Piedmonen  prede(l  de  monsrle  Marescbal  [2)  qui  est 
de  ceste  beure  en  campaigne.  Il  pourroit  bien  estre  quilz  vouldronl 
metre  a  Correggio  quelques  gens  pour  vous  tenir  en  suspect,  et  en 
despence,  et  vous  proposer  nouveaulx  partiz  pour  se  descbarger  des 
obligations  quilz  vous  feroient  dernièrement  el  se  remectre  en  leur 
première  liberté.  Mais  vous  avez.  Dieu  mercy.  Monseigneur,  assez 
de  gens  de  guerre,  a  pied  et  a  cheval,  pour  les  garder  de  courre  sur 
vostre  pays  et  pour  tenir  vostre  frontière  en  seurete,  et  silz  dres- 
soient  l'orme  de  camp  pour  assiéger  quelcune  de  voz  places,  je  croy 
que  le  Roy  ne  fauldra  de  vous  secourir,  mais  que  vous  mesine. 
Monseigneur,  vous  aydiez  le  premier.  Je  vous  envoyé,  Monseigneur, 
le  commis  du  Gard  avec  le  payement  duu  quartier  pour  vos  cent 
hommes  darmes,et  pour  voz  aultres  garnisons,  pour  ce  mois  davril. 
luy  ayant  donne  charge  de  mettre  entre  voz  mains  les  estalz  des 
cappitaines  el  capesoldes  afin  que  vous  puissiez  appoincter  de  cela 
plus  grand  nombre  de  cappitaines  et  daultres  officiers  aux  compai- 
gnies  comme  vous  desirez.  El  >i  vous  ne  trouvez  bon  quil  paye  les 
soldats  a  la  banque,  il  mettra  largent  pour  ceste  foyz  la  ou  il  vous 
plaira  luy  ordonner  et  a  laultre  moys,  le  Roy  y  aura  nu-  quelque 
-  ieiiieni.  mais  si  fault  il  quoo  aye  oecesseremenl  ung  rolle  el 
le  nom-  de  [ou-  les  cappitaines  que  le  Roy  non-  paye,  et  de  chacun 
soldat  tant  prive  soil  il,  et  pour  ceste  cause  jenvoye  le  coutrolleur 
Marcati  qui  est  exercite  en  telles  choses,  les  estatz  que  Monseigneur 
Pacquier  vous  a  laissez,  seront  pour  ceste  foys  suivyz.  Et  quant  a 
ce.  Monseigneur,  qui  vous  est  deu  du  passe,  il  est  fort  raisonable 
que  b-  itu\  vous  en  paye,  ci  je  veoy  que  cesl  sod  intention,  mais  il 
est  bien  raisonable  aussy  que  vous  le  supportiez  et  attendiez  ce 
remboursement  pour  quelques  moys,  veu  le  grandz  afferes  que  Sa 
Majesté  a.  el  que.  Dieu  mercy,  \>>us  avez  biendequoy  vous  en  pas- 
ser ;  jay  escnptz  a  Sa  Map'- le  et  luy  envoyé  ung  estai  au  \ra\  de  ce 

(1)  Comme  butin. 

(2)  Le  maréchal  de  Brissac. 


[AVRIL    1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  237 

qui  vous  est  deu,  qui  monte  une  bonne  grosse  somme  et  ne  sera 
pas  peu  faict  si  le  Roy  veult  recognoistre  la  vous  debvoire  claire- 
ment et  se  charger  de  sa  contribution  et  de  celle  du  Pape  pour  vous 
mettre  bors  de  disputer  et  de  quereller  de  tout  le  passe,  et  allant 
ces  pourleurs  a  la  court,  il  vous  servira  et  aydera  grandement  a 
faire  entendre  le  tout  a  Messeigneurs  du  Conseil,  et  a  vous  en  1ère 
depescher  vostre  assignation.  Au  reste,  Monseigneur,  je  veoy  que 
Monseigneur  de  Guyse  ne  faict  aulcun  doubte  ne  difficulté  que  Vos- 
tre Excellence  ne  preste  au  Roy  111e  Lm  escus  quil  fault  a  ce  moys 
de  may  pour  fere  le  IIIe  deppotz,  du  quel  on  satisfera  aprez  au  des- 
pences de  l'armée  de  mon  dit  sieur  de  Guyse  et  aux  vostres,  et  je 
me  doubte  aussi  qu'a  la  court,  en  facent  leur  estât  pource  que  je  ne 
veoy  quon  parle  d'y  proveoir  par  aultre  voye,  combien  que  déjà 
nous  nayons  icy  plus  dargens  pour  satisfaire  a  la  moytie  du  moys 
de  may.  Et  je  veulx  espérer,  Monseigneur,  que  vous  le  ferez  pour 
inonstrer  au  Roy  par  efi'ect  la  grande  affection  que  vous  avez  a  son 
service,  et  aussi  que  vous  promissez,  lors  que  la  cappitulaction  se 
traicta  a  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine  de  fere  ce  prest  et 
avez  encores  en  voz  mains  la  cedulle  entière  de  mon  dit  sieur  le 
Cardinal  de  Lorraine,  de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon  et  de 
monsr  Davanson  pour  la  somme  de  mc  m  escus,  et  jay  vue  promesse 
que  vous  feitez  de  cesle  heure,  la  signer  de  votre  main  que  vous 
me  delivreries  ceste  somme  la,  toutes  fois  et  quantes  que  je  la  vous 
denuinderois.  Maintenant,  Monseigneur,  il  en  seroit  temps  et  vous 
supplye  très  humblement  de  fere  entendre  au  Roy,  et  a  mon  dit 
sieur  de  Guyse,  vostre  intention  la  dessus  ou  la  dire  a  ce  pourteur 
pour  la  fere  entendre  a  Sa  Majesté,  afin  quelle  regarde  ce  quelle 
aura  a  fere  pour  ladvenir,  et  en  voslre  particulier,  eten  tousses  aul- 
tres  afferes,  lesquelz  nont,  Dieu  mercy,  guieres  amande  jusques 
aujourdhuy  des  ligues  et  amitiés  dltalye,  et  Monseigneur  de  Guyse 
scauroit  bien  quen  dire.  Il  vous  plaira,  Monseigneur,  renvoyer  ces 
pourteur  le  plus  tost  quil  sera  possible,  car,  il  est  necessere  quil 
face  ce  voiage  a  la  court  et  quil  revienne  en  bonne  diligence.  Qui 
est,  Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous  scaurois  dire  pour  ceste  heure, 
nayant  icy  aulcune  nouvelle  dimportance. 
De  Venize  ce  xx°  jour  davril  1557. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc 


GABRE    AU    CONNÉTABLE 

180.  —  [Venise],  22  avril  1557.  —  Monseigneur,  je  veoy  bien  que 
pour  eslre  trop  franc  et  maulvais  courtisan,  je  suis  fort  mal  avec 
Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  et  luy  diz  et  escript  si  librement  le 


238  NÉGOCIATIONS   de  [avril   1557] 

peu  de  service  qu'il  faict  et  la  grande  despence  que  le  Roy  porte 
pour  luy.  et,  quant  il  ne  peut  avoir  tout  ce  qu'il  demande,  il  luy 
semble  qu'il  n'y  a  que  moy  seul  qui  en  suis  cause,  et  si  je  suis  mal 
avec  luy,  je  suis  encore  piz  avec  vous.  Le  Cardinal  Caraffa  qui  me 
volleust  dernièrement  a  Regio  (1)  me  traiter  en  vallet.  disputant  de 
ces  contributions.  et  je  volleuz  bien  parler  aussi  hault  que  luy  ayant 
la  raison  de  mon  cousté  et  voyant  que  mon  maistre  payoit  l'escot. 
et  luy  monstray  que  je  n'estimois  guères  son  bonnet  rouge,  duquel 
il  m'avoit  volleu  donner  tant  d'espérance,  qu'il  luy  sembloit  bien 
m'avoir  cloz  la  bouche,  mais  il  trouva,  et  au  besoing  et  a  la  dispute, 
que  j'estimois  son  bonnet  et  luy  autant  que  s'il  estoit  mon  infé- 
rieur. J'entends  que  l'un  et  l'aultre  ont  l'ait  office  envers  Monsei- 
gneur de  Guyse  pour  me  deffavoriser  envers  le  Roy  et  m'oster  d'icy  : 
le  partement  m'en  sera  toujours  très  agréable,  d'autant  que  je  scay 
bien  que  je  ne  puis  que  perdre  a  contraster  avec  ces  grands  Sei- 
gneurs, mais  j'aymeroys  mieulxquece  fust  a  ma  requeste,  que  s'ilz 
se  pouvoient  vanter  de  m'en  avoir  faict  chasser,  et  si  vous  voiez. 
Monseigneur,  qu'on  dressast  quelque  partye  a  mon  désadvantage  en 
ce  fait  la,  je  vous  supplie  très  humblement.  Monseigneur,  n'aban- 
donner point  de  vostre  protection  l'innocence  et  l'honneur  des  bons 
serviteurs  du  Roy  et  vostres,  car  mes  actions  feront  toujours  foy 
que  je  suis  toujours  fidel  et  homme  de  bien  en  l'endroit  de  mon 
maistre.  sy  jamais  homme  le  fust  ny  le  sera;  je  veulx  avoir  a  tout 
le  moins  ce  contentement  en  mon  esprit,  puis  que  de  mes  services 
je  n'en  puis  avoir  aultre  bien  ny  récompense,  et  me  recommande. 
Monseigneur,  très  humblement  a  vostre  bonne  grâce. 
De  Venize  ce  xxn*  Avril  1557. 

Bibl.  nat.,  Fr.  3126,  fol.  96)  (originale). 


<;ABRF.    Al'    DUC    l»E    FEKHAKE 

181.  —  [Venise],  24  avrill557. —  Monseigneur, je  eroy  que  Votre 
Excellance  aura  entandu  quelque  petit  commancement  que  Monsrde 
Tavance  a  faict,  entrant  au  pays  de  Labrucio  (2).  Je  vous  envoyé  a 
toutes  adventures  la  coppie  dune  lectre  dudit  sieur  de  Tavance, 
laquelle  Monseigneur  le  Cardinal  ma  envoyée,  et  une  coppie  de 
ladvis  quon  escript  icy  de  M  vlan  de  la  prinse  de  Valfemere  3),  qui 
est  une  heureuse  conques  te,  el  espère  quelle  en  admenera  daultres 

i  Lorsqu'il  s'était  porté,  le  m  février  précédent,  à  la  rencontre  du  duc  de 
Guise  en  compagnie  du  duc  de  Ferrare  el  du  cardinal  Carafa. 

(2)  Les  Abruzzes. 

(3)  Valfenera,  place  du  Piémont,  dans  la  province  d'Alexandrie. 


[AVRIL    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  239 

et  que  cela  gardera  bien  que  ceulx  de  Corregio  ne  vous  feront  pas 
tout  le  mal  quilz  avoient  bonne  envye  de  faire,  et  si  jamais  vous 
avez  a  vous  resentyr  de  linjure  et  de  la  burle(l)  quilz  vous  ont 
faicte,  je  pense  que  vous  nen  sauriez  avoir  meilleur  marche,  que 
maintenant  que  les  forces  du  Roy  Philipe,  leur  protecteur,  sont  bien 
occupées  a  Naples  et  en  Piedmont,  et  aura  bien  a  faire  sil  se  peult 
deffendre.  par  lous  les  coustez  ou  le  Roy  le  veul  assaillyr.  L'ambas- 
sadeur Varquez  (2)  est  arrive  qui  vouloit  encores  tenir  lieu  dambas- 
sadeur  de  l'Empereur,  et  la  Seigneurie  ma  voulu  persuader  et  près- 
cher  delevouloire  trouver  bon;  mais  avec  bonnes  raisons  contraires, 
je  les  ay  resoluz  de  vouloire,  en  toutes  façons,  quil  me  ceddast,  et 
Monsieur  votre  ambassadeur  et  moy  avions  de  sa  dresse  ung  bon 
squadron  pour  en  faire  demourer  Ihonneur  a  la  ligue.  A  la  fin,  la 
Seigneurie  ma  envoyé  prier  'pour  éviter  tumulte  et  ne  troubler  h' 
feste  de  S1  Marc),  que  je  voulusse  me  tenyre  en  mon  logis  aujour- 
dhui  et  demain,  et  que  ledict  Varquez  ne  bougeroit  du  sien,  et  que 
je  leur  ferois  fort  grand  plaisir,  pour  après  a  plus  grand  loysir  acco- 
moder  noz  différend/..  Et  je  leur  en  ay  bien  voulu  complaire.  Icy  ny 
a  rien  de  nouveau  de  Levant,  ny  dailleurs.  qui  me  gardera.  Monsei- 
gneur, vous  fayre  plus  longue  lettre. 
De  Venise  ce  xxmie  davril  1557. 

Vrch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    Al"    PRINCE    DE    FERRA  RE 

182.  —  [Venise  ,  24  avril  155' . —  Monseigneur,  Il  vous  a  pieu  me 
scripre  que  vous  desiriez  savoir  ce  que  aura  este  faict  du  sauf- 
conduict  dont  le  Roy  avoit  escript  a  la  Seigneurie  a  votre  requeste, 
et  en  faveur  du  conte  Horio.  Il  vous  plaira,  Monseigneur,  entendre 
quil  ne  si  est  rien  faict  parladvis  dung  gentilhomme  vénitien,  beau 
frère  ou  parent  de  ce  conte,  lequel  congnoissant  la  complexion  et 
eoustume  de  ses  seigneurs,  et  la  qualité  du  banissement  de  lautre, 
ha  oppinion  que  tout  le  monde  nest  pas  suffisant  pour  le  luy  faire 
avoir,  et  je  vous  puys  asseurer  quil  ny  a  ung  plus  seur  moien  pour 
navoir  jamais  saufconduict  ne  grâce  de  ses  seigneurs,  que  de  la  faire 
demander  par  princes  estrangiers.  Je  lay  expérimente,  je  croy,  deux 
cens  fois  avecques  lectres  très  expresses  du  Roy  et  grand  impor- 
tunyte,  et  jamais  non  seuz  avoir  ung.  Hz  sont  en  cela  du  tout  inexo- 
rables et  jentends  que  ce  bannissement  est  dune  fort  estrange 
nature,  et  pour  cause  fort  odieuse  a  dit  seigneurs.  Toutesfoiz,  si  vous 

(1)  Burla:  plaisanterie,  badinage. 
(2j  Vargas. 


^40  NÉGOCIATIONS    DE  [AVRIL    1557] 

commandez  que  je  y  face  autre  chose,  je  ne  fauldray,  Monseigneur. 
de  vous  obeyr  et  l'aire  service,  en  me  recommandant  très  humble- 
ment a  votre  bonne  gr:ice. 

Do  Venize  ce  xxime  davril  1557. 

Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    ROI 

183.  —  Venise],  26  avril  1557. — Sire,  je  vous  escripviz  n'y  a 
que  3  jours,  par  le  commis  de  l'extraordinaire  qui  se  tenoit  icy.  et 
depuis,  j'ay  eu  une  despeche  de  Monsieur  de  la  Vigne  ou  d  n'y  avoit 
qu'une  lettre  pour  moy,  d'un  cintre  particulier,  que  je  luy  avois  en- 
voyé, de  laquelle  je  vous  envoyé.  Sire,  une  copie  deschiflrée  au  vray, 
affin  que  vostre  Majesté  voye  comme  toutes  chosses  passent.  La 
Seigneurie  m'a  envoyé  le  paquet  estant  venu  soubz  la  couverte  de 
leur  ambassadeur,  et  ont  publyé  la  oialladye  ilu  Grand  Seigneur,  de 
laquelle  aussy  Monsieur  de  la  Vigne  m'escript.  Je  ne  les  yray  point 
voir  aultrement  pour  n'entrer  en  ce  propoz  la  el  affin  qu'ilz  ne  puis- 
sent dire  que  c'est  moy  qui  lav  publiée,  et  aussi  que  je  leur  venlx 
monstrer.  pour  quelques  jours,  que  je  suis  ung  peu  mal  content 
d'eulx  pour  n'avoir  vollu  donner  le  lorl  a  l'Ambassadeur  du  Roy 
Philippe  aux  disputes  ou  nous  sommes  entrez  pour  les  précéden- 
ces  (1),  bien  que.  Dieu  mercy.  il  n'y  aye  pas  eu  du  meilleur,  car  il 
y  a  cinq  ou  six  ans  qui!  est  icy  avec  tiltre  dUnbassadeur  de  1  Empe- 
reur, et.  comme  tel,  a  toutjour  précédé  voz  ambassadeurs,  cl  main- 
tenant je  luy  ay  mis  cela  en  dispute,  et  l'ay  mis  hors  de  sa  posses- 
sion,  enrôles  quil  dye  quil  n'a  point  change  de  maislre.  J'escripz  de 
ces  propoz  plus  difuzement  a  Monseigneur  le  Connestable,  affin, 
Sïre,  que,  en  vostre  Conseil,  puissent  regarder  ce  quil  leur  en  sem- 
blera  et  qu'on  m'en  mande  quelques  mot/  d'adviz  pour  n'y  faire 
point  d'erreur,  bien  vous  assureray-je,  Sire,  que,  en  parle  qui  voul- 
dra  en  ce  pays,  je  ne  lairray  pas  occuper  le  lieu  qui  est  <\f\\  a  voi 
ministres,  a  aulcun  ministre  du  Roy  Philippes,  quelque  nom  quili 
aillent  emprunter  d'ung  empereur  qui  n'a  point  d'empire  Sire,  la 
prinse  de  Valfenyere  a  mi/  vos  afferes  par  deçà  en  tort  grande  répu- 
tation, et  .chacun  espère  que  ceste  bonne  Fortune  ne  sera  pas  senlle 
et  qu'elle  en  admenera  d'aultres,  vostre  année  qui  est  déjà  en 
l'Abruccio  (2)  y  a  faict  quelque  commencement  et  prins  la  ville  de 
Campoly  (3)  d'assauli  qui  donnera  ung  peu  d'exemple  et  de  terreur 

i    Préséances. 
■j   Les  Abruzzes. 

(3)  Campli,  ville  d'Italie,  a  s  kil.  île  Teramo. 


[AVRIL    1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  241 

aux  aultres.  Vostre  Majesté  en  verra  les  particularitez  par  ung  pa- 
quet de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon,  qui  sera  avec  la  pré- 
sente, lequel  il  m'envoya  ouvert.  Monseigneur  de  Guyse  m'a  escript, 
n'y  a  que  deux  jours  encores,  que  nostre  reste  dargent  soit  assez 
court  que  je  ne  faille  poinct  de  retenir  ce  qu'il  fault  pour  Monsei- 
gneur le  Duc  de  Ferrare  pour  le  mois  de  May,  ce  que  je  ne  fauldray 
de  faire,  et  de  luy  envoyer  le  reste  pour  son  camp  qui  seront  envi- 
ron cm  escus,  et  pour  les  aultres  moys  advenir,  je  croys.  Sire,  que 
Vostre  Majesté  y  aura  proveu.  Je  vous  supplie  très  humblement, 
Sire,  faire  renvoyer  bientost  par  deçà  ledit  commis,  avec  la  resolu- 
tion des  affaires  de  Ferrare,  ou  il  n'est  rien  survenu  de  nouveau. 
De  Venize  ce  xxvie  jour  dAvril  1557. 

Sire,  je  veoy  par  la  lettre  de  Monsieur  de  la  Vigne  que  la  despe- 
che  que  je  luy  envoiay  par  homme  exprez  du  ime  février,  ladver- 
tissantde  vostre  armée  passée  en  Italye,  et  de  la  guerre  ouverte,  luy 
a  de  beaucoup  servy  pour  rabattre  les  mensonges  ou  faulces  nou- 
velles que  d'aliltres  y  escripvent  ;  et,  pour  mieulx  disposer  ceste 
porte  la  contre  vostre  intention,  il  ne  couste  que  xn  escus  d'envoyer 
homme  exprez  de  Ragouze  a  Constantinople,  et  je  croy,  Sire,  que 
vous  ne  trouverez  pas  maulvais  que,  tous  les  moys,  je  y  face  une 
despeche  ou  deux,  et  que  je  donne  commission  a  Raguze  de  l'en- 
voyer par  homme  exprez,  affln  que  voz  ministres  ayent  de  quoy 
respondre  quant  ilz  y  verront  quelcun  qui  veuille  descryer  voz  affe- 
res.  Ces  Seigneurs  Vénitiens,  a  ce  que  jay  sceu  de  bon  lieu,  ont 
monstre  une  grande  allégresse  entre  eulx  par  ce  pacquet  veneu,  se 
tenant  asseuré  que  l'armée  ne  sortira  point  ;  disent  davantaige  que 
vostre  Ambassadeur  avoit  faict  requeste  que  le  Grand  Seigneur 
leur  voleut  escripre  de  se  déclairer  contre  vostre  ennemy,  et  qu'il 
leur  avoit  esté  respondu  qu'il  estoit  leur  amy  et  qu'il  voulloit  qu'ilz 
vesquissent  en  paix  comme  luy  pour  ceste  année. 

(Bibi.  nat,  Fr.  2045G,  fol.  5)  (originale). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

184. —  [Tenise],  /er  mai  1557.  —  Monseigneur,  Jay  receu  la 
lettre  quil  vous  a  pieu  me  scripre,et  estant  icy revenu  de  Padoue,je 
ny  ay  trouve  rien  de  nouveau,  sinon  que  1  Ambassadeur  Varquez  (1) 
avoy teste  en  audience  secrète  assez  longuement  avec  ces  Seigneurs, 
et  loppinion  est  quil  soyt  entre  en  marchez  et  partiz  avec  eulx.  Je 
mettray  pegne  dentendre  le  tout  et  d'y  fere  tout  lempeschement 

(1)  Varias. 

20 


242  NÉGOCIATIONS    DE  [MAI    1557J 

que  je  pourray.  Quant  a  votre  paye  de  may,  le  reste  de  notre  argent 
est  fort  court  pour  larmée  de  Monseigneur  de  Guyse,  toutesfoisje 
vous  en  fera  y  la  meilleur  part  que  je  pourray.  Jeuz  hier  lettres  de 
mondit  sieur  de  Guise,  qui  avoyt  loge  son  camp  à  la  portée  de 
canon,  a  Civitelle  (1),  et  faisoit  son  compte  de  le  battre  dez  mercredi 
passe,  qui  me  faict  espérer  quil  le  prendra,  puis  quil  lentreprend. 
Je  ne  veoy  venir  rien  de  Piedmont  depuis  la  prinse  de  Valfeniere 
et  quant  a  ces  Allemands  qui  debvoient  venir,  on  a  icy  quelcques 
nouvelles  quilz  sont  a  Trento  (2),  mais  il  ny  a  nulle  raisons  ne  appa- 
rence quilz  doibvent  aller  sur  votre  estât,  ayant  tant  dafferes  en 
Piedmont,  et  nest  pas  en  leur  puissance  de  dresser  une  armée  de 
ce  coust  la,  et  den  dresser  une  aultre  contre  vous,  car  ce  nest  pas 
assez  davoir  des  lansquenetz  ne  gens  du  payz;  car  il  y  faut  de  la 
cavallerye  et  de  lartillerye,  dont  ilz  sont  si  mal  fourniz  quilz  nen 
ont  pas  assez  pour  se  défendre  aux  lieux  ou  ilz  sont  assailliz.  Je  le 
vous  diz  encores  ung  aultre  coup.  Monseigneur,  que  si  vous  la  per- 
donez  a  ce  coup  a  ceux  de  Corregio,  je  me  doute  que  vous  nen 
aurez  jamais  si  bon  marche.  Qui  est,  Monseigneur,  tout  ce  que  vous 
diray  pour  ceste  heure. 
De  Venise  ce  premier  jours  de  may  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  , 


CABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

185.  —  [Venise],  6  mai  1557. —  Monseigneur,  Jay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  par  ce  courrier,  et  feray  partir  demain  ung 
trésorier  et  ung  controlleur,  avec  largenl  quil  fausl  pour  voslre  gar- 
nison de  ce  moys  de  may.  Ils  fussent  p;utiz  dez  aujourdhuy,  nestoit 
que  les  gens  de  Nazi  se  sont  excusez  de  ne  nous  pouvoir  depescher 
de  largent  plus  tost  que  demain  après  disner;  lung  de  ces  gens  la 
aura  commission  de  1ère  tout  ce  que  vous  luy  commanderez  sur  le 
faict  de  cest  argent  que  Vostre  Excellence  a  trouve  pour  commencer 
le  deppotz  de  sa  protection.  Jay  veu  ladvis  de  vostre  gouverneur  de 
Reige  (3),  de  quelcque  artillerye  et  gens  de  pied,  (pion  disoit  deb- 
voir  venir  a  Guastalla,  je  ne  veulx  pas  dire  quil  ne  puisse  estre 
quon  vous  veuille  travailler,  et  que  les  ennemys  se  voyantz  assaillii 

t  Civitella,  ville  forte  d'Italie,  à  14  kit.  <le  Teramo.  Guise  était  arrivé  dam 
cette  ville,  avec  son  armée,  le  2î  avril,  el  son  avant-garde  s'étail  emparéedea 
petites  places  voisines  :  Campli,  Teramo,  etc. 

(2)  Le  Tronto,  rivière  d'Italie,  qui  prend  sa  source  au  Y  de  la  province  d'Aquila 
et  se  jette  dans  l'Adriatique. 

(:î)  Reggio. 


[MAI    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  243 

et  perdantz  de  tous  cousiez  nayenj;  occasion  de  chercher  leur 
revanche  aux  lieux  ou  ilz  debvroient  trouver  la  plus  grand  resis- 
tence,  et  ou  ilz  pensent  en  trouver  le  moings.  Toulesfois,  cest  une 
chose  fort  loingtaine  de  toute  raison  et  de  tout  discours  quilz  ayent 
lennemy  en  leurs  maisons,  et  quilz  veuillent  laysser  perdre  le  cer- 
tain pour  essayer  dacquerir  ung  estât  si  forlifye  et  mal  ayse  comme 
est  le  vostre.  Je  vous  diz,  Monseigneur,  que  si  jamais  telz  ennemys 
ont  intention  de  vous  assailyr}  ou  vous  a  eulx,  vous  debvez  eslre 
bien  aise  que  cela  se  face  en  ce  temps  icy,  pour  leur  ruyne  et  pour 
Vostre  Grandeur,  car,  ilz  sont  si  occupez  et  lravaillez*ailleurs,  quil 
est  du  tout  impossible  quilz  puissent  fere  effort  ne  défense  qui 
vaille  de  vostre  couste  ;  vous  voyez  les  forces  que  Monsrle  Mareschal 
Slrozzi  (I)  menne  en  la  Romaigne,  desquelles  je  présuppose  et  nen 
faiz  aulcun  double  que  vous  nen  puissiez  disposer  si  vous  estez 
assailly  et  resoluez  de  demourer  de  vostre  couste  sur  la  défensive. 
Il  ny  a  aulcune  diliculte  que  les  forces  dudit  Mareschal  Strozzi,  avec 
votre  garnison  ordinere,  ne  soient  trop  plus  que  soufizantcs,  mais 
vous  verrez  que  les  ennemys  vous  auront  menasse  et  nauront  aprez 
de  quoy  vous  ofenser,  seullement  vous  auront  contrainct  de  vous 
préparer  a  la  defence,  si  avant  que  vous  aurez  de  quoy  les  assaillir 
et  les  chasser  de  leur  propre  maison.  Si  vous  estez  prince  et  homme, 
je  vous  le  diz,  Monseigneur,  de  zèle  et  daffection  pour  le  service  du 
Roy  mon  maitre,  et  pour  vostre  réputation,  et  pour  le  bien  et  hon- 
neur que  je  désire  a  vostre  maison  et  a  vostre  personne.  Ce  matin, 
estant  en  Seigneurie,  il  est  venu  a  propos  den  toucher  ung  mot,  et 
vous  asseure  bien  que  tous  les  advis  que  vous  scuorez  envoyer  ne 
leur  scauroient  fere  croyre  que,  en  ce  temps,  les  ennemys  vous 
puissent  assaillyr  ne  mal  fere,  et  mon  dit  quilz  sestoient  laissez  assez 
entendre  usant  de  ce  propre  terme,  Chai  bisogna  far  o  lasciar  star, 
vous  entendez  assez,  Monseigneur,  que  cela  veult  dire  ;  et  quant  aux 
harengues  et  menaces  de  Varguez  (2j,  je  suis  ce  jordhuy  entre  en 
ce  propoz  avec  eulx  et  leur  ay  dit  ce  quil  ma  semble  necessere,  et 
asseurez  vous  que  si  toutes  les  partis  du  monde  leur  estoient  pré- 
sentez de  ce  coust  la,  ils  sont  resoluez  de  voulloir  estre  spectateurs, 
par  ce  quilz  ne  bougeront  de  leur  neutralité  pour  prince  quelconque, 
et  si  veulx  toutefois  croire  quilz  ne  prendront  pas  plaisir  de  vous 
veoir  mal  traicte.  Hz  mont  dil  ce  matin  ladvis  quilz  ont  de  la  prinse 
de  Queras  (3)  et  encores  ne  sentend  rien   de  Civilelle  du  couste  de 

(1)  Le  maréchal  Strozzi,  au  lieu  d'appuyer  le  duc  de  Guise,  opérait  en  Romagne 
avec  une  partie  des  troupes  pontificales,  pour  surveiller  le  duc  de  Florence 
soupçonné  de  menées  favorables  à  Philippe  11.  (G.  Duruy,  Carlo  Cara/a,p.  225). 

(2)  Varias. 

(3)  Ctierasco,  ville  torte  d'Italie,  près  du  confluent  du  Tanaro,  à  31  kil.  de 
Mondovi. 


244  NÉGOCIATIONS    DE  fMAI    1557 

Monseigneur  de  Guyse;  de  Levant  il  ny  a  rien  de  nouveau,  parquoy, 
Monseigneur,  je  ne  vous  feray  plus  longue  lettre  que  de  mes  très 
humble  recommandacions  a  vostre  bonne  grâce. 
De  Venize  ce  6me  jour  dt  may  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc   . 


GABRE    AU   CONNETABLE 

186. —  [Venise],  12  mai  15.5  7 .  —  Monseigneur,  je  me  trouve  au 
lict,  bien  travaillé  d'une  fiebvre  tierce,  qui  me  fera  vous  supplier 
très  humblement  de  m  avoir  pour  excuse  sy  je  me  remectz  de  tout 
ce  que  j'escriptz  en  la  lettre  du  Roy.  J'espère  que  Nostre  Seigneur 
me  donnera  bientost  santé  pour  pouvoir  continuer  le  service  accous- 
tumé;  etainsy  que  jescripvoisceste  lettre,  est  arrive  ung  brigantin(l) 
de  Raguze,  avec  une  despeche  de  Levant,  laquelle  je  vous  envoyé 
par  ce  mesme  courrier,  n'ayant  eu  loisir  de  veoir  la  mienne,  par  ce 
qu'elle  est  longue  de  six  ou  sept  feuilletz  en  chiffre. 

De  Venise  ce  12me jour  de  May  1557. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20645,  fol.  52;  (copie). 


GABRE   AU    DUC   DE    FERRARE 

187. —  [Venise]^  16  mai  155 7.  —  Monseigneur,  Mens"  Millet  (2) 
sen  va  envers  vous  et  mesne  avecques  luy  le  commis,  qui  est  pour 
a  ceste  heure  comptable  de  tous  les  deniers  qui  se  recoyvenl  el  dé- 
pendent pour  le  Roy  en  Italye,  et  sil  vous  plais!  satisfaire  ad  ce  que 
Monsieur  de  Guyse  vous  demande,  ilz  seront  tous  pretz  a  recevoir  : 
et  quant  a  vostre  deppost.  Monseigneur,  je  ne  suizpassi  malapprins 
de  vous  en  escripre  en  bourle  (3),  mais  bien  vous  en  ay  dict  la  pure 
vérité  et  dict  au  dit  sieur  Millet,  comme  le  faicl  dudicl  deppost 
se  doibt  conduyre,  et  ne  puys  pas  penser  quil  se  paisse  faire 
autrement  et,  quoy  quil  en  soit,  je  vous  en  diray  tousjour  ce  quil 
men  semble,  en  bon  serviteur  du  Roy,  el  vostre.  Quanl  a  ni>/  qou- 
velles  dicy,  je  les  remecteray  sur  la  suflisance  dudil  sieur  Millet. 

I)  Briganlin,  navire  à  une  seule  voile,  dans  le  genre  des  galères,  comprenant 
huit  à  seize  bancs,  à  un  seul  rameur.  On  s'en  servail  spécialement  pour  les 
courses,  en  raison  de  leur  grande  rapidité. 

i2)  .Iran  Millet,  secrétaire  de  la  Chambre  <lu  Roi,  tenanl  lieu  île  secrétaire  îles 
finances,  à  la  place  de  feu  M.  deVillaudry,  près  de  Mgr  le  duc  de  Guise  Voii 
Bibl.  nat.,  Fr.  10395.  loi.  26). 

(3)  Bourla  :  plaisanterie. 


[MAI  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRE  245 

Seullement,  je  vous  diray,  Monseigneur,  que  par  lettres  que  jay  de 
Levant  du  xxe  d'avril,  que  la  resolution  quon  avoit  peu  avoir  du 
grand  Seigneur  pour  ceste  année  estoit  que  Dragut  et  le  Roy  Dar- 
gier  (1),  avecques  toutes  les  galleres  et  autres  naves  (2)  et  voilles  de 
corsaires  quilz  pourroient  mectre  ensemble,  se  jouignissent  avec- 
ques nostre  armée  de  mer  et  allassent  favoriser  lentreprinse  de 
Napples,  et  que,  au  demourant,  il  feroit  sortir  quarente  ou  cinquante 
galleres  pour  la  garde  de  larchipelago,  et  mont  envoyé  les  comman- 
demens  du  grand  Seigneur  pour  lesdit  Dragut  et  Roy  Dargier  a  ceste 
fin,  lesquelz  jay  envoiez  au  Roy. 
De  Venise  ce  xvie  jour  de  may  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

188. —  [Venise],  19  mai  1 557 ' .  —  Monseigneur,  je  me  resouiz  bien 
fort  de  la  bonne  resolution  quil  vous  a  pieu  prendre  de  secourir  Mon- 
seigneur de  Guise  (3),  tant  pour  le  service  du  Roy  que  pour  lespe- 
rance  que  jay  que  cela  vous  portera  grand  contentement  et  bénéfice 
a  voz  afferes,  puis  que  les  Allemans  de  Casalmagiore  sen  vont  tra- 
guecter  a  la  Spetie,  comme  Ion  me  script  ;  ce  nest  pas  la  pire  nou- 
velle quil  vous  eust  peu  advenir,  et  je  vouldrois  quilz  feussent  déjà 
la  ou  ils  se  désirent  de  ce  couste  la.... 

De  Venize  xix  jour  de  mai.... 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

189.  —  [Venise],  21  mai  1557.  —  Monseigneur,  cejourd'huy  est 
arrivé  Monsieur  Bodet,  vostre  secrétaire,  et  ne  parleray  point  a  ces 
Seigneurs  du  passaige  des  lansquenetz  que  le  Roy  veult  envoyer 
pour  le  renfort  de  Monseigneur  de  Guyse,  jusques  a  ce  que  j'ay  nou- 
velles de  ce  que  Messieurs  d'Asnois  et  Coignet  (4)  en  auront  arresté 

(1)  Le  dey  d'Alger,  Yahya,  qui  succéda  à  Yousouf,  mort  de  la  peste,  et  régna 
de  janvier  à  juin  1557.  ^Voir  Mas-Latrie,  Trésor  de  Chronologie,  p.  1839). 

(2)  Nave  :  du  latin  navis,  se  disait  à  cette  époque  d'un  navire  plus  important 
qu'un  vaisseau. 

(3)  Hercule  II  avait,  bon  gré  mal  gré,  fourni  un  peu  d'artillerie  au  duc  de  Guise. 
(Voir  Dubuy,  Carlo  Carafa,  p.  227). 

(4)  Mathieu  Coignet,  sieur  de  la  Thuillerie,  né  vers  1535,  avocat  au  Parlement 
de  Paris,  maître  des  requêtes  de  Catherine  de  Médicis,  procureur  général  au 
Parlement  de  Savoie  (1559),  ambassadeur  en  Suisse;  mort  en  1586. 


246  NÉGOCIATIONS    Dli  [MAI    1556J 

avec  Messieurs  des  Ligues  grises  (1).  Je  differeray  aussy,  Monseig'-, 
d'aller  a  Ferrare  pour  quelques  jours,  et  jusques  a  ce  que  Monsei- 
gneur de  Guyse  mayt  fait  entendre  comment  il  vouldra  qu'on  pro- 
cède avec  Monsieur  le  Duc  pour  ne  rien  gaster,  d'autant  que  desja 
ledit  Sieur  de  Guyse  a  tiré  de  luy  cent  cinquante  mil  escuz  sur  sa 
simple  promesse,  et  j'envoiay,  dez  avant  hier,  ung  trésorier  dicy 
pour  les  recevoir  et  les  conduire  la  ou  mondit  Sieur  de  Guyse  sera, 
duquel,  Monseigneur,  vous  avez  entendu  la  resolution  par  le  dernier 
courrier  quil  despescha  au  Roy,  et  depuis  nous  n'en  avons  icyaultre 
chose  que  ce  quil  vous  plaira  veoir  par  une  lettre  que  mescript  le 
Collonel  Vincenso  Tadei  (2),  qui  est  gouverneur  a  Ancona,  par  ou 
je  veoy  que  mondit  Sieur  de  Guyse  s'est  levé  de  Civitelle  (3)  et  que 
le  Duc  dAlve  s'est  approche  de  luy;  je  crains  bien  que  sur  le  desad- 
vantaige  que  peult  avoir  le  premier  qui  desloge,  il  y  puisse  avoir 
combat.  La  place  de  Civitelle  a  este  trouvée  si  mal  aysée  que  mon- 
dit Sieur  de  Guyse  n'a  moins  de  réputation  envers  le  comraung,  de 
s'en  estre  levé  avec  son  armée  saulve,  que  s'il  l'avoyt  conquize.  car 
il  ne  la  pouvoit  forcer  sans  perdre  toute  ceste  noblesse  quil  a  avec 
luy  et  ruyner  son  armée;  nostre  Toscanne  est  fort  travaillée  et  en 
grand  danger,  si  mondit  Sieur  de  Guyse  ne  la  va  bientost  secourir. 
J'envoye,  dez  demain,  vostre  pacquet  a  Monsieur  de  Selve  par  le 
courrier  ordinaire,  et  ledit  Secrétaire  Bodet  ne  bougera  pour  quel- 
ques jours  d'avec  moy,  attendant  quelques  autres  nouvelles  de  mon- 
dit Sieur  de  Guyse  et  vostre  resolution  sur  la  despeche  du  commis 
de  l'extraordinaire  et  du  sieur  Alexandre  Fiasco. 
De  Yenize  ce  xxie  jour  de  Mai  1557. 

Monseigneur,  j'ay  este  ce  matin  en  Seigneurie  leur  dire  des  nou- 
velles de  mondit  Sieur  de  Guyse  et  leur  louer  sa  resolution  de  se 
lever  de  devant  Civitelle,  pour  aller  combattit'  le  Duc  dAlve,  lallant 
chercher  le  plus  avant  quil  peut  dans  le  Royaulme,  et  layant  appro- 
che de  si  prez,  que  les  deux  camps  estoient  voysins  de  sept  mille, 
de  sorte  que  de  heure  a  aultre  se  peult  attendre  nouvelles  du  com- 
bat, auquel  je  croy  bien  que  ledit  Duc  dAlve  seroit  supérieur  de 
nombre  d'hommes,  mais  que  j'esperois  que  M  de  Guise  les  auroit 
meilleurs,  et  si  le  Duc  dAlve  n'aura  vollu  combatre,  comme  il 
est  croyable  qu'il  ne  vouldra  faire,  ledit  Sieur  de  Guyse  pourra  plus 
honorablement  faire  ce  que  le  Roy  lui  avoit  commandé,  et  la  Sei- 

(1)  Ligues  grises  :  Tune  des  trois  fédérations  démocrati<|ues  des  Grisons,  chef- 
lieu  Ilanz,  à  10  kil.  de  Coire. 

2    Vincenso  Tadei,  commissaire  îles  guerres. 

(3)  Lo  duc  de  Guise,  surpris  par  les  forces  supérieures  du  dur  d'Albe,  Imaii, 
le  15  mai,  le  siège  i!<v  Civitella  el  battait  précipitamment  en  retraite. 


[MAI-JUIN    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  247 

gneurie  a  fort  loué  la  valleur  et  la  prudence  de  Monseigneur  de 
Guyse  a  ne  s'ostiner  poinl  a  Civitelle,  puis  qui!  ne  la  pouvoit  pren- 
dre sans  ruyner  son  armée. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  195)  (originale). 


GABRE   AU    DUC    DE    GUISE 

190.  —  [Venise],  2  2  mai  1 557 .  —  Monseigneur,  J'ai  receu  ce 
matin  la  lettre  quil  vous  a  pieu  m'escrire  du  xv,  et  entendu  de 
M.  le  Cardinal  de  Tournon  Testât  de  vos  affaires  dont  j*ay  parle  a  la 
Seigneurie,  pour  luy  dire  comme  vous  vous  estiez  levé  de  devant 
Civitelle  pour  aller  combattre  le  Duc  d'Alve,  et  l'aller  chercher  le 
plus  avant  que  vous  pourriez  et  que  déjà  vos  deux  armées  estoient 
bien  voisines.  Je  vous  jure,  Monseigneur,  que  vous  avez  esté  plus 
louée  de  ceste  action,  et  belle  resolution,  que  si  vous  eussiez  pris 
Civitelle,  et  n'y  a  personne  par  deçà  qui  ayt  opinion  que  ledit  Duc 
d'Alve  veuille  venir  au  combat,  encore  qu'il  ayt  plus  grand  nombre 
dhommes  que  vous  n'avez,  et  luy  ayant  ainsy  monstre  le  visage, 
vous  pouvez  tourner  honorablement  voz  entreprises  en  tous  les 
endroictz  ou  vous  verrez  vostre  advantage.  Je  vous  escrivis  hier, 
par  un  homme  de  Monsieur  de  Nemours,  la  venue  d'un  secrétaire 
de  Monseigneur  le  Connestable,  icy,  pour  le  passage  des  lansquenetz 
que  le  Roy  vous  veut  envoyer  pour  renfort,  ne  voulant  vous  aban- 
donner ny  laisser  en  nécessité  de  tout  ce  que  vous  aurez  besoing. 
Je  vous  supplie  très  humblement  ne  penser  qua  conserver  vostre 
petite  trouppe  avec  laquelle  vous  pouvez  faire  grand  service  au  Roy 
et  acquérir  grande  réputation. 

La  Seigneurie  m'a  dit  aujourd'hui  que  Monsieur  Brissac  était 
encore  devant  Coni(l),  et  la  prise  qu'on  avait  ici  publiée  de  Fos- 
san  (2)  s'est  trouvée  véritable. 

Venise  ce  22  mai  1557. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  23236,  fol.  516,  et  Mém.  du  duc 
de  Guise,  Imp.,  p.  351). 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

191.  —  [Venise],  1er  juin  1557.  —  Monseigneur,  Jay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  par  ce  courriere,  et  depuis,  Votre  Excellence 
aura  veu  ce  que  je  luy  ay  escript  par  le  secretair  Boudet  et  Chemaus 

(1)  Coni,  ville  d'Italie,  à  70  kil.  de  Turin. 

(2)  Fossano,  ville  d'Italie,  à  19  kil.  de  Coni. 


248  NÉGOCIATIONS    DE  [JUIN    1557] 

qui  satisfaict  de  responce  a  tout  ce  que  vous  desirez  scavoir  de  moy. 
Il  es  arrive  hier,  icy,  ung  gentilhomme  parti  de  notre  camp  le  xxvie, 
qui  se  retiroit  sain  et  saulve,  Dieu  merci,  qui  jestime  une  fort  honne 
nouvelle  pour  le  Roy  et  pour  Monseigneur  de  Guyse.  Je  croy  que  ledit 
Seigneur  sera  bien  tost  avecques  vous,  et  quil  vous  aura  fait  enten- 
dre ses  resolutions.  Je  seray  icy  attendant  ce  quil  plaira  a  Votre 
Excellence  et  audit  sieur  me  commander.  Quant  à  ces  petites  entre- 
prises que  les  ennemys  ont  faict  sur  voire  estât,  puisque  le  Marquis 
de  Pescara  dit  ne  vous  voulloir  poinct  fere  de  guerre,  leur  offences 
seront  aysees  a  excuser  et  reparer,  et  saichant  la  ritirala  de  nostre 
armée,  ilz  se  tiendront  hien  heureux,  mais  que  vous  ne  leur  deman- 
dez rien,  le  temps  nous  en  fera  hien  tost  certains. 
De  Venize  ce  premier  jour  de  jung  1557. 

(Arcli.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE   AU    ROI 

192.  —  [Venise],  1er  juin  1557.  —  Sire,  il  est  icy  arrivé  deux  gen- 
tilzhommes,  qui  viennent  du  camp,  lequel  ilz  ont  laisse  deçà  del 
Tronto,  ayant  faict  leur  retraicte  honorahle  sans  perdre  ung  seul 
cheval  de  hagaige.  Monseigneur  de  Guyse  esloit  ung  peu  mallade  et 
temporisoit  sur  les  confins  en  Testât  de  l'Esglise,  pour  la  grande 
prière  que  luy  en  faisoit  le  Duc  de  l'aliano,  affin  qu'on  ne  laissast 
toute  la  Marque  (I  et  la  Romagna  au  prède  (2  de  l'ennemy.  Je 
presuppoze,  Sire,  que  mondit  sieur  de  Guyse  vous  aura  faict  enten- 
dre ses  intentions,  et  ce  quil  a  délibère  de  faire,  duquel  j'attendz 
aussy  a  toute  heure  nouvelles.  Cependant,  j'ay  envoyé  a  Monsieur 
le  Duc  de  Ferrara  le  secrétaire  Baudet  et  Monsieur  de  Chemans,  qui 
estoit  icy  avec  moy,  n'y  pouvant  aller  moy  mesmes,  pour  estre 
encore  ung  peu  débile  de  la  (iebvre  que  j'ay  eue  ces  jours  passez  et 
leur  ay  baillé  une  instruction  de  la  façon  qu'il  me  semble  qu'on 
doibt  négotier  ce  que  Vostre  Majesté  désire  avoir  de  luy,  en  atten- 
dant qu'il  soit  temps  que  j'y  aille.  Le  commis  du  Gard  n'est  encores 
aussi  de  retour,  et  selon  la  responce  que  j'auray  dudit  Ferrare,  je 
seray  tout  prest  dy  aller  quand  fera  besoing  et  mesmement  a  l'ar- 
ryvée  dudit  sieur  de  Guyse,  lequel,  comme  l'on  m'a  dit.  y  sera 
bienlost.  Je  vous  escripviz,  Sire,  n'y  a  que  quatre  jours,  les  propoz 
que  la  Seigneurie  m'avoit  lenuz  de  la  paix.  J'ay,  depuis,  sceu  que 
c'estoit  a  la  requeste  du  Pape,  qui  avoit  dit  a  leur  ambassadeur  a 
Rome  quil  désiroit  fort  la  paix  et    quil  en  escripvit  a  ces  seigneurs 

(h  La  Marche. 

(2)  Prede:  du  latin  prœda,  prise  de  pierre,  butin. 


[JUIN    1557]  DOMINIQUE   DU   GABRE  249 

quilz  luy  feroient  grand  plaisir  d'en  mettre  les  propoz  en  avant,  et 
que,  pour  plaire  a  Sa  Sainteté,  et  affin  qu'elle  fust  bientost  advisée, 
ilz  avoient  volu  faire  eeste  démonstration  en  public  de  m'en  parler, 
et  m'aasseuré  aussi,  quelqu'un  qui  le  cuyde  savoir,  (pie  tant  que  ces 
guerres  dureront,  on  ne  scauroit  présenter  si  grand  party  a  ces  sei- 
gneurs qui  les  puisse  faire  sortir  de  leur  neutralité.  J'ay  receu,  Sire, 
une  lettre  de  Monsieur  de  Codignac  du  xxvme  d'Apvril  a  Andrinopoly, 
ou  le  Grand  Seigneur  etoit  encores,  et  semble  que  Monsieur  de  la 
Vigne  s'en  fust  allé  devant  a  Constantinople;  la  copie  de  la  lettre 
dudit  sieur  de  Codignac  sera  avec  la  présente. 

Sire,  j'ay  receu  une  lettre  quil  vous  a  pieu  m'escripre  du  xve  de 
May,  par  laquelle  je  voys  que  Vostre  Majesté  a  trouvé  bon  que  je 
tienne  souvent  adverty  voz  ministres  de  Levant  de  Testât  de  voz 
affaires,  a  quoy  je  ne  fauldray.  Et  quand  a  la  précédence  de  Vargas, 
qui  se  dit  Ambassadeur  de  l'Empereur,  puys  que  vous,  Sire,  avez 
trouvé  bonne  la  résistance  que  je  y  ay  faicte,  Vostre  Majesté  se  peult 
bien  asseurer  que  je  ne  layrray  rien  entreprandre  a  vostre  préjudice 
ne  au  myen.  La  Seigneurie  ne  nous  envoyé  plus  convier  a  leurs 
cerymonies  ne  l'ung  ne  l'aultre,  et  pour  ce  qu'on  na  point  encores 
de  Légat,  au  lieu  du  Cardinal  Trivulce,  qui  est  encores  icy,  la  Sei- 
gneurie n'estoit  plus  accompaignée  que  des  Ambassadeurs  de  Fer- 
rare  et  d'Urbin,  et  avoyent  faict  venir,  les  Imperiaulx,  l'ambassadeur 
de  Savoye  pour  precedder  celuy  de  Ferrare,  mais  nous  y  avons  fait 
autre  grand  conteste,  et  allay  dire  a  la  Seigneurie  quil  n'y  avoit 
point  aultre  Duc  de  Savoye  que  vous,  Sire,  et  que  le  père  l'avoit 
perdu  et  que  vous,  Sire,  le  possédiez  avec  bon  droict  et  meilleur 
tiltre,  tellement  que  cestuy  cy  ne  l'avoit  jamais  possédé,  ne  n'avoit 
este  receu,  ne  accepté  du  peuple,  en  sorte  que  ledit  Ambassadeur  de 
Savoye  est  demeuré  frustre  de  son  intencyon,et  les  a  l'on  faict  tous 
deulx  de  nostre  livrée,  que  l'ung  ne  l'aultre  ne  va  plus  aux  cery- 
monies. 

De  Venize  ce  premier  jour  de  Juing  1557. 

Sire,  depuis  ceste  lettre  escripte,  sont  arrivez,  de  retour  de  Fer- 
rare,  le  secrétaire  Boudet  et  Chemans,  et  je  vous  envoyé  la  propre 
instruction  que  je  leur  ay  baillée,  par  laquelle  j'aurois  finy,  ce  me 
semble,  les  poinctz  principaulx  de  vostre  intencion  ;  la  chose,  a  ce 
qu'ilz  m'ont  rapporté,  se  resoult  a  cela  que  Mr  le  Duc  ne  veult  ouyr 
parler  en  façon  du  monde  des  cm  escus  qu'on  luy  demande  mainte- 
nant daventaige,  et  quant  aux  mcm  escus  qu'il  avoit  promis  à  Mon- 
sieur le  Cardinal  de  Lorraine,  il  dit  quil  en  baillé  cent  cinquante  mil, 
a  la  grande  prière  que  luy  en  a  faicte  Monsieur  de  Guyse,  et  quil  en 
baillera  les  autre  cl  mil  quand  on  luy  baillera  la  promesse  du  géné- 
ral d'Albene  de  ces  mcm,  des  autres  mcm  de  son  deppost  particulier 


250  NÉGOCIATIONS    DE  [JUIN    1557] 

et  de  tout  ce  qu'on  luy  doibt  du  passé  pour  sa  protection,  de  sorte 
que  cest  une  seurté  d'environ  vnicm  escus  ;  et  luy  ayant  dict  la  dessus 
quil  seroit  mal  aysë  de  trouver  marchant  qui  se  voulut  obligera  une 
si  grosse  somme,  et  que  s'il  ne  faisoit  ce  prest,  vostre  armée  seroit 
ruynée  et  sa  garnison  demoureroit  a  payer,  il  a  respondu  que  tout 
périsse  et  quil  ny  scauroit  faire  aultre  chose,  et  que,  sy  l'on  luy 
manque,  il  manquera.  Le  commis  du  Gard  n'est  encores  arrivé,  et 
je  n'ay  lettres  de  Monseigneur  de  Guyse  depuis  le  xve  de  ce  mois; 
mais,  que  j'en  aye  d'un  couste  et  d'aultre.  je  regarderay  dy  donner 
unp  aultre  allarme.  Cependant,  je  scay  bien  que  mondit  sieur  de 
Guyse  ne  peult  avoir  faulte  d'argent  pour  ce  mois.  Ledit  sr  Duc  (1) 
dit  toutjour  au  commencement  du  mois  qu'il  a  la  guerre  en  son 
estai,  mais  a  la  lin  du  mois  il  est  toutjour  en  paix,  c'est  pour  avoir 
de  nostre  argent  et  s'escuser  de  n'en  bailler  du  sien.  Il  se  parle  fort 
de  laccord  du  Pape  et  du  Roy  Philippe  (2 ),  et  a  toutes adventures,  je 
vouldrois  que  Mr  de  Guyse  resoleust  de  sachemyner  et  s'ousler  du 
danger  des  ennemys  secretz  qui  sont  plus  a  craindre  que  les  enne- 
mys  declairez.  Ces  Seigneurs  ont  eu  lettres  de  Levant  du  xi  de  May, 
comme  le  grand  Seigneur  estoit  party  d  Andrinopoly  (3)  pour  aller 
a  Constantinople  et  qu'on  avoit  faict   sortir  en    î  pour  la 

seurete  de  l'archipelago  (5)  quarante  galères,  de  sorte  que,  au  be- 
soing,  ce  Turq  et  Pape.  t>t  d'autres  avec,  ne  vous  ont  gueres  secoru. 
Dieu  vous  doint  la  grâce,  Sire,  de  vous  en  pouvoir  desmeler. 

(Bibl.  nat..  Fr.  20456.  fol.  1)  (originale). 


GABBE    AU    DIX    DE    FEKBABE 

193.  —  [Venise  .  2  juin  1557.  —  Monseigneur,  Jay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  par  le  secretere  de  Monseigneur  le  Conesta- 
ble  (6)  et  par  Chemaus,  et  vous  ayant  par  eulx  faict  entendre  tout  ce 
que  javoys  a  vous  dire  de  la  part  du  Roy.  et  leur  en  ayant  baille  par 
escript  instruction  signée  de  ma  main,  je  ne  vous  puis  dire  ne  res- 
pondre  aultre  chose  sur  vostre  particulier,  si  je  ne  voullois  passer 
mes  commissions,  et  fere  plus  (pion  ne  me  commande.  Je  creoy  que 
vous  verrez  bien  tost  Monseigneur  de  Guyse,  lequel  a  (autorité  et 
meilleur  moyen  de  vous  sattisfereque  moy.  .lavais  achapte  quatorze 

(1)  Le  duc  de  Ferrare. 

(•2)  Cet  accord  fui  réellement  conclu  le  il  septembre  suivant,  par  un  traité  <|ui 
fit  passer  le  Pape  du  parti  du  roi  de  France  dans  celui  du  mi  d'Espagne. 
(3)  Andrinople. 
I    lot  déchiré  dans  le  texte. 

(5)  L'archipel. 

(6)  M.  Bodet. 


[JUIN    1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  251 

milliers  de  pouldre  de  canon  qui  doibvent  estre  consignez  a  Ferrare 
pour  les  envoyer  a  mondit  sieur  de  Guyse.  Ce  pourleur,  Jehan  Petit, 
ma  dit  quil  estoit  en  peyne  de  trover  maguasin  pour  la  retirer  et 
pource  que  cest  chose  qui  pourra,  par  aventure,  servir  pour  vous 
mêmes,  il  vous  plaira,  Monseigneur,  commander  a  quelcun  de  voz 
officiers  de  lartillerye  quon  lui  en  face  bailler.  Jen  ay  encores  icy 
aultres  dix  milliers  que  je  feray  conduire  au  dite  Ferrare  quant 
vous  le  me  manderez,  et  si  ay  faict  ung  marche  de  cent  cinquante 
milliers  de  fer  en  voullelz  de  cinquante  et  soixante  dont  javoyez 
baille  cinquecens  escuz  darres,  et  on  ne  travaille  poinct  a  les  fere, 
pource  que  Monseigneur  de  Guyse  ma  mande  quil  nen  avoyt  plus 
besoing  et  quil  ne  ma  envoyé  les  formes,  mais  si  vous  avez  volonté 
avec  la  commodité  de  son  retour  et  de  son  arivee  de  chastier  voz 
voisyns,  cest  une  marchandise  dont  on  auroit  bien  a  fere,  et,  en  tout 
evennement,  seroit  toutjour  bonne  munition  pour  vous.  Je  ne  rom- 
pray  poinct  le  marche,  pour  ne  perdre  les  arres,  jusqu'à  ce  que 
vous,  ou  mondit  sieur  de  Guyse,  me  mandiez  aultrement. 
De  Venize  ce  nma  de  jung  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancclleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    DUC    DE   FERRARE 

194.  —  [Venise],  10  juin  1557.  —  Monseigneur,  Jay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  par  le  secrétaire  de  Monsieur  vostre  Ambas- 
sadeur, et  me  semble  que  Vostre  Excellence  me  demande  une 
chose  quelle  scait  comme  moy,  et  dont  par  linstruction  que  javois 
baille  au  secrétaire  de  Monseigneur  le  Conestable  (1),  je  vous  respon- 
doy  par  motz  exprès  que  je  ny  scauroy  rien  dire  davantaige.  Toutes 
fois,  puis  quil  vous  plaist  que  je  le  redys  encores  ung  coup,  je  ne 
vous  scaurois  dire  sinon  que  le  Roy  et  Monseigneur  de  Guyse,  tous 
deux  mont  commande  de  faire  payer  vostre  garnison  et  vostre  estât, 
et  ce  commandement  ne  nia  jamais  este  revocque,  et  aussitost  que 
les  trésoriers  qui  sont  allez  au  camp  de  mon  dit  sieur  de  Guyse 
seront  revenuz  avec  argent  pour  vostre  dite  garnison  et  estât,  je  les 
feray  partir  pour  vous  aller  payer  ce  présent  moys  de  jung,  et  auc- 
tant  en  ferayze  aux  aultres  moys  en  suivans  aussitost  que  largent 
sera  venu.  Si  je  scavois  auctre  chose  en  ceste  matière  la,  je  ne  la 
vous  celerois  pas. 

De  Venize  ce  xme  jour  de  jung  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 
(1)  M.  Bodet. 


252  NÉGOCIATIONS    DE  [JUIN    1557] 


GABRE    AU    DUC    DE    GUISE 

195.  —  [Venise],  I  2  juin  1557. —  Monseigneur,  J'ai  receu  deux 
lettres  quil  vous  a  pieu  m'escripre  du  iuc  et  mie  de  ce  moys,  par  les 
clercz  que  vous  avoient  apporté  largent  et  vous  mercye  très  hum- 
blement de  la  bonne  part  quil  vous  a  pieu  me  faire  de  voz  nouvelles; 
j*espère  que  bientost  il  vous  plaira  de  m'en  mander  de  plus  réso- 
lues, et  Dieu  vueille  qu'elles  soient  telles  que  vous  vous  soyez 
approché  de  nous,  et  vostre  armée  acbemynee  vers  Ferrare,  car,  si 
vous  entrez  une  foys  en  cest  estât  la.  soit  pour  passer  ou  pour  ayder 
le  Seigneur  a  se  venger  de  ses  voisins,  il  n'y  aura  nulle  difficulté  que 
vous  n'ayez  de  luy  aultant  dargent  que  vous  en  avez  desja  eu,  car 
cest  ce  qu'il  avoit  promis  a  Monseigneur  le  Cardinal  vostre  frère  (1) 
et  dernièrement  que  je  y  envoiay  le  secrétaire  de  Monseigneur  le 
Connestable  (2)  et  Chemaus,  il  confirma  de  le  vouloir  faire,  pourveu 
que  on  luy  baillast  la  seurete  de  Guadaigne,  tant  pour  ce  nouveau 
prest  que  pour  les  mcm  escus  de  son  deppost  et  aussi  de  tout  ce 
qui  luy  est  deu  du  passe  qui  seroit  une  obligation  denviron  viir1" 
escus,  et  il  sera  bien  malayse  de  trouver  marchant  qui  veuille 
s'obliger  a  une  si  grosse  partye.  Toutesfoiz  j'en  ay  escript  a  la  court 
et  attendz  dheure  a  aultre  le  retour  de  du  Gard,  et  Monsieur  le 
Duc  (3)  attend  aussi  le  retour  du  Fiascho,  et  sera  malaysé  quil  face 
résolution  qui  vaille  que  ledit  fiasco  ne  soit  de  retour,  si  ce  nest 
que  vostre  présence  ne  luy  lace  taire  et  la  nécessité  de  veoir  rostre 
armée  sur  son  estât.  Si  mon  allée  audit  Ferrare  eust  peu  servir  a 
Feflet  que  vous  desiriez,  je  vous  asseure,  Monseigneur,  que  je  y 
fusse  plustost  aile  a  quatre  piedz  si  je  ne  n'eusse  peu  aultrement, 
mais  je  vous  respondz  que  a  peine  me  veult  il  seullement  senlyr 
nommer,  tant  je  luy  suisdevenu  odieux,  el  sou  courroux  ne  procède 
d'aultre  chose,  sinon  qu'il  luy  souvient  davoir  perdu  l'ayse  el  le 
repoz  la  ou  il  avoit  toujours  vescu,  el  qu'il  luy  semble  que  moy  seul 
l'ay  mis  en  ce  travail  ou  il  se  trouve  maintenant.  De  vray.  je  n'ay 
pas  beaucoup  lait  pour  luy.  mais  j'av  encores  moings  laid  pour  le 
Roy,  de  sorte  que  je  puys  dire  que  d'un  cousté  el  d'aultres  j'av 
perdu  mes  peynes.  Je  désire  forl  de  vous  aller  faire  la  révérence 
pour  vous  faire  service  a  toute  obéissance,  mais  je  ne  vouldrois 
point,  s'il  estoil  possible,  aller  a  ferrare  pour  ne  nie  présenter  de- 
vant ung  prince  en  sa  maison  qui  me  voit  mal  vouluntiers  el  qui  se 

(1)  Le  cardinal  de  Lorraine. 
2    M.  Bodet. 
(3)  Le  due  de  Ferrare. 


[JUIN    1557]  DOMINIQUE   DU   GABRE  253 

tient  offensé  de  moy.  Si  vous  estes,  Monseigneur,  pressé  d'argent 
pour  vostre  armée,  avant  que  le  veoir  il  sera  nécessaire  que  vous 
y  envoiez  ung  des  vostres  qui  aye  patience  d'escouter  toute  plainte 
et  qui  schache  importuner,  et  ne  faictes  point,  M,  estât  de  moy, 
car  je  vous  asseure  que  je  gasterois  tout.  Icy  se  dit  depuis  hier  que 
les  Imperiaulx  ont  eu  adviz  de  la  prinse  de  Coni  par  force,  mais  la 
Seigneurie  n'en  a  rien.  De  la  Court,  Monseigneur,  vous  en  avez  tou- 
tes nouvelles  par  Marseille  et  je  n'en  ay  rien  en  particulier. 
Dp  Venize  ce  xne  jour  de  Juing  1557. 

Monseigneur,  jay  parle  aux  Seigneurs  de  Testât  de  voz  afferes,  de 
façon  qu'ilz  cognoissent  la  bonne  intention  du  Roy  et  vostre  en- 
vers le  Pape,  et  n'ay  point  volleu  encores  toucher  aucun  malcon- 
tentement nostre,  jusques  a  ce  que  les  choses  soyentunpeu  mieulx 
résolues,  et  qu'on  puisse  veoir  comme  vous  m'escripvez  si  nostre 
ligue  continuera  ou  non.  Quant  a  Testât  de  tout  l'argent  du  deppostz 
qui  estoit  icy,  aussitost  que  du  Gard  sera  de  retour  de  la  Cour,  il 
vous  sera  envoyé  :  et,  quant  aux  vim  francz  de  Monsieur  de  Selve, 
Monsieur  le  Connestable  ma  expressément  escript  que  le  Roy  l'en- 
tendoit  ainsy,  et  si  l'on  faict  aulcun  fond  dargent  en  ceste  ville,  je 
vous  asseure  bien  quil  ny  sera  prins  ung  seul  escu  que  vous,  Mon- 
seigneur, ne  le  commandiez.  Quant  aux  mille  escuz  que  vous  de- 
mandiez, qui  estoient  icy  reservez  pour  les  boulletz,  Dieu  vueille 
quil  puisse  suflire  a  payer  les  boulletz  et  les  pouldres  que  je  sui- 
contrainct  de  payer  par  les  marchez  que  j'en  avois  faictz. 

iBibl.  nat.,  Fr.  20512,  fol.  91)  (originale). 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

196.  —  [Venise],  15  juin  1557 .  —  Monseigneur,  Jay  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  me  scripre  du  xvu,e  de  ce  moys  et  yray  en  Seigneurie 
fere  toutes  les  remonstrances,  et  meilleurs  offices  quon  pourra,  pouj 
les  persuader  de  remédier  aux  allarmes  et  représailles  que  faict  sur 
leur  mer  ceste  fuste  des  ennemys.  Je  vous  escripviz  dernierment, 
Monseigneur,  que  aussi  tost  que  le  trésorier  seroit  venu  du  camp 
avec  la  provision  dargent,  jenvoierois  payer  voslre  garnison;  les  tré- 
soriers sont  bien  venuz,  mais  de  largent  il  nen  y  a  poinct  encores 
de  novelles;  aussi  tost  quil  y  en  aura,  je  vous  asseure  que  je  ne  le 
lairray  pas  séjourner  une  heure.  Icy  nous  navons  aulcunes  nouvel- 
les, sinon  de  Rome  et  du  camp,  lesquelles  je  croy  bien  que  vous 
scavez  plus  tost  et  mieulx  au  vray  que  nous. 

De  Venize  ce  xvie  jour  de  jung  1557. 


254  NÉGOCIATIONS    DE  [jUIN    1557] 

Monseigneur,  ceste  lettre  a  este  gardée  par  traducteur  jusqu'à  ce 
jour  xixe  que  le  commis  du  Gard  est  revenu  de  la  court  et  me  remect 
Ion  la  resolution  de  voz  afferez  aprez  quilz  auront  acorde  de  toutes 
choses  avec  le  Fiasco,  le  quel  ilz  faisoient  compte  de  depescher  dans 
bien  peu  de  jours  aprez. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

197.  —  [Venise],  16  juin  1557.  —  Monseigneur,  Je  n'ay  rien  a 
adjouster  a  la  lettre  que  jescriptz  au  Roy,  sinon  que  Monsieur 
d'Asnois  m'escript  du  vc  de  juing  que  les  Impériaulx  faisoint  lever 
en  grand  diligence  ung  régiment  nouveau  de  cinq  mille  lansquenetz 
et  quil  estoit  passe  de  huict  a  neuf  cens  chevaulx  ou  jumentz  pour 
tirer  artillerye  qui  alloyt  droict  a  Mylan;  c'est  signe  quilz  veullent 
faire  quelque  effort  du  couste  de  Piedmont  ou  du  cousté  de  Ferrare, 
ou  quilz  veullent  favoriser  leur  recolle  en  quelque  endroit.  Je  me 
resjouys  bien  qu'ilz  lacent  leurs  grans  forces  du  cousit''  de  deçà,  car 
cela  me  faict  espérer  que  vous  les  trouverez  plus  foibles  du  couste 
de  Flandres  et  en  Piedmonl.  et  s'ilz  se  veullent  venter  d'avoyr 
conserve  l'Italye,  vous  vous  pouvez  aussi  contenter  d'agrandir  la 
France.  Vous  avez,  ce  me  semble,  assez  fonces  en  Italye  pour  conser- 
ver vos  armez  et  vostre  Tuscanne  (1),  si  l'on  se  veult  resouldre  a  la 
défensive,  et  si  tenez  occupez  environ  vingt  mille  Allemantz  que  le 
Roy  Philippe  aura  faict  passer  en  Italye,  et  environ  dix  mille  Espai- 
gnolz  qui  sont  aujourd'huy  au  Royaulme  ou  en  Lombard ye,  mais 
que  nous  ayons  veu  quelque  reiglemenl  au  fail  de  Ferrare.  Apres 
l'arrivée  de  du  Gard,  le  Sr  Bodet  vous  yra  trouver,  lequel  cependant 
est  icy  avec  moy  et  vous  escript  de  ses  nouvelles. 

De  Venize  ce  xvie  de  juing  1557. 

(Bîbl .  uat.,  Fr.  20456,  loi.  197,  (originale  . 


GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

198.  _  Venue'],  22  juin  1557.  —  Monseigneur,  .lai  veu  ce  qu'il 
vous  a  pieu  me  scripre  du  sauf  conduict  que  vous  desideriei  de 
cesle  Seigneurie,  pour  ung  homme  d armes  de  vostre  compaignie. 
Ces  Seigneurs  sont  si  difflcilles  en  telles  choses  que  ]<-  nen  sceui  de 
ma  vye  obtenir  un  seul.  Toutesfoiz,  je  ne  lainay  pour  cela  dessayer 

(1)  Toscane. 


[JUIN    1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  255 

cestuicy  quant  on  men  baillera  quelque  mémoire,  et  seray  1res  aise 
de  lui  faire  service  pour  lhonneur  de  vous  en  me  recommandant 
très  humblement  a  vostre  bonne  grâce. 
De  Venize  ce  xxnme  jour  de  jung  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

GABRE    AU    DUC    DE    FERRARE 

199. —  [Venise],  22  juin  1557 .  —  Monseigneur,  suyvant  une  lettre 
que  Monseigneur  de  Guyse  ma  escripte,  jenvoye  ces  commis  du 
trésorier  devers  Vostre  Excellence  pour  recepvoir  et  bailler  sa  quic- 
tance  de  largent  quil  vous  plaira  prester  au  Roy,  pour  après  en 
envoyer  a  mondit  sieur  de  Guyse,  et  payer  vostre  garnison  et  encores 
mille  hommes  davantaige.  Monsieur  de  Monteuson  sen  va  aussi  qui 
pourra  fere  voz  monstres  et  ce  que  vous  luy  commanderez.  Il  se  dit 
icy,  depuis  bier,  que  Monsr  le  Marescbal  de  Briss[ac]  tient  Coin  (1) 
tout  jour  plus  assiège  que  jamais,  et  de  la  Court  je  nen  ay  aulcunes 
lettres  depuis  les  dernières  que  je  vous  escripviz. 

De  Venise  ce  xxnme  jour  de  jung  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

GABRE    AU    DUC   DE   FERRARE 

200.  —  [Padoue~\,  28 juin  1557 .  —  Monseigneur,  Jay  receu  la  lettre 
quil  vous  a  pieu  me  scripre  estant  en  barque  pour  men  aller  a  Ve- 
nise, et  veulx  espérer  que  Dieu  vous  donnera  tout  bon  succès  a  len- 
treprinse  de  Guastalla,  et  a  cbastier  voz  voisins,  qui  vous  ont  tant 
provoque  que  vostre  querelle  ne  sauroit  estre  plus  juste.  Le  monde 
vous  en  aura  en  plus  grande  reputacion  et  le  Roy  aura  fort  grand 
contantement  de  vostre  resolution,  et  encores  plus  de  secours  que 
vous  faictes  a  Monseigneur  de  Guyse.  Le  commis  du  Gard,  présent 
porteur,  sen  va  résider  auprès  de  Vostre  Excellance,  qui  vous  dira  en 
quel  eatat  nous  sommes  icy  en  matière  dargent,  et  Mons1*  le  secré- 
taire Rodet  partira  demain  pour  aller  prandre  congie  de  Vostre 
Excellence  et  sen  retourner  a  la  Court.  Jay  eu  lettres  de  Lyon  du 
xvme  comme  le  Fiasque  y  estoit  arrive  bien  depescbe  et  content  de 
la  Court  et  debvoit  arrester  deux  ou  trois  jours  audit  Lion  pour 
councluere  toutes  choses  avecques  le  gênerai  Dalbene.  Qui  est, 
Monseigneur,  tout  ce  que  je  vous  diray  pour  ceste  heure. 

De  Padoua,  en  barque,  ce  xxvnr3  de  jung  1557. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.), 

(1)  Coni. 


256  NÉGOCIATIONS   DE  [JUILLET   15o7j 


GABRE    AU    CONNETABLE 

201.  —  [Venise],  ê  juillet  iobl . —  Monseigneur,  Je  receuz,  il  y  a 
trois  jours,  la  despeche  qu'il  vous  pleust  mescripre  du  loe  avec  celle 
du  Roy  a  laquelle  je  fais  la  responce  qu'il  vous  plaira  veoir.  Mr  Bodet 
est  allé  au  camp  de  Mr  le  Prince  de  Ferrare  qui  est  en  cest  endroit 
la  de  Guastalla  et  de  Corregio,  et  a  son  retour  de  la  il  vous  plaira 
veoir  toutes  nouvelles  de  ce  quil  aura  veu  et  de  toutes  choses  de 
deçà.  Je  croy  bien  que  Monseigneur  de  Guise  attend  en  grand  dévo- 
tion nouvelles  du  Roy,  et  vostres,  par  Monsieur  de  Navailles  (1), 
mais  je  croy  bien  qu'il  ne  les  pourra  avoir  si  tost  comme  il  désire, 
si  vous  mettez  vos  resolutions  apprès  l'arrivée  de  Monsieur  le  Ma- 
reschal  Strozzy.  lequel  n'aura  peu  taire  grande  delligence  s'il  n'aura 
laisse  en  chemin  le  Marquis  de  la  Cave  (2  quil  menoit  avec  luy: 
quant  au  propoz,  Monseigneur,  dont  je  vous  escripviz  l'autre  jour 
en  chiffre  de  Padoua  par  l'ung  des  Tassins,  ]»•  n'en  ay  rien  entendu 
davantaige  et  ny  avois  rien  oublié,  sinon  de  vou>  dire  la  quallité  de 
celuy  qui  descouvrit  le  fait  de  Mr  de  S1  Papol  3  .  qui  m  a  dit  que 
c'estoit  ung  homme  (h1  uuerre  conlident  des  Imperiaulx,  mai-  sy 
mal  recongneu  qu'il  se  vouloil  venger  d'eulx  elles  habandonner  et 
avoit  prié  qu'on  n'en  escripvil  rien  jusques  a  son  retour,  mais  nous 
avons  craint  (pie  luy  mesmes  soit  descouverl  et  reteneu  ou  qu'il  luy 
puisse  survenir  quelque  empeschement,  qui  est  cause  que  nous 
avons  advisé  de  ne  différer  point  a  vous  donner  cest  advis  la,  soit 
que  la  chose  puisse  estre  vraye  ou  non  pour  estre  de  l'importance, 
Monseigneur,  que  vous  pouvez  juger.  Avec  la  présente,  sera  ung 
paquet  que  j'euz  avant  hier  de  M1  de  Selve.  ïcy  se  dit  publiquement 
que  le  Roy  a  retiré  le  Duc  d'Urbin  avec  1-2  mil  escuz  de  pention  et 
cens  hommes  darmes;  la  Seigneurie  m'a  demandé  avec  grand  curio- 
sité si  j'en  savois  quelque  chose;  je  leur  ayt  dit  que  je  n'en  avois 
aucun  advis.  mais  que  je  1»'  cn.yois  parce  que  j'en  avois  veu  de 
quelque   particulier,  et  a  la  vérité.   Monseigneur,  je  pence  que  la 

(1)  Jean  de  Montaut,  baron  de  Navailles.  mort  à  Macerata  en  1557,  «car  il  mourut 
au  voyage  de  M.  de  Guise  en  Italie».    Brantôme,  édil   Lalanne,  t.  rv,  p.  176). 

(2)  Le  marquis  de  Cavi,  fils  du  duc  de  Paliano,  avait  été  remis  au  maréchal  Strozzi, 
qui  le  conduisit  en  Fiante,  sous  prétexte  que  le  mi.  par  amitié  pour  les  Carafe, 
désirait  le  taire  élever  avec  -es  enfants.  En  réalité,  le  marquis  de  Cavi  était 
envoyé  à  Paris  comme  otage  par  le  duc  de  Guise  qui  se  déliait  de  la  duplicité  du 
cardinal  Carafa.  iV.  Duri  y,  Cardinal  Carafa,  p.  -J-J'.H. 

3  Bernard  Salviali,  chevalier  de  .Malte,  prieur  de  Capoue,  grand  prieur  de 
Borne,  amiral  de  l'ordre  de  Malte,  embrassa  l'étal  ecclésiastique,  devinl  évêque 
de  Saint-Papoul  en  juin  1549  par  la  démission  de  son  frère;évôque  de  Clermonl 
et  cardinal  en  1561,  grand  aumônier  de  Catherine  de  Hédicis;  morl  le  6  mai  1568. 


[JUILLET    1557]  DOMINIQUE   DU    GABRE  257 

despense  ne  sera  point  mal  employée.  Il  ny  a  icy  rien  de  nouveau 
du  Levant  et  pour  ceste  année  n'en  fault  espérer  aultre  secours  que 
ce  que  vous  en  avez  veu.  et  s'il  leur  en  fault  demander  pour  l'année 
prochaine  et  quil  vous  faille  continuer  la  guerre,  vous  avez  assez  de 
temps  pour  y  penser.  Cependant  je  tiendray  les  ministres  de  par  de 
la  bien  adverty  de  toutes  choses,  en  me  recommandant,  Monseig1", 
très  humblement  a  vostre  bonne  grâce. 
De  Venise  ce  2e  jour  de  Juillet  1557. 

(l'.ibl.  nal..  Fr.  20645,  fol.  61)  (copie). 


GABRE    AU    CONNETABLE 

202. —  [Venise],  16/47  juillet  1557. —  Monseigneur,  la  présente  ne 
sera  que  pour  accompaigner  des  pacquetz  de  Monseigneur  le  Cardi- 
nal de  Tournon  et  de  Monsieur  de  Selve,  et  pour  vous  dire  aussi  la 
réception  de  la  despeche  du  Roy,  et  vostre  du  25e  du  passe,  par  du 
Rau,  qui  arriva  hier  matin,  et  le  soir  mesme  il  s'embarqua  pourtra- 
gueter  a  Raguze,  et  constinua  son  voyage  de  Levant,  par  ce  qu'il  se 
trouva  de  fortune  trois  brigantins  Raguzois,  quiestoient  prestzafaire 
voile.  Je  veoy,  Monseigneur,  par  vostre  despeche,  que  desja  les  en- 
nemis avoient  commencé  la  guerre  en  Picardie,  et  que  vous  com- 
mencez a  avoir  du  travail  pour  y  aller  remédier  et  acheminer  voz 
forces  de  delà.  Les  discoureurs,  par  deçà,  ont  oppinion  que  c'est  de 
ce  couste  la  ou  l'on  vous  veult  le  moings  offendre,  et  que,  après  qu'ilz 
vous  auront  fait  tourner  et  acheminera  ce  cousté  la  tous  voz  forces, 
Dom  Ferrant  vous  assaillira  du  cousté  de  Champaigne  et  de  Bour- 
goigne,  avec  une  aultre  armée  qui  viendra  d'Àllemaigne,  et  Dieu 
veuille  qu'ilz  n'ayent  point  le  cœur  a  1  entreprinse,  dont  je  vous  ay 
escript  par  Tassin,  ou  que  vous  y  ayez  remédié.  Car  vous  savez, 
Monseigneur,  que  s'il  yvenoil  le  moindre  inconvénient  du  monde, 
ce  seroit  la  ruine  de  voz  affaires  d'Italie  et  de  France,  et  toute  la 
chrestienté  s'en  ressentiroit  aussi.  Monsieur  de  S1  Papoul  est  tou- 
jours a  Padoua,  et  ne  me  m'a  point  mande  le  retour  de  l'homme  qui 
y  estoit  aile  en  entendre  des  nouvelles  ;  il  est  possible  que  ledit 
homme  aye  change  de  volonté  ou  qu'il  luy  soit  survenu  ma- 
ladie ou  aultre  empeschement,  et  pour  ce  qu'il  avoit  dit  qu'une 
partie  de  leurs  forces  de  Piedmont  debvoit  eslre  employée  a  ceste 
entreprinse,  je  suis  entré  en  quelque  souspeçon  de  reste  longue  de- 
meure du  Marquis  de  Pescare  a  Fossan  (1),  pour  ce  que,  les  advis 
qu'on  a  icy  de    Milan,  contiennent  que  le  Cardinal  de  Trente  estoit 

(1)  Fossano,  ville  d'Italie,  à  19  kil.  de  Coni. 

21 


258  NÉGOCIATIONS    DE  JUILLET    1557J 

sorty  de  Milan  pour  faire  sortir  de  toutes  leurs  places  de  Lom- 
bardie  toutes  leurs  garnisons,  et  les  envoyer  audit  Marquis,  soubz 
couleur  de  ce  qu'il  estoit  enferme  en  une  certain  passaige,  ou 
Monsieur  le  Mareschal  letenoit  assiégé, el  ne  s'en  pouvoit  retourner 
de  deçà  sans  combattre:  et,  voyant  que  ces!  empeschement  dure 
depuis  vingt  jours  en  ca,  je  suis  entre  en  quelque  fantaisie  qu'il 
y  a  plustot  quelque  artifice  que  si  grande  nécessite,  comme  ilz 
disent.  Tout  le  monde  coudoit  que,  pour  cest  empeschemeni  ou 
ledit  Marquis  se  trouvoit,  es'tans  toutes  les  forces  de  l'ennemy 
tourné  de  ce  coste  la.  Monsieur  le  Duc  de  Ferrare.  qui  ne  trou- 
voit aulcune  résistance  en  campaigne,  deust  faire  quelque  grand 
effect  en  la  guerre  qu'il  avoit  commencé;  mais  ce  a  este  tout 
le  rebours  ;  car  c'est  lorsqu'il  s'est  levé  de  l'entreprinse  de  Guas- 
talla.  et  a  tellement  diminué  son  camp  que  l'on  dit  que  les  garni- 
sons de  Corregio  et  de  Guastalla  courent  partout  son  estai  et  y  fonl 
de  grandz  maulz.  Le  Fiasques  n'es!  encores  arrive,  bien  qu'on 
l'attend  de  jour  en  autre;  mais  je  pense  que  Monsieur  Bodet.  vos- 
tre  secrétaire,  s'en  pourra  dan-  deux  joui-  par-tir  dicy  pour  aller 
trouver  ledit  sieur  Duc,  pour  après  s'en  retourner  devers  vous  et 
vous  apporter  toutes  nouvelles  de  deçà.  Quanl  a  la  levée  que  le 
Roy  avoit  mandé  faire  des  Suisses  pour  Italie,  a  ce  que  j'entendz, 
il  y  aura  delà  longueur  et  quelque  difficulté,  el  quant  a  Monsei- 
gneur de  Guise,  je  croy  qu'il  atend  eu  grand  dévotion  le  retour  de 
Monsieur  de  Navailles,  comme  lait  le  Pape  celle  de  Monsieur  le 
Mareschal  Strozzi.  De  l'armée  Turquesque,  il  ne  s'en  entend  rien 
icy,  sinon  quelle  est  en  mer  depuis  le  3'  de  juing. 
De  Venise  ce  16e  de  Juillet  iool . 

Monseigneur,  .le  veoy  par  lettres  qu'on  a  icy  de  Flandres  du  5  de 
ce  mois  qu'il  ny  avoit  encores  nouvelles  de  l'arrivée  de  Domp  Fer- 
rant, lequel  toutesfoisy  pouvoit  arriver  dez le 20e  dupasse.  C'est  donc 
signe  évident  qu'il  s'est  arresté  ou  en  Allemaigne  ou  en  Franche 
Comté  pour  vous  préparer  quelque  autre  bonne  besongne  de  ce 
couste  la  ;  et,  voyant  aussy  le  Ion-  séjour  du  Marquis  de  Pescaire  a 
Possan,  qui  est  la  place  la  plu-  voisine  qu'il/,  axent  de  la  fiance,  et 

qu'ilz  envoyent  de  ce  cousté  la  toute-  les  Forces  qu'il/  peuvent,  je 
ne  me  puis  pas  garder,  soit  que  je  sois  souspeçonneulx  de  ma  nature, 
ouquej'aye  maul  vais  jugement  qu'il  n'yaye  quelque  dangerde  l'en- 
treprinse dont  je  vous  escripviz  et.  quand  il  devroit  estre  a  mes 
de-pens.  j'a\  bien  voulu  despecher  la  Rivière  que  Monsieur  de  Mou- 
lue m'avoil  icy  envoyé,  lequel  je  congnois  pour  homme  advisé,  seur 

et  fidelle.  allin  qu'il  -en  alla-l  eu  dilli-ence  a  Lyon  cl  que.  eu  che- 
min, il  se  informas!  quelles  nouvelles  ou  a  de  Domp  Ferrand  et  du 
cousté  d'Allemagne  ;  et.  arrive  qu'il -oit  a  Lion,  s'il  trouve  «pic  VOUS 


[JUILLET    1557  DOMINIQUE    DU    GABRE  259 

n'y  ayez  envoyé  quelque  personnage  de  qualité  pour  prendre  garde 
atout,  je  luy  ay  défendu  de  parler  de  ce  propoz  a  ame  qui  vive  ; 
mais,  s'il  entend  que  le  Marquis  de  Pescares  soit  encore  a  Fossan,  je 
luy  ay  donné  charge  d'aller  trouver  Monsieur  le  Mareschal  de  Brissac, 
et  luy  communiquer  secrètement  l'entreprinse  et  le  souspeçon  que 
j'ay,  affin  qu'il  ouvre  l'œil  a  toutes  choses  de  son  cousté  ;  et.  si  ledit 
la  Rivière  voit  ny  entend  quelque  autre  chose  de  plus  grand  souspe- 
çon, je  luy  ayt  dit  que  luy  mesme  allast  jtisqua  Dolo  (  I)  pour  des- 
couvrir nouvelles  dud.  Domp  Ferrand,  et  sy  Ion  y  fait  masses  et 
assemblées,  et  en  quelles  parts  on  les  doit  adresser,  bien  que  je 
présuppose  que  Monsieur  de  la  Guische  (2)  ou  quelque  autre  doibt 
estre  a  Bourg  en  Bresse,  car  ilz  ont  bon  moyen  d'en  entendre  toutes 
nouvelles,  et  ledit  de  la  Rivière  se  pourra  adresser  a  luy  s'il  y 
veoit  quelque  chose  qui  aye  besoing  de  prompte  provision,  et  s'il 
entend  qu'il  y  aye  quelque  danger,  vous  en  donnera  advis  ;  s'il 
n'en  voit  point,  il  s'en  ira  faire  ses  affaires  et  j'en  loueray  Dieu. 
De  Venize  ce  17  Juillet  1557. 

(Bil)l.  nat,  Fr.  20645,  fol.  10  (copie). 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

203. — [Venise],  18  juillet  1.5.')7.  —  Monseigneur,  Nous  avons 
icy  ouy  parler  diversement  de  notre  guerre,  mais  je  veulx  croire 
qu'en  toutes  choses  vous  avez  procède  avec  raison  et  selon  la 
variette  des  occasions  qui  se  présentent.  11  est  possible  que  bien  tost 
vous  aurez  plus  grans  forces  et  meilleurs  moyens  dexerciter  vos 
entreprinses.  Monsieur  le  Secretere  Doudet,  présent  pourteur,  ne 
veult  pas  sen  retourner  a  la  court,  sans  prendre  congé  de  Vostre 
Excellence,  et  de  Monsieur  le  Prince,  et  dira  fedellement  ce  quil 
vous  plaira  luy  commander.  Geste  présente  ne  sera  que  pour  la 
compaigner,  et  me  recommander  très  humblement  a  votre  bonne 
grâce. 

De  Venize  ce  xvme  jour  de  juillet  1557. 

(Arcli.  do  Modène.  Cancelleria  Ducale,  elc). 

(1)  Dello  Commit1,  petit  village  du  diocèse  de  Brescia.  {Dictionnaire  des  com- 
mîmes d'Italie). 

(2)  Gabriel  de  la  Guiche,  seigneur  de  la  Guiclie.  de  Chaumont,  de  St-Geran,  né 
le  5  novembre  1497,  gouverneur  de  Bresse  en  1547,  capitaine  d'une  compagnie 
d'ordonnance  en  1553. 


260  NÉGOCIATIONS  DE  [AOUT  1557" 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 


204.  —  [Venise  .  20  août  1557.  —  Monseigneur.  Jav  veu  ce  quil 
vous  a  pieu  mescripre  par  Monsieur  Rosset,  e1  entandu  le  grand 
malheur  advenu  au  pouvre  Monseigneur  le  Conestable  et  a  la 
France  (1).  Cest  bien  ung  des  estranges  accidens  qui  eust  sceu 
venyr  a  ce  pauvre  royaulme,  et  se  peull  dire  véritablement  oeuvre 
de  Dieu  et  non  humaine,  car  sil  y  a  eu  faulte  de  nostrecouste,  elle 
est  faute  du  plus  grand  chef  de  guerre  qui  feust  en  la  crestiente. 
Et  je  croy  que  les  ennemys  ne  pensèrent  jamais,  une  heure  devant, 
a  ung  si  grand  heur  pour  eulx.  Dieu  vueille  quilz  nayent  suivv  leur 
victoire,  par  ri  la  gendarmerye  est  rompue  et  noz  Allemands  des- 
faicts.  .le  ne  veoy  pas  que  le  Roy  puisse  promptemenl  remectre  ung 
autre  camp  ensemble  pourempesdirr  leurs  cours,  et  venue  a  Paris. 
Le  Roy  a  bon  besoing  damys,  dayde  et  de  conseil,  et  je  veuls  es- 
pérer. Monseigneur,  que  vous  ne  luy  fauldrez  en  ceste  adversité  de 
tous  les  deux  et  de  le  consoler.  Mon-1  Rosset  m'a  communicque 
ce  que  vous  luy  avez  comande  dire  a  ces  Seigneurs  ou  il  y  a  toutes 
persaussions  de  remonstrances  lie-  prudentes, e1  tendans  au  bien 

des  allaite-  de  sa  Mayeste.  .le  y  feus  hier  matin  les  visiter  en  au- 
dience secrète,  el  leur  voulluz  bien  dire  «pie  le  roy  avoit  faict  une 
forte  grande  perte  et  fort  mal  a  propoz.  Estant  l'ennemy  dedans  le 
royaulme  m  grossement  arme,  mai-  que  j'esperois  que  Dieu  qui 
scavoil  la  justice  de  la  querelle  de  -a  Mayeste,  ne  lhabandonneroit, 
ne  son  royaulme.  en  ceste  adversité,  et  quen  peu  de  temps,  avecque 
sonavde.  sa  Mayeste  remediroyt  a  ce  grand  inconvénient,  que  le 
Roy  avoit  durant  son  règne  ayde  tous  les  affligez  de  la  cristiente,  et 
oblige  beaucoup  de  princes  et  de  personnes,  en  ceste  ïlalye,  et 
neantinoin-e.  que  je  veoyois  bien  peu  de  sperance  que  Sa  Mayeste 
peust  avoir  auCun  ayde  de  personne  a  ee  grand  besoin,-,  et  que  bien 
luy  serviroit.  a  mon  advis,  >i  de  luy  mesmez  il  y  pouvoil  remédier, 
et  que  pour  ceste  cause  Sa  Mayeste  seroiz  contraincte  de  .doue  pour 
quelque  temps  loreille  et  la  bourse  a  toutes  despences  dltalye,  el 
recommander  a  ceste  Seigneurie  la  protection  de  la  personne  d  de 
le  slat  du  Pape,  et  de  Voire  Excellance,  leurs  prochains  voisins, 
daultans  que  la  chemyse  non-  touchoit  de  pin-  pie-  que  le  pour- 
poinct  ei  quil  failloit,  avant  toutes  choses,  conserver  le  royaulme 
assaillj  dexplus  formidables  forer-  quil  aye  jamais  este.  Quilz  deb- 
voienl  bien  considérer  de  quelle  importance  estoil  a  eulx, et  a  tonte 
lllalye,  dempescher  la  grandeur  de  rr  roy  d  Angleterre  -2  .  puys  que 

i    La  défaite  de  Saint-Quentin    LO  août  I 
(2)  Philippe  il  qui  avait  épousé  m  1554  Marie  Tudor,  reine  d'Angleterre* 


[AOUT  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRE  261 

bon  luy  veoyoit  suyvre  le  chemin  el  le  naturel  de  son  père.  Hz 
mont  a  cela  respondu  qu'il/,  neurienl  de  leurs  vyes  une  aouvelle  qui 
tant  leur  faschast,  et  leur  visaiges  el  contenances  le  tesmoingnoient 
clairement.  Mais,  au  reste,  ilz  nonl  respondu  sinon  que  parolles  ge- 
neralles  fort  honnestez,  sans  substance  et  sans  aucune  construction 
comme  ilz  ont  accoustùme.  .le  scay  bien  que  tout  ce  que  nous  leur 
disons  sont  parolles  perdues,  et  que  pour  chose  qui  sceust  advenir, 
pourveu  quon  ne  sadresse  a  eul\,  ilz  ne  sen  eschausferonl  de  rien. 
Toutesfois  s'il  vous  semble.  Monseigneur,  que  je  y  doibve  l'aire 
quelque  autre  office,  je  faray  1res  vouluntiers  ce  que  vous  me  com- 
manderez. Jattenderay  la  segonde  nouvelle  de  France,  et  Dieu 
vueille  quelle  ne  soit  pire  que  la  première.  Je  ne  scay  ce  que  Mon- 
seigneur de  Guise  se  resouldra  de  faire  après  avoir  entandu  ce 
malheur,  et  ne  puys  croire  qu'il  ne  vienne  bien  tost  a  Ferrare,  sache- 
ver  de  quérir  la,  el  puys  aller  trouver  le  Roy.  car  sil  veult  attandre 
larmee,  il  ny  sera  de  Noël.  Je  crains  bien  que  Ion  face  encores  a 
Paliano  [1  quelque  fricasse.  qui  ne  vaille  gueres,  car  jamais  ung 
malheur  ne  vient  seul.  Monsr  de  la  Vigne  partist  hier  au  soir  pour 
la  court,  lequel  porte  au  Roy  beaucoup  de  bons  propoz  de  la  part 
du  Grand  Seigneur,  et  grans  offres  des  secours  pour  lannee  qui 
vient,  dargent,  de  municions  et  de  galleres  et  dune  armée  en  Alle- 
maigne  la  plus  grosse  que  jamais  homme  aye  veux.  Maisjay  grand 
peur  que  ce  sera  après  la  mort,  le  médecin.  Notre  Seigneur,  vueille 
avoir  pithie  du  Roy  el  le  consoller. 
De  Venize  ce  xxme  jour  daust  1557. 

ArcH.  de  Modène.  Cancellcria  Ducale,  etc.  . 


GABRE    AU   DUC   DE   GUISE 

205.  — [Venise],  22  août  1557.  —  Monseigneur,  vous  avez  en- 
tendu le  malheur  advenu  a  Monseig'  le  Connestable  et  a  nostre 
pauvre  France.  J'ay  grand  peur  que  la  seconde  nouvelle  que  nous 
en  aurons  ne  soit  encore  pire  que  la  première,  de  sorte  que  le  Roy 
a  grand  besoing  d'ayde,  de  bons  conseils  et  de  bons  ministres,  car 
si  la  gendarmerie  est  défaicte,  et  tous  noz  Allemans  comme  on  dict, 
je  ne  veois  pas  que  Sa  Majesté  puisse  rassembler  promptemenl  loi- 
ces  ny  formes  de  caïnp  pour  empescher  les  courses  des  ennemys  el 
leur  venue  a  Paris  2),  le  malheur  voulant  quil  ne  luy  soil  resté  un 

(1)  Le  duc  d'Albe,  débarrassé  du  duc  de  Guise  qui  se  dirigeail  vers  Rome,  se 
dispesait  à  frapper  un  grand  coup  en  enlevant,  avec  ses  troupes,  el  celle-  de 
Marc-Antonio  Colonna,  la  place  forte  de  Paliano. 

[%  Le  désastre  de  Saint-Quentin,  venant  après  la  défaite  du  duc  de  Guise  à 
Civitella,  engendrait,  en  effet,  les  plus  vives  appréhensions  ;  on  ne  doutait  point 


262  NÉGOCIATIONS   de  [août   1557] 

seul  chef  de  guerre  auprès  de  luy  et  que  vous  estes  si  loing  et 
malade  que  je  ^ne  pense  point  que  vous  y  puissiez  estre  de  ce  Noël] 
sy  vous  ne  faites  compte  de  venir  sans  l'armée.  Je  ne  scay  quelle 
resolution  Dieu  vous  fera  prendre  la  dessus. 

Je  fus  hier  en  Seigneurie  deviser  avec  ces  Seigneurs  de  ce  mal- 
heureux accident,  et  ayant  eu  audience  secrète,  je  leur  voulus  bien 
dire  que  le  Roy  avoit  faict  une  très  grande  perte  et  mal  a  propos, 
étant  l'ennemy  dedans  le  Royaume,  si  grossement  armé,  mais  que 
fespérois  que  Dieu  qui  scavoit  la  justice  de  la  querelle  de  sa  Ma- 
jesté ne  l'abadonneroit,  ni  son  royaume,  en  ceste  adversité,  et  qu'en 
peu  de  temps,  avec  son  ayde,  Sa  Majesté  remedieroit  a  ce  grand  in- 
convénient, que  le  Roy  avoit.  durant  son  règne,  ay dé  tous  les  affliges 
de  la  chrestienté  et  oblige  beaucoup  de  princes  en  cesle  Italie,  et 
neantmoins  qu'il  voyoit  bien  peu  d'apparence  que  Sa  Majesté  put 
avoir  aucun  ayde  de  personne  a  ce  grand  besuing.  et  que  bien  luy 
serviroit,  a  mon  advis,  si  de  luy  mesmes  il  y  pouvoit  remédier;  que 
pour  ceste  cause,  Sa  Majesté  seroit  contraincte  de  clore  pour  quelque 
temps  l'oreille  et  la  bourse  a  toute  despence  d'Italie,  et  recomman- 
der a  ceste  Sainteté  la  protection  de  la  personne  et  de  lestât  du 
Pape  et  du  Duc  de  Ferrare,  leurs  proebains  voisins,  d'autant  nous 
touchoit  de  plus  près  que  le  pourpoint,  et  quil  falloil  avant  toutes 
choses  conserver  le  Royaume,  assailly  des  plus  formidables  forces 
qu'il  ayt  jamais  esté;  qu'ils  debvoienl  bien  considérer  de  quelle  im- 
portance estoit  a  eulx  et  a  toute  l'Italie  d'empescher  la  grandeur  du 
Roy  d'Espagne,  puis  qu'il  suivoit  déjà  le  parti  de  son  père  et  son 
naturel.  Hz  m'ont  a  cela  respondu  que  de  leur  vie  ilz  n'ont  receu 
nouvelles  qui  les  faschat  davantaige,  ce  que  leurs  visages  tesmoi- 
gnent  clairement,  mais  ilz  nont  rien  dit  que  généralement  et  hon- 
nestement.  ne  s'eslanl  expliquez  davantaige.  Mr  de  la  Vigne  partit 
hier  pour  la  cour  et  porte  au  !{<>>  plusieurs  bonnes  paroles  de  la 
part  du  Grand  Seigneur  et  de  grandes  offres  pour  l'année  prochaine 
d'argent,  de  munitions  et  galleres,  et  une  armée  eu  Allemagne,  la 
plus  grosse  que  jamais  11(11111111'  ayt  veu.maisjay  peur  que  ce  soit 
après  la  mort,  le  médecin,  Nostre  Seigneur,  veuille  regarder  en 
pitié  nostre  Roy  et  nostre  pauvre  France. 

De  Venize  ce  22  Août  1557. 

[Bibl.  iiat..  Fr.  23236,  fol.  553  (copie   el  Mém. 
du  duc  de  Guise,  hnp.,  p.  380 

que  Philippe,  enivré  par  ses  succès,  ne  voulût  terminer  la  guerre  en  dictant,  à 
Paris  même,  les  conditions  de  la  pais  au  roi  de  France. 


[AOUT  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRE  263 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

206.  —  [Venise],  25  août  1557. —  Monseigneur,  Je  ne  vous 
scaurois  dire  les  interprétations  que  Ion  faisoit  en  cesle  ville  sur  ce 
que,  du  couste  de  Flandres  il  ne  venoit  aulcung  advis  a  la  Seigneu- 
rie ne  aux  ministres  du  roy  d'Angleterre  de  ce  conflict  de  Saint 
Quentin  ;  chacun  en  parloit  selon  son  sens  et  sa  passion,  mais  on 
me  vient  médire  quil  est  arryve  ce  soir  ung  gentilhomme,  a  lambas- 
sadenr  Varquez  (1),  avec  les  particularitez  de  la  victoire,  lesquelles 
il  na  encores  publyees,  voulant  aller  demain  le  dire  en  Seigneurie. 
Mais  quelcun  de  sa  maison  a  dit  que  Monseigneur  le  Conestahle 
estoys  prisonier,  et  trois  chevaliers  de  lordre  aussi,  et  trois  qui  en 
estoient  mortz  (2),  et  que,  en  effect,  il  y auroyt  eu  plus  de  prisso- 
nie.rs  que  de  mortz.  Demain,  nous  en  entendrons  mieulx  la  vérité, 
et  cependent,  Monseigneur,  je  vous  en  ay  volleu  dire  ce  quon  men 
a  dit,  en  supliant  Nostre  Seigneur  vous  donner  très  bonne  et  longue 
vie. 

De  Venize  ce  xxve  jour  daoust  1557. 

Monseigneur,  on  me  vient  lonl  a  teste  heure  de  dire  que  Mon- 
seigneur le  Conestahle  avoit  eu  une  arquehuzade  au  couste,  fort 
dangereuse  de  mort,  que  Mons''  le  Mareschal  Sainct  André  est  pri- 
sonnier avec  aultres  cinq  personnes  de  qualité,  et  ung  troisiesme 
filz  de  mondit  sieur  le  Conestahle  mort,  que  Monsr  le  Conestahle 
navnvl  mené  avec  luy  que  douze  enseignez  de  François,  la  moytie 
de  noz  Allemandz,  et  la  moytie  de  nostre  gendarmerye  ;  que  le  Duc 
de  Bronshvic  (3),  avec  cinq  mille  chevaulx,  avoyt  rompu  tout  cela, 
de  sorte  que  le  Roy  aura  encores  quelques  relicques  des  forces 
quil  avoyst  assemblées,  et  que  Ion  commencoyt,  dez  le  xnii,  la 
hatterye  a  Saint  Quentin,  qui  est  moins  mal  que  silz  eussent  che- 
mine plus  avant,  car,  par  aventure,  cela  les  amusera  quelques  jours, 
et  ce  pendent  le  Roy  aura  temps  de-  pouvoir  assembler  ung  aultre 
camp. 

(Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.). 

(1)  De  Vargas. 

(2)  Le  duc  d'Enghien  était  tué,  le  duc  de  Montpensier,  le  maréchal  de  Saint- 
André,  le  duc  de  Longueville  étaient  prisonniers. 

(3)  Le  duc  de  Brunswick. 


264  NÉGOCIATIONS    DE  AOUT    1557] 


GABHE    Al     CONNETABLE 

207.  —  [Venise  .  Ji>  août  1557 .  —  Monseigneur,  jay  a  vous  l'aire 
récit  d'une  dispute,  ou  je  suis  a  présent,  avec  l'ambassadeur  de 
l'Empereur  ou  du  Roy  Philippe,  pour  la  précédence.  Il  vous  plaira 
entendre  qu'il  vint  icy.  y  a  environ  six  ans,  un  docteur  qu'on  appel- 
loit  Vargues  (1),  ambassadeur  de  l'Empereur,  et  comme  tel  avoit 
toujours  précède  les  ambassadeurs  du  Roy.  En  septembre  dernier, 
le  Roy  Philippe  l'envoya  appeller,  etescrivit  a  cette  Seigneurie  qu'il 
le  renvoyeroit  bientost,  et  qu'en  attendant  son  retour,  il  envoyeroit 
ici  un  homme  pour  tenir  sa  place.  Ce  Vargues  s'en  va.  et  deux 
mois  après  vint  un  cavalier  Espagnol,  qu'on  appelloit  de  Layula, 
lequel  n'apporta  que  lettres  du  Roy  Philippe  a  la  Seigneurie,  conte- 
nant quil  lenvoyoit  au  lieu  de  Vargues.  Quant  ce  vint  au  jour  des 
cérémonies  publiques,  la  Seigneurie  me  dit  que  cetuy  la  pretendoit 
tenir  le  lieu  d'ambassadeur  de  l'Empereur.  Je  leur  envoyay  cela 
bien  loing,  et  leur  dis  que  je  voulois  procéder  sans  aucune  dispute, 
puisqu'il  n'avoit  apporté  que  lettres  et  commission  du  Roy  Phi- 
lippe qui  tiit  cause  que  l'autre  n'esl  jamais  comparu  en  aucun  acte 
public,  et  j'ai  toujours  tenu  premier  lieu  après  le  Légat  du  Pape. 
Maintenant.  Vargues  esl  revenu  de  Flandres  depuis  3  jours,  et  sans 
faire  nouvelle  réception  ny  cérémonie,  esl  venu  visiter  la  Seigneurie 
comme  il  avoit  accoustumé  avant  quil  s'en  allasl  :  el  ayant,  le  lende- 
main, a  nous  trouver  en  Chapelle  aux  vespresde  Saint-Marc,  je  croj 
que  ledit  Vargues  dit  a  la  Seigneurie  quil  entendoil  garder  son  Lieu 
accoutumé,  disant,  pour  ses  raisons,  quil  avoitete  reçu  ambassadeur 
pour  l'Empereur,  lequel  vivoil  encore,  el  quil  n'avoit  changé  de 
personne  ni  de  maistre,  mais  seulement  etoil  aile  parler  au  Roi 
Philippe,  comme  je  faisois  bien  souvent  a  Ferrare,  et  vers  Monsieur 
de  Guise.  La  Seigneurie,  sachant  bien  que  l'entendois  tout  autre- 
ment, sassembla  l'apresdisné,  et  m'envoya  quérir  a  une  heure  non 
accoustumee  en  leur  collège,  ou  le  Dur  ±  me  voulu!  persuader,  et 
prescher,  que  je  voulusse  trouver  bon  que  chacun  de  nous  retournas! 
en  son  lieu  accoustumé,  déduisant  toutes  raisons  que  ledit  Vargues 
pouvoil  alléguer  a  cette  intention,  et  que  je  leur  ferois  bien  grand 
plaisir  que  les  choses  se  passassent  entre  nous  paisiblement  et  sans 
dispute,  disant  davantage  que  sils  connoissoienl  ledit  Vargues,  am- 
bassadeur du  Roy  Philippe.  il>  ne  lairoienl  aucune  difficulté  que  je 
ne  h-  deusse  précéder  :  que  cela  estoil  quant  a  eux  résolu,  mai-  quils 
lavoienl  toujours  tenu  pour   l'Ambassadeur  de   l'Empereur  et  que, 

i    De  V'argas. 
-i    Le  Dose. 


[AOUT  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRË  265 

quand  ilsabsenta,  le  Roy  Philippe  leur avoitescrit  quille  renvoyeroit 
bientost,  tellement  quil  n'avoit  point  été  autrement  révocqué  et 
leur  sembloit  que  cela  dut  aller  ainsi.  Je  leur  lis  beaucoup  d'argu- 
ments, au  contraire,  pour  leur  montrer  que  Vargues  etoit  purement 
ministre  du  Roy  Philippes  el  non  de  l'Empereur,  et  que,  dès  que 
ledit  Roy  entra  au  gouvernement  des  Royaumes  et  Estats  que  son 
père  lui  avoit  remis,  il  avoit  rappelle  et  révocqué  tous  les  ministres 
que  l'Empereur  avoit  en  Italie  ;  qu'après  il  en  avoit  conlirmé  les  uns 
en  leur  charge,  comme  il  avoit  fait  maintenant  ledit  Vargues,  et 
change  les  autres,  et  que,  pour  mieux  veriffîer  que  ledit  Vargues 
estoit  licentié  de  reste  charge  première,  ces  Seigneurs,  quand  il 
partit,  lui  avoient  donné  son  présent  de  deux  mil  eseus,  encores 
quils  n'ayent  accoustumé  d'en  donner  aux  autres  que  mille  ;  et  si 
maintenant  ledit  Roy  Philippe  s'en  veut  encore  servir  en  ceste 
charge,  ce  n'est  pas  a  luy  de  lui  bailler  le  lieu  d'Ambassadeur  d'Em- 
pereur, veu  quil  est  chose  notoire  et  publique  que  l'Empereur  s'est 
démis  de  tous  ses  royaumes,  Estais  et  de  l'administration  de  l'Em- 
pire (1),  nayant  pas  réservé  pour  soy  un  palme  de  terre,  ni  aucune 
authorité  en  l'Empire,  et  que,  quand  il  s'en  alla  mettre  en  un  mo- 
nastère (2),  soit  par  dévotion  ou  désespoir,  il  liscentia  tous  ses 
ambassadeurs,  qui  souloient  estre  auprès  de  luy,  pour  ne  vouloir 
plus  ouir  parler  ny  traitter  desdites  affaires  du  monde,  et  de  vouloir 
gagner  maintenant  ceste  precedence  par  ceste  voye,  c'estoit  toute 
artifice  et  tromperie  ;  que  Vargues  se  devoit  contenter  de  negotier 
les  affaires  de  son  maistre,  sans  penser  par  ses  finesses  usurper  le 
lieu  du  premier  Roy  Chrestien,  duquel  j'estois  ministre,  et  voulois 
bien  prier  la  Seigneurie  de  ne  mettre  pas  la  main  a  cela  et  se 
garder  bien  d'en  faire  jugement  au  préjudice  de  la  réputation  et 
honneur  du  Roy,  mon  maitre,  qui  leur  est  confédéré  et  des  meil- 
leurs amis  quils  ayent,  et  fait  si  grande  profession  d'honneur,  quil  y 
a  dix  ans  qu'il  ne  fait  que  combattre  pour  le  garder,  et  y  a  despensé 
et  despensera  les  centaines  de  millions.  Aucuns  de  la  Seigneurie  se 
levèrent  pour  faire  de  nouveaux  argumens  contre  moy,  me  deman- 
dant si  Vargues,  leur  venant  parler  de  la  part  de  l'Empereur,  s'ils 
pouvoient  refuser  de  l'ouir  comme  son  ministre,  et  pourquoy  donc 
ne  tiendra-il  ce  lieu  la?  Je  leur  respondis  que  l'Empereur  ne  pouvoit 
avoir  affaires  a  traiter  icy,  et  que  toutes  les  négociations  estoient 
réduites  avec  desorloges(3),  et,  enfin,  je  leur  demandai  s'ils  ne  fai- 


(1)  En  abdiquant,  en  1555,  Charles-Quinl  avait  donné  à  son  frère  Ferdinand  les 
États  héréditaires  d'Autriche  et  la  couronné  impériale;  à  son  lits  Philippe  II 
d'Espagne,  les  Pays-Bas,  l'Italie  et  le  .Nouveau  Monde. 

(2)  Le  monastère  de  Saint-Just,  dans  l'Estramadure, 

13)  Allusion  à  l'une  des  occupations  préférées  de  Charles-Quint,  dans  sa  retraite 


266  NÉGOCIATIONS    DE  [AOUT    1557] 

soient  point  de  conscience  de  vouloir  converser  avec  un  excom- 
munié, et  sils  ne  scavoient  pas  bien  que  le  Roy  Philippe  usurpoit  de 
fraische  mémoire  beaucoup  de  place  du  patrimoine  de  l'église  et 
faisoit  actuellement  guerre  contre  la  personne  de  nostre  Saint  Père 
et  son  siège  et  cité  de  Rome,  et  que  lui  et  tous  ses  conseillers,  ser- 
viteurs et  ministres  sont  excommuniés  par  la  bule  que  le  Pape 
publia  le  jour  du  Jeudy  Saint  dernier  1  ,  que  je  les  priois  de  laisser 
l'affaire  entre  nous  deux,  et  quils  ne  s'en  empêchassent  point,  et  que 
si  je  me  gardois  bien  mon  lieu,  je  lui  donnois  la  querelle  gagnée. 
Que,  pour  conclusion,  je  ne  lui  voulois  non  seulement  céder,  mais 
je  voulois  en  toutes  façons  procéder;  je  les  laissai  en  bien  fort 
grand  peine,  ne  sachant  qu'elle  resolution  y  prendre,  car  ils  ne  se 
pourroient  pas  priver  de  l'assistance  des  Ambassadeurs  de  ces  dits 
deux  grands  princes,  et  si  ne  voudroient  pas  mettre  la  main  a  ce 
jugement,  ils  ne  voudroient  pas  au--i  desplaire  a  l'autre,  et  je  pense 
avoir  la  raison  de  mon  coté.  Enfin  je  me  retiray  en  mon  logis  et 
commencay  a  mettre  gens  emsemble,  pour  me  taire  bien  accompa- 
gner, et  pour  demeurer  supérieur,  s'il  falloil  jouer  des  mains;  l'Am- 
bassadeur de  l'Empereur  n'en  faisoit  pas  moins  de  son  coté.  Ainsi 
la  Seigneurie  envoya  devers  l'un  et  devers  l'autre,  pour  nous  prier 
de  ne  vouloir  point  troubler  leur  leste  de  S1  Marc,  et  ne  bouger  de 
nos  logis  pour  ces  deux  jours,  et,  qu'apivs.  a  plus  grand  loisir,  on 
verroit  daccommoder  nos  differens,  me  priant,  sur  tous  les  plaisirs 
que  je  desirerois  leur  taire,  d'avoir  cette  patience,  el  quils  m'asseu- 
roient  que  Vargues  ne  bougeroit  de  son  logis.  Je  leur  (is  respon-<- 
que  je  voudrois  bien  leur  complaire  en  plus  grande  chose,  el  leur 
monstrer  que  j'étois  homme  de  paix,  mais  quil  me  sembloil  avis 
qu'on  faisoit  tort  au  Roy,  mon  maistre,  et  que  je  l'avertirois  du  tout. 
Nous  en  sommes  demeurez  la,  el  cependanl  je  croy  bien  que  si 
Vargues  peut  faire  voir  quelque  lettres  de  l'Empereur,  qu'il  le  fera 
quand  il  en  devroit  contrefaire  une  ;  mais  si  je  n'en  ai  commission 
du  Roy  en  une  façon  ou  autre,  je  ne  lui  cedderay  jamais,  car  jevoy 
bien  (pie  ce  a'est  qu'une  tromperie.  Si  vous  voyez,  Monseigneur, 
que  j'y  doive  faire  autre  chose,  il  nous  plaira  m'en  dire  le  bon 
plaisir  du  Roy  et  vostre  bon  advis 
De  Venise  ce  vingt  six  d'Août  1557. 

Bibl.  iiat.,  Fr.  16079.  fol  1)  (copie). 


de  Saint-Just,  qui  consistait  à  essayer  de  mettre  d'accord  entre  elles  les  heures 
de  ses  horloges. 

i  Paul  i\  avait  déclaré  rebelles  el  ennemis  du  Saint  Siège  Charles-Quinl  el 
Philippe  II,  le  jeudi  saint  précédent;  il  avail  excommunié  solennellement  loua 
ceux  qui  avaient  envahi  les  États  de  l'Église  el  les  complices  des  envahisseurs, 
quelle  que  lût  leur  dignité.    VoirG.Duw  y,  Cardinal  Carafa,  p.  226  . 


[AOUT  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRE  267 


GABRE  AU  DUC  DE  FERRARE 

208.  —  [  Venise  ,  SI  aoûl  1 557.  —  Monseigneur,  J'ay  veu  ce  qu'il 
vous  a  pieu  m'escrire  par  le  secrétaire  Myron,  présent  porteur,  et 
loue  Dieu  de  ce  qu'on  n'a  pas  encore  mauvaises  nouvelles  de  S'Quen- 
tin,  ny  que  les  ennemys  ayent  poursuivy  leur  victoire;  s*ilz  man- 
quent a  prendre  cette  place  dans  le  quinziesme  du  mois  prochain,  je 
tiens  leurruyne  toute  certaine,  carie  Roy  àdéja  de  forl  lionnes  troup- 
pes  et  nos  Suisses  seront  arrivez  ;  les  pluyes  et  les  longues  nuicts 
auront  abbattu  le  cueur  et  labravure  des  ennemys,  les  difficultés  des 
charoys  et  des  vivres  seront  plus  grandes,  de  sorte  qu'ilz  n'auront 
plus  beau  party  que  de  se  retirer  ;  que  sy,  le  malheur  vouloit  que 
la  place  se  perdist,  le  Roy  ayant  son  camp  frais,  il  luy  sera  facile  de 
la  recouvrer  avant  que  les  ennemys  ayent  reparé  ce  qu'ils  en  auront 
abattu.  Quant  aux  choses  d'Italie,  s'il  m'est  permis,  Monseigneur, 
d'en  dire  mon  opinion,  il  est  aisé  de  les  conserver  en  Testât  qu'elles 
sont  aujourd'huy.  Le  pis  que  peut  arriver  du  costé  de  Rome  (1)  est 
la  perte  de  Paliano,  chose  que  le  Pape  et  ses  nepveux  ont  bien  mé- 
rité, puisqu'ils  la  pouvoient  avictuailler  a  leur  aise  pendant  que  Mon- 
seigneur de  Guyse  etoit  a  Civitelle,  et  que  toutes  les  forces  du  Duc 
d'Alve  estoient  occupées  de  ce  costé  la  ;  et  si  le  Pape  ne  fait  la  paix, 
qui  est  tant  sollicitée  de  ces  Seigneurs,  laquelle  il  semble  estre  aussy 
désirée  de  Sa  Sainteté,  et  de  ses  nepveux,  et  du  Roy  Philippe,  sy 
fauldroit  il  que  Sa  Sainteté  se  contentât  de  se  mettre  du  tout  sur  la 
défensive  et  de  conserver  Rome  et  ses  principales  places,  a  l'effect 
de  quoy  on  a  moyen  de  lui  laisser  partie  des  forces  de  Monseigneur 
de  Guyse,  lesquelles,  selon  mon  jugement,  on  ne  doit  point  penser 
a  ramener  en  France  de  cest  hyver,  mais  les  despartir  en  Italie  en 
trois  lieux  :  une  partie  au  Pape,  une  a  noz  places  de  Toscane,  et 
l'autre  a  la  deffence  de  vostre  estât,  car,  de  les  mener  pour  le  se- 
cours du  Roy  en  France,  il  est  certain  qu'elles  ny  arriveroient  jamais 
a  temps,  par  ce  quil  y  a  de  grande  difficultés  en  leur  passage,  et  se- 
roient  combattues  et  consommées  par  le  mauvais  temps,  avant 
qu'elles  soient  a  moitié  du  chemin.  Mais  il  faut,  Monseigneur,  que 
je  vous  die,  avec  toute  la  submission  et  reverecce  que  je  vous  doibz, 
que  vous  faites  une  grande  ruyne  en  noz  affaires,  aux  vostres  et  a 
ceux  du  Pape,  refusant  l'argent  que  le  Général  d'Elbene  a  envoyé  a 
Ferrare  avec  commission  a  Nazi  de  le  nous  délivrer  pour  en  payer 
l'armée  du  Roy;  c'est  l'intention  dudit  d'Elbene  et  le  Roy  me  l'a  es- 
cril  ainsy  etcomnmndé  très  expressément,  et  ne  scay,  Monseigneur, 

(!)  Le  duc  d'Albe  n'était  qu'à  une  quinzaine  de  milles  de  Komr. 


268  NÉGOCIATIONS   DE  AOUT    1557] 

comment  vous  n'avez  quelque  respect  a  user  de  cette  rétention  vio- 
lente a  l'endroict  du  Roi,  et  enung  besoing  de  si  grande  importance, 
comme  est  la  conservation  d'une  armée,  et  vous  supplie  très  hum- 
blement. Monseigneur,  y  bien  penser;  car.  encore  que  le  Roy  vous 
soit  debiieur  de  ceste  somme,  et  de  plus  grande,  vous  ne  la  pouvez 
retenir  justement  contre  sa  volonté  et  offensez  grandement  Sa 
M  et  le  Pape  (1);  Monseigneur  de  Guyse  s'excusera  et  déchargera 
sur  vous  de  n'avoir  pu  secourir  Paliano.  par  ce  que  vous  aviez  retenu 
le  payement  de  l'armée;  nos  places  de  Toscane  seront  perdues  par 
ce  qu'il  sont  deubz  trois  moys  qui  leurestoient  assignez  sur  l'argent 
que  vous  retenez.  Je  suis  seur,  M,  que  de  tels  reproches  vous 
fascheroient.  Vostre  Excellence  a  laicl  sy  volontiers  plus  grand 
service  a  l'ung  et  a  l'autre,  en  temps  ou  onenavoit  moinsde  besoing 
et  je  la  supplie  que  ce  peu  ne  luy  fasse  pas  perdre  beaucoup  davan- 
tage, d'autant  plus  que  les  cent  mil  escuz  que  vous  faisiez  chercher 
en  cette  ville  seront  tout  prest  aussy  tost  que  vous  envoyerès  l'obliga- 
tion de  vos  marchandz,  lesquelz  cent  mil  escus  vous  pourrez  pren- 
dre et  cependant  secourir  mondit  Seigneur  de  Guyse  de  ceulx  la 
qui  sont  pretz  et  comptans.  Je  scais  bien,  Monseigneur,  que  vous 
dites  avoir  besoing  du  vostre  el  que  vous  n'attendez  que  l'heure  que 
vostre  ennemy  vous  viendra  assaillyr;  j'advoue  que  vous  le  debvez 
craindre  el  vous  bien  pourvoir,  mais  je  vous  veulx  bien  dire  qu'il 
n'y  a  nulle  apparence  de  cela,  car  voz  récoltes  sonl  faictes,  voz 
places  bien  munies  d'hommes,  et  ne  peuvent  estre  prises  que 
par  de  longs  sièges.  Oultre  que  l'enneniv.  ayant  tant  de  guerre  et 
d'armées  ailleurs,  il  n'y  a  point  d'apparence  qu'en  l'entrée  de  l'hy- 
ver  et  sur  la  fin  de  son  argent,  il  veuille  lever  une  autre  armée  con- 
tre vous,  scachant  bien  que  vous  estes  le  prince  d'Italie  qui  peut 
mieux  se  deflfendre.  11  vous  plaira.  Monseigneur,  m'excuser  si  je 
vous  dis  franchement  ce  qu'il  m'en  semble,  car,  sy  le  monde  tour- 
noit  sens  dessus  des  soubz,  je  ne  veux  poinl  faillir  de  vous  estre 
véritable  et  fidel  serviteur,  etc. 
De  Venize  ce  dernier  Août  1557. 

Bibl.  nat.,  Fr  23236,  fol.  554  copie  et  Hém.  du 
duc  il.'  Cuise.  I m } ». ,  p.  382,  el  Arch.  de  Modène. 
Cancelleria  Ducale  . 

(1)  Le  duc  de  Ken-are,  que  la  retraite  du  duc  de  Cuise  laissait  à  découvert  et 
qui  était  menacé  d'avoir  la  guerre,  el  toutes  les  forces  du  duc  d'Albe  sur  ses 
Etats,  avait,  jusque-là,  généreusement  contribué  au  paiement  des  soldes  el  muni- 
tions pour  le  compte  du  roi  de  France  Ses  avances  ne  s'élevaient  pas  à  moins 
de  cent  quarante  mille  livres  tournois,  luasi  le  duc  refusait-il  de  restituer  au 
roi  les  cent  mille  écus  qu'il  avait  reçus  en  dépôt,  malgré  les  supplications  du 

duc  de  Guise  et  de  M.  de  Lodève.    Voir  n icanachi,  Renée  de  France,  p 

284). 


[AOUT  1557]  DOMINIQUE  DU  GABRE  269 


GABRE  AU  DUC  DE  GUISE 

209.  —  [Venise],  Ier  septembre  1557 .  —  Monseigneur,  depuis  mon 
autre  lettre  écrite,  est  venu  ung  courrier  de  Lyon,  avec  lettres  du 
24,  lequel  a  apporte  dix  mil  escus  sur  la  paye  des  cent  mil  livres 
de  la  gendarmerie.  Je  vous  envoyé  coppie  de  la  lettre  escrite  par 
Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine  au  General  d'Elbène,  par 
laquelle  on  veoit  les  affaires  du  Roy  en  assez  bons  termes  ;  il  sem- 
ble par  ladite  lettre  qu'on  entend  que  vous  laissiez  l'armée  en  Italie, 
mais  encor  faut-il  veoir  que  ce  soit  en  lieux  ou  elle  puisse  gagner 
le  pain  du  Roy,  et  luy  faire  service,  et  je  vois  les  affaires  de  Rome 
tellement  conduites,  que  vous  debvez  croire  perdu  tout  ce  que 
vous  y  laisserez,  et  si  vous  laissez  nostre  Toscane  en  main  des  Ita- 
liens non  payez,  vous  en  entendrès  dire  quelque  desordre,  avant 
peut  être  que  vous  soyez  en  France, que  si  vous  faictes  le  desparte- 
ment  de  l'armée  selon  mon  mémoire  (I),  vous  conserves  la  Toscane 
et  le  Duc  de  Ferrare.  J'ay  veu,  Monseigneur,  les  lettres  de  Rome, 
la  bravade  des  ennemys,  venus  jusques  aux  murailles  (2)  ;  il  est 
impossible  que  vous  puissiez  honorablement  abandonner  le  Pape 
que  vous  ne  les  ayez  faict  ung  peu  retirer,  affin  que  soubz  la  faveur 
de  vostre  armée,  Sa  Sainteté  puisse  avoir  meilleure  condition  en 
l'accord,  et  vault  mieux  pour  cela  que  vous  différiez  vostre  parle- 
ment pour  sept  ou  huit  jours  que  de  partir  en  haste  et  laisser  les 
choses  en  confusion. 

De  Venize  ce  1er  Septembre  1557. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  23236,  fol.  56U  (copie)  etMém. 
du  duc  de  Guise.  Imp.,  p   281). 


GABRE   AU    DUC    DE    GUISE 

210,  —  [Venise],  1"  septembre  1 557 .  —  Monseigneur,  c'est  grand 
pityé  de  ceste  obstination  de  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare  en  ma- 
tière de  cest  argent,  car  il  ne  s'en  peult  ayder  et  jamais  le  mar- 
chant ne  luy  délivrera;  et  cependant  il  vous  laysse  en  grande  néces- 
sité et  les  all'aires  du  Pape  et  les  siens  mêmes  en  grand  confuzion; 

(1)  Voir  ce  mémoire  à  l'Appendice  qui  suit. 

(2)  Le  cardinal  Carafa  sauva  Rome  de  la  prise  d'assaut,  grâce  à  un  habile 
subterfuge  :  sachant  l'ennemi  campé  aux  abords  de  la  Porte  Majeure,  il  til  allu- 
mer pendant  la  nuit  des  Lorches  le  long  des  remparts.  Le  duc  d'Albe,  trouvant  la 
ville  ainsi  éclairée,  n'osa  point  donner  l'assaut  et  fit  battre  en  retraite.  (Voir 
G.  Dukuy,  Cardinal  Carafa,  p.  239). 


270  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE    15571 

nous  y  avons  de  deçà  usé  tout  l'artifice  possible,  et  Monseigneur 
le  Cardinal  de  Ferrare  y  fait  ce  quil  peult,  mais  personne  ne  le 
peut  vanillé  (1).  Monsieur  Myron.  a  ce  que  je  veoy,  l'a  aussi  fort 
bien  presse,  niais  ny  pour  cela,  nous  avons  advisé  quil  y  re- 
tourneroit  encores  avec  une  lettre  que  je  luy  escriptz.  contenant 
remonstrances  de  la  grand  offence  quil  faict  au  Roy  et  au  Pape, 
qui  auront  juste  occasion  de  s'en  ressentir,  comme  il  vous  plaira 
veoir  par  la  copie  de  ladite  lettre  qui  servira  de  protestation, 
et  la  copie  en  sera  renvoyée  au  Roy.  s'il  ne  se  veult  renger  a 
la  raison,  et  y  envoyons  celuy  qui  conduysoit  icy  le  party  de  cent 
mille  escuz  pour  luy  dire  a  bouche,  qu'ilz  sont  tous  pretz  et  contentz, 
aussitost  quil  envoyera  les  obligations  des  marcbands  de  Ferrare 
que  luy  mesmes  a  présentez,  et  ledit  Myron  vous  despechera  aprez 
ung  courrier  pour  vous  advertir,  Monseigneur,  de  la  responce  qu'il 
aura  eu  et  de  ce  qu'on  y  aura  peu  taire.  Nous  avons  icy  le  banquier 
qui  nous  solloyt  servir  par  commission  du  gênerai  de  Albenne,  si 
change  depuis  ceste  routte  advenue  devant  S1  Quentin,  quil  ne  nous 
bailleroit  pas  ung  escu  si  le  mènerai  d'Elbenne  ne  luy  en  envoyoit  le 
moyen  et  la  commission,  et  vous  pouvez,  Monseigneur,  de  la  penser 
si  les  autres  banquiers,  a  son  exemple,  doibvent  avoir  grande  volonté 
de  nous  secourir;  je  ny  scaiche  aulcung  remède,  sinon  que  le  Pape 
escripve  ung  brief  à  Monseigrle  Duc.  se  plaignant  de  «este  rétention 
d'apgenl  qui  estoit  pour  payer  l'armée  de  la  ligne,  et  luy  comman- 
dant, sur  peyne  d'excommuniemeut  et  de  rébellion,  qu'il  aye  a  le 
délivrer,  puis  quil  est  certain  que  le  Roy  la  envoyé  et  destinés  reste 
fin  (2).  Quant  au  gênerai  d'Elbenne,  il  y  a  longtemps  que  je  lu\  ay 
escript  la  peyne  ou  vous  estiez,  el  que  nous  ne  pouvons  avoir  cest 
argenl  la.  afin  qu'il  y  pourveusl  par  aultre  voye,  mais  je  n'en  ay 
encores  responce.  ny  nest  aussy  venu  autre  argenl  sur  la  partye  des 
cent  mille  francs  de  la  gendarmerye,  depuis  les  vingt  mille  escuz 
derniers  qui  vous  ont  este  envoj  ez.  S'il  en  vienl  peu  ou  prou,  il  vous 
sera  incontinent  envoyé.  Le  Commis  du  Gard,  qui  s'en  revaencore 
a  Ferrare  pour  la  quatriesme  fois,  vous  envoyé,  Monseigneur,  lestât 
du  second  deppostz  de  uicLm  es<-u>  etnya  ordre.  Monseigneur,  qu'on 
puisse  rien  voir  de  uecl  avec  ces  clercz.  Car  il  y  met  une  partye  de 
troiz  mil  et  tant  d'escuz  pour'les  irai/  de  la  conduite  de  l'argent  qui 
vous  a  esté  envoyé  depuis  que  vous  estes  en  Italye,  dont  je  n'ay 
poinct  volleu  arresler  les  parties,  riant    neeesseure    que    Monsieur 


(1)  Convaincre,  persuader. 

2  Le  duc  de  (luise  joignit  mvs  efforts  à  ceux  de  M  de  Lodève  pour  .noir  cette 
somme;  il  écrivit  à  Hennit'  il  qu'il  serait  cause  de  la  ruine  de  son  armée. 
Hercule  se  laissa  attendrir  et  remit  au  malheureux  général  la  moitié  de  la  somme 

déposée,  soit  50000  écus.   Voir  \\ canachi,  Benée  '/<•  France,  p.  384,  el  lettre 

de  du  Gabre  au  Roi  qui  suit). 


[septembre  1557]  Dominique  du  gabre  271 

Viallard  les  voye  pour  ce  quil  y  rnect  plusieurs  fraiz  d'escorte  qu'il 
a  paye  depuis  Ravenne  a  Ci vitelle,  et  Monsieur  Myron  m'a  dit  que 
vous  en  aviez  baille  quelques  fons  au  commis  Testu  (1).  Quant  a 
largent  que  Monseigneur  le  Duc  a  preste,  il  dit  vous  en  avoirenvoye 
Testât  et  que  jamais  il  nen  retint  par  de  la  ung  seul  escu  ne  pour 
fraiz  ne  pour  autres  chose  ;  il  a  encores  deux  mil  escuz  qu'il  a  der- 
nièrement retenuz,  mais  il  y  a  aussi  quelques  restes  a  payer  des  poul- 
dres  et  bouletz,  lesquelz  j'ay  este  contraint  de  prendre  sur  peyne  de 
prez  de  nm  escus  d'arres  qui  avoient  este  advancez,  et  si  vous  le 
trouvez  bon,  je  serois  d'oppinion,  Monseigneur,  de  faire  conduire 
tout  a  la  Mirandole,  et  en  prendre  bon  récépissé  de  Monsieur  le 
Comte,  car  vous  aurez  veu  comme  il  a  volontiers  baille,  quant  vous 
le  luy  avez  demande,  tout  ce  quil  en  avoit,  et  si  nous  les  laissons  a 
Ferrare,  j'ay  peur,  quand  nous  en  aurons  besoing,  qu'il  en  face 
comme  de  nostre  argent,  de  les  porter  tout  d'ung  train  en  Toscane  ; 
ce  seront  grandz  fraiz  et  je  ne  scay  si  elles  iroyent  seurement  en 
ceste  saison. 

Monseigneur,  je  ne  faiz  doubte  que  vous  ne  soyez  en  grand  peyne 
a  vous  resouldre  de  ce  que  vous  avez  a  faire  de  voslre  armée  pour 
obeyr  au  commandement  du  Roy  et  contenter  le  Pape,  et  si  j'avois 
bon  corps  pour  courir  la  poste,  je  vous  fusse  très  volunliers  aile 
trouver  pour  recepvoir  voz  commandementz,  en  attendant  la  veneue 
de  mon  successeur;  mais  pour  aussi  que  en  ce  temps  je  ne  doibz 
laisser  ce  lieu  icy  seul,  il  vous  plaira  m'en  excuser  et  recepvoir  en 
bonne  part  ung  mémoire  que  j'ay  mis  par  escript,  contenant  mon 
advis  sur  la  resolution  qui  se  pourroit  prendre  de  vostre  dite  armée 
et  de  vostre  partement,  affînque,  apprez  avoir  entendu  les  adviz  de 
plusieurs,  vous  y  puissiez  asserer  vostre  dernier  et  meilleur  juge- 
ment, et  si  vous  y  trouvez  quelque  faute,  il  vous  plaira,  Monsei- 
gneur, l'excuser  sur  mon  ignorance  et  sur  ma  bonne  volunté.  Il  est 
vray,  Monseig1-,  que  je  desirerois  bien  que  ledit  mémoire  ne  feust 
veu  de  personne  qui  le  peult  redire  aux  ministres  de  Sa  Saincteté, 
et  si  ne  m'en  soucierois  pas  beaucoup,  mais  que  je  feusse  hors  de 
ce  pays. 

De  Venize  ce  premier  jour  de  Septembre  1557. 

Monseigneur,  il  est  deu  a  Monsieur  le  Comte  de  la  Mirandole  les 
moys  de  juillet  et  d'aoust,  et  maintenant  sommes  entrez  au  ine  moys, 
M.  de  Selve  n'a  pas  ung  escu  pour  vivre  et  n'a  garde  de  trou- 
ver qui  luy  en  preste.  En  Testât  ou  sont  nos  affaires,  vostre  armée 
est  sans  argent,  la  Toscanna  en  grand  nécessite,  et,  avec  ces  cent 

(1)  François  Testu,  contrôleur  des  bandes  italiennes  en  l'armée  du  duc  de 
Guise.  (Bibl.  nat..  Fr.  10395,  fol.  41). 


272  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE   1557] 

mil  escuz  de  Ferrare,  nous  eussions  temporizé  en  attendant  d'aul- 
tre  argent,  de  sorte  que  ceste  rétention  nous  couppe  la  gorge  a 
toutes  choses.  Ledit  sieur  Conte  a  déjà  envoyé  icy  par  deux  foiz  pour 
avoir  argent  et  se  plainct  bien  fort,  il  a  pryé  Monsieur  le  Duc  de 
nous  voulloir  lascher  de  cest  argent  quelque  peu  pour  luy,  d'aul- 
lant  que  je  l'assignois. la  dessus,  mais  il  l'en  a  du  tout  reffuzé:  je 
ne  scay  quel  ordre  y  donner  ne  a  quel  saint  me  vouer,  et  luy  ay 
escript  qu'il  estoit  forcé  qu'il  eut  encores  patience  pour  quelques 
jours;  ilz  doibvent  bien  trouver  estrange  ceste  longueur,  carjamays, 
depuis  que  je  suis  en  Italye,  on  ne  leur  avoit  difere  leur  payement 
quinze  jours,  et  Dieu  scayt  comme  ilz  doibvent  cryer  contre  nous 
a  la  Cour,  quant  nous  les  importunons  d'argent,  veu  la  grand  néces- 
site ou  ilz  sont  eulx  mesmes. 

[Bibl.  nat.,  Fr.  20525.  fol.  125)  (originale). 


GABRE    AU    DUC   DE    FERRARE 

211.  —  i  Venise],  20  septembre  I .')57.  —  Monseigneur,  le  monde  et 
la  fortune  est  tant  changée  en  noslre  endroit  que  je  ne  scay  plus  que 
dire  ;  je  veoy  que  vous  estez  pour  estre  assaily  et  que  nous  avons 
bien  peu  de  moyen  de  vous  deffendre,  qui  me  desplail  bien.  Si  oze- 
rois  je  jurer  que  la  bonne  volunte  ne  mancquera  poincl  du  couste 
du  Roy  ne  de- ses  ministres;  mais,  quant  a  la  puissance,  j en  doubi 
quelque  peu,  veu  les  grands  afferes  <»u  Sa  Majesté  9e  trouve.  Ce  se- 
roit,  Monseigneur,  imprucfence  daccuser  les  fauctes  passes  des  ungs 
et  des  aul  très,  car  cela  ne  peult  remédiera  noz  adversitez;  el  Fault 
mieulx  fere  a  [advenir,  se  résolvanl  ou  a  la  paix  ou  a  la  guerre,  et 
en  lung  ou  laultre.  fere  ultimum  de  potentia  el  non  les  chose-  a  de- 
my,  comme  Ion  a  faict  par  le  passe.  Jay  bonne  espérance  que  ces 
Seigneurs  ne  vous  abandonneront  poincl.  a  quo)  messieurs  voz  mi- 
nistres qui  sont  icy  fonl  fort  grand  deboir,  el  en  ce  peu  que  je  puis 
je  les  seconderay  et  ayderay  toul  jour,  daultanl  sincère  el  bonne 
affection,  que  s'il  y  alloil  de  ma  propre  vve.  Il  semble  de  prime  face 
que  laccord  de  Rome  soit  anostre  préjudice,  et  je  le  tiens  a  grand 
heur  pour  le  Etoy  et  espère  que  doresnavant  cesseront  noz  malheurs, 
car  il  vault  mieulx  estre  seul  que  mal  acompaigne. 

De  Venize  cexxe  de  septembre  1557. 

Messer  Baccio  Tholomei  VOUS  dira.  Monseigneur,  les  difficultés  qui 
se  sont  trouvées  sur  le  prest  que  vous  desiriez  icy,  el  ce  qu'il  laul- 
droit  pour  y  remédier. 

\irh.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


[septembre  1557]  Dominique  du  gabre 


273 


GABRE  au  cardinal  de  lorraine 

212.  —  [Venise],  23  septembre  1557.  —  Monseigneur,  oultre  ce 
qu  il  vous  plaira  veoir  en  la  lettre  que  j'escriptz  au  Roy,  je  ne  vous 
scaurois  dire  sinon  que  j'avoys  envoyé  à  Monseigneur  d'Aumalle 
lu  mil  escuz,  tant  de  la  monnoye  qui  estoit  a  Ferrare,  que  de  quel- 
ques restes  que  javois  icy  trouvé,  ez  mains  des  Trésoriers,  et  pour  ce 
que  les  chemins  sont  fort  mal  seurs,  j'ay  donne  charge  aux  clercz 
de  s'arrester  a  Ravenne,  et  que  l'ung  d'eulx  allast  trouver  mon  dit 
sieur  d'Aumalle  pour  scavoir  ou  il  vouldroit  l'argent  lui  estre  ap- 
porté. Monsieur  de  Byron(2)  vient  d'arriver  icy,qui  m'a  dit  que  ledit 
sieur  faisoit  compte  de  ne  faire  la  monstre  qu'il  ne  fust  sur  le  Fer- 
rarois,  ou  j'espère  l'aller  trouver  pour  veoyr  ce  qu'il  resouldra  de 
faire.  Monsieur  le  Duc  est  tant  travaillé  et  menasse  de  guerre  que  la 
raison  veult  que  le  Roy  le  secoure,  et  le  debvoir  vouldroit  avec,  que 
ceste  troupe  de  Monsieur  d'Aumalle  demeurast  pour  sa  deffence,et, 
en  ce  cas  la,  son  estât  seroit  en  seureté  et  bien  gardé,  tiendroit  on 
l'ennemy  en  grande  despence  et  amuseroit  Ton  la  toutes  les  forces 
qui  sont  maintenant  en  Italye,  lesquelles  sans  cela  seront  employées 
contre  notre  Tuscanne  ou  en  Piedmont,  mais  je  veois  grande  diffi- 
culté a  payer  la  dite  armée,  car,  Monseigneur,  le  Duc  fait  exécrables 
serementz  qu'il  n'a  point  d'argent  ;  d'aultre  coste,  ces  seigneurs  ne 
le  vouldroient  pas  veoyr  ruyner,  mais  ilz  le  vouldroyent  bien  veoyr 
affoibli  d'argent  et  d'une  partye  de  son  estât,  par  quoy  quelque 
bonne  myne  qu'ilz  nous  facent,  je  n'ay  pas  grand  foy  en  leur  ayde. 
Je  y  ay  prins  les  expediens,  et  usé  des  persuasions  que  vous  veoyez 
et  n'y  scaurois  faire  davantage  de  trouver  argent  a  Yenize  sur  le  cre- 
dict  du  Roy  ni  de  mondit  sieur  le  Duc;  je  le  veoy  impossible,  veu  le 
mauvais  estât  de  noz  affaires  en  France  et  en  Italie,  car  les  gens  de 
ce  pays  ne  mettent  pas  volontiers  leur  argent  a  l'adventure.  Vous 
m'escripvez,  Monseigneur,  d'y  emploier  mes  moyens  et  mon  crédit 
qui  est  trop  petit  pour  telz  affaires  et  n'est  pas  pour  estre  plus  grand 
a  l'advenir,  puisque  je  ne  suys  enaulcune  considération  envers  vous 
aultres,  Messieurs,  qui  estes  auprez  du  Roy  ;  car,  s'il  pluvoit  abbayes 
ou  bénéfices,  il  n'en  scauroit  tumber  ung  seul  sur  ma  teste.  Toutes- 
foyz,  ny  pauvretés  ni  accident  ne  me  fera  jamais  estre  autre  que  bon 
serviteur  du  Roy. 

De  Venize  ce  xxme  jour  de  Septembre  1557. 

(Bibl.  nat.,  Fr.  20456,  fol.  199)  (copie). 

(1)  Armand  de  Gontaut,  baron  de  Biron,  né  en  1521,  servait  en  Piémont  sous  le 
maréchal  de  Brissac  ;  fut  créé  grand  maître  de  l'artillerie  (1569)  et  maréchal  de 
France  (1577).  Il  fut  tué  au  siège  d'Épernay  en  1592. 

22 


274  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE   1557] 


GA.BRE    AU    ROI 

213. —  [Venise],  23  septembre  1557.  —  Sire,  enfin  laccord  de 
Rome  (1)  a  été  fait,  et  Vostre  Majesté  en  aura  veu  les  partieularitez, 
mais  par  adventure  non  pas  toutes  les  secrètes  intentions  (2)  et 
resolutions  prises  entre  le  Duc  d'Albe  et  le  Cardinal  Caraffe.  Quoi- 
qu'ils fassent  quant  a  moy,  Sire,  je  l'entens  de  cette  façon,  que  tout 
le  pis  qu'ils  scauroient  faire,  est  tout  le  mieux  qui  vous  scauroit 
advenir,  pour  vous  faire  une  bonne  fois  résoudre  a  ne  plus  vous 
fyer  en  eulz  pour  ladvenir;  car  le  procédé  de  tous  vos  alliez  en  ce 
pays  a  este  tel,  quil  doit  servir  d'exemple  et  de  mémoire  a  vous. 
Sire,  et  a  vostre  postérité  pour  ne  jamais  plus  mesler  vos  affaires 
avec  les  leurs.  Il  ny  a  ny  petit,  ny  grand  en  Italie  qui  ne  connoisse 
le  grand  devoir  que  vous  avez  faict  en  celte  ligue,  et  qui  ne  parle 
du  peu  d'aide  et  des  mauvais  offices  de  voz  alliez.  J'ay  bonne  espé- 
rance, Sire,  puisque  vous  estes  deschargé  de  ceste  compagnie  la, 
et  de  ceste  dépense  mal  employée,  que  vos  malheurs  cesseront  et 
que  Dieu  reprendra  la  protection  de  vos  affaires  et  de  vostre 
Royaume.  Si  on  se  pouvoit  décharger  aussi  honorablement  du  Duc 
de  Ferrare  et  le  laisser  en  quelque  repos  et  seurete,  comme  est  le 
Pape,  je  le  trouverois  encore  meilleur. 

Sire,  mondit  Sieur  le  Due  est  fort  menacé  d'avoir  la  guerre  el 
toutes  les  forces  du  Due  d'Albe  sur  son  Estât,  avec  celles  des  Ducs 
de  Florence  et  de  Parme.  Je  presche  fort  ces  Seigneurs  pour  pren- 
dre sa  protection,  el  pour  essayer  de  leur  faire  paver  vostre  armée; 
ils  reculent  tant  qu'ils  peuvent  leurs  résolutions;  el  hier,  après 
avoir  receu  les  articles  de  l'accord  de  Rome,  je  les  ay  sollicite  de 
me  respondre  et  dire  clairement  leur  intention  et  de  m'accorder  le 
passage  et  vivres  par  leur  Estât,  pour  l'armée  que  mené  Monsei- 
gneur d'Auniale.  Ils  me  tirent  réponse  qu'ils  me  feroienl  appeler 
pour  me  dire  la  résolution,  après  qu'elle  seroil  arrestée  entre  eux, 
et  m1"'.!1'  'rs  excusasse  de  la  longueur  sur  la  grande  importance  de 

Cl)  Allusion  à  l'accord  officiellement  intervenu  entre  le  duc  d'Albe  ci  Paul  IV. 
aux  termes  duquel  ce  dernier  dénonçait  l'alliance  avec  la  France  et  s'engageait 
à  observer  la  neutralité. 

2  I.a  convention  secrète  dont  parle  Lodève  fiait  relative  à  la  question  tou- 
jours irritante  de  Paliano;  elle  lui  rédigée  cuire  le  duc  d'Albe  el  le  cardinal 
Carafa  el  resta  mystérieuse.  En  vertu  <le  celle  convention,  le  flef  de  Paliano 
recevait  désormais  un  gouverneur  investi  de  la  confiance  de-;  deux  parties,  el 
pourrait  être  démantelée  m  le  roi  Philippe  l'exigeai!  l>an>  ce  dernier  cas,  le  duo 
de  Paliano  recevrait  une  suffisante  indemnité.  (Voir  G.  Duroy,  Le  cardinal  Carafa, 

p.   245). 


[septembre  1557]  Dominique  du  gabre  275 

cette  affaire  et  sur  la  multitude  de  leurs  balotes  (1),  ou  ils  avoient 
fort  contraires  et  diverses  opinions,  et  que  les  Republiques  ne  se 
peuvent  pas  sitost  résoudre,  comme  un  prince  absolu.  Mais,  par 
advis  que  j'ay  secrets  de  leurs  disputes,  on  me  donne  espérance 
qu'ils  feront  quelque  cbose  de  bon.  Ledit  Duc  de  Ferrare  a  icy  deux 
ministres  qui  demandent  aide  et  protection  et  sollicitent  la  réponse, 
mais  ils  n'en  peuvent  avoir.  Je  croy,  Sire,  que  mondit  sieur  d'Au- 
male  sera  bientost  avec  sa  petite  troupe  au  Ferrarois,  ou  il  fera  la 
monstre  et  quelque  payement  de  ses  gens  avec  cinquante  mil  escuz 
que  Monsieur  le  Duc  nous  a  délivrez  de  cette  monnoye  qui  étoit  a 
Ferrare.  Quant  aux  autres  cinquante  mil  escuz  quil  a  retenuz,  en- 
core que  Vostre  Majesté  luy  en  ayt  nouvellement  escrit,  je  ne  pense 
pas  quil  les  délivre,  si  ce  n'est  quil  soit  forcé  de  se  servir  de  vostre 
armée,  auquel  cas  il  fauldroit  résoudre,  ce  me  semble,  que  luy  ou 
les  Vénitiens  la  payassent,  ou  par  prest  ou  autrement,  car  denvoyer 
de  l'argent  de  France  pour  eux,  je  l'ay  encores  redit  franchement  a 
ces  Seigneurs  que  je  vous  en  dissuaderois  tant  que  je  pourrois,  veu 
les  affaires  que  vous  avez  en  vostre  Royaume,  et,  de  plus,  ne  leur  ay 
pas  voulu  celer  que,  sur  l'obligation  du  Duc  de  Ferrare  et  de  tous 
les  marchands  de  sa  ville,  nous  n'avons  pu  trouver  en  cette  ville 
aucun  argent,  et  ceux  qui  en  avoient  premièrement  offert  pour  le 
party  de  cent  mil  escuz  se  sont  du  tout  retirez,  veu  la  défaveur  de- 
nos  affaires  et  dudit  Duc.  Parquoy,  si  ces  Seigneurs  ne  mettoient  la 
main  a  la  bourse,  je  ne  voyais  autre  remède  que  de  débander 
nostre  armée  et  laisser  le  Duc  de  Ferrare  en  proye  de  l'ennemy. 
De  Venize  ce  23  Septembre  1557. 

(RiBiER.t.  ii,  p.  704)  (originale). 


GABRE   A    M.    DE   BEAUREGARD 

214.  —  [Venise],  23  septembre  1 557 .  —  Monsieur,  Je  veoy  bien 
que  le  temps  nest  pas  propre  pour  faire  querelles  particullieres  en 
vostre  court,  les  publicques  y  sont  trop  fâcheuses  et  desplaisantes; 
il  estoit  aise  de  prévoir  en  vostre  mesnaige  quelque  désolation,  car 
Dieu  la  prédite  aux  lieux  ou  il  y  a  divisions  et  partialitez,  comme 
Ion  a  toujours  vesceu  la,  si  le  Roy  ne  prent  aultre  forme  au  gouver- 
nement de  ses  affaires.  Je  crains  quil  y  vienne  encores  pis,  et  Dieu  l'en 
veuille  garder.  Je  n'esperay  jamais  guières  de  vostre  court  du  temps 
que  je  pensois  y  avoir  ung  protecteur,  je  vous  laysse  penser  si  jen 
doibz  espérer,  maintenant  que  personne  ne  my  cognoisplus.Si  vous 

(1)  Voix,  suffrages. 


276  NÉGOCIATIONS    DE  [SEPTEMBRE    1557] 

voulez  que  jaye  quelque  bien  et  récompense  de  mes  longs  services, 
faictes  moy  estre  diseur  de  grâces  a  la  court,  ou  clerc  de  chapelle, 
ou  solliciteur  au  pallais,  car  le  mestier  dambassadeur  est  fort  con- 
traire a  cella.  Je  me  plains  fort  de  Monsieur  de  Nouailles,  qui 
estoit  arrive  a  Lyon  il  y  a  vingt  six  jours,  et  seroit  déjà  icy  a  cloche 
pied  sil  eust  volleu  ;  il  trouva  une  myenne  lettre,  par  laquelle  je  le 
prioys  prendre  la  poste,  il  n'a  pas  seullement  escript  sil  viendra  ou 
non,  ny  n'a  envoyé  personne  pour  lui  préparer  logerz.  Jay  vendu 
mes  provisions  et  mes  meubles,  et  maintenant  je  ne  scay  si  je  doibz 
partir  ou  non:  pour  le  moins,  il  me  met  a  lyver,  dont  je  luy  suis 
bien  peu  obligé,  et  si  l'on  avoit  faite  ellection  daultre  en  son  lieu, 
je  vous  prye.  Monsieur,  me  le  mander,  car,  sy  je  ne  puys  passer  ces 
Grisons  par  tout  octobre,  je  me  retireray  pour  cest  yver  en  quelque 
beau  lieu  sur  le  lac  de  Garde  avec  trois  serviteurs,  Xanscio  rsurire 
el  abondare  et  penuriam  pâli.  Vos  aultres,  auriez  peur  que  je  fusse 
trop  riche  si  Ion  m'eust  faict  quelque  part  de  la  despeuille  de  Mon- 
sieur de  Soyssonsii),  Dieu  vous  maintienne  en  voz  ayses  et  vous 
doint,  Monsieur,  ce  que  plus  desirez. 
De  Venize  ce  xxiuc de  Septembre  1557. 

Je  croy  bien  que  pour  le  bon  recueil  que  je  trouverav  a  mon  arry- 
vée  a  la  Court,  il  n'est  nul  besoing  que  je  prenne  la  postt>. 

[Arch.  du  Ministère  des  Affaires  étrangères,  t.  vu  du  fonds 

Venise,  t.  i  de  la  Collection  Noailles,  fol.  36    originale). 


GABRE    AU    COMTE    DE    LA    MIRANDOLE 

215.  —  [Venise],  25  septembre  /.'>.">  7.  —  Monseigneur,  je  vous  mer- 
cye  très  humblement  de  la  Visitation  faite  par  le  capitaine  Lyvio  (2) 
qui  n'estoil  point  nécessaire,  car  je  vous  suis  serviteur,  el  vous 
trouverez  que  a  la  Court  je  ne  vous  seray  pas  inutile,  et  vous  assu- 
rerez. Monsieur,  que  sil  peull  venir  entre  mez  mains  tant  soit  peu 
d'argent,  que  vostre  garnison  sera  payée  pour  les  moys  dont  elle  a 
faict  monstre,  mais  je  jure  Dieu  que  si  alloit  de  ma  vye,  je  ne  seau- 
rois  ou  en  prendre  pour  ceste  heure,  et  sil  y  en  avoit,  je  serois  très 
content  et  d'opynion  que  vous  mecttez  encore  quelques  compa- 
gnies de  gens  de  pied  dans  vostre  place,  voyant  le  grand  bru  ici  qui 
se  faict  des  forces  impérialles  qui  doibveni  venyr  assaillir  Modene, 
Uegge,  lieux  si  voysins   de   vostre  estai,  quil  esl   bien  raisonnable 

(1)  Il  s'agit  de  la  succession  do  Mathieu  de  Longuejoue,  évoque  de  Soissons, 
mort  le  6  septembre  1557,  qui  étail  titulaire  de  plusieurs  prieurés  el  abbayes, 
(Voir  Gallia  christiana,  t.  i.\\ 

(2)  Livio  Crotto,  capitaine  siennois.  {Commentaires  de  Mortfluc,  t.  iv,  p.  11. 


[OCTOBRE    1557]  DOMINIQUE    DU    GABRE  277 

que  vous  soyez  sur  voz  gardes,  mais  vous  pourrez  veoyr,  Monsieur, 
le  proccedder  des  ennemys,  et  sellon  cella  vous  gouverner,  ayant 
tousjours  consultation  aux  grandz  affaires  ou  le  Roy  se  trouve  de 
présent,  et  je  scay  bien  que  vous  ne  le  vouldrez  mectre  en  despence 
inutille  que  n'y  en  voyez  plus  grande  nécessité,  auquel  cas,  Mon- 
sieur, vous  pourrez  renforcer  vos  garnisons,  et  sil  y  aura  icy  argent 
du  Roy,  je  la  vous  feray  payer,  et  s'il  ny  en  a  point,  et  que  vous 
en  fournissiez  du  vostre,  vous  scavez  que  Sa  Majesté  ne  manque 
jamais  a  ceulx  quil  ayme  et  qui  sont  soubz  sa  protection.  Il  ne 
vouldra  pour  peu  de  chose  laisser  perdre  vostre  place  pour  laquelle 
il  a  faict  de  si  grandes  despences.  Vous  pouvez  bien,  Monsieur,  estre 
asseuré,au  surplus,  quil  no  tiendra  pas  a  moy  que  tout  ce  que  nous 
aurons  dartillerye  et  de  munitions  ne  soit  porte  soubz  vostre  garde. 
Je  ne  vous  scauroys  dire,  Monsieur,  le  temps  de  mon  partement, 
parce  que  je  n'ay  aulcune  nouvelle  de  mon  successeur.  Jay  dict  au 
cappitaine  Lyvio  les  nouvelles  que  nous  avons  icy,  et  me  recom- 
manderay  bien  humblement  a  vostre  bonne  grâce,  en  supplyant 
Nostre  Seigneur  quil  vous  donne,  Monsieur,  bonne  vie  et  longue. 
De  Venize  ce  xxve  jour  de  septembre  1557. 

Le  sieur  Lyvio  ma  parle  du  payement  de  vostre  compaignie,  ha- 
vant  elle  fut  au  camp,  et  de  la  monnoye  que  l'on  vous  a  baillie  a  ceste 
dernière  monstre,  et  de  cest  argent  qui  vous  est  deu  et  que  vous 
dictes  que  Monsieur  de  Guyse  a  ordonne  au  Trésorier  de  Tuscane 
vous  payer,  je  luy  ay  respondu  sur  cela  ce  quil  m'a  semblé,  il  vous 
plaira  le  croyre  de  ce  quil  vous  dira  de  ma  part. 

(Arcli.  Aff.  étrangères,  Venise,  t.  vu,  fol.  37)  (copie). 
Même  lettre  (Bibl.  nat.,  Fr.  20620,  fol.  37)  (copie). 


GABRE   AU    CARDINAL    DE    LORRAINE 

216.  —  [Venise],  17  octobre  1557 .  —  Monseigneur,  Monsieur  de 
Daqz  (1)  est  arrivé  icy  et  a  este  receu,  bien  veu  et  honoré  de  ceste 
Seigneurie.  Je  luy  ay  communicqué  tout  ce  peu  que  je  scavois  des 
affaires  de  deçà  et  de  ceste  charge,  et  me  semble  quil  y  ferabeaucoup 
de  service  au  Roy  et  quil  est  capable  de  plus  grandz  négociations 
que  celles  dicy,  desquelles  je  ne  vous  oscripray  autre  chose,  laissant 
fere  cest  office  audit  Sr  de  Daqz.  Joinctaussy  que  pour  le  présent  ny  a 
chose  qui  importe  ne  digne  d'escripre,  car,  quand  au  faict  de  Ferrare, 
vous  verrez,  par  la  depesche  de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Tournon, 

(1)  François  de  Noailles,  évèque  de  Dax. 


278  NÉGOCIATIONS    DE  [OCTOBRE    1557] 

ce  que  Monsr  de  Villars(l)a  rapporté  dudit  Ferrare,  ou  il  nestoit  be- 
soing  ne  raisonnable  que  je  portasse  eeste  mauvaise  nouvelle  a 
Monsieur  le  Duc  (2)  pour  mon  adieu  que  je  luy  diray  par  escript, 
car  il  eust  eu  plus  d'occasion  et  dargumentz  en  ses  plainctes  par- 
lant a  moy  que  avec  ung  aultre  nouveau  en  son  faict,  je  me  suis 
licentié  de  ces  Seigneurs  et  dans  cinq  ou  six  jours  je  me  mettray  en 
chemin  pour  aller  rendre  raison  de  ma  vilication  (3)  et  obeyr  a  ce 
quil  vous  playra  me  commander. 
De  Venize  ce  xvne  dOctobre  1557. 

(Arcli.  Aff.  étrangères.  Venise,  t.  vu.  fol.  81)  (originale  . 


GABRE   AU    DL'C    DE   FERRARE 

217.  —  [Venise],  20  octobre  1557 .  —  Monseigneur,  je  prépare  mon 
partement  pour  la  court,  puisque  Monsr  (4) Dagz,  mon  suc- 
cesseur, est  arrive,  lequel  vous  yra  bien  tost  visiter  delà  part  du  Roy, 
a  quoy  je  leusse  voluntiers  acompaigne  pour  prendre  congé  de 
Vostre]  Excellence   et  recepvoir  voz  commandemens,  [si  je  eusjse 

pense   que   cel eust  peu  porter  service   ou  remède  a  voz 

[t]rava[ulx],  a  quoy  je  ne espargner  ma  propre  vye 

quant  je  verray  <iuil    vous   seroit pour  le  moings, 

diray  je,  Monseigneur,  hault  et  clair  la  ou le  Roy  esl 

tenu  de  vous  ayder  et  détendre  vos  lie  maison propre 

et  espère  quil  le  fera,  sil  peult,  une  fois  avoir hors  du 

royaulme. 

Monseigneur,  je  me  tiendray  toute  ma  vye  a  ii quant 

il  vous  plaira  me  commander  quelque oy  je  seray, 

en  me  recommandant  très  humbleme[nt 

De  Venize  ce  xxe  jour  doctobre  1557. 

(Arcii.  de  Hodène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 

(1)  Pierre  deVillars,  qui  succéda  en  1560  à  Suavius  comme  évêque  de  Mirepoix. 

(2)  Le  cas  du  malheureux  duc  de  Ferrare  était,  eu  effet,  singulier.  Hercule 
n'était  pas  compris  dans  le  traité  de  paix  qui  allait  être  conclu,  le'ji  octobre  sui- 
vant, entre  le  Pape  et  Philippe  II.  et,  de  fait,  il  étail  menacé  de  supporter  seul 
les  conséquences  de  la  guerre.  Au  surplus,  non  seulement  son  infortune  n'exci- 
tait aucune  pitié,  mais  encore  les  petits  princes  de  son  voisinage  comptaient 
agrandir  leurs  étals  aux  dépens  du  duché  de  Ferrare  11  ne  fallut  rien  moins  que 
l'intervention  énergique  de  Cosme  de  Médicis  pour  que  la  paix  lui  fût  accordée, 
mais  aux  conditions  suivantes:  il  se  démettrait  de  son  titre  de  lieutenant  général 
de  la  Ligue,  ne  fournirait,  désormais,  ni  canons  ni  munitions  à  ses  allies,  res- 
tituerait San  Martino  à  Sigismond  de  Gonzague  el  ferait  la  paix  avec  Octave 
Farnèse.  Ces  conditions  humiliantes  furent  ratifiées  par  Philippe  II.  et  le  duc 
rentra  dans  l'inaction,  tout  heureux,  après  de  telles  secousses,  >\<'  conserver 
son  duché  indépendant  et  intact.  [Voir  Roi NAi  hi,  Renée  de  France,  p.  286  281 

(3)  Vilication  :  du  latin, vilUsatio,  administration. 

(4)  Les  mots  remplacés  par  des  points  manquent  dans  le  texte. 


[JANVIER    1558]  DOMINIQUE    DU    GABRE  279 


GABRE    A    M.  DE    NOAILLGS 

218. —  [Paris],  13  janvier  1558. —  Monsieur,  vous  aurez,  par  une 
depesche  du  Roy,  le  discours  que  m'a  este  monstre  de  la  prinse  de 
Cales  (1),  et  aurez  la  de  quoy  faire  garder  la  chambre  a  Monsieur 
l'Ambassadeur  d'Espaigne,  car  cest  a  vostre  reng  a  braver  mainte- 
nant, et  a  luy  a  se  cacher;  cela  nous  apportera  grande  repputation, 
mais  aussy  cela  vuydera  bien  noz  bourses,  .le  m'accoustre  de  ceste 
court,  comme  peult  faire  ung  homme  qui  sort  de  Venise,  mais 
jespere  en  sortir  bientost,  et  ny  revenir  que  le  plus  tard  que  je 
pourray.  On  m'a  donne  quelques  expectatives  sur  les  premiers  bé- 
néfices vacants,  j'en  donnerois  voluntiersla  moitié  pour  avoir  l'autre 
asseurée,  et  sy  ayme  mieulx  quitter  le  tout  que  d'attendre  icy  les 
occasions.  Il  ny  a  remède,  Monsieur,  de  faire  cognoistre  a  Monsieur 
de  S1  Ciergue  que  le  Roy  n'a  aulcun  interest  a  ses  quinze  cens  escus, 
que  cest  a  luy  a  y  deffendre  de  son  chef.  Nous  en  avons  este  assem- 
blez cejourd'huy  devant  Mons1'  le  Cardinal  de  Chastillon,  et  après 
tous  je  vous  doys  escripre  une  lettre  de  son  faict,  et  Mons1'  le  Car- 
dinal aussy  avec  une  depesche  du  Roy,  vous  en  ferez  après  le  mieux 
que  vous  pourrez,  mais  que  soys  hors  dicy,  j'en  lairray  le  pense- 
ment  a  luy  et  a  qui  il  appartiendra.  Nous  avons  forces  décimes  et 
extraordinaires  sur  l'église,  mais  je  croy  que  vous,  Monsieur,  pour 
estre  Ambassadeur,  ne  paierez  que  huict  decymes,  qui  est  aultant 
comme  ung  aultre  vacquant.  Voyla,  Monsieur,  tout  ce  que  je  vous 
scaurois  dire  pour  ceste  heure,  présentant  mes  recommandations  a 
vostre  bonne  grâce. 

De  Paris,  ce  xme  Janvier  1558  [58]. 


Vous  que  icy  ny  a  nulle  dolieza  ne  plaisir,  et  les  plus  grandz 

y  vivent  en  belitres  (2). 

'Arch.  Aff.  étrangères,  Venise,  t.  vu,  fol.  284)  (originale). 

(1)  Guise,  rappelé  en  France  après  la  défaite  de  Saint-Quentin,  fut  nommé 
lieutenant-général  du  royaume  ;  il  refoula  les  Espagnols  vers  le  Nord  et  prit 
Calais  aux  Anglais  le  8  janvier  1558.  Cette  victoire  releva  la  réputation  militaire 
de  la  France  et  permit  à  Henri  II  d'entamer  des  négociations  de  paix  honorables, 
<jui  aboutirent  au  traité  de  Cateau-Cambrésis  (3  avril  1559). 

(2)  Les  mots  remplacés  par  des  points  manquent  dans  le  texte. 


APPENDICE 


MÉMOIRES,     LETTRES,     DOCUMENTS     DIVERS.    RELATIFS     AUX 
NÉGOCIATIONS   DE    DOMINIQUE    DU   GABRE 

1. —  \ Ferrure],  15  mars  1553.  —  Articles  secretz  d'estroicte  intel- 
ligence, ligue  et  confœderation,  entre  le  Roy  très  chrestien  Henry 
2e  et  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  lesquelz  l'Evesque  de  Lodesve 
a  proposez  et  mis  en  avant,  a  mondit  Seigneur  le  Duc,  comme  mi- 
nistre de  Sa  Majesté,  et  ayant  charge  et  commission  de  venir  aux 
particularitez  et  moiens  de  effectuer  ladite  ligue  et  amytié.  Réser- 
vant sur  tout  le  bon  plaisir  du  Roy(l). 

Premier  article  Monseigneur  le  Duc   n'a  rien 

Premièrement,queleRoy  pren-  trouvé  de  mauvais  en  cest  article, 

dra  en  sa   protection  et  sauve-  bien  adict  que  l'on  a  accoustumé 

garde  tout  Testât,  pays,  terres  et  de  faire  un   dépost   de   quelque 

Seigneuryes  dudit  Seigneur  Duc  somme  d'argent  pour  sûreté  du 

de  Ferrare,  pour  iceulx  conserver  contenu  en  l'article.  Mais  je  luy 

et  deffendre  de  toutes  ses  forces  ay  faict  responce  qu'il  seroit  im- 

(1)  Nous  avons  eu  la  bonne  fortune  de  trouver  le  présent  projet  d'alliance,  tel 
qu'il  a  été  rédigé  et  annoté  par  du  Gabre  en  1553,  et  nous  en  donnons  ici  le  texte 
in  extenso. 

Ce  projet,  bien  qu'il  n'eût  rien  que  de  très  honorable,  suivant  la  judicieuse 
expression  de  M.  Rodocanachi  {Renée  de  France,  p.  226),  ne  reçut  pas  immédia- 
tement l'approbation  royale,  et  il  fallut  attendre,  deux  ans  encore,  avant  que  les 
stipulations  proposées  par  l'évêque  de  Lodève  fussent  acceptées.  Le  traité  défi- 
nitif signé  en  1555  par  le  cardinal  de  Lorraine  ne  différa  guère  de  celui  qu'avait 
préparé  du  Gabre.  Cela  s'explique  par  cette  raison  qu'Henri  II,  connaissant  l'in" 
fluence  dont  jouissait  le  duc  de  Ferrare  dans  le  nord  de  l'Italie,  ne  pouvait  se 
passer  de  son  alliance  et  était  obligé  de  l'acquérir,  même  aux  conditions  les 
plus  onéreuses. 

Si  ce  document  n'avait  rien  que  de  très  honorable,  en  1553,  il  est  bien  difficile 
de  comprendre  qu'il  soit  devenu,  deux  ans  plus  tard,  l'objet  de  critiques  acerbes 
et  qu'un  contemporain  s'en  soit  servi  pour  déverser  sur  l'évêque  de  Lodève  les 
plus  injustes  calomnies. 

Tel  est  pourtant  le  rôle  étrange  que  joua  Jean  de  Morvillers. 

On  trouvera  plus  loin  (pièce  4  du  présent  Appendice)  le  mémoire  que  rédigea 
ce  dernier  sous  l'empire  d'un  sentiment  trop  facile  à  deviner —  Morvillers  n'avait 
pu  pardonner  à  du  Gabre  de  lui  avoir  succédé  au  poste  envié  d'ambassadeur  à 
Venise. 


28-2 


NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE   DU   GABRE  [MARS    1553] 

possible  en  ce  temps  de  faire 
ledit  deppost,  que  le  Duc  Otta- 
vio  (i)  n'en  avoit  demandé,  et 
neantmoins  chacun  a  veu  le  grand 
debvoir  que  Sa  Majesté  en  avoit 
faict,  par  quoy  n'en  fault  parler 
icv. 


et  finances,  avoir  et  pouvoir  en- 
vers et  contre  tous  ceulx  qui 
vouldront  offencer  et  assaillir  le- 
dit sr  Duc,  en  aulcun  lieu  de  son- 
dit  estât,  pays  et  Seigneuryes, 
sans  excepter  le  Pape,  l'Empe- 
reur, ne  aucun  autre  prince  et 
potentat  qui  voulust  entrepren- 
dre de  faire  la  guerre  audit  Duc 
de  Ferrare,  laquelle  advenant, 
sadite  Majesté  promet  et  s'oblige, 
dresser  et  mettre  sus,  une  armée 
suffisante,  non  seullement  pour 
résister  et  deffendre  ledit  pays, 
mais  pour  devenir  supérieur  et 
victorieux,  avec  l'a-yde  de  Nostre 
Seigneur,  a  rencontre  de  ceux 
qui  y  vouldront  entreprendre. 
Promet  aussy,  sadite  Majesté, 
payer  et  souldoier  tous  les  gens 
de  guerre,  de  pied  et  de  cheval, 
de  ladicte  armée,  et  fournir  aux 
fraiz  de  l'artillerye  qui  sera  né- 
cessaire pour  ladicte  année,  et 
en  campagne  seulement. 


2.  —  Que,  advenant  la  guerre, 
s'il  est  nécessaire  fort ilier  aucune 
desdites  places  et  faire  fortz  nou- 
veaulz  bastions,  cavalliers.  tran- 
chées et  autres  fortifications  né- 
cessaires pressantes,  et  non  vo- 
lontaires. Sa  Majesté  les  fera  tain' 
a  ces  propres  coutz  et  despensel 
de  ses  propres  deniers.  Laissant 
audit  sieur  Duc  a  porter  la  des- 
pence des  autres  fortiffîcations 
qu'il  vouldra  faire  volontaires, 
non  pressées,  ne  en  temps  de 
guerre. 


Monsieur  le  Duc  a  dicl  quil 
faut  faire  les  fortifications  Me 
Verse!  -i  .  et  de  Rege  (3)  et  Del- 
phinal  (4),  qui  ne  doibvent  estre. 
appellées  volontaires,  d'autant 
qu'elles  sont  nécessaires  pour 
rendre  tout  son  estai  imprenable 
et  quasy  inaccessible,  pourquoy 
Sa  Majesté  y  pourroit  contribuer 
pour  sa  part. 


(J)  Octave  Farnèse. 

(2)  Verseil,  ville  d'Italie,  à  15  kil  de  Novare. 

(3)  Reggio. 

(4)  Final  Nelli  Emilia,  ville  d'Italie,  province  et  arrondissement  de  Modèn* 


[MARS    1553]  APPENDICE 

3  _  QUe  en  temps  de  paix,  et  Monsieur 
non  suspect  pour  tenir  tout  ledit  cest  article, 
estât  en  seurete  et  hors  de  dan- 
ger et  destre  surprins  de  ses  voi- 
sins et  ennemis,  Sa  Majesté  paye- 
ra et  entretiendra  de  ses  propres 
deniers  audit  Sieur  Duc  deux  mil 
hommes  de  pied  de  garnison  or- 
dinaire, que  ledit  Sieur  Duc  dé- 
partira par  ses  places,  ainsy  que 
bon  luy  semblera. 


le 


283 
Duc   trouve  bon 


4.  —  Et,  oultre  cela,  baillera 
audit  Sieur  Duc  de  Ferrare  cent 
hommes  d'armes  du  nombre  des 
vieilles  bandes  et  ordonnances 
de  France,  dont  ledit  Sieur  Duc 
sera  chef  et  capitaine,  que  Sa  Ma- 
jesté fera  payer  sur  son  ordinaire 
par  quartiers,  de  troys  moys  en 
trois  moys,  en  temps  de  paix  et 
de  guerre,  a  la  solde  accoustumée 
des  autres,  avec  les  estatz  et  ap- 
poinctement  de  cappitaine,  lieu- 
tenant ou  enseigne,  laquelle  com- 
paignie  de  cent  hommes  d'ar- 
mes, ledit  Sr  Duc  pourra  faire 
d'Italiens,  ses  subjectz  et  autres, 
comme  il  luy  semblera  bon,  et 
demeureront  dans  les  pays  dudit 
Sieur  Duc  en  garnison,  despartis 
dans  sesdites  places  comme  bon 
luy  semblera. 


Il  a  aussi  trouvé  bon  cet  ar- 
ticle. 


5.  —  Que  Sa  Majesté  baillera 
audit  Sr  Duc  pouvoir,  par  lettres  cle. 
patentes,  de  Lieutenant  général 
de  sadite  Majesté  en  toute  l'Ita- 
lie, avecq  ample  autorité  de  com- 
mander a  tous  les  gens  de  guerre 
tant  de  pié  que  de  cheval,  faire 
lever,  casser  et  remettre,  traicter 
et  accorder  au  nom  de  Sa  Majesté 
toutes  ligues,  accordz,  traictez, 


Il  a  trouvé  bon  tout  cest  arti- 


284 


NÉGOCIATIONS  DE  DOMINIQUE  DU  GABRE     [MARS  1553] 


trefves  et  suspensions  d'armes- 
avecq  quelconque  prince  et  po- 
tentat que  ce  soit,  et  selon  les 
occurences  qui  se  présenteront, 
faire  dons  et  presens,  ordonner 
des  finances  et  de  toutes  les  des- 
pences ordinaires  et  extraordi- 
naires, comme  ont  accoustume 
tous  autres  lieuxtenans  de  Sa  Ma- 
jesté, avec  promesse  que  autre 
prince  ni  gentilhomme,  que  le 
Roy  voulut  envoyer  en  Italie,  ne 
pourra  commander  audit  Sieur 
Duc,  saouf  et  réservé  la  personne 
de  Sa  Majesté  le  Daulphin  ou 
aulcun  de  Messeigneurs  les  en- 
fans  du  "Roy. 


6.  —  Que  pour  aider  au  s1'  Duc 
a  porter  la  despence  quil  sera 
contraint  de  croistre  pour  la 
conduicte  desdictes  affaires,  Sa 
Majesté  luy  donnera  de  pension 
ordinaire,  et  pour  son  plat  (1),  la 
somme  de  xvinm  escus  par  an, 
qui  est  a  la  raison  de  mil  cinq 
cens  escus  par  moys,  par  le  tré- 
sorier de  l'extraordinaire,  estant 
en  Italie,  par  sa  seule  quittance, 
comme  est  accoustume  aux  au- 
tres lieuxtenans. 


Monsieur  le  Duc  a  dict  que  l'on 
eust  bien  autant  donne  au  Duc 
d'Urbin  et  qu'on  luy  pourroit 
bien  donner  n"'  ecus  par  mois, 
mais  qu'il  ne  voudroit  pas  a  cela 
qu'on  ne  lusi  d'accord. 


7.  —  Que  pour  soulager  ledit 
Sieur  en  si  grandes  affaires,  et 
luy  bailler  personnes  d'honneur 
et  dexperience  au  faict  de  la 
guerre,  sur  lesquelz  il  se  puisse 
reposer  et  descharger  d'une  par- 
tie desdites  affaires,  sera  faict 
toute  diligence  daccommoder  au 


Monsieur  le  Duc  dict  que  le 
vray  liltre  du  sieur  Camille  doil 
estre  Lieutenant  du  Roy  en  Tos- 
cane, et  Monsieur  de  Termes  en 
Lombardie.  et  allant  a  la  guerre 
comme  deux  ne  se  desdaigne- 
ront pas  de  mener  soubz  luy 
lavant  garde,  et  que  le  Sr  Camille 


i  Expression  ancienne,  prise  dans  le  sens  de  bénéfices,  d'émoluments,  l'ar 
exemple:  «  Monseigneur  de  Guise  pour  son  plat  1000  livres».  Bibl.  nat.,  Ft. 
10395,  fol.  6.  Comptes  de  l'armée  du  duc  de  Guise  en  1581  . 


[MARS    1553]  APPENDICE 

service  du  Roy  le  Sr  Camille  Ur- 
sin(l),luybaillanttiltre  et  qualité 
de  Cappitaine  général  des  armées 
du  Roy  ou  de  Lieutenant  du  Roy 
en  Toscane,  avec  xm  escus  de 
pension,  et  sera  aussi  accom- 
modé, au  service  dudit  Sieur,  le 
sr  Baptistin  Strossy,  avec  pen- 
sion de  nm  imc  escus  par  an,  et 
tiltre  de  commissaire  général,  et 
superintendant  sur  les  monstres 
veues  et  reveues  des  gens  de 
guerre,  pour  lexpérience  et  gran- 
de suffisance  dont  ledit  sr  Duc 
le  congnoist. 


285 

doit  avoir  une  compagnie  d'hom- 
mes d'armes  pour  ce  quil  en 
avoit  une  des  Vénitiens.  Quant 
au  sr  Baptistin,  que  c'est  le  plus 
digne  maistre  de  camp  qu'on 
puisse  trouver  en  Italie,  et  quil 
luy  fauldroit  ce  tiltre  avec  la 
superintendance   des   monstres. 


8.  —  Que,  advenant  que  Sa 
Majesté  face  guerre  offencive  et 
veuille  faire  conqueste  en  la  Du- 
ché de  Millan,  au  pays  de  Lom- 
bardye,  en  la  Toscane,  ou  au 
Royaume  de  Naples,  s'il  advient 
avec  l'ayde  de  INostre  Seigneur, 
il  face  conqueste  desdits  pays  ou 
partie  diceulx,  Sa  Majesté  sera 
contente  pour  agrandir  Testât  ou 
maison  de  Ferrare  et  recongnois- 
tre  l'amytié  et  bienvueillance, 
confirmées  par  tant  d'alliances, 
proximité  de  sang,  comme  elle 
est  aujourd'buy,  estans  les  en- 
fans  dudit  Sieur  Duc,  filz  d'une 
fille  de  France,  Sa  Majesté  bail- 
lera en  mains  dudit  Sieur  Duc, 
pour  en  jouir  a  jamais  luy  et  les 
siens:  C'est  assavoir  en  Lombar- 
dye  la  ville  de  Crémone  et  les 
places  et  chasteaulx  en  depen- 
dans.  En  la  Toscane,  les  villes  de 
Pise  et  de  Ligorne  (2),  et  au 
Royaulme  de   Naples  le  pais  et 


Ledit  sr  Duc  dit  que  pour  se 
mettre,  luy  et  son  estât  en  dan- 
ger, il  mérite  bien  Crémone  sans 
paiement  ne  sans  la  luy  faire 
achepter,  qu'on  luy  en  a  donne 
autrefois  l'intention.  Quant  aux 
autres,  il  s'en  remet  toujours  a 
la  bonne  vollonté  du  Roy. 


(1    Camille»  Pardo  Orsini. 
(2)  Livourne. 


286 


NÉGOCIATIONS   DE    DOMINIQUE   DU    GABRE  [MARS    1553J 


villes  de  l'Abbrucio,  en  payant 
néantmoings  par  ledit  sr  Duc  a 
Sa  Majesté  ce  que  lesdites  terres, 
villes  et  pais  seront  estimez  de 
valleur,  a  raison  de  dix  pour 
cent  du  revenu  d'icelles,  aussy 
tost  qu'il  se  trouvera  possesseur 
pacificque  et  jouissant  des  dites 
villes  par  la  conqueste  et  forces 
du  Roy. 


9.  —  Et,  réciproquement,  ledit 
sr  Duc,  pour  continuer  et  persé- 
vérer en  l'amityé  et  servitude 
que  les  Ducs,  ses  prédécesseurs 
et  ancestres,  ont  toujours  eu 
avec  la  maison  de  France,  de 
laquelle  ils  ont  toujours  receu 
l'honneur  et  faveur  en  leurs  affai- 
res, ou  recongnoistre  en  partie 
la  faveur  et  amityé  qu'il  plaist  au 
Roy  luy  porter  et  a  sa  maison, 
se  déclarera  ouvertement  servi- 
teur du  Roy,  promettra  et  s'obli- 
gera servir  Sa  Majesté  en  temps 
de  guerre  et  de  paix  de  sa  per- 
sonne et  de  son  estât,  pais,  terres 
et  seigneuries,  villes,  places  for- 
tes et  plat  pays,  pour  en  icelles 
laisser  entrer  Sa  Majesté,  ses 
serviteurs  et  ministres,  y  faire 
masse  de  gens  et  armes,  aller, 
passer  et  revenir  fortz  et  faibles, 
selon  que  le  temps  et  l'occasion 
le  requerra,  bailler  et  administrer 
vivres,  logis  et  toutes  autres  com- 
moditez  possibles,  en  paiant  tou- 
tesfois  et  vivans  sans  desordres, 
ne  faire  excedz,  et  demeurons 
toujours  lesdictes  gens  de  guerre 
soubz  l'obéissance  dudit  s'  Duc. 


Monsieur  le  Duc  n'a  rien  trouvé 
de  mauvais  en  cet  article. 


10.  —  Que  ledit   sr  Duc  se  dé-         Il  n'a  rien  trouve  de  mauvais 
clarera  amv   des  amis   du  Roy,      en  cest  article,    et  jt>   luy  a\  «lit 


franchement- que  sur  ces  motz 
S'  Siège  ny  S1  Empire,  le  Pape 
n'y  l'Empereur  ne  sont  pas 
exceptez. 


Il  n'a  rien  trouvé  mauvais  en 
cest  article. 


[mars  1553]  appendice  287 

ennemy  desennemys,  sans  aucun 
en  excepter,  sauf  et  réservé  le 
S1  Siège  Apostolicque  et  le  Saint 
Empire  (1),  desquelz  il  veult  de- 
meurer toujours  bon  vassal,  et 
ne  permettra  en  temps  de  guerre 
que  les  ennemis  de  Sa  Majesté 
ayent  passage,  vivres  et  commo- 
ditez  quelconques  en  sesditz 
pays,  terres  et  seigneuries. 

11.  —  Que,  advenant  que  Sa 
Majesté  vueille  faire  guerre  offen- 
sive et  conqueste  ausdictz  pays 
de  Naples,  de  la  Toscane  et  de 
la  Lombardye,  ledit  sr  Duc  pro- 
mettra de  bailler  et  consigner 
entre  les  mains  des  ministres  du 
Roy,  dix  canons,  quatre  couleu- 
vrines  (2),  quatre  sacres  (3)  et 
quatre  gorfalques,  avec  autres 
sept  pièces  de  campagne,  mon- 
tées et  équippées,  de  leurs  afl'ustz 
et  eqnippages  nécessaires,  a  la 
charge  que  Sa  Majesté  sera  tenue, 
dans  deux  moys  après,  que  la 
guerre  sera  finye,  les  luy  rendre 
dans  Ferrare  en  la  mesme  bonté, 
qualité  et  equippagequil  les  aura 
délivrez,  et  sy  elles  estoient  gas- 
tées,  esventées  ne  empirées,  les 
fera  reffaire  et  refondre,  aux  des- 
pens  de  sadite  Majesté.  Et  s'il 
s'en  falloit  ou  perdoit  aulcune, 
sadite  Majesté  sera  tenue  payer 
pour  canon  la  somme  de  , 

pour  couleuvrine  (4)         ,  et  pour 
les  autres  pièces 

(1)  Saint  Empire  Romain  :  .litre  <|ue  porta  l'ancien  Empire  d'Allemagne  depuis 
le  xe  siècle  jusqu'en  1806. 

(2)  Couleuvrines  :  sorte  do  petits  canons.  En  général,  les  pièces  d'artillerie 
recevaient  des  noms  d'animaux,  tels  que  dragons,  serpentins,  sacres,  fauconneaux, 
etc. 

(3)  Voir  annotation  ci-dessus. 

(4)  Mots  en  blanc  dans  le  texte. 


288  NÉGOCIATIONS   DE   DOMINIQUE   DU   GABRE  [MARS    1553] 

12.  —  Que  ne  pouvant.  Sa  Ma-  Il  a  esté  content, 
jesté,  recouvrer  d'ailleurs  et 
promptement  pouldres,  boulletz 
et  autres  munitions  d'artillerye, 
ledict  sr  Duc  en  accommodera  des 
siennes.  Sa  Majesté  en  payant 
raisonnablement  ce  qu'elles  val- 
lent. 


13.  —  Que  Sa  Majesté  essayera, 
par  toutes  voyes  bonneste.  lici- 
tes et  honnorables,  de  recouvrer 
du  Duc  Octavio  de  Farneze  la  ville 
de  Parme  et  estât  du  Parmezan, 
en  luy  baillant  bonne  et  suffizante 
recompense,  au  autrement  et  en 
cas  quil  se  puisse  trouver  expé- 
dient, que,  avec  le  contentement 
dudit  Duc  de  Parme,  ledit  estai 
tombast  entre  les  mains  de  Sa 
Majesté,  en  ce  cas  elle  promet 
de  le  bailler  et  mettre  en  mains 
dudit  Sieur  Duc  de  Ferrare,  el 
len  faire  Seigneur  et  possesseur, 
pour  en  jouir,  luy  el  les  siens,  en 
payant,  par  ledit  sr  Duc  a  Sa  Ma- 
jesté, telle  somme  de  deniers 
quil  sera  advise  et  raisonnable, 
eu  esgard  a  la  valleur  et  juste 
estimation  dudit  estai.  A  la  charge 
de  recongnoistre  pour  Seigneur 
souverain  ledit  Sr  Roy  et  de  luy 
jurer  et  promettre  serment  et 
debvoir  de  bon  et  loyal  vassal. 

14.  —  Que  ledit  sieur  Duc, 
avant  qu'entrer  en  déclaration 
manifeste,  esseyera  de  1ère  tout 
office  et  plain  debvoir  de  persua- 
der le  Pape  et  la  Seigneurie  de 
Venise,  avec  l'aide  des  ministres 
du  Roy,  de  voulloir  entrer  en 
ligue  et  confédération  deffensive 
ou  offensive  avec  sadite  Majesté, 


Il  désire  fort,  sur  cet  article, 
entendre  l'intention  du  Roy  et 
de  Mr  le  Connestable. 


Il  a  trouvé  bon  cesl  article. 


[MARS    1553^  APPENDICE  289 

en  laquelle  ledit  Sr  Duc  de  Fer- 
rare  entrera  avec  les  conditions 
qui  seront  advisées  et  conclues, 
demeuransneantmoings,  ces  pre- 
sens  articles,  secretz  en  leur  en- 
tier. 

15.  —  Et  la  ou  il  adviendroil  H  n'a  rien  trouvé  mauvais  en 

qu'ilz  en  fussent  refusans  et  que  cest  article. 
Sa  Majesté  fut  contraincte  venir 
a  guerre  contre  les  estatz  et  pais 
de  l'eglize  et  des  Vénitiens,  et 
que  sadite  Majesté  auroit  conquis 
villes,  places  et  pays  de  leurs 
dits  estais,  sera  restitué  de  lad 
conqueste  audit  sieur  Duc  toutes 
les  places  et  pays  sur  lesquelz  il 
a  droict  et  prétentions,  et  qu'il 
prétend  luy  estre  usurpées  par 
les  Vénitiens,  et  si  Ravenne  et 
Cervie  tombaient  entre  les  mains 
et  puissance  du  Roy,  sadite  Ma- 
jesté en  accommodera  ledit  >r 
Duc  et  le  mettra  en  ses  mains. 
pour  en  jouir  luy  et  les  siens,  en 
faisant  pareilles  remonstrances 
et  vassal  de  Sa  Majesté,  et  payant 
a  sadite  Majesté,  pour  partie  de 
la  despence  qu'il  aura  portée  aus- 
dites  guerres,  ce  que  lesdites 
places  seront  estimées  a  raison 
de  dix  pour  cent  du  revenu. 

16.  —  Que  ledit  sieur  Duc  \\  a  trouvé  bon  tout  cest  arti- 
n*entrera  en  aulcune  déclaration  cie. 
ny  ces  présens  articles  ne  seront 
aucunement  obligatoires  et  n'au- 
ront aucune  force  ne  vigueur. 
jusques  a  ce  que  sadite  Majesté 
aura  faict  passer  en  Italie  tel 
nombre  de  Suisses,  d'bommes 
d'armes  etsoldatz  français,  qui, 
joinctz  avec  les  Daliens  qui  sont 
de  présent  au  service  du  Roy,  Sa 


290  NÉGOCIATIONS    DE   DOMINIQUE    DU    GABFŒ  [MARS    1553] 

Majesté  soit  maistre  de  la  cam- 
pagne pour  lever  le  siège  de 
Sienne,  et  avecques  moyen  d'of- 
fencer  et  dassaillir  les  eslatz  des 
susdictz  ;  et  que  pour  lentretene- 
ment  de  ladite  armée.  Sa  Ma- 
jesté ave  consigné  et  faict  fons 
a  Venise,  a  Ferrare,  ou  a  Rome 
de  quatre  cens  mil  escuz  comp- 
tans  pour  entretenir  ladite  armée 
troys  moys. 


17.  —  Que  sy  Sienne,  cepen- 
dant, venoit  a  estre  perdue,  et 
entre  les  mains  de  l'Empereur, 
et  que  sa  dite  Majesté  ne  voulut 
faire  entreprise  en  Italie,  ne  au- 
trement  se  prevalloir,  en  cest 
esté  prochain,  de  la  faveur  de 
l'armée  de  Levant,  qui  esl  atten- 
due et  qui  fera  Sa  Majesté  supe- 
rieure  de  la  mer.  et.  par  ce 
moyen,  luy  rendra  toutes  entre- 
prises aisées  et  facilles  on  Ita- 
lye.  en  ce  cas  la,  ledit  s'  Duc  ne 
entend  estre  tenu  a  aulcunes 
choses  contenues  en  cesdilz  pre- 
sens  articles. 


Il  a  trouvé  hon  tout  cest  arti- 


cle. 


18.  —  <Jue  Sa  Majesté  no 
pourra  faire  traicté  'le  paix,  tref- 
ve,  ne  autre  forme  daccord  avec 
lEmpereur,  nv  princes  Italiens. 
que  ledit  Seigneur  Duc  ny  -<>it 
comprins  comme  principal  con- 
trahanl,  luy.  son  pays  el  -es  suh- 
getz. 


Il  a  trouvé  hon  cest  article,  y 
adjoustant  que  quand  le  Ro\  lui 
aurra  l'ailly  de  promesse  en  quel- 
que chose,  il  entend  estre  deso- 
blige de  tout  le  contenu  en  ces 
articles. 


Ferrare  le  Ireiziesme  mars  mil  cinq  cens  cinquante  trois. 


Bibl.  nat..  collection  Loménie  de  Rrienne,  vol.  6,  fol.   I6»\ 


[novembre  1553]  appendice  291 


PROCURATION    DE    HENRI    II    A    GABRE 

2.  —  [Fontainebleau],  28  novembre  1553.  —  Henry,  par  la  grâce  de 
Dieu,  Roy  de  France,  a  tous  ceulx  que  ces  présentes  lettres  verront, 
salut.  Comme  nostre  très  chère  et  très  amée  compagne  la  Reyne, 
ayant  entendu  que,  a  Venize  et  ailleurs  en  Italye,  aucuns  se  seroient 
présentés  a  nos  ministres  pour  nous  secourir  et  ayder  par  prest  de 
certaines  bonnes  et  notables  sommes,  pour  subvenir  aux  besoins  de 
nos  affaires  de  guerres  et  aux  grandes  et  inestimables  despences 
que  nous  avons  a  supporter  et  conduire  en  les  assignant,  asseurant 
de  leurs  payements  et  rembourcements,  avec  honnestes  proufict  et 
interest  sur  nos  domaines,  aydes,  fermes  et  gabelles  de  Lyonnois 
dont  ils  demandent  leur  estre  faict  vente  et  aliénation,  les  aucuns 
au  denier  douze,  les  autres  au  denier  quatorze,  ou  plus  ou  moins, 
selon  les  sommes  quils  nous  presteront.  Et  considérant  nostre  dite 
compaigne  quaudit  pays  de  Lyonnois,  nous  n'avions  moien,  pour 
les  aliénations  précédentes,  de  leur  bailler  assignation,  ne  asseurance 
de  leurs  dicts  payements,  et  rembourcements,  elle  nous  avoit  sup- 
plyé  et  requis  de  nous  voulloir  ayder  de  tout  ce  qu'elle  a,  et  tient  et 
possède,  de  bien  immeuble-immeuble  par  succession  de  ses  feu 
père  et  mère,  en  nostre  pays  dÀuvergne  (1),  voisin  dudit  Lyonnois 
et  ailleurs  pour  le  vendre,  aliéner,  engaiger  et  en  disposer  comme 
de  nostre  propre,  ou  autrement  la  voulloir  autoriser  pour  ce  faire, 
affin  de  nous  bailler  les  deniers  quelle  en  pourra  tirer  et  recouvrer, 
laquelle  authorisation  nous  luy  aurions  a  sa  très  instante  requeste 
accordée,  au  moyen  de  quoy  elle  auroit  décerné  ses  lettres  de  pou- 
voir et  procuration  specialle  a  noz  amez  et  féaux  les  Eveques  de 
Lodève  et  sieur  de  Selve,  nostre  conseiller  maistre  des  requestes 
ordinaire  de  nostre  hostel  et  Ambassadeur  devers  la  Seigneurie  de 
Venise,  et  a  chacun  d'eulx,  l'un  en  l'absence  de  laultre,  pour  et  en 
son  nom,  authorisée  de  nous  comme  dessus,  vendre,  alliener  et 
engaiger  a  telles  personnes  et  pour  tel  prix  et  sommes  de  deniers 
que  l'on  pourra  trouver,  les  biens,  comtes,  baronnies,  terres  et  pos- 
sessions qui  luy  appartiennent  de  son  propre  et  par  succession  de 
ses  dicts  feu  père  el  mère,  tant  es  pays  d'Auvergne,  que  ailleurs  ou 
besoin  sera,  et  dautant  que  ceux  avec  lesquels  on  conviendra  des 
venditions,  transportz,  aliénations  el  engaigemens  des  terres  de 
nostre   dite   compaigne  pour  en   recouvrer    argent,  voudront    par 

(il  Henri  II  avait  délaissé  à  Catherine  de  Médicis,  le  12  juillet  1549,  la  jouissance 
des  domaines  qui  lui  étaient  échus  de  la  succession  de  ses  père  et  mère.  Cathe- 
rine avait  pour  mère,  on  le  sait,  .Madeleine  de  la  Tour  d'Auvergne,  qui  possédait 
la  baronnie  de  La  Tour. 


292  NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE    DU    GABRE      '.NOVEMBRE    1553] 

adventure  avoir  de  nous  quelque  seuretés,  promesses  et  obligations 
pour  l'entretenement  et  observation  des  choses  qui  traictées,  passées, 
et  accordées  sur  lesdiles  ventes,  cessions,  transportz  et  aliénations, 
et  engaigement  a  eeste  cause  est  besoin  et  requis,  commectre  et 
députer  de  nostre  part  aulcuns  bqns  el  notables  personnaiges  avec 
suffisant  pouvoir  de  nous  a  ceste  fin,  scavoir  taisons  que  nous  con- 
sidérant que  nous  ne  scaurions  faire  meilleure  élection  pour  cesl 
efîect  que  des  personnes  desditz  Eveque  de  Lodeve  et  Sieur  de 
Selve,  pour  la  bonne  et  entière  confiance  que  nous  avons  de  leur 
personnes  e!  de  leurs  sens,  vertu,  probité,  loyaulté,  expérience  et 
bonne  dilligence,  iceux  et  chacun  d'eulx  en  l'absence  de  l'aultre, 
avons  commis,  ordonne  et  deppute,  commettons,  ordonnons  et 
depputtons  par  ces  présentes,  avec  plein  pouvoir,  autorite,  com- 
mission et  mandement  spécial,  pour  et  en  nostre  nom,  convenir 
avec  les  marchans  Italyens  el  autres,  qui,  par  engaigement,  consti- 
tution de  renie,  vendition  ou  allienation,  voudront  avoir  et  prendre 
desdites  comtes,  terres  et  seigneuries  appartenant  a  nostre  dite 
compaigne,  et  leur  faire  et  bailler  par  nous  el  en  nostre  nom  imites 
les  promesses,  seureté,  obligations,  qui  seront  et  verront  estre  a 
faire,  et  dont  ils  seront  requis  el  recherchés  par  lesdits  presleurs 
et  acquéreurs  pour  l'entretenemenl  el  observation  des  choses  qui 
seront  traitées,  passées  el  accordées  sur  les  susdites  ventes,  aliéna- 
tions el  engaigemens,  loul  ainsi  que  nous  mesmes  ferions  el  l'aire 
pourrions  si  presens  y  estions  en  personne  ;  jacoyt  que  le  cas  re- 
quisl  mandement  plus  spécial  que  en  ces  présentes  n'esl  exprimé. 
Promettant  en  bonne  foi  et  parolle  de  Roy  par  cesdites  présentes 
signées  de  nostre  main,  el  su.  bs  1  obligation  el  hypothèques  de  tous, 
et  chacuns  nos  biens  meubles  el  immeubles  presens  el  advenir 
avoir  agréable  et  tenir  terme  el  stable  el  ratifier  en  la  meilleure 
forme  que  taire  ce  pourra,  toul  ce  que  par  nos  dicts  depputes  aura 
este  faict,  promis,  accorde  el  asseuré  pour  non-,  el  en  nostre  dict 
nom  ausdits  presleurs  et  acquéreurs  ou  leurs  procureurs  el  deppu- 
tes es  choses  dessusdite-,  leur-  circonstance  el  deppendances,  sans 
jamais  aller  ne  venir  directemenl  ou  indirectement,  au  contraire, 
en  quelque  manière  que  ce  soit  :  en  outre,  promettons  encore,  que 
si  besoin  est,  el  requis  en  sommes  que  nous  ferons  omologuer  el 
enregistrer  en  nos  Courts  de  Parlemenl  el  Chambre  de  nos  Comptes 
ces  dites  présentes,  ausquelles  en  tesmoin  de  ce  nous  avons  laid 
mestre  nostre  scel. 

Donne   a   Fontainebleau  le   vingl   huictiesme  jour  de  Novembre 
l'an  mil  cinq  cens  cinquante  trois  de  nostre  règne,  le  septiesme. 

Signé  :  Henry. 

Sur  le  reply,   l)i  nui  h,  el  scelle  en  double  queue  de  cire  jaune. 

Ois  de  Grenoble,  tel.  L9  v° . 


[septembre  1554]  appendice  293 


NOMINATION    DE    GABRE    A    L  AMBASSADE    DE    VENISE 

3. —  Compiègjie],  5  septembre  1554.  —  Monsieur  de  Lodesve, 
vous  entendrés,  par  le  sr  de  S1  Luc  I  .  gentilhomme  de  ma  cham- 
bre, ce  que  je  luy  ay  donne  charge  de  dire  el  de  faire  es  lieiiN  et 
endroicts  nu  il  vu.  car  il  vous  communiquera  les  mémoire  et  instruc- 
tion bien  amples  que  je  luy  ay  faicl  bailler,  vous  [triant  le  croire  en 
cest  endroicl  comme  moy  mesrne,  et  avoir  au  surplus  en  toute 
recommandation  que  vous  avez  eu  jusques  icy  le  mesnaigement  de 
nos  despences  de  delà,  pour  le  bien  de  mon  service  et  la  conduitte 
de  mes  affaires,  car  vous  voyes  quil  en  est  plus  temps  et  saison  que 
jamais. 

Au  demeurant.  Monsieur  de  Lodesve,  voyant  que  le  besoin  et  la 
nécessité  de  mesdictes  affaires  requièrent  que  j'ay  un  Ambassadeur 
a  Rome  auprès  de  uostre  S  Pène,  et  que  quant  bien  le  sr  de  Lanssac 
n'auroit  esié  pris  prisonnier  (2),  comme  vous  m'avés  cscript  en 
avoir  eu  advertissement,  si  est  ce  .que  je  vouldrois  bien  l'emploier 
ailleurs  que  la;  a  cesl  ■  cause,  j'escrips  présentement  au  sieur  de 
Selve  quil  sen  aille  le  plustosl  quil  pourra,  audit  itome  pour  y  résider 
mon  ambassadeur  et  en  son  lieu  j'ay  advisé  de  vousenvoier  a  Venise 
pour  y  faire  semblable  résidence,  avec  charge  de  mon  ambassadeur 
devers  la  Seigneurye,  a  laquelle  j'en  escrips  par  une  lettre  que  j'ai 
envoyée  audict  sr  de  Selve.  faisant  mention  de  ra  revocquation  et 
de  l'eslection  que  jay  faict  de  vous  pour  tenir  sa  place,  dont  jad- 
vertis  aussy  mon  oncle.  .Monsieur  le  Duc  de  Ferrare.  et  que  ceste 
charge  ne  vous  empeschera  point   de   satisfl'aire   a  celle  que  vous 

1  Valeran  d'Espinay  de  Saint-Luc.  Il  fut  envoyé  de  Rome  à  Sienne  en  1554, 
au  mois  d'octobre,  par  les  cardinaux  Farnèse  et  du  Bellay.  Voir  lettres  de^lils 
cardinaux,  Bibl.  nat  .  Fr.  20447,  fol    2-25  . 

Saint-Luc  vint  à  Montalcin,  vit  Strozzi,  entra  dans  Sienne,  et  écrivit  au  roi. 
(Bibl.  nat.,  Fr.  20642.  toi.  36).  —  Il  devint  plus  tard  gentilhomme  de  la  Chambre 
du  Roi  et  maréchal  de  camp  dans  l'armée  que  le  due  de  Guise  conduisit  en  Italie. 
(Bibl.  nat  .  Fr.  10395.  Comptes  de  l'armée  du  duc  de  Guise'.  —  Voir  aussi 
Montluc,  édit.  de  Ruble,  t.  iv.  p.  17  . 

2  Le  maréchal  rie  Brissac,  sachanl  Montluc  en  détresse,  avait  mandé  un 
courrier  à  Borne  pour  donner  ordre  à  M.  de  Lansac  de  venir  le  rejoindre  à  Sienne. 
Fn  arrivant  à  Montalcin,  Lansac  reçu!  l'avis  de  continuer  sa  route  à  pied  sous 
l'escorte  de  deux  gardes  et  d'un  de  ses  serviteurs  :  mais,  comme  il  était  sur  le 
point  d'atteindre  Sienne,  des  soldats  ennemis  s'emparèrent  de  lui  et  le  condui- 
sirent au  marquis  de  Marignan  qui  le  retint  prisonnier,  jusqu'à  la  tin  delà 
guerre,  à  Florence,  ou  il  lut  traité,  non  en  diplomate,  mais  en  espion.  {Com- 
mentaires de  Montluc.  edit.   de  Ruble,  t.  iv,  p.  468  . 

Ribier  (t.  il,  p.  531-34  indique,  clans  une  lettre  du  cardinal  d'Armagnac  au 
Connétable,  la  date  du  ]s  août  1554  comme  celle  où  se  passa  cet  événement. 


294  NÉGOCIATIONS   DE   DOMINIQUE   DU    GABRE  [1555] 

aves  eu  jusqu'icy  auprès  de  luy,  car  elles  sont  deppendantes  l'une* 
de  l'aultre,  et  quand  il  sera  besoin  vous  le  viendrés  tousjours  trouver 
pour  négocier  avec  luy  ce  quil  s'offrira,  estimant  que  pour  vostre 
absence  dudict  Venise,  ainsi  par  bouttées  (1),  mes  affaires  et  ser- 
vices n'en  pourront  porter  ne  souffrir  aucun  préjudice  ne  dommaige, 
par  quoy  vous  regarderes  a  vous  préparer,  pour  faire  ce  voyage  et 
en  suivre  en  cest  endroict  mon  voulloir  et  intention,  priant  Dieu, 
Monsieur  de  Lodesve,  quil  vous  aye  en  sa  très  saincte  et  digne 
garde. 

Escript  a  Compiegne  le  cinquiesme  jour  de  septembre  1554. 

Signé  :   Henry, 
et  plus  bas  :  Dlthier. 

Monsieur  de  Lodesve,  j'ay  depuis  ceste  lettre  escripte  advisé 
de  mander  au  sr  de  Selve  que,  au  cas  que  ledict  sr  de  Lanssac  ne 
fust  prisonnier,  il  ne  parte  point  de  Venise  jusques  a  ce  quil  ayt 
autres  nouvelles  de  moy,  car  je  veux  bien  faire  entendre  première- 
ment audict  sieur  de  Lanssac  mon  voulloir  et  intention  et  ce  quil 
aura  a  faire,  par  quoy  il  fault  que,  sellon  ce  que  jay  escript  audit 
sieur  de  Selve,  vous  vous  gouvernés  et  ne  faictes  ne  plus  ne  moings 
que  luy,  et  quant  aux  mémoire  et  instruction  quil  vous  fauldra.  je 

vous  les  envoyeray  cy  après. 

Signé:  Dutuier. 

(Ms  de  Grenoble,  fol.  82  r). 


4. —  1555. —   Mémoires    destat   de  ml;ssire  jean   de   morvilliers 
eveque  d'orléans  (2) 

Discours  sur  les  affaires  qui  se  sont  passées  avec  le  Duc  de  Ferrare 

en   Ijôj 

Il  se  résolut  donc  [le  Duc  de  Ferrare  ,  pour  toutes  ces  causes, 

de  prendre  partye  avec  lo  Roy,  sil  le  pouvoit  avoir  tel  quil  !•>  reque- 
roit,  et  ceste  sienne  délibération  communicqua  premièrement  a 
lEveque  de  Lodève,  résidant  lors  a  Ferrare,  par  commendemenl  «lu 
Roi,  pour  le  fait  des  finances  ou  l'on  avoit  souvent  besoin-  de  l'ayde 
dudit  Duc,  lequel  avoit  tant  acquis  a  son  service  ledit  Eveque  de 

(1)  Bouttée  :  secousse,  intervalle.  (Voir  Lacurne    de  Saintk-Palaye,  Gtossati* 
de  l'ancienne  langue  française). 

(2)  Sur  ce  personnage,  voir  l'ouvrage  de   M.  Bagubnauli  db  Puchbsb  :   ■  /MM 
de  Morvillers,  évêque d'Orléans,  ganir  des  sceaux  de  France»,  1  vol.  in  12.  Paris, 

Didier,  1870. 


[1555]  APPENDICE  295 

Lodeve  quil  se  monstroit  autant  affectionné  envers  le  Duc  qu'au 
service  du  Roy  et,  à  la  vérité,  ses  actions  en  ont  donné  plus  de 
preuve  qu'il  ne  f au  droit  pour  son  honneur  et  pour  le  bien  du  service 
du  Roy.  LEveque  de  Lodeve  prit  en  main  la  conduite  de  celte  pra- 
tique sur  les  arres  quil  avoit  ja,  car  le  Roy  luy  avoit  donné  charge 
qu'estant  a  Ferrare  sondast  toujours  la  volonté  dudil  Duc,  le  persua- 
dant, selon  les  occasions  qui  se  présenteroient,  d'entrer  en  l'unyon 
avec  Sa  Majesté.  Aussi  ledit  Eveque  escrivit  lors  au  Roy  quil  trou- 
voit  le  Duc  bien  disposé  a  prendre  party.  pourveu  que  ledit  party 
fut  honnorable  et  qu'il  eut  moyen,  en  se  déclarant,  de  maintenir  son 
estât  en  seureté.  Le  Roy  ayant  reçeu  la  lettre  de  lEveque  de  Lodeve, 
quil  estimoit  procéder  en  ceste  affaire  avec  la  loyauté  dung  fidèle 
serviteur,  luy  respondit  que  service  plus  agréable  ne  pourroit  luy 
faire  que  persuader  le  Duc  de  Ferrare  a  prendre  party  avec  luy, 
quil  ne  vouloit  espargner  condition  aucune,  soit  pour  l'honneur, 
ou  maintenir  ses  estatz  en  seureté,  laschant  ainsi  la  bride  audit 
Eveque  de  Lodeve  de  traitter  avec  le  Duc  a  telles  conditions,  qu'il 
verroit  pour  bien  de  son  service.  Ledit  Eveque  ayant  cette  lettre  du 
Roy  fit  une  capitulation  avec  ledict  Duc  contenant  en  substance 
les  articles  qui  en  suivent 

finalement,  par  ce  benoist  traité,  le  bon  eveque  obligeoit  le  Roy  a 
mettre  une  grosse  somme  de  deniers  en  dépôt  dans  la  ville  de  Fer- 
rare, pour  subvenir  promptement  au  Duc  s'il  en  avoit  besoing,  et  en- 
voya au  Roy  cette  capitulation  comme  ung  beau  chef  d'œuvre  donl 
l'autheur  méritoit  louange  et  rémunération,  commémorant  par  ses 
lettres  la  difficulté  qu'il  avoit  eue  a  renger  le  Duc  a  cette  raison. 

Le  Roy  ayant  veu  cette  capitulation,  la  trouva  merveilleusement 
estrange  et,  contre  toute  expectalion,  si  fit  Monseigneur  le  Conné- 
table. En  premier  lieu,  il  n'avoit  jamais  pense  prendre  le  Duc  comme 
serviteur,  mais  bien  comme  prince  allié  et  amy.  le  recevoir  a  condi- 
tion honorable  pour  tenir  son  party,  et  moyennant  ce,  prendre  aussy 
la  protection  de  ses  estatz.  voire  aussi  luy  promectre  secours  cer- 
tain le  besoing  occurent,  et  l'ayder  de  quelque  raisonnable  somme 
de  deniers  pour  la  garnison  de  ses  villes 

On  fit  entendre  doucement  au  Duc  de  Ferrare  que  1p  Roy  eut  bien 
désiré  pouvoir  accepter  ce  quil  requéroit  pour  ladite  capitulation, 
mais  que  ces  charges  estoient  si  excessives,  et  les  finances  dudit 
Seigneur  si  foibles,  qu'elles  n'en  scauroient  porter  la  moitié,  quant 
ores  il  seroit  deschargé  de  plusieurs  autres  despenses  quil  estoit 
forcé  de  soutenir,  quil  avoit,  grâce  a  Dieu,  en  celle  guerre  non  seul- 
ement résisté,  mais  endommagé  son  ennemy,  et  quil  esperoit  avec 
l'ayde  de  Dieu  garder  son  advantage,  voire  le  croistre,  et  essaieroit 


296  NÉGOCIATIONS    DE   DOMINIQUE    DU   GABRE  "15551 

de  se  passer  de  compagnie  si  chère 

On  escripvit  alEveque  de  Lodeve  assès  aigrement  (1),  avecblasme 
de  sa  témérité  et  peu  de  considération  quil  avoit  eue  en  sadite  capi- 
tulation, ou  il  s'etoit  déclaré  si  avant  pour  le  Duc  de  Ferrare,  que 
s'il  eust  esté  son  serviteur,  il  n'eust  peu  faire  mieulx  pour  luy  ny 
pis  pour  le  Roy.  En  conclusion,  on  luy  fit  entendre  que  le  Roy  ne 
vouloit  plus  quil  s'entremist  de  telles  praticques,  et  que  ledit  Sei- 
gneur se  sentoit  très  mal  servy  de  luy  pour  cette  fois,  ainsy  de- 
meura ledit  Duc  frustre  de  ses  demandes.  L'Eveque  de  Lodeve,  qui 
de  tout  temps  avoit  été  nourry  a  la  cour  et  connoissoit  les  humains, 
usa  de  tels  artifices  pour  rabiller  sa  faulte  quil  en  fit  oublyer  la  mé- 
moire nuits  jours  après,  combien  qu'elle  fut  lourde  et  notable,  que 
le  ministre  qui  l'avoit  commise  meritoit,  a  vray  dire,  plus  grand  châ- 
timent que  destre  honteusement  desmis  de  sa  charge.  Toutteffois, 
on  le  laissa  à  Ferrare  (2)  sous  couleur  quil  étoit  agréable  au  Due. 
lequel  luy  montrent  une  grande  privaulté  et  se  laissnit.  en  appa- 
rence, persuader,  a  ses  prières  mesme,  ou  il  estoit  question  démet- 
tre la  main  a  la  bourse  pour  secourir  les  affaires  du  Roy,  et  estoit 
vrai,  mais  qui  entendroit  bien  les  moyens,  et  les  causes  intrinsèques 
de  ce  gouvernement  trouveroit  qu'il  y  avoil  plu-  de  perte  (pie  de 
gaing  pour  le  Roy,  car  si  Ton  doibt  adjouster  foy  eu  gens  de  biens 
et  clairvoyans  qui  traittoient  lors  les  affaires  ;i  Rome  et  a  Venise, 
ils  sapercevoient  chacun  jour  que  lEveque  de  Lodeve  ne  scavoit  rien 
de  si  secret  et  si  important  au  service  du  Roy  qui!  ne  le  communic- 
quat  au  Duc  de  Ferrare,  qui  nen  recueillil  pas  une  petite  utilité,  en 
ce  temps  la,  car  encore  quil  aymal  mieux  le  Roy  que  lEmpereur, 
si  estoit  il  si  jaloux  de  ce  que  Ion  pouvoil  toucher,  ou  il  pensoit  que 
noz  entreprises  pou voienl  approcher  le  feu  de  sa  maison  ou  autre- 
ment le  mettre  en  dépense,  il  savoil  dextrememenl  et  soubzmain 
faire  rompre  noz  desseings,  l'expérience  l'a  montré  plus  d'une  fois, 
Au  moyen  de  quoy,  ceulx  la  mêmes  qui  estoienl  les  plus  proches  et 
aray  d'iceluy  Duc,  serviteurs  du  Roy,  ayant  aperçu  cela  quand  ils 
vouloient  après  entreprendre  aucune  chose  sans  le  sceu  du  Duc  de 
Ferrare,  ne  le  communicquoil  audit  eveque  de  LodeA  e,  e  si  ans  ass 
rés,  comme  ils  disoient,  que  ledit  Eveque  de  Lodeve  ne  savoil  rien 
qu'il  ne  le  communicqua  au  Duc. 

Bibl.  ait..  Fr.  5i72,  fol.  26  . 

(1)  Nous  n'avons  trouvé,  malgré  nos  recherches,  aucune  lettre  adress 
Gal>n\  qui  tut  conçue  dans  les  termes  de  blâme  indiqués  par  Morvillers. 

(2)  Ici,   ainsi   qu'au   commencement  de  ce  mémoire,   Morvillers   fail  résider 
l'Hvéque  de  Lodeve  à  Ferrare.  Or,  depuis  le  mois  de  septembre  1584,   du  Gabre 

était  pourvu  de  l'ambassade  de  Venise. 


[avril  1556]  appendice  297 


5. —  [Amboise],  12  avril  1556.  —  Mémoire  pour  répondre  et  replie- 
quer  a  Mv  le  Duc  de  Ferrure,  de  la  pari  du  Roy.,  sur  ce  que  Mr  le 
Prince  son  fils{\    a  de  la  sienne  dit  et  expose  de  sa  part. 

Le  Roy  ayant  entendu  ce  que  Mr  le  Prince  de  Ferrare  luy  adict  et 
expose  de  la  pari  de  M.  le  Duc,  son  père,  suivant  le  contenu  en  une 
lettre  que  ledit  sieur  Duc  a  escrit  a  son  ambassadeur,  estant  par 
deçà,  sur  ce  quil  a  entendu  par  le  sieur  de  Ramboillet,  que  Sa 
Majesté  luy  avoit  despeché  lois  de  la  conclusion  de  la  trefve  (2), 
s'est  grandement  esmerveillé  des  malcontentement,  confusion  et 
desesperation,  ou  iceluy  sr  Duc  dict  estre  entré,  de  ce  que  sadicte 
Majesté  ne  luy  veut,  comme  il  estime,  continuer  et  observer  la  cap- 
pitulation  quil  luy  a  pieu  ratiffier,  par  escripturepublicque,  et  auten- 
tique,  signée  de  sa  main  et  scellée  de  son  scel,  pour  a  quoy  luy  res- 
pondre  le  Roy  ne  luy  veult  user  que  de  raison  commune,  sans  autre 
artifice  de  remonstrances  et  persuasions.  L'on  seait  bien  que  toutes 
promesses  et  obligations  sont  faictes  avec  fondement, selon  les  con- 
ditions accordées  entre  les  contractans,  et  dont  l'elfe  et  et  exécution 
se  remettent,  ou  a  présent  ou  au  futur,  avec  le  temps  et  l'occasion, 
ainsi  quil  est  dit  et  porté  par  les  traictes  qui  en  sont  passés. 

Le  principal  fondement  de  la  cappitulation  faicte  avec  ledict  sr 
Duc  est  la  ligue  offensive  et  défensive  traictée  avec  nostre  S'  Père 
le  Pape,  de  laquelle  Sa  Majesté  luy  doibt  faire  bailler  la  charge  et 
autorité  de  Capitaine  général,  et  davantage  le  faire  son  Lieutenant 
général  en  Italye,  hormis  le  Piedmont.  En  considération  desquelles 
charges,  et  pour  aucunement  luy  ayder  a  porter  la  despence  quil  luy 
conviendroit  croistre  et  augmenter  pour  raison  d'icelles,  il  luy  de- 
voit  estre  baille  et  paye  par  chacun  mois  deux  mil  escus  de  pension, 
luy  promettant,  sadite  Majesté,  outre  cela,  le  prendre  en  sa  protec- 
tion avecq  ses  personnes,  estât  et  pays.  Or,  si  depuis  cette  cappitu- 
lation la  trefve  est  intervenue  entre  l'Empereur,  le  Roy  d'Angle- 
terre (3)  et  le  Roy  très  Cbrestien,  laquelle  suspend  l'exécution  du 
traite  de  ladite  ligue,  quant  a  l'offensive  pour  le  temps  que  ladite 
trefve  doibt  durer,  qu'est  ce  quil  se  peult  maintenant  faire  et  obser- 
ver quand  aux  poinetz  cy  dessus  touchés,  car,  pour  le  regard  des 
charges  de  Lieutenant  gênerai  du  Roy  et  de  cappitaine  général  de 
1  !  Ligue,  encores  que  Sa  Majesté  advoue  qu'elles  sont  affectées  audit 

(1)  Alphonse,  fils  aine  du  duc  de  Ferrare,  était  reparti  pour  la  France  avec  le 
consentement  de  son  père,  dès  qu'il  avail  entrevu  l'éventualité  d'une  nouvelle 
guerre.  (Voir  Rodocanachi,  Renée  de  Frimer,  p.  273  . 

(2)  La  trêve  de  Vaucelles,  5  lévrier  1556. 

(3)  Philippe  II,  époux  de  Marie  Tudor. 


298  NÉGOCIATIONS   DE   DOMINIQUE    DU    GABRE         "AVRIL    looH' 

sr  Duc,  venant  a  l'exécution  de  ladite  ligue,  si  est  ce  qu'elles  ne  se 
peuvent  cependant  exécuter,  ny  ayant  armes  n'y  forces  assemblées, 
ne  pareillement  autres  actes  a  exploicter  deppendans  de  l'autorité 
d'un  Lieutenant  et  cappitaine  général,  et  par  ainsy,  iceluy  sr  Duc  n'a 
été  et  n'est  aucunement  contrainct  de  croistre  et  augmenter  sa  des- 
pence pour  raison  d'icelles  charges,  et,  par  conséquent  aussi,  il  ne 
peult  demander  ce  qui  luy  avoit  été  accordé  pour  cet  effect,  qui 
sont  lesdits  deux  mil  escus  par  mois,  mais  se  retrouvant  les  choses 
au  temps  et  avec  l'occasion  qu'elles  pourront  avoir  lieu,  il  ne  fault 
point  quil  face  doubte  que  tout  ce  qui  luy  a  esté  promis  par  la  cap- 
pitulation  ne  luy  soit  inviolablement  observé  et  entretenu. 

Reste  seulement,  cependant,  le  faict  de  la  protection,  laquelle,  dès 
maintenant  et  pour  toujours,  le  Roy  veult  observer  audict  sr  Duc, 
ainsy  quil  luy  a  fait  entendre  par  ledict  sr  de  Ramboillet.  l'asseu- 
rant  que,  au  cas  quil  soit  assailly  ou  offensé,  en  quelque  lieu  et 
endroit  de  son  estât,  ou  autrement  par  quelque  prince  ou  potentat 
que  ce  soit,  Sa  Majesté  avec  ses  forces,  voire  jusques  a  sa  propre 
personne,  s'il  estoit  besoin  de  la  y  employer,  le  deffendra.  main- 
tiendra et  conservera  envers  et  contre  tous.  Et  combien  que  ledit 
sr  Duc  ne  doibve  aucunement  doubter  que  l'on  luy  vueille  courir 
sus,  ne  entreprendre  sur  son  estât  si  la  foy  dos  princes  est  invio- 
lable, puisquil  est  comprins  dedans  la  trefve,  tant  de  la  part  de 
l'Empereur  et  du  Roy  d'Angleterre  que  de  celle  dudit  sieur  Roy  très 
Chrestien  ;  toutesfois,  sadite  Majesté  pour  luy  maintenir  sadite  pro- 
tection, l'asseurerde  l'effeet  dicelle,  et  luy  aider  a  aucunement  sup 
porter  la  despence  quil  pourroit  faire  pour  augmenter  la  garde  de 
ses  places  ou  autrement  s'asseurer  de  quelque  doubte  ou  soupçon 
ou  il  pourroit  être  entré,  pour  avoir  cappitulé  avec  le  Roy,  qui  désire 
singulièrement  recognoistre  la  grande  démonstration  qui1  ledicl  sT 
Duc  luy  a  faite  de  l'entière  affection  et  dévotion  quil  luy  porte  s'ac- 
commodant  capitulation,  dont  néanmoins  ilnes'esl  encores ensuivy 
aucune  exécution,  lui  a  accorde  et  accorde  les  cinquante  mille  livres 
de  pension  par  an,  avec  la  compagnie  de  cenl  hommes  d'armes  dont 
il  doibt  estre  le  chef,  selon  ce  que  ledit  sr  de  Ramboillel  luy  a  fait 
offrir,  sadicte  Majesté,  a  laquelle  il  semble,  par  le  dire  et  jugemenl 
de  tout  homme  d'expérience,  raison  el  équité  que  iceluy  sieur  Duc 
a  très  bonne  et  juste  cause  et  occasion  de  s'en  contenter,  sans,  pour 
le  présent,  aucunement  répeter  les  autres  particularités  de  ladicte 
capitulation,  mesme  pour  ce  quil  touche  l'entretenemeni  des  gens 
de  pied  et  de  cheval  pour  la  garde  desdites  places,  a  quoy,  par  les 
raisons  dessus  dielz.  el  par  ce  que  le  Roy  laid  maintenant  pour 
ledict  sieur  Duc,  Sa  Majesté  pense  avoir  suffisamment  satisfaict,  en 
attendant  que  le  temps  et  l'occasion  se  présentent,  que  ledit  sieur 
Duc  en  puisse  raisonnablement  faire  instance,  venant  a  l'exécution 


[octobre  1556]  appendice  299 

du  traité  de  la  ligue,  ou  bien  au  cas  qu'il  fut  offensé  ou  assailly  en 
son  estât. 

Et  au  regard  de  la  response  que  ledit  sieur  Duc  a  faite  sur  ce  que 
ledit  Rambouillet  luy  a  propose,  que  le  Roy  vouloit  qu'il  eust  dores- 
navant  la  communication  et  participation  de  toutes  ses  affaires 
d'Italie,  il  doit  entendre  que,  ce  que  sadite  Majesté  en  a  faict,  n'a 
esté  que  pour  la  parfaite  et  entière  confiance  qu'elle  a  en  luy  et 
pour  la  grande  estime  qu'elle  a  tousjours  faict  de  ses  vertus,  pru- 
dence et  bon  jugement,  dont  elle  s'étoit  pensée  prévaloir  a  la  con- 
duite et  direction  de  ses  affaires,  et  non  point  pour  le  faire  compaignon 
de  ses  ambassadeurs  et  ministres,  comme  ledit  sieur  Duc  a  voulu 
dire  par  sa  lettre,  car  le  Roy  n'ignore  pas  sa  qualité,  et  puis  voiant 
que,  pour  le  temps  ou  nous  sommes,  il  ne  pouvoit  mieux  accom- 
moder le  tiltre  de  son  Lieutenant  général,  qui  demeure  sans  exer- 
cice durant  ladite  trefve,  ainsi  que  dict  est  que  de  bailler  a  icelluy 
sieur  Duc  l'intelligence  de  sesdites  affaires,  il  a  bien  voulu  que,  par 
sesdits  ambassadeurs  et  ministres,  il  luy  en  fust  rendu  compte 
comme  à  son  superintendant  sur  iceulx. 

Signé  :  Henry. 

Et  plus  bas:  Faict  a  Amboyse  le  douziesme  avril  1556,  après 
Pasques. 

Signé:  Duthier. 

<Ms  de  Grenoble,  fol.  8  r°). 


MONTMORENCY    A    GABRE 

6.  —  [Paris],  1 1  octobre  1556.  —  Monsieur  de  Lodesve,  j'ay  faict 
veoir  au  Roy  ce  que  vous  m'avés  escript  du  vingtquatriesme  du 
mois  passe,  dont  il  a  esté  très  ayse,  et  mesme  pour  Tordre  que  vous 
avés  donne  a  faire  tenir  des  deniers  du  depost  a  Rome  ou  l'affaire  se 
présente  selon  que  vous  scavez.  11  est  vray,  que  par  ce  que  je  puis 
veoir  et  entendre  que  lordre  que  nous  avions  prescrit  pour  la  consi- 
gnation dudit  depost  dune  part,  et  d'autre  a  Venise  ne  se  pourra 
bien  observer  pour  ce  que  le  Pape,  pour  sa  part  et  contribution,  étant 
la  despence  a  faire  du  coste  de  Rome,  ne  vouldra  pas  envoyer  ses 
deniers  audict  Venise,  en  un  coffre,  comme  il  estoit  dict  pour  après 
les  rapporter  audit  Rome,  dautant  quil  y  auroit  de  la  despence  inu- 
tile et  superflue,  outre  les  inconvénients  qui  peuvent  survenir,  au 
moyen  de  quoy  il  ne  sera  point  de  besoin  du  pouvoir  que  l'on  avoit 
advise  de  vous  depescber,  mais  suffira  que  vous  faictes  selon  ce 
que  vous  avez  accoustumé,  pour  faire  recevoir  audict  Venise  les 
deniers  par  le  commis  du  trésorier  de  lextraordinaire,  et  puis  les 


300  NÉGOCIATIONS    DE   DOMINIQUE   DE    GABRE      [DÉCEMBRE   1556] 

envoier  par  chacun  mois  seurement,  audict  Rome,  par  ladvis  de 
Messieurs  les  Cardinaulx  de  Ferrare  et  de  Tournon.  et  selon  ce  que 
vous  manderont  aussy  les  ministres  du  Roy  audict  Rome,  suivant 
le  règlement  arresté  par  chacun  mois,  de  la  despence  commune  dp 
la  ligue,  dont  il  vous  doibt  estre  envoyé  Testât  par  lesdicts  minis- 
tres, vous  priant,  au  surplus,  ne  mettre  en  fantasie  de  demander 
vostre  congé,  car  vous  avès  trop  bien  servy  jusques  icy  par  delà,  ou 
vous  avez  toutte  lexpérience  requise  et  nécessaire  a  la  conduicte 
des  affaires,  pour,  au  temps  qui  court,  parler  de  vous  en  retirer, 
mais,  au  contraire,  il  faut  que  vous  vous  délibérés  et  resoh 
continuer  plus  que  jamais  vostre  service,  voyant  que  le  temps  et 
l'occasion  vous  y  appellent,  vous  pouvant  asseurer  sur  moyque  le 
Roy,  ayant  si  bonne  cognoissance  comme  il  a  de  vostre  suffisance, 
et  de  combien  vous  luv  êtes  utille  serviteur,  vous  fera  du  bien  el  de 
l'honneur,  de  sorte  que  vous  avez  juste  occasion  de  demeurer  rou- 
tent et  satisfaict  !  .  n'ayanl  autre  chose  a  vous  dire  que  ce  que 
lAbbé  de  S1  Ferme  vous  pourra  faire  entendre  en  passanl  de  la  reso- 
lution du  Roi,  pour  le  secours  quil  envoyé  au  Pape,  avec  autres 
particularités  de  sa  despeche,  priant  Dieu,  Monsieur  de  Lodesve,  quil 
vous  ayt  en  sa  Sainte  el  digne  garde. 
Escript  a  Paris  le  unziesmejour  dOctobre  1556, 

Signé:  Momorancy. 

Et  au  dessus:  a  Monsieur  l'Eveque  de   Lodesve,  con  r  du  Roj  el 
son  ambassad'  devers  la  Seigneurie  de  Venise. 

Ms  de  Grenoble,  fol.  20  r). 


7.  —  [Ferrare],  S  décembre  1556.  —  Mémoire  de  VEvesque  de  /.<>- 
dève,  ambassadeur  du  Roy  n  Venize,  pour  les  affaires  </<•  sa  M<tjr*i<: 
en  Italie,  sur  lesquelles  il  plaira  <<  Monseigneur  h-  Connestable  de 
faire  responce  <m  plustot  7'"'  faire  se  pourra. 

En  premier  lieu,  il  est  notoire  a  chacun,  que  depuis  les  dernières 
ordonnances  faites  par  le  Roy  sur  le  laid  de  la  guerre,  les  com- 
pagnies de  gens  de  pied  qui  sont  a  la  soiilde  du  Roy  eu  France,  en 
Italie,  ne  se  bailleni  a  moins  de  troyscens  hommes  pour  enseignes, 
avecques  le-  avantages  de  dix  pour  cenl  el  les  autre-,  appoincte- 
mens  ordinaires  des  cappitaine,  lieutenant,  enseigne,  sergens,  cap- 


1    Nous  avons  voulu  reproduire  cette  élogieuse  lettre  du  Connétable 
Gabre,  pour  prouver  dans  quelle  haute  estime  étail  tenu  le  prélal  ambassadeur, 
et  détrurne  ainsi  h'  déplorable  effet  <les  attaques  de  Morvillers. 


[décembre   1556]  APPENDICE  301 

poraulx,  fourrier  et  tabourins  (I),  et  quant  aux  hommes  armez,  il 
n'estoit  accoustumé  on  payer,  sinon  ceulx  que  l'on  présentoit,  en 
effect,  a  la  monstre,  portant  les  armes  sur  le  dos,  pourveu  qu'ilz  ne 
excédassent  la  moitié. 

Il  advint  lors  du  siège  de  Parme  que  les  vieilles  bendes  de  Pied- 
mont  y  vindrent,  dont  estoient  chefz  Jehan  de  Turin  (2),  San  Piedro 
Corso  (3),  Chiaramont  (4)  et  autres  qui  avoient  acquis  je  ne  scay 
quelle  réputation  d'estre  si  furieulx,  eulx  el  leurs  soldatz,  que  l'on 
ne  regardoit  a  rien  de  la  despence  pour  les  bien  traiter  et  tenir 
contans,  lesdits  cappitaines  qui  savoient  bien  faire  l'arc  de  s'enri- 
chir sur  lesdites  compagnies,  chacun  le  scait,  et  ledit  Eveque  en 
parle  pour  avoir  été  tousjours  durant  le  siège  dans  Parme  et  sceu- 
rent  si  bien  crier  et  alléguer  la  charte,  qui  y  estoit  pour  estre  la 
ville  assiégée  de  ennemys  avec  Monsieur  de  Termes,  lors  lieute- 
nant du  Roy,  lesadvantages  de  huict  pour  cent,  oultreles  dixaccous- 
tumez,  et  leur  payoit  on  la  moitié  de  toutte  la  compagnie  comme  (5) 
soit  qu'ilz  le  feussent,  ou  qu'ilz  ne  le  l'eussent  pas. 

Aussitost  que  cela  fust  accordé  aux  vieilles  bendes,  les  cappitai- 
nes du  Duc  de  Parme  le  sceurent  et  voulurent  estre  payez  de  ceste 
façon,  et  ny  eust  remède  que  de  l'accorder,  et  a  cella  si  bien  conti- 
nué, après  le  siège  levé,  quelque  trêve  qu'il  y  eut,  et  a  l-on  si  mal 
accoustumé  ceste  nation  que  aujourd'huy,  tant  aux  garnisons  et  aux 
armées  que  l'on  mis  a  en  campagne,  cest  ordre  a  este  et  est  suivy  et 
en  Lombardie  et  en  Tuscane.  De  sorte  que,  avecq  les  passevolans  (6) 
et  larrecins,  que  gens  de  guerre  de  toutes  nations  scavent  aujour- 
d'huy bien  faire,  il  y  a  été  discipé  tant  d'argent  que  le  Roy  en  en- 
tretiendroit  pour  quelques  mois  une  bonne  armée,  et  qui  ne  remé- 
diera a  ce  désordre,  ayant  a  dresser  la  guerre  et  voullant  entrer  eu 
grosses  et  nouvelles  despences  par  deçà,  on  continuera  tousjours 
ce  mauvais  mesnage  et  confusion,  et  n'y  aura  compaignie  qui  ne 


(1)  Tambours. 

(2)  Le  capitaine  Jehan  de  Turin,  fils  d'un  colonel  italien  au  service  de  la  France, 
tué  en  1553.  Il  avait  sollicité  la  survivance  des  charges  et  pensions  de  son  père. 
(Lettre  du  maréchal  de  Brissac,  31  décembre  1553.  Bibl.  nat..  Fr.  20642.  fol.  191). 

(3)  Sanpietro  Corso,  capitaine  corse,  servit  d'abord  dans  les  bandes  noires 
florentines  et  passa  en  1553  au  service  de  la  France,  où  il  devint  colonel;  il 
mourut  assassiné  le  17  janvier  1557,  victime  de  la  vendetta  des  Orano.  {Com- 
mentaires  de  Montluc,  t.  i.  p.  163,  note). 

(4)  Fiancesco  de  Chiaramonte,  colonel  d'une  des  bandes  italiennes  dont  Strozzi 
était  général.  Son  tils  Annibal  était  capitaine  d'une  bande  italienne  dans  l'année 
du  duc  de  Cuise.  (Bibl.  nat  ,  Fr.  10395). 

5    Mot  en  blanc  dans  le  texte. 

6;   fasse-volants  :  nom  donné  à  de  faux  soldats  que  les  officiers  faisaient  passer 
en  revue  pour  tromper  les  inspecteurs  et  les  commissaires  quand  leurs  compa 
gnies  n'étaient  pas  complètes,  afin  de  s'approprier  leur  solde. 


302  NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE    DU    GABRE      [DÉCEMBRE    1556] 

couste  deux  ou  trois  cens  ecus  plus  qu'elle  ne  doibt,  qui  montera 
tant  en  une  grosse  trouppe  et  au  long  aller,  que  avec  ce  trop  la  on 
en  pourroit  entreprendre  une  autre  nouvelle  guerre.  Est  aprez,  ung 
autre  desordre  que  l'on  a  faict  tant  de  petitz  capitaines  qui  n'ont 
moien,  puissance,  ne  réputation  pour  assembler  et  maintenir  nom- 
bre de  soldatz,  quil  y  a  plusieurs  compaignies  de  cent  hommes  et 
de  lx  et  de  moings,  et  les  estatz  desditz  cappitaines  et  chefz  mon- 
tent plus  que  la  paye  des  soldatz,  et  font  tant  croistre  la  dépense, 
qu'elle  passe  quasi  le  double  de  ce  que  cousteroient  lesdites  com- 
paignies si  elles  estoient  entières  comme  elles  doibvent  estre. 

Maintenant  que  le  Roy  aura  icy  ung  Lieutenant,  prince  Italien  de 
grande  auctorité  (1),  qui  a  dellibéré  se  faire  craindre  et  obéir  de 
ceulx  de  sa  nation,  et  regarder  de  plus  prez  quil  pourra  a  remé- 
dier a  ses  confusions,  mauvais  mesnages,  larrecins,  et  puis  aussi 
que  le  Roy  apporte  si  incroiables  despenses  que  chacun  scait,  les- 
quelles il  fault  encore  continuer,  il  semble  que  Sa  Majesté  ajuste 
occasion  de  voulloir  penser  a  la  reformation  et  retrancbement  des 
despences  superflues  et  mal  emploiées,  et,  pour  cest  effect,  semble 
qu'il  seroit  bon  que  Sa  Majesté  feyt  une  ordonnance  signée  de  sa 
main,  pour  l'envoier  a  sondit  Lieutenant  général,  qui  la  monstreroit 
pour  son  excuse  a  ceulx  qui  en  pourroient  estre  mal  contans. 
Comme  Sa  Majesté  veult  et  entend  que  toutes  les  compagnies  de 
gens  de  pied,  qui  sont  et  seront  cy  après  a  son  service,  soient 
reduictes  au  nombre  de  trois  cens,  avecq  expresses  deffences 
de  ne  payer  les  appoinctemens  des  hommes  armez,  sinon  de  ceulx 
qui  effectuellement  se  présenteront  armez  a  la  monstre,  selon  que 
l'ordonnance  ancienne  et  accoustumée  le  porte,  et  que  les  advan- 
tages  de  xvm  pour  cent  soient  reduictz  a  dix,  comme  il  est  en 
France,  en  Piedmont,  et  en  toutes  les  garnisons  et  armées  de 
Sa  Majesté. 

Et  quant  aux  passevolans  et  larrecins  que  les  cappitaines  ont  ac- 
coustumés  de  faire,  attendu  que  on  les  y  veoil  incorrigibles,  seroit 
bon  mectre  en  l'ordonnance  une  grande  terreur  de  peine  de  mort 
pour  les  cappitaines  qui  seront  trouvez  en  faulte,  et  pour  celluy  qui 
aura  servy  au  passevolant  exhortant,  el  commandanl  au  Lieutenant 
gênerai  quil  ait  a  estre  sévère  et  rigoreulx  en  telles  punition-,  avecq 
toutefois,  condition,  que  si  ledit  Lieutenant  voit  que,  pour  restrein- 
dre ceste  mauvaise  coustume,  il  y  eut  danger  de  pouvoir  subvenir 
desordre,  il  luy  soit  donne  auctorité,  par  lettre  a  part,  d'en  faire  le 
mieulx  qu'il  pourra  et  lordonner  comme  il  congnoistra  pour  le 
mieulx. 

Si  cella  est  bien  observé,  la  despence  d'une  année  sera  beaucoup 

(1)  Le  duc  de  Ferrare. 


[DÉCEMBRE   1556]  APPENDICE  303 

moindre  et  scaura  ton  de  combien  de  gens  de  combat  le  Roy  peult 
faire  estât,  car,  cest  aujourd'huy  une  chose  bien  corrompue  el 
malheureuse  que  le  Roy  paie  en  Tuscane  v  ou  vic  payes,  et  chacun 
qui  en  vient,  dict  qu'il  ny  a  pas  trois  mil  hommes  en  séance. 

Maintenant,  faut  parler  des  garnisons  et  despences  ordinaires  aux 
places  qui  ont  este  soubz  la  protection  du  Roi,  comme  sont  Parme 
et  la  Mirandola,  lesquelles  auroient  besoing  de  ce  grand  reiglement, 
car  il  y  a  des  despences  fort  superflues,  et  ausquelles  le  Roy  n'est 
nullement  tenu  par  les  cappitulalions,  et  y  est  Ton  entre  du  temps 
que  lesdites  places  ont  ete  en  guerre  et  assiégées,  mais  aprez 
qu'elles  ont  este  en  liberté  et  hors  de  travail  pour  la  tresve  accor- 
dée, on  n'a  pas  laissé  de  les  continuer,  de  jour  a  autre  les  augmen- 
ter, desquelles  parties  superflues  j'ay  dresse  ung  estât  a  part,  et  par 
le  menu  qui  est  envoie  avecq  ce  mémoire,  affin  que  l'on  puisse 
mieulx  discerner  et  adviser  celles  qui  seront  raisonnables  de  conti- 
nuer, et  celles  que  l'on  voudra  retrancher,  et  verra  l'on  par  ledit 
estât,  que  réduisant  la  despence  desdites  garnisons  ordinaires,  selon 
ce  que  l'on  a  promis  par  les  cappitulalions,  le  Roy  espargnera  en 
ces  deux  places  seullement  au  bout  de  l'an  peu  moings  de  cxm  livres 
(lui  serviroient  a  paier  la  plus  grande  partie  des  garnisons  de  la 
nouvelle  protection  dont  le  Roy  c'est  chargé  de  Testât  et  place  du 
Duc  de  Ferrare,  de  sorte  que  la  ne  s'y  trouveroit  de  gueres  aug- 
mentée pour  ladite  protection.  Et  en  cas  qu'il  fust  trouvé  bonde  faire 
laref.'ormation  de  ceste  despense  selon  ledit  estât,  il  seroit  nécessaire 
de  parler  au  cavalier  Tiburce  et  a  l'homme  du  Comte  de  la  Miran- 
dola pour  leur  faire  entendre  et  faire  trouver  bonne  l'intention  du 
Roy,  et,  oultre  cela,  en  écrire  une  bonne  lettre  au  Duc  de  Parme  et 
Comte  de  la  Mirandola,  leur  remonstrant  la  grande  despence  que  le 
Roy  a  faicte  pour  conserver  leurs  places  quant  l'ennemy  y  a  voullu 
entreprendre,  et  que  s'ilz  ont  veu,  par  effect,  que  le  Roy  n'y  a  riens 
espargné,  il  est  encore  tout  prest  et  résolu  de  faire  mieulx  quand  il 
en  sera  besoing,  mais,  puis  quil  plaist,  a  Dieu  que  chacun  peult 
congnoistre  déjà  la  grande  foiblesse  de  l'ennemy  et  au  contraire 
la  grande  prospérité  ou  les  affaires  du  Roy  sont  reduictz,  estant  sa 
Majesté  maintenant  entré  en  ligue  avec  le  Pape  et  le  Duc  de  Fer- 
rare,  sadite  Majesté  a  fait  comprendre  leurs  places  et  estats  soubz 
la  protection  de  ladite  ligue,  de  sorte  que,  veu  le  peu  de  moyen  que 
lEmpereur  a  de  dresser  armée  pour  travailler  lesdites  places,  et 
puisqu'elles  auront  doresnavant  les  estats  de  l'église  et  de  Ferrare 
promptz  et  obligez  pour  leur  secours,  il  nefault  craindre  qu'ils  puis- 
sent estre  travaillez  ne  assiégez,  et  pour  ceste  cause,  aiant  Sa  Majesté 
a  entrer  en  autres  nouvelles  entreprises  et  grosses  despences,  il  a 
faict  regarder  par  les  gens  de  son  conseil  a  retrancher  et  refformer 
les  despences  superflues  et  non  nécessaires,  tant  en  France  que  en 


304  NÉGOCIATIONS    DE   DOMINIQUE   Df    GABRE      [DÉCEMBRE    1556] 

Italie,  et  a  este  advise  de  réduire  lesdites  despences  de  leurs  places 
a  ce  qui  leur  a  este  promis  par  les  cappitulations,  a  quoy  le  Roy  ne 
vouldroit.  pour  rien  manquer,  qui  est  le  paiement  quant  à  Parme 
de  xvc  hommes  de  pied  et  cinquante  chevaulx.  dont  les  deniers  -  - 
ront  doresnavant  mis  en  leurs  mains  par  leurs  simples  quittances 
pour  paier  leurs  soldatz  au  meilleur  mesnage  et  espargne  qu'ilz 
pourront,  et  sans  plus  estre  en  despence  de  commissaires,  control- 
leurs,  multiplication  de  trésoriers  et  autres  mangeries  qui  ont  y  esté 
par  le  passé:  et  quant  aux  vivres  et  munitions  qui  sont  dans  leurs 
places  acheptées  de  sa  Majesté,  que  sadite  Majesté  veult  et  entend 
qu'elles  soient  vendues  en  ceste  année  pour  se  prévaloir  des  deniers 
qui  en  sortiront,  ou  quelles  soient  vendues  et  consignées  a  la  coin- 
munaulte  de  leur  cytadins,  pour  le  prix  courant  en  leur  place,  et  a 
rabattre  le  payement  desdits  vivres  sur  ce  qui  sera  deu  et  mois 
advenir  pour  leurs  dites  garnisons,  aiant  donne  charge  a  l'Évesque 
de  Lodève,  ambassadeur  de  Venize,  d'aller  ou  envoyer  taire  ladite 
vente  et  consignation  et  suyvre  cest  ordre,  que  dessus,  les  asseurant 
encores  ung  coup  que  leur  advenant  travail  et  affaires,  sadite  Ma- 
jesté ordonnera  a  Monseigneur  le  Duc  de  Ferrare,  a  présent  son 
Lieutenant  général  en  Italie,  de  pourveoir  a  leur  secours,  et  n'y 
espargner  chose  que  ce  soit  pour  les  conserver  H  deffendre  envers 
tous  et  contre  tous. 

Et  seroit  très  nécessaire  faire  ung  ions  certain  de  toutes  h'-  - 
nisons  ordinaires,  séparé  de  l'extraordinaire  des  guerres,  pour  ne 
leur  faillir  chacun,  mais  at lin  qu'ilz  n'aient  occasion  de  se  plaindre, 
et,  soit  que  l'on  vueille  faire  le  retranchement  <u>dit  ou  non.  il 
plaira  au  Roy  donner  ordre  a  la  provision  de  l'argent  nécessaire 
pour  lesdites  garnisons.  Reste  maintenant  a  parler  des  choses 
nécessaires  pour  effectuer  tout  ce  que  l'on  a  promis  a  Monseigneur 
le  Duc  de  Ferrare.  a  quoy  il  ne  faull  manquer  m  on  ne  le  veut  per- 
dre, car  il  a  toujours  protesté  que  si  on  ne  luy  tienl  promesse,  il 
entend  être  en  liberté  de  se  pouvoir  retirer  de  la  cappitulation. 

Il  luy  a  este  promis,  en  premier  lieu,  encores,  que  ce  soi!  h-  der- 
nier article,  de  faire  rattili  t  an  Roy  la  cappitulation  dans  quarente 
jours  après  la  datte  d'ieelle  qui  passera  le  vingtsixiesme  de  decem- 
ble,  laquelle  il  ne  faicl  difficulté  que  l'on  envoie,  car  il  disl  et  pro- 
testa icy  a  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine,  puis  qu'on  le  faisoil 
signer  et  qu'il  ne  s'en  pouvoil  retirer,  qu'il  entendoil  que  le  Roy 
feust  obligé  aus<i  a  luy  maintenir  tout  ce  que  ses  ministres  luy 
avoient  promis,  sans  s'en  pouvoir  retirer  pour  quelque  cause  que 
ce  feust.  Pour  ceste  cause,  il  plaira  a  Sa  Majesté  faire  depeseberet 
envoier  ladite  ratification  eu  dilligence  el  eu  bonne  forme,  >i  desja 
n'a  esté  envoiée. 

Luy  a  este  aprez  promis  de  luy   bailler  pouvoir  de  lieutenant 


[décembre   1556]  APPENDICE  305 

général  du  Roy  en  Italie,  avecques  toutes  les  amples  facultez  quil 
en  a  jamais  esté  baillé  a  autre  de  sa  quallite. 

Il  plaira  le  faire  despecher  et  l'envoier  ou  plustost  autant  honno- 
rable  et  favorable  que  l'on  pourra,  et  que  le  mérite,  la  grandeur  et 
qualité  dudit  Sieur  Duc,  et  quil  puisse,  par  la,  congnoistre  que  Sa 
Majesté  luy  fye  la  guerre  et  la  paix  et  la  conduicte  de  toutes  ses 
affaires  et  ministres  en  Itallie. 

Luy  a  esté  après  promis  quil  seroit  cappitaine  gênerai  de  la  ligue 
dont  il  luy  fault  encores  autre  pouvoir;  cela  dépend  de  la  négocia- 
tion de  Monseigneur  le  Cardinal  de  Lorraine  a  Romme,  et  se  fera 
après  la  conclusion  et  establissement  de  ladite  ligue. 

Luy  a  este  aussi  promis  de  luy  payer  par  chacun  mois  nm  escus 
pour  son  plat  et  pension;  il  plaira  a  sa  Majesté  envoierfons  d'argent 
pour  les  luy  paier  avecques  la  despence  de  sa  garnison.  Il  luy  a 
este  promis  de  luy  paier  cent  hommes  d'armes,  ledit  Sieur  Duc 
commence  a  assembler  et  faire  trouver  gentilzhommes  qui  soient 
vraiz  soldatz  en  effect,  et  non  en  apparence,  et  a  leur  faire  achepter 
gros  rossins  bardables(i)  pour  faire  une  belle  et  bonne  compaignie. 
Je  crois  bien  quil  passera  quelques  mois  avant  qu'il  les  puisse 
avoir  mis  emsemble,  et  aura  le  Roy  bon  loisir  d'envoier  le  paie- 
ment. 

Quant  au  payement  de  gens  de  pied  et  chevaulx  légers  de  sa  gar- 
nison, il  dict  quil  se  tient,  quant  a  luy,  pour  tout  déclairé  et  a 
mandé  faire  levée  de  gens  de  pied  en  toute  dilligence  pour  ce  quil 
a  eu  advis  du  sieur  Daulle  Vitel  (2)  que  les  Imperiaulx  ont  faict 
venir  a  Plaisance  quatre  compaignies  d'Italliens  et  au  bourg  S' 
Denis  (3)  mille  Almans,  et  que  leur  cavallerie  c'estoit  aussi  ache- 
minée vers  Crémone  et  ne  vouldroit  estre  surprins,  et  qu'ilz  com- 
mençassent a  rompre  de  ce  coste  la,  en  lui  desrobant  Bresseil  ou 
quelque  autre  place,  comme  ilz  firent  a  la  dernière  guerre  de  Parme, 
et  entend  pour  ceste  occasion  que  sa  dite  garnison,  au  moings  ce 
qu'il  en  pourra  assembler,  soit  paiée  pour  ce  mois  de  Décembre.  Il 
s'en  va  demain  vers  Modène  et  Reige  (4)  pour  veoir  faire  la  reveue 
de  ses  gens  et  les  mectre  en  ordre,  affin  que  dedans  huict  ou  dix 
jours  j'en  puisse  aller  faire  la  monstre,  dont  jay  adverti  Monsei- 
gneur le  Cardinal  de  Lorraine  pour  m'en  commander  ce  quil  luy 
plaira,  n'estant  déclairé  par  la  capitulation  en  quel  temps  doibt  com- 
mencer la  despence  de  sa  protection,  et  je  me  garderay  bien  de 
travailler  en  cela  sans  exprez  commandement  joint,  que  si  ledit  Sr 

(1)  Bardables  :  pouvant  être  bardés  d'un  bat  pour  transporter  les  fardeaux   ou 
les  pièces  d'artillerie. 

(2)  Paolo  Vitelli  :  condottiere. 

(3)  Le  bourg  Saint-Denis,  à  deux  ou  trois  milles  deçà  Parme. 

(4)  Reggio. 

24 


306  NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE   DU    GABRE  ^MAI    lo57_ 

Duc  mesmes  ne  preste  l'argent  de  cedit  mois,  je  ne  scay  ou  le 
prendre,  mais  de  percister  a  le  voulloir  jusques  a  protester  que  si 
je  luy  en  faictz  reffuz,  il  prend  cela  pour  manquement  de  promesse, 
me  disant  que  je  considère  le  demourant  quil  laisse  a  dire  pour  la 
révérence  quil  porte  a  sa  Majesté,  et  veoy  bien  que  si  on  le  mal 
contante  en  cecy,  il  en  pourra  advenir  quelqne  désordre. 

Luy  a  este  aussi  promis  quil  seroit  envoyé  promesse  du  gênerai 
Dalbeyne,  qui  le  obligeast  envers  ledit  Sieur  Duc  jusques  a  la 
somme  de  mcm  escus  pour  le  deppost  de  sa  protection  et  aux  inte- 
restz  comme  le  contient  l'article. 

Je  désire  bien  que  l'on  prenne  le  dit  article  el  promesse  plus  a 
ladventage  du  Roy  que  autrement,  car  s'il  survenoit  guerre  audit 
sr  Duc  et  le  Roy  n'eust  argent  pour  le  secourir.  Sa  Majesté  seroit 
contraincte  en  prendre  a  xx  et  x\x  pour  cent,  la  ou  il  entend  mectre 
peine  et  espère  en  trouver  parmy  ses  amiz  et  subgectz  a  beaucoup 
moings;  et  si  le  Roy  pouvoit,  par  tel  moien.  assembler  cinq  ou  six 
cens  mil  escuz,  il  debvroit  les  voulloir  prendre,  encores  qu'il  n'en 
eust  besoing  pour  sil  luy  subvenoit  occasion  de  l'eure  un  gros  effort 
sur  la  fin  de  ceste  guerre,  il  trouvast  cest  argent  prest,  pour  s'en 
pouvoir  ayder  et  ne  fault  pas  craindre  quil  soit  pour  fournir  de  son 
argent  soubz  le  nom  d'autres  pour  gaignier  les  interestz,  car  il  nous 
a  dict  franchement  qu'il  s'estimeroil  meschant  et  indigne  de  vivre 
et  qu'il  ne  meriteroit  pas  le  lieu  que  le  Roy  lui  donne  en  son  ser- 
vice. Par  ainsi  il  plaira  a  Sa  Mageste  donner  ordre  d'envoier  la  pro- 
messe dudit  Dalbene  en  forme  contenue  en  larticle  dudit  deppost. 
et  veoir  sur  cela  ung  mémoire  que  j'envoye  a  pari  pour  le  monstrer 
audit  Dalbène. 

Cela  faict,  ledit  Sr  Duc  dict  quil  ira  servir  sa  Mageste  jusques  aux 
Indes  si  luy  est  commande  et  que  l'on  luy  face  scavoir  les  entre - 
prinses  et  l'intention  de  Sa  Magesté,  el  od  verra  de  quelle  affection 
et  dilligence  il  entend  user  en  ce  service. 

Des  choses  de  Romme  il  ne  s'en  peult  icy  faire  mention,  pour 
n'avoir  entendu  encore  aucune  particularité  de  ce  que  Monseigneur 
le  Cardinal  de  Lorraine  y  aura  négotié. 

Faict  a  Ferrare'le  mc  de  Décembre  Ki56. 

(Bibl.  nal..  Fi-.  3125,  fol.  58)  (copie). 


8.  —    Venise     î .'  mai  155  7.  —  Estât  des  affaires  ei  de  V armée  en  la 
fin  dudit  amis  de  May  envoyé  audit  S1  Eveque  de  Lodeve 

Monseigneur  le  Duc  de  Guyse,  continuant  son  logement  entre 
Norette  el  Poropoly,  ou  il  séjourna  10  joins  entiers  pour  veoir  la 
contenancede  l'ennemyel  essayer  ions  moyens  de  l'attacquer,  après 


[MAI   1557]  APPENDICE  307 

avoir  considère  la  façon  de  faire  do  sondit  ennemy,  avoir  este  bien 
informé  de  toutes  ses  forces  et  bien  regardé  la  situation  du  pays, 
délibéra  de  proposer  Monsieur  le  Duc  de  Paliano  (1)  d'employer 
cette  armée  sans  la  laisser  plus  longuement  perdre  temps,  puis- 
qu'elle avoit  déjà  essaye  tous  moyens  possible  pour  venir  au  com- 
bat, et  qu'emsemble  on  donna  si  bon  ordre  que  les  pays  du  Pape  ne 
peussent  estre  aucunement  endommagez.  Ce  que  considérant  plus 
particulièrement  le  tenoit  plus  retenu  en  toutes  ses  résolutions, 
dont  iinallement  le  25e  jour  de  Mai  après  disner,  s'estant  trouvé  un 
peu  indisposé,  envoya  a  Mr  le  Duc  de  Palliano,  pour  le  prier  de 
prendre  la  peine  de  le  venir  voir  pour  communicquer  avec  luy  des 
affaires  communes,  et  estant,  ledit  Duc,  arrivé,  luy  dit  quil  avoit 
bien  voulu  luy  en  parler  en  particulier  avant  que  de  rien  proposer 
au  Conseil  pour  faire  quelque  bon  project  et  adviser  a  prendre  une 
bonne  résolution. 

Luy  remonstra,  qu'ayant  esté  conlrainct,  pour  éviter  que  l'ennemy 
ne  se  vint  mettre  entre  luy  et  ses  vivres  durant  quil  tenoit  Civitelle 
assiégée  et  quil  ne  courust  les  terres  de  l'Eglise,  il  avoit  été  advisé 
de  se  porter  au  lieu  ou  il  estoit,  pour  couvrir  ses  vivres  et  se  tenir  a 
la  teste  del'ennemy,  pour  voir  sil  y  auroit  moyen  de  luy  présenter 
bataille,  ou  il  n'avoit  neantmoins  pu  lattirer,  s'en  esloignant  autant 
quil  pouvoit,  l'ayant  bien  lesmoigné  en  ce  quil  n'avoit  voulu  entre- 
prendre de  se  faire  maistre  de  la  ville  de  Tortorette  (2),  qui  est  sur 
la  colline,  ou  il  pouvoit  prendre  grand  advantagepour  ce  faire,  ayant 
en  outre  eboisy  un  camp  le  plus  fort  quil  estoit  possible,  environné 
delà  mer  d'un  costé,  delà  rivière  de  1  autre,  et,  noncontent  de  cela, 
il  s'y  fortilioit  toujours,  s'y  tenant  a  couvert,  en  sorte  qu'il  ny  avoit 
aucune  apparence  de  l'aller  assaillir  par  la  teste,  a  moins  que  de  se 
la  vouloir  rompre,  ce  qui  pouvoit  être  imputé  a  peu  de  prudence  a 
un  chef  de  guerre  ;  que  sy  on  le  vouloit  attaquer  par  derrière,  se 
logeant  entre  lui  et  ses  vivres,  il  n'estoit  assez  fort  pour  ce  faire 
pour  ce  que  les  vivres  luy  pouvoient  toujours  venir  par  la  mer,  dont 
il  estoit  maitre  ;  qu'ainsy  de  demeurer  plus  longtemps  devant  l'en- 
nemy avec  l'armée,  ou  il  y  avoit  déjà  beaucoup  de  malades  et  perdre 
le  temps  sans  rien  faire,  cestoit aussi  faire  perdre  le  cœur  aux  siens 
et  quil  seroit  beaucoup  plus  a  propos,  pour  le  service  de  Sa  Sainteté 
et  de  sa  Majesté,  de  tascher  d'endommager  l'ennemy,  et  que,  pour 
cela,  il  en  falloil  advertir  sadite  Sainteté  comme  estant  plus  voisine 
et  par  ce  Monsieur  le  Marescbal  Strozz  pour  la  sullisance  et  con- 
liance  que  sadite  Sainteté  et  sa  Majesté  avoient  en  luy,  et  cepen- 
dant que  l'armée  pourroit  changer  de  logis  pour  respirer  un  peu,  ce 

,1)  Caral'a,  duc  de  Paliano,  frère  du  cardinal, 

(2)  Torlorelle,  ville  d'Italie,  nrovince  de  l'Abruzze,  à  30  kil.  de  Teramo. 


308  NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE   DU    GABRE       JUILLET    1557j 

qui  fut  assez  approuvé  par  Monsieur  le  Duc  de  Palliano,  après  quel- 
que  résistance  a   la    proposition   d'envoyer   ledit    sieur  Maréchal 
Strossy,  parce  qu'en  effet  il  estoit  malade  de  fiebvre. 
Venise,  22  mai  1557. 

(Bibl.  nat..  Fr.  23236,  fol.  516,  et  Mém.  du  duc  de  Guise. 
Imp.,  p.  357). 


NOAILLES    A     GABRE 

9.  —  [Compiègne],  22  juillet  1557.  —  Monsieur,  je  pense  bien 
que  vous  avés  desja  entendu  comme  il  a  pieu  au  Roy  me  com- 
mander de  m'en  aller  la.  part  ou  vous  estes,  pour  estre  amplement 
instruict  par  vous  de  vostre  charge,  a  laquelle  Sa  Majesté  a  voullu 
que  je  succédasse,  plus  comme  je  croy,  pour  satisfaire  a  l'instante 
requeste  et  sollicitation  que  vous  luy  avès  longtemps  faicte  destre 
soulaigé  des  grands  et  continuels  travaulx  que  vous  y  avés  sous- 
tenus,  que  pour  oppinion  quil  eus!  que  je  peusse  par  mesme  moyen 
succéder  a  vostre  suffisance,  en  laquelle  je  m'asseure  trouver  le 
remède  de  toultes  mes  faillies,  avec  espérance  que  vous  m'en  serés 
autant  libéral  que  vous  cognoistrés  estre  besoin  a  une  telle  foiblesse 
que  la  mienne,  qui  se  trouvera  grandement  fortifiée  de  vostre  bon 
entendement,  s'il  vous  plaist  luy  en  faire  aussi  bonne  pari  que  jen 
désire  en  vostre  bonne  grâce,  el  pour  ce,  Monsieur,  que  j'espère  me 
rendre  devers  vous  dans  la  lin  du  mois  prochain  ou.  pour  le  plus  tard. 
au  commencement  de  l'aultre;  je  nestendray  ce  propos  plus  avant, 
seullementvous  diray  que  l'on  haste  mon  partemenl  beaucoup  plus 
que  je  ne  le  vouldrois,  pour  le  pende  loisir  quil  me  reste  a  Diestre 
ordre  aux  choses  requises  et  nécessaire  pour  la  commodité  du  mes- 
naige  de  ma  maison,  en  quoy  je  me  vois  merveilleusement  surpris  et 
empesrlié.  et  mesmemenl  pour  la  provision  île  quelques  bons  vins, 
lesquels,  a  ce  que  je  peux  entendre,  se  recouvrent  si  difficilement 
par  delà,  que  si  je  n'en  laids  de  bonne  heure  faire  a  la  francoise, 
comme  vous  aves  faict,  ainsy  que  j'ay  entendu  par  ceux  qui  en  ont 
heu,  je  suis  en  grand  danger  d'en  trouver  de  fort  mauvais,  qui  est 
bien  un  des  rencontre-.  «In  monde  que  je  crains  le  plus,  comme 
celuy  qui  a  faict  son  apprentissage  eu  l'escolle  de  Monsieur  de  Grand- 
sel  ve,  mon  oncle,  que  vous  avés  bien  congneu,  el  si  je  ne  vois  pas 
que  j'ay  moien  dy  pouvoir  remédier,  si  n'esl  pas  vostre  lionne  ayde 
et  secours,  qui  me  faict,  avec  ladvis  de  ce  porteur,  vous  prier  hum- 
blement parcelle  c\  de  commander  a  quelqu'un  des  vostrea  de 
men  faire  faire  telle  quantité  que  vous  cognoistrez  mestre  néces- 
saire, et  je  ne  fauldray  de  le  rembourser  Incontinanl  après  mon 
arrivée,  de  l'argent  quil  aura  advancé  a  cesteffect,  el  oultre,  lion- 


[JUILLET-AOUT    1557]  APPENDICE  309 

sieur,  que  vous  me  ferez  un  très  grand  plaisir,  vous  aures  non  seul- 
ement en  cella,  mais  en  toul  ce  qui  despendra  jamais  de  ma  puis- 
sance, autant  de  pari  et  commandement  que  sur  la  vostre  propre, 
et  remeclanl  la  vérité  de  ce  langage  au  premier  effect  ou  vous  me 
vouldrez  employer,  je  feray  lin  par  mes  très  humbles  recomman- 
dations a  vostre  bonne  grâce,  priant  Dieu,  Monsieur,  vous  donner 
telle  part  que  vous  désires  en  la  sienne. 
De  Compiegne  ce  xxne  jour  de  juillet  1557. 

Signé:  de  Noailles,  Evesque  Dacqs. 

(Ms  de  Grenoble,  fol.  90  r°). 


10.  — [Compiegne],  22  juillet  1557.  —  Instruction  pour  Mv  lEve- 
que  dAcqs  Premièrement  estant  arrive  audit  Venise  avec  lEveque 
de  Lodève,  a  présent  ambassadeur,  par  delà,  il  luy  baillera  lalettre 
que  b'  Roy  lui  escript  touchant  ses  revocation  et  retour  par  deçà, 
suivant  le  congié  quil  a  faict  demander,  lequel  luy  a  este  accordé 
comme  chose  1res  raisonnable  pour  les  causes  quil  a  remonslrees,  etc. 

Très  chers  et  grandz  amys  et  confederez  et  alliez.  Nous  avons 
présentement  depesche  nostre  amé  et  féal  conseiller  lEvesque  de 
Dacqs,  pour  aller  résider  nostre  ambassadeur  auprès  de  vous,  au 
lieu  de  nostre  amé  et  féal  conseiller  M"  Dominique  du  Gabre,  eves- 
que de  Lodesve,  lequel,  après  avoir,  par  longue  espace  de  temps, 
demeuré  es  quartiers  de  la,  tant  a  Ferrare  que  a  Venise,  en  la  charge 
de  nostre  dit  ambassadeur,  nous  a  faict  demander  congié  pour  venir 
donner  ordre  a  ses  affaires  spirituelz  et  temporelz.  chose  que  nous 
a  semblé  si  raisonnable  que  nous  luy  avons  liberallement  accordé, 
luy  mandant  s'en  venir  nous  trouver,  etc. 

Escript  a  Compiegne  le  xxue  jour  de  Juillet  l'an  mil  vc  cinquante 
et  sept. 

Henry  Duthier. 

(Affaires  étrangères,  Venise,  t.  vm,  fol.  1  et  16). 


DISCOURS    DE   SAINT-QUENTIN 

11.  —  [  ],  août  1 557.  —  Le  mardy  dixiesme  de  ce  moys, 

Monsieur  le  Connestable  ayant,  deux  jours  auparavant,  bien  faict 
recognoistre  le  lieu  et  moyen  de  mètre  de  gens  dedans  la  ville  de 
Saint  Quentin  pour  rendre  la  place  plus  forte,  partyt,  avec  larmee 
du  Roy,  de  La  Fere  ou  estoyt  son  camp,  pour  aller  audit  Saint  Quen- 
tin, faisant  conduyre  avec  luy  quelques  prises  darlillerye  et  ung  bon 


310  NÉGOCIATIONS  DE  DOMINIQUE  DU  GABRE      AOUT  1557] 

nombre  de  batteaulx.  avec  lesquelz  il  auroit  délibère  mètre  par 
eaue  les  gens  de  guerre  dedans  ladit  ville,  et  exploicta  si  heureuse- 
ment  sa  délibération  et  quil  y  mict  sept  ou  buict  cens  hommes. 
barquebuziers  esleuz  sans  plusieurs  cappitaines  et  gentilhommes, 
qui  liberallement  se  y  jecterent  a  la  veue  des  ennemis  sans  aucun 
empeschement,  et  se  retiroyt  en  fort  bon  ordre,  et  pour  ce  que 
cella  ne  se  peulst  faire  avec  le  temps,  lesditz  ennerniz  tjui  estoient 
de  la  leaue.  et  avec  lesquelz  cepandant  y  avoit  eu  quelzques  escar- 
mouches par  les  nostres,  feisenl  passer  au  dessus  de  la  rivière  de 
Somme  cinq  ou  six  mille  cbevaulx  pistolliers  (1)  et  toute  la  fleur  de 
leur  armée  pour  venir  traverser  le  chemin  a  la  relraicte  de  lanostre 
qui  avoyt  ja  bien  advance  de  deux  lieues,  mais  aucun  des  les  dit 
pistolliers  se  basterent  tant  que  noz  gendarmes  (2)  furent  con- 
traintz  de  les  charger,  et  dura  la  meslee  si  longuement,  que  la 
grosse  troupe  des  ennemys  eut  loysir  de  venir  cependant,  et,  se 
trouvans  ainsi  renffbrcez  quasi  de  toute  leur  armer,  pressarent  tant 
les  nostres  en  lieux  ou  ilz  le  trouvèrent  ;i  leur  ad  vantai  ge,  que  en- 
cores  que  les  chefs  et  les  plus  gens  <le  bien  yayent  faict  t<>ul  devoir, 
si  est  ce  que  Dieu  a  voulu  que  mondit  sieur  le  Connestable,  mons1 
le  Duc  de  Montpensier  (3),  monsr  le  Maréchal  de  Saint  André  (4),  et 
quelsques  autres  seigneurs  et  cappitaines  ayent  este  prins,  les 
autres  sont  retrouvez  a  La  Fere  •">  ou  monsr  le  Duc  de  Nymours  a 
recuilly  et  rassamble  les  innés,  donnant  tel  ordre  que  Ion  espère 
ce  dommaige  estiv  bien  tosl  repare,  pour  le  moings  a  estre  ledit 
Saint  Quentin  si  bien  pourveu,  quil  y  a  apparence  que  les  ennemys 
sont  pour  y  demourer  une  bonne  espace  de  temps,  et  que  le  Roy, 
actendu  ce  quil  faict  venir,  lever  et  mètre  sur  de  toutes  partz  avec 
ce  quil  avoyt  reserve  pour  ung  besoing,  aura  forces  suffisantes  pour 
lever  le  siège  et  faire  plus  de  dommaige  audit  ennemys  quilz  nont 
proficte  de  ceste  rencontre. 

Arch.  de  Modène.  Cancelleria  Ducale,  etc.  . 


.1  On  appelait  pistolliers,  au  xvr  siècle,  des  cavaliers  armés  de  pistolets. 
(Lalan.ne.  Dictionnaire  historique  de  la  Frant 

K2)  On  donnait  autrefois  le  nom  de  gendarmes  aux  cavaliers  armes  de  toutes 
pièces.   Lalanne,  Dictionnaire  historique  de  la  Fran 

(3)  Louis  11  de  Bourbon,  pair  de  France,  dauphin  d'Auvergne,  lieutenant-général 
des  armées  du  roi.  Le  comté  de  Montpensier  avait  été  érigé  en  duché  pairie  on 
sa  faveur  eu  1538.  Montpensier  mourut  le  23  septembre  I 

i    Jacques  d'ALbon,  .sieur  de  Saint-André,  maréchal  de   France  en   1541 
tué  à  la  bataille  de  DreUx  en  1562. 

(5)  La  Fère,  chef-lieu  de  canton  du  département  de  l'Aisne,  à  24  lui.  N.-O.  da 
Laon 


[septembre  1557]  appendice  311 


le  roy  a  l'eveque  d'acqs  (17  septembre  1557) 

12.  —  [  ],  octobre  1557.  —  M''  de  Dacqs,  J'ay  par  cydevant 

escript  a  Monsieur  l'Eveqne  de  Lodesve,  vostre  prédécesseur,  am- 
bassadeur a  Venise,  et  aianl   la  charge  el   supérintendance  de  mes 

finances  en  Italie,  etc.,  pour  faire  payer  l'état  de  Mr  de  Selve,  am- 
bassadeur a  Rome. 

(Affaires  étrangères,  Venise,  t.  vu,  fol.  34). 


Estât   abrégé  de  la  despence  faicte  par    Guillaume  du   Gard  depuis 
le  mois  de  janvier  1 557  jusquau  mois  d'octobre 

(Affaires  étrangères,  Venise,  t.  vu,  fol.  120). 

Monsieur  de  Lodesve,  pour  ses  estats  d'ambassadeur  que  le  Roy 
escript  lui  payer  pendant  neuf  mois  la  somme  de  17575  escus. 

(Affaires  étrangères,  Venise,  1.  vu,  fol.  123  v  . 


13.  —  [Venise],    /er  septembre    1557 .   —   Mémoire  de    l'Fveque   de 
Lodeve  au  Duc  de  Guyse  sur  les  affaires  de  ce  temps  la 

Ayant  entendu  lEveque  de  Lodeve,  Ambassadeur  pour  le  Roy  a 
Venize,  que  sa  Majesté  avoit  mandé  a  Monseigneur  de  Guyse  s'en 
retourner  en  France,  avec  son  armée,  le  plus  diligemment  qui  luy 
sera  possible,  laissant  les  places  et  Testât  du  pape  fourniz  de 
garnisons  pour  les  défendre  soubz  la  charge  de  Monsieur  le  Maré- 
chal Stozzy,  ledit  Eveque  a  bien  voulu  prendre  la  hardiesse  de  dire 
son  advis  des  choses  qui  luy  semblent  nécessaires  aux  affaires  de 
sa  Majesté  en  Italie  et  l'envoyer  par  escrit  a  mondit  Seigneur  de 
Guyse,  par  le  secrétaire  Myron,  affin  qu'après  avoir  entendu  par 
ledit  Sieur  diverses  et  peut  être  contraires  opinions  des  Ministres  de 
sa  Majesté,  son  Excellence,  avec  sa  prudence  et  bon  jugement,  se 
puisse  mieulx  resouldre  de  ce  qu'il  aura  a  faire. 

Premièrement.  Il  est  vraysemblable  que  le  Roy  n'a  mandé  venir 
la  personne  de  mondit  Sieur  de  Guyse,  que  pour  avoir  auprès  de 
sa  Majesté  un  grand  chef  de  guerre,  tel  quil  est  pour  gouverner 
et  commander  a  la  grosse  armée  que  sa  Majesté  est  contraincte 
préparer  pour  conserver  la  France,  et  ne  revocque  l'armée  d'Italie, 
sinon  pour  espérance  qu'elle  vienne  secourir  son  Royaume  sur  cette 
grande  infortune  qui  est  advenue  devant  S1  Quentin. 


312  NÉGOCIATIONS    DE    DOMINIQUE   PU    GABRE      [SEPTEMBRE    1557] 

Il  est  certain  que  ladite  armée,  laquelle  se  trouve  déjà  a  Rome, 
ne  peut  aller  en  France  promptement  et  diligemment,  sinon  par 
mer,  auquel  cas,  fauldroit  attendre  bien  longuement  avant  que 
l'armée  de  Marseille  la  fust  venue  trouver,  et  maintenant  qu'on 
entre  sur  l'hyver,  la  navigation  pour  les  gallères  sera  assès  fascheu- 
ses  et  mal  seure,  joinct  aussy  que  l'armée  imperialle  nous  est  tou- 
jours supérieure  et  que  c'est  mettre  nos  gallères,  et  gens  de  guerre, 
en  danger  de  l'ennemy. 

Sy  on  veut  faire  repasser  l'armée  par  le  chemin  de  Lombardie 
comme  elle  vint,  sy  elle  marche  en  trouppes  elle  sera  combatue  des 
ennemys,  parce  quelle  est  petite,  sans  artillerie  ny  suite  de  vivres  ; 
s'ilz  vont  desbandez,  ils  seront  deffaicts  et  dévalisez  en  beaucoups 
de  lieux  des  ennemys  ou  ilz  passeront,  et  peut  estre  envoyez  en 
gallere. 

Si  on  les  veult  casser  et  renvoyer  desbandez  par  la  Suysse,  le 
voyage  est  si  long  et  fascheux  qu'ilz  seront  combattus  et  ruinez  du 
long  du  voyage,  des  neiges  et  difficultés  des  montagnes,  «'t  n'y  aura 
ny  homme  ni  cheval  qui  puisse  servir,  eslant  arrivé  ;i  Lyon,  poinct 
que  quand  ilz  seroient  bien  payez  avant  partir,  encore  fauldroit  il 
que  la  plus  part  des  soldatz  demandassent  l'aumosne  en  chemin. 

Ainsy,  quelque  voye  qu'on  leur  fasse  prendre,  pour  retourner  sur 
le  commencement  de  l'hyver  en  France,  ce  ne  sera  que  perte 
d'hommes,  de  chevaux,  de  reputacion  et  d'argent,  et  semble  qu'il 
sera  meilleur  se  résouldre  a  éviter  tous  ces  inconvenientz,  et  main- 
tenir encore  pour  quelques  mois  la  réputation  et  les  affaires  de 
l'Italie,  en  Testât  qu'elles  sont,  en  attendant  que  l'on  voye  le  progrès 
de  l'ennemy  en  France,  et  n'abandonner  tout  d'un  coup,  pour  une 
petite  adversité,  l'Italie  et  les  amys  «pie  le  Roy  a  si  cheremenl 
acheptez  et  pour  lesquelz  il  ;i  laid  tant  de  despences. 

On  veoit  que  le  Cardinal  Trivulx  (I),  qui  est  icy  pour  le  Pape,  a 
esté  depuis  deux  jours  avec  ces  Seigneurs  et  leur  a  fait  tant  d'instan- 
ces qu'ils  voulussent  procurer  et  solliciter  l'accord  avec  le  boy  d'An- 
gleterre. La  Seigneurie  ;i  envoyé  quérir  l'Ambassadeur  Vargner  _  . 
qui  est  icy  pour  ledit  boy  d'Angleterre,  lequel  a  un  pouvoir  bien 
ample  de  traiter  et  remettre  tous  les  differentz  du  Pape  et  dudit 
Roy,  au  jugement  et  arbitrage  desdits  Seigneurs,  et  eu  sonl  les 
choses  sy  avant  que  la  Seigneurie  a  despeche  en  diligence  un  de 
leurs  principaux  secrétaire  vers  e  Pape,  et  le  Duc  d  Allie  reprenant 
les  conditions  quasi  arrestées  a  Ostie  entre  le  Cardinal  Caraffe  et 
ledit  Duc.  De  sorte  qu'il  y  a  appare  ace  que  l'accord  se  fera,  veu  que 

(1)  Dès  le  2*  août,  le  cardinal  Carafa  avait  informé  le  cardinal  Trivulce,  légat  a 
Venise,  de  la  gravité  de  la  situation,  et  lui  avait  ordonné  de  solliciter  l'aide  de  la 
Seigneurie. 

(2)  Vargas. 


[septembre  1557]  appendice  313 

les  deux  partyes  le  désirent,  et  que  ces  Seigneurs  icy  y  mettront  de 
leur  auctorité,  ce  qu'ilz  pourront  pour  le  faire  réussir,  et  aussy  que 
le  Pape  et  ses  aepveux,  voyant  l'adversité  advenue  au  Roy,  crain- 
gnent  d'estre  abandonnez  de  sa  Majesté. 

Si  ledit  accord  se  faict,  le  Pape  aura  esté  conservé  des  forces  du 
Roy,  et  le  Roy  se  trouvera  deschargé  d'un  grand  fais  et  de  gens  de 
qui  on  ne  peut  espérer  aucun  ayde,  ny  aucun  office  d'amitié,  et 
ayant  veu  par  expérience  qu'ilz  ont  faict  tout  le  contraire  de  ce 
qu'ilz  avoient  promis  et  qu'on  esperoit  d'eulx. 

Et  en  cas  dudit  accord,  Monseigneur  de  Guyse  peut  retirer  toute 
son  armée  des  environs  de  Rome,  avec  satisfaction  et  contentement 
de  Sa  Sainteté,  laquelle  aura  grand  subjet  de  se  tenir  obligée  au 
Roy,  et  Sa  Majesté  pourra  dire  n'avoir  gueres  amendé  ses  affaires 
pour  s'être  allié  avec  sadite  Sainteté,  mais  encore  est  il  meilleur 
de  s'en  retirer  tard  que  jamais. 

Que  si  ledit  accord  ne  se  fait  poinct  et  que  le  Pape  demeure  tou- 
jours en  guerre,  je  serois  d'advis  que  l'on  laissast  plustot  perdre 
Paliano  que  de  hazarder  une  bataille  desadvantageuse  pour  nous, 
comme  elle  seroit  sans  doubte.  Le  Duc  d'Albe  ayant  plus  d'Alle- 
mands et  Espagnolz  que  nous  n'avons  de  Suysses  et  de  François, 
car,  quant  a  noz  Italiens,  on  scait qu'ilz  ne  servent  que  de  nombre, 
et  non  pour  le  combat,  cela  ayant  été  veu  sy  souvent  qu'on  n'en 
doubte  plus;  que  s'il  nous  arrivoit  un  second  malheur,  nous  serions 
perdus,  d'honneur  et  de  réputation,  par  tout  le  monde  ;  et  si  nous 
estions  victorieux,  nous  n'avons  le  moyen,  le  Pape  ny  nous,  de  pour- 
suivre la  victoire,  de  sorte  que,  a  mon  advis,  nous  debvons  fuyr 
l'occasion  de  venir  a  cette  extrémité,  mais  faire  resouldre  Sa  Sain- 
teté quelle  se  contente  sur  l'hyver  de  demeurer  sur  la  deffensive 
avec  des  garnisons  raisonnables. 

Davantage  ledit  Eveque  ne  seroit  pas  d'advis  qu'on  luy  laissast 
aucun  François,  ni  de  pied  ny  de  cheval,  car  on  scayt  le  mauvais 
traictement  qu'ilz  firent  aux  régiments  de  Messieurs  de  Givry  (1)  et  de 
la  Mote,  au  temps  qu'ils  avoient  plus  besoing;  on  scait  aussi  com- 
ment ilz  traversèrent  a  Bologne  ceulx  de  Monsieur  de  S1  Vidal  (2), 
que  le  Cardinal  Caraffe  setoit  oblige  de  payer:  faulte  de  quoy  faire, 
ils  alloient  demander  l'aumosne  de  porte  en  porte,  après  avoir 
vendu  toutes  leurs  armes  au  grand  déshonneur  de  la  nation  fran- 
çoise  ;  oultre  quil  est  impossible  que  ceste  année  on  ne  veoye  a 

(1)  René  d'Anglure.  sieur  de  Givry,  baron  de  Boursault,  comte  de  Tancarville, 
chevalier  de  l'ordre  du  Roi,  capitaine  de  cent  chevau-légers,  colonel  de  l'infanterie 
française  en  Toscane.  Lorsque  Montluc  fut  rappelé  en  France.  Givry  fut  nommé 
lieutenant-général  du  roi  à  Montalcin.  ;Lettre  de  Montluc,  15  septembre  1537. 
Commentaires,  t.  iv,  p.  100).  Il  fut  tué  à  la  bataille  de  Dreux  en  1562. 

(2)  Antoine  de  La  Tour,  seigneur  de  Saint-Vidal 'Saint-Vidal,  baronnie  enVelayi. 


314  NÉGOCIATIONS    DE   DOMINIQUE   DU   GABRE      [SEPTEMBRE    1557; 

Rome   et   ez  environs  une  cherté  incroyable,  et   peut  estre  une 
famine,  si  de  Provence  on  n'y  porte  des  bledz  et  des  vins. 

On  veoit,  de  plus,  quil  est  deub  déjà  trois  mois  a  noz  places  de 
Toscane,  de  sorte  quelles  se  vont  perdre  pour  ny  avoir  garnison,  en 
la  plupart,  que  d'Italiens  non  payez,  lesquelz  nont  aucune  affection 
ny  fidélité  qu'autant  quilz  sont  bien  payez.  Monsieur  de  Montluc  va 
faict  ses  récoltes  de  bledz  et  de  vins  abondamment,  et  ne  peuvent 
les  places  que  le  Roy  y  tient  estre  en  nécessité  de  vivres  de  ceste 
année. 

Donc,  pour  conserver  ce  pays  conquis,  qui  est  aujourd'hui  au  Roy 
comme  son  patrimoine,  il  semble  qu'on  y  debvoit  envoyer  tous  les 
gens  de  pied  et  chevaux  légers  françois  (quand  bien  il  seroit  quatre 
mil)  qui  sont  avec  mondit  Seignrde  Guyse,avec  bons  chefz,  car  en  ce 
taisant,  on  conserve  ces  bonnes  trouppes  fidelles  au  Roy.  et  les  che- 
vaulx  qui  seroient  ruynez  avant  qu'ils  fussent  a  demy  chemin  de 
France;  on  tient  ainsy  les  places  du  Roy  en  seureté,  et  le  Duc  de 
Florence  en  crainte  et  despence  continuelle,  qui  est  le  vray  moyen 
de  le  consommer  comme  on  dit  a  petit  feu. 

La  despence  ne  sera  que  de  vingt  mil  escus  par  mois  sy  elle  est 
bien  réglée,  que  le  Roy  pourra  porter  pour  cest  livrer  ;  ces  forces 
donneroient  quelque  réputation  au  Pape,  et.  l'hyver  estant  passé, 
pourroient  estre  rafraischies  et  secourues  par  mer.  faisant  cepen- 
dant fortifier  le  port  de  Talamon  pour  y  avoir  quelque  descente 
seure.  pouvant  estre  secourus  par  lestai  de  l'Eglise,  si  le  Pape  nous 
demeure  amy,  ou  par  le  Duché  d'Urbin  qui  demeurera  en  neutralité 
comme  il  est  aujourd'huy. 

Que  si,  au  printemps,  le  Roy  a  besoin::  de  faire  quelque  entre- 
prise en  Italie  pour  favoriser  l'armée  Turquesque,  sy  elle  vient,  ou 
pour  aultre  chose,  sa  Majesté  aura  la  des  forces  de  gens  de  sa  na- 
tion aguerris,  italiennez,  fidels  et  connoissans  le  pays. 

Quant  aux  Italiens  qui  sont  en  la  Toscane,  je  les  envoyerois  au 
Pape  et  a  Monsieur  le  Mareschal  Strozzi.  pour  s'en  servir  et  Les 
payer  si  Sa  Sainteté  en  avoit  besoing,  ou  pour  les  casser  si  elle 
n'en  avoit  que  faire. 

Quanta  nos  Suysses,  amenés  par  tnondil  sieur  de  Guyze,  il/  ont 
sy  bien  servy  qu'on  ne  les  doibt  pas  mescontenter,  et  leur  doibt  on 
donner  le  choix  ou  de  leur  retour  en  leur  maison,  ou  d'une  bonne 
garnison  sur  Testât  du  Duc  de  Ferrare,  qui  les  doibl  payer  pour  ces! 
hyver,  puis  qu'il  a  sy  grand  peur  d'estre  attaque  ce  qui  ne  luy  scau- 
roit  couster  cent  mil  escus,  moyennant  quoy,  ces  pays  seroient  en 
seureté,  etauroit  grande  réputation  partout  :  que  sy  aucuns  desdits 
Suysses  vouloient  aller  passer  lhyver  en  leurs  poiles,  ils  en  auraient 
le  moyen,  et  d'aller  et  venir  par  le  Vénitien  sans  passer  sur  le  pays 
ennemy. 


[1557]  APPENDICE  315 

Quant  aux  hommes  d'armes  qui  sont  avec  mondit  seigneur  de 
Guyse,  attendu  quïlz  ne  se  peuvent  retirer  en  France  que  parle  che- 
min des  Grisons,  qui  est  une  despence  incroyable  et  la  ruine  des 
chevaulx,  je  leur  donnerois  garnison  a  Ferrare,  ou  le  Duc  les  rece- 
vra, comme  je  crois,  attendu  sa  crainte,  et  leur  laisseroit  pour  chef  ou 
Monsieur  de  Tavannes  (1)  ou  Monsieur  de  Brosses  i) ;  et  sy,  l'hyver 
estant  passé,  il  f'ault  continuer  la  guerre,  ce  sont  des  troupes  portées 
en  Italie,  suffisantes  pour  attaquer  et  se  deffendre,  et  qui  tiendront 
toujours  l'ennemy  en  crainte  et  despence,  et  les  affaires  du  Roy  en 
réputation,  et  ses  amys  et  alliés  contents  et  asseurez  ;  et  fera-t-on 
valoir  cela  auprès  du  Grand  Seigneur  pour  le  porter  a  se  remuer  a 
bon  escient. 

Et  ayant  mondit  Seigneur  de  Guyse  ce  despartement  aysé  a  faire, 
dans  peu  de  jours  il  se  peult  embarquer  avec  sept  ou  huit  galleres 
pour  Marseille,  et  mener  avec  luy  tous  les  princes,  seigneurs  et  gen- 
tilshommes qui  l'ont  suivy,  non  obligez  par  les  ordonnances,  et  qui 
sont  venus  pour  honneur  ou  pour  plaisir,  et  aller  trouver  le  Roy 
pour  luy  faire  service,  laissans  les  chevaulx  qu'ils  auront  de  prix, 
avec  les  trouppes  d'hommes  darmes,  dans  le  Ferrarois,  pour  ne  les 
perdre  en  si  long  voyage. 

Il  est  mal  séant  a  un  prestre  de  parler  de  ces  choses  sy  avant  qui 
ne  sont  de  sa  profession,  mais  la  qualité  qu'il  plaisl  au  Roy  que  jaye 
en  son  service,  et  l'affection  que  je  doibs  au  bien  de  ses  affaires,  et 
celle  que  j'ay  aussy-a  vous  en  particulier,  Monseigneur,  m'excuse- 
ront, s'il  vous  plaist,  depresumption  et  de  tout  reproche. 

Fait  a  Venize  le  1er  jour  de  Septembre  1557. 

iBibl.  nat.,  Fr.  23236,  fol.  556,  et  Mém.  du 
Duc  de  Guise.  Imp.,  p.  285] . 


14  AD  VIS     DE    M.    DE    LODÈVE 

(Amenda  de  M.  de  Dacqs) 


Vous  avez  le  sr  Francisque  Bertrand,  lequel  vous  viendra  souvent 
dire  des  nouvelles  et  persuasions,  il  le  faut  fort  escouter  et  louer, 
jamais  ne  luy  discourir,  sinon  de  galante  humeur. 

Vous  avez  Marc  Vidal,  homme  dextre  *d  fort  exercité  aux  partiz 
d'argent,  qui  scait  la  ou  il  y  en  a,  et  les  moyens  d'en  avoir  possible 

(1)  Gaspard  de  Saulx,  sieur  de  Tavanne,  maréchal  de  camp  dans  l'armée  du 
duc  de  Guise  ;  il  fut  nommé  maréchal  de  France  en  1570,  gouverneur  de  Provence 
en  1572  ;  mourut  le  19  juin  1573. 

(2)  M.  de  Brosses,  maréciial  de  camp  dans  l'armée  du  duc  de  Guise. 


316  NÉGOCIATIONS   DE    DOMINIQUE    DU    GABRE  [1557] 

et  raisonnable;  est  homme  d'entendement  et  d'honneur,  vous  aurez 
toujours  par  luy  toutes  les  nouvelles  de  Realte  et  de  S1  Marc,  qui 
servent  de  passelemps  et  quelquefois  donnent  argument  et  matière 
d'escripre. 

Vous  avez  cest  ambassadeur  de  Ferrare,  qui  est  de  son  naturel 
afexionné  a  noz  affayres  et  est  fort  mal  traité,  et  mal  content  du  Duc, 
et  faict  profession  de  descouvryr  toutes  secrettes  intentions  de  la 
Seigneurie  et  des  ennemys,  il  luy  faut  faire  bonne  chère  et  quelquef- 
foys  l'appeller  a  diner  domesliquement,  louer  son  scavoir  aux 
lettres  et  aux  armes,  dont  il  faict  grande  profession,  et  louer  ses 
discours,  mais  estre  fort  réservé  a  luy  faire  les  vostres. 

Vous  avez  icy  Camille  de  la  Croix,  qui  est  fort  bon  jeune  homme 
et  dilligent  et  fidelle,  vous  fera  mille  service  aux  négociation  du 
palays,  des  courts,  sil  advenoit  quelque  occasion,  et  pour  l'expédi- 
tion des  lettres  et  patentes  dont  vous  aurez  bien  souvent  besoing 
de  la  Seigneurie;  je  my  suis  tousjours  tant  fye  que,  quant  je  ne  pou- 
vois  aller  a  la  Seigneurie,  je  ly  envoyois  au  lieu  de  mon  secrétaire. 

Vousavez  le  sr  Francisco  Nazi,  homme  de  grand  crédit  et  homme 
de  bien;  cest  luy  qui  a  toujours  fourny  tous  les  deniers  despenduz 
pour  le  Roy  en  Itallie  et  a  secouru  les  ambassadeurs,  mais  il  veut 
bien  scavoir  comment. 

11  vous  fault  eslire  ung  secrétaire  vostre,  qui  tous  les  matins  aille 
a  S1  Marc  entendre  tout  ce  que  Ion  y  dicl  au  lieu  ou  se  reduysenl 
tous  les  ambassadeurs  subalternes  el  les  autres  secrétaires,  el  par- 
tant dudit  S1  Marc,  il  sen  viendra  a  Realte  donner  une  passe-grata 
et  puis  s'en  viendra  disner  et  vous  rapporter  tout  ce  quil  aura 
entendu  ;  ladvertir  de  la  modestie  el  de  parler  réservement. 

Jay  ung  portier  qui  a  servy  troys  ambassadeurs  :  forl  bon  homme, 
seur  et  conscientieux.  jamais  ne  bouge  de  la  port»1,  et  avant  que 
lonsoit  levé  il  a  ballye  el  nestoyé  la  salle  el  la  maison;  il  a  ung  escu 
le  mois  de  gaiges.  Vous  l'aurez  si  le  voulez. 

Jay  ung  jeune  gentilhomme  français,  que  Ion  appelle  Cambiz.  qui 

me  sert  de  copyer.  Il  vouldroit  encores  demeurer  en  Itallye  el  esl 

fort  bien  conditionné,  de  qui  je  me  fye;   il  avoit  deux  escuz  de 

gaiges. 

(Affaires  étrangères,  Venise,  t.  vu,  loi.  9). 


APPENDICE  317 


ADDITIONS 


P.  XXI,  note  2.  —  Le  duc  de  Longueville.  —  Léonor  d'Orléans, 
duc  de  Longueville,  fils  de  Longueville  (François  d'Orléans,  mar- 
quis de  Rothelin),  né  en  1540,  mort  en  1573  à  Blois.  — En  1551,  il 
recueillit  la  succession  de  François  III,  son  cousin,  mort  sans  pos- 
térité, et  fut  gouverneur  de  Picardie.  Après  avoir  été  lait  prison- 
nier des  Espagnols,  à  la  bataille  de  Saint-Quentin,  il  prit  une  part 
active  aux  affaires  du  temps  et  soutint  le  parti  de  la  Cour.  Charles 
IX  lui  accorda  en  1571  le  titre  de  prince  du  sang.  Marié  en  1561 
avec  Marie  de  Bourbon,  veuve  du  comte  d'Enghien,  Jean  de  Bour- 
bon, il  en  eut  neuf  enfants.  (Voir  Anselme,  Histoire  des  Grands  offi- 
ciers de  la  Couronne). 

P.  10,  dépêche  8,  dernière  ligne,  en  note.  —  Les  noces  du  duc 
Orace.  —  Il  s'agit  du  mariage  d'Horace  Farnèse  avec  Diane  d'An- 
goulême,  fille  naturelle  de  Henri  II,  légitimée,  et  d'une  Piémon- 
taise,  ou,  suivant  Brantôme,  de  Diane  de  Poitiers.  Après  la  mort 
d'Horace  Farnèse,  Diane  d'Angoulême  épousa  François  de  Mont- 
morency, fils  du  Connétable.  Elle  mourut  en  1619. 

P.  21,  dépêche  14,  ligne  6,  en  note.  — Monsieur  d'Aumale.  — 
Claude  II  de  Lorraine,  né  en  1526,  marquis  de  Mayenne,  duc  d'Au- 
male en  1547,  colonel  de  la  cavalerie  légère,  gouverneur  du  Dau- 
phiné  (1548),  de  Bourgogne  (1550),  s'illustra  à  la  défense  de  Metz, 
assiégée  par  Charles-Quint,  et  aux  batailles  de  Dreux,  Saint-Denis, 
Moncontour.  Il  avait  épousé  en  1547  Louise  deBrézé;  mourut  au 
siège  de  La  Rochelle  en  1573. 

P.  35,  ligne  27 ,  en  note.  —  Marenne.  —  Sans  doute,  la  Maremme, 
territoire  de  Toscane,  entre  Livourne  et  Piombino. 

P.  59,  ligne  13,  en  note.  —  Le  duché  de  Milan.  —  Après  Mari 
gnan,  François  Ier  se  rendit  maître  du  Milanais;  Maximilien  Sforza 
enfermé  dans  le  château  de  Milan,  résista  quelque  temps,  mais 
moyennant  une  pension  de  30.000  ducats,  céda  le  duché  à  Fran 
çois  Ier  en  1515.  —  En  1521,  le  pape  Léon  X  et  Charles-Quint 
ayant  conclu  une  ligue,  reprirent  le   Milanais  au  nom  de  François 


i 


318  NÉGOCIATIONS   DE   DOMINIQUE    DU    GABRE 

Marie  Sforza.  Celui-ci  mourut  en  1531.  L'Empereur  s'empara  alors 
du  duché  de  Milan,  et  entretint  longtemps  François  1er  de  l'espé- 
rance d'investir  l'un  de  ses  fils  de  ce  duché  ;  malgré  cette  pro- 
messe, il  en  investit  Philippe  II  le  11  octobre  1540.  Ce  prince,  et 
tous  les  rois  d'Espagne,  possédèrent  le  duché  de  Milan  jusqu'en 
1706,  époque  où  l'empereur  Joseph  Ier  s'en  rendit  maître. 

P.  59,  dépêche  43,  ligne  5,  en  noie.  —  Les  Tassin  de  Luna  ou 
Lonato  ils  étaient  plusieurs,  car  du  Gabre,  pages  224  et  256  de  la 
présente  correspondance,  dit  :  l'un  des  Tassins  résidaient  à  Lonato, 
à  22  kilomètres  de  Brescia  ;  ils  remplissaient  Ips  fonctions  de  cour- 
riers et  entretenaient  de  constantes  relations,  à  titre  d'agents  de  la 
France  en  Lombardie,  avec  nos  ambassadeurs  à  Venise. 

P.  95,  dépêche  72,  ligne  J ,  en  noir.  —  Le  duc  de  Mantoue.  — 
Guillaume  de  Gonzague,  3e  duc  de  Mantoue.  (ils  de  Frédéric  Pr,  duc 
de  Mantoue,  et  de  Marguerite,  fille  de  Guillaume  VI  Paléologue,  né 
le  14  avril  1538;  il  succéda  en  1550  à  son  frère  aîné  François,  sous 
la  tutelle  de  sa  mère  et  de  son  oncle  le  cardinal  Hennit'  :  épousa  en 
1561  Éléonore  d'Autriche,  tille  de  l'empereur  Ferdinand  Ier,  el  mou- 
rut le  14  août  1585. 

P.  135,  ligne  6,  en  note.  —  Prestanza  :  impôt,  taxe. 

P.  168,lign>-  :>.  en  note.  —  Alvarot.  —  Alvarotti,  ambassadeur 
d'Hercule  II  auprès  de  la  Cour  de  France.  Il  avait  été  chargé,  en 
1554,  de  ramener  à  Ferrare  l'héritier  présomptif  du  duché,  Alphonse, 
qui  s'était  enfui  pour  aller  se  mettre  au  service  d'Henri  II     Voir 

Rodocanacui,  Renée  de  France,  p.  229  . 

P.  216,  note.  —  René  d'Elbeuf.  —  René  de  Lorraine.  7  (ils  de 
Claude,  duc  de  Guise,  1er  marquis  d'Elbeuf;  il  mourul  en  1566. — 
Elbeuf  avait  été  érigée  en  comté  par  Philippe  VI  en  1338;  «'lit'  échut 
en  1554  à  la  maison  de  Lorraine  et  fut,  dès  lors,  érigée  en  mar- 
quisat. 

P.  242,  dépêche  185,  ligne  I  ! ,  en  unir.  —  Guastalla,  ville  d'Ita- 
lie, sur  la  rive  droite  du  Pô.  à  27  kilomètres  N.-E.  de  Parme. 

P.  263,  noie  2.  —  Le  duc  d'Enghien.  —  .Iran,  comte  de  Soissons, 
puis  duc  d'Enghien  à  la  mort  de  son  frère  François,  uaquil  le  6 
juillet  1526;  il  était  fils  de  Charles  de  Bourbon,  duc  de  Vendôme,  el 


APPENDICE  319 

de  Françoise  d'Alençon.  A  la  bataille  de  Saint-Quentin,  il  se  jeta 
dans  la  mêlée,  la  lance  en  avant,  ne  voulant  pas  être  frappé  par 
derrière,  fut  mortellement  blessé,  et  mourut  à  1  âge  de  31  ans. 

La  seigneurie  d'Enghien,  en  Hainaut,  était  passée  de  la  maison  de 
Luxembourg  dans  celle  de  Bourbon  par  le  mariage  de  Marie  de 
Luxembourg  avec  François,  comte  de  Vendôme,  en  1467.  Ce  titre  fut 
successivement  porté  par  son  fils  Charles  et  ses  deux  petits-fils 
Jean  et  Louis  de  Bourbon.  (Voir  Le  duc  d'Aumale,  Histoire  des  prin- 
ces de  la  maison  de  Condé,  7  vol.  in-8°.  Paris,  Calman-Lévy,  1885). 

P.  308,  dépêche  9,  ligne  27,  en  noie.  —  Ce  "Monsieur  de  Grand- 
selve  »  était,  sans  doute,  un  oncle  maternel  de  François  de  Noailles, 
pourvu  de  l'abbaye  de  Grandselve,  au  diocèse  de  Toulouse. 


TABLE  ANALYTIQUE 


DES    MATIÈRES    CONTENUES    DANS   CE   VOCIME 


Abondio,  courrier  —  '219. 

Abruzzes.—  135,   137,  238,  240,  286. 

Achile  (Domenico  d').  —  95. 

Adda    1").  —  40. 

Agria.  —  Voir  Erlau. 

Albe.—   21,  59. 

Albe  'Fernando  Alvarez  de  Tolède, 
duc  d').  -  xxi.  7,  32.  37.  41,  122,  127, 
130,  135,  137.  138,  140,  U3.  147,  148, 
176,  182,  190,  192.  195,  205,  206,  211, 
215,  216,  246,  2.7,  261,  267,  268,  269, 
274,  312,  313. 

Albenine.  —  Voir  Bene  (Albisse  ciel). 

Albize.  —  Voir  Bene  (Albisse  del) 

Albo.n  Jacques  d'),  seigneur  de  Saint- 
André,  maréchal  de  France.  -  Voir  Saint- 
André. 

Albret  'Henri  d'),  roi  de  Navarre.  — 
159. 

Albret  'Isabelle  d').  —  160. 

Albret  (Jean  d').  —  160. 

Albret  Jeanne  d').  —  160. 

Alcala   de  Hénarès.—  183. 

AlencoiN  (duc  d1),  quatrième  tils  de 
Henri  II.  —  118 

Alençon  'Françoise  d'),  mariée  à 
Charles' de  Bourbon,  duc  de  Vendôme. 
—  319. 

Alès  (d1).  secrétaire  de  Gabre.  —  152. 

Alexandre  (le  sieur).  —  Voir  Guérin 
Alexandre. 

Alexandrie   —  147.  238. 

Alger  —  100. 

Alger  (devs  d').  —Voir  Yahya,  You- 
souf. 

Alvarot  —  Voir  Alvarotti. 

Alvarotti,  ambassadeur  de  Ferrare 
en  France.  -  168.  318. 

Ambassade  de  France,  à  Venise  (Pa- 
lais de  Y).  —  Voir  Urbin  (Palais  d    . 

Ambassadeurs  de  Charles-Quinte  — 
A  Rome,  voir  Manriquez  de  Lara, 
marquis  de  Saria. 

A  Venise,  voir  Vargas. 

Ambassadeurs  de  FÈrrark  —  A  Paris, 
voir  Alvarotti. 

A  Rome,  voir  Roddi. 


Ambassadeurs  de  France.  —  En  An- 
gleterre, voir  Noailles  François  de  . 
Selve   Odét  de  .  Seurre  [Michel  de  . 

En  Ecosse,  voir  Péguineau  (Martin,. 
Langea c   Jean  de  ■ 

En  Espagne,  voir  Langeac  (Jean  de). 

A  la  Porte  Ottomane,  voir  Aramon 
'Gabriel  d').  Boistaillé  {Hareau  de), 
Cambray  [Jean-Jacques  de  .  Codignac 
{Michel  de  .  Fumel  (François  de),  Lan- 
sac  [Louis  de  .  Mari/lue  [Charles  de), 
Noailles  (François de),  Vigne  [de  la). 

En  Portugal,  voir  Guivhe  \Claude  de 
la),  Langeac  'Jean  de). 

A  Rome,  voir  Armagnac  (Georges  d'\ 
Avanson  Jean  d'),  Guiche  Claude  de 
la),  Langeac  Jean  de),  Lansac  (Louis 
de  ,  Mari/lac  (Charles  de),  Selve  (Odet 
de). 

En  Suisse,  voir  Asnois  d'),  Langeac 
(Jean  de\  Coignet  (Mathieu). 

En  Transylvanie,  voir  Martincs. 

A  Venise,\oir/l rmagnac  (Georges  d'). 
Ba'if  (Lazare  de  .  Canossa,  Gadagne 
(Guillaume  de),  Langeac  iJean  de), 
Morvillers  (Jean  de),  Noailles  (Fran- 
çois de),  Pélicier  (Guillaume),  Pins 
(Jean  de),  Selve  (Georges  de),  Selve 
(Odet  de). 

Ambassadeurs  de  Philippe  II.  —  A 
Venise,  voir  Ayala,  Vargas. 

Amboise    -  222,  297,299. 

A.MBNZÉ  Jean  d'  .  enseigne  au  régi- 
ment de  Piémont.  —  28. 

ANCÔNE.  —  122,  135,  161,  215.  216, 
230,  246 

Andelot  (François  de  Coligny,  sei- 
gneur d',.  agenl  de  l'ambassade  de 
France  à  Venise   —  20,  80. 

Andrinople.  —  152,  166,  220,  229, 
233.  219.  250. 

Androuet  du  Cerceau.  —  229. 

Angennes  (Jacques  d'),  seigneur  de 
Rambouillet,  capitaine  nés  gardes.  — 
89,  297,  298,  299. 

Angleterre  (roi  d").  —  Voir  Henri 
VIII.  Philippe  U. 

->:■> 


322 


TABLE   ANALYTIQUE 


Anglure  (René  d"),  sieur  de  Givray. 
colonel  de  l'infanterie  française  en  Tos- 
cane.— 313. 

Anne  de  Bretagne,  reine  de  France. 

—  xi,  3. 

Anne  de  Hongrie,  mariée  à  Ferdi- 
nand 1er  d'Autriche.  —  189. 

Anselme  île  P.).  -  108,  311. 

Antibes.  —  91. 

Antonio    don  .  —  152. 

Aramon  (Gabriel  de  Luez.  baron  d). 
ambassadeur  auprès  de  la  Porte  Otto- 
mane. —  51,  99. 

Archives  du  ministère  des  Affaires 
étrangères.  —  vu.  xx:  —  de  Ferrare.  — 
vu.  xxvn;  —  de  Modène.  —  vu.  xx. 

Arezzo.  —  XVI. 

Ariège.   —  VIII. 

Armagnac  ^Georges  d'  .  évêque  de 
Rodez,  ambassadeur  à  Venise.  —  xv, 
163,  293. 

Arnoul  (le  contrôleur;.  —  87. 

Arquebuses.  —  Ml . 

Artillerie.  —  6,  18.  20.  38,  iO.  54, 
145,  159,  161,  187,  19i.  197.  211,  242.  245. 
251.  254,  2".  282,  2s:.  2-8.  305.  312. 

Ascanyo    le  sieur)  —7,8,  92 

Ascension  (fête  de  1'..  —  12s. 

Asnois  1  Louis  de  Salazar.  seigneur  d';, 
ambassadeur  en  Suisse.  —  121.  245, 
254. 

Atri.  —  230. 

Attanante,  secrétaire  du  cardinal 
Carafa.  -  147. 

AUCANVILLE.    —  IX. 

Ai  ch  (Collège  des  Jésuites  d').  — IX. 

Augsbourg.  —  127,  183. 

Auguste  île  duc  .  électeur  de  Saxe. 

—  72 

Augustins    religieux  .  —  12S. 

Aumale  Claude  II  de  Lorraine,  due 
d).   -   21,   118.  2!i>.  27::.  271.  27:,.   317. 

Aumale  (comte  d'  .  —  Voir  Guise 
[Claude  de  Lorraine,  premier  du 

Aumale    Henri  d'Orléans,  duc  d').  — 

319. 

Autriche  Marguerite  d' .  veuve 
d'Alexandre  de  Médicis,  remariée  a  Or  - 
tave  Farnèse.  —  37. 

Auvergne.  —  291. 

Avalos  et  Aqdino  François-Ferdi- 
nand  d'  .  marquis  de  PescaïTe.  —  Voir 
Pescaïre. 

Avanson  Jean  de  Saint-Marcel,  sieur 
d'),  ambassadeur  à  Rome.  —  106,  107, 
109,  11U.     115,    117.   119,    151,  194,   237. 

A VR ANCHES.  —   W  . 

Avala  don  Giovanni  .  ambassadeur 
par  intérim  de  Philippe  II  à  Venise.  — 
212. 


Bagdad.  —  100. 

Baglione  Adrien  .  commandant  des 
troupes  italiennes  au  service  de  la 
France.  -   121.  211.  220.  221. 

Bagny  (comte  de).  —  Voir  Carafa 
.\nt<mio). 

iUENAULT  DE   PUCHÈSE.   —  291. 


Baif  iLazare  de  ,  ambassadeur  à 
Venise.  —  xv. 

Bailleul  Commanderie  de).  —  x. 

Bâillon  Adrien).  —  Voir  Baglione 
(Adrien,) . 

Ban.  —  61.  Ban   arrière-.  —  61. 

Ba.ndidio  (le  sieur  .agent  du  cardinal 
de  Ferrare.  —  234,  236^ 

Banques.  —  165,  232,  236. 

Banquiers. —Voir  Benc  (Atbixse  del), 
Soz>/.  <tmzz>    Roberto,. 

Banquiers  de  Lyon.—  164:-  de  Paris. 
164. 

Baptistin  (le  sieur  .  —  Voir  ïtrozzi 
Baptistin  . 

Barberousse.  —  Voir  Keir  cl  Din 

Barcelone.  —  10 

Barques.  — 83,  134,161,198,  201   - 

Barry.  -  183. 

Barthe  Paul  de  la  .  seigneur  de 
Termes.  —  Voir  Termes. 

Baschet    Armand  .  —  122.  L34,  185. 

Bassa    le).  —  141,  174. 

Baume  Françoise  de  la),  mariée  à 
François  de  Carnavalet.  —  229 

Baux  Isabelle  des  ,  mariée  à  Pierre- 
François  Colonna.  —  223 

Bayard  (Pierre  du  Ter  rail,  seigneur 
de).  -  94. 

BAYLE  de  Ferrare  .—  107:  de  Venise  . 

—  166 

B  A  YONNE.   —  XXII.  55. 

BEAUCAiRe   Etats  tenus  à  .  -  xi. 
ieg  ''.U'  Jean  du  Thier,  seigneur 
de  .  secrétaire  des  finances.  —  xn.  xm, 
xxn.  29,  34,  169,  189,  lit'..  208,  27 
294,  299,  309. 

BeliÈvre    de  .  —  vu. 

Bellay   Guillaume  du  .  seigneur  de 
.  —  Voir  Langey. 

Bellay  Jeandu  ,  seigneur  du  Bellav, 
cardinal.  -   55.  56.  57,  58,  B 

Bellay  Louis  du  ,  seigneur  de  Lan- 
gev,  pèie  du  cardinal  Jean  du   Bellav. 

—  "55 

l!i  i.i.ikr  François  de  .  abbé  de  Manne, 
chargé  de  missions  auprès  du  Pape.— 
151,  229. 

Bene  Albisse  del  .  -encrai  ei  surin- 
tendant des  finances.  —  8 
26.  31,  33,  3.",.  56.  60.  I  '16.  67, 

68,  76.   81,   f  "    90,   92,   103,   104, 

L32,   139,    l-i.    192,   200,  232,    249 
270.  306. 
'.  ENTE.  —   227  . 

Bentivoglio  Cornelio),  colonel  ita- 
lien au  service  de  la  France.  —  :'■■">. 

Bi  1. 1  m-  \  ii.i.f  (de  .  ancien  capitaine 
français.   -  168,  169. 

r.hiii  li  lnd   Francisque  .  - 

l'uni  1;  wii  Jean  .  cardinal,  garde  des 
sceaux  de  France. —  227. 

Iti'/ii  >,-  Diocèse  de  .  —  xmv  :  Etats 
tenus  à    —  xi. 

Bibliothèque  nationale  a  Paris.— 
VI.   xxvn. 

BlLLON,  secrétaire  du  duc  de  l'arme. 


TABLE    ANALYTIQUE 


323 


Binch  (de).  —  xxvi. 
Biron.  —  Voir  uontaut  {Armand  de). 
Biscuits.  —  152. 

Blés.—  14,  21,  107,  187,  190,  193,194, 
196.  197. 198,  199,  200,  201,  202,  314 
Blois.—  xi,  xv 
Bodet  (Wr  ,  secrétaire  du  Connétable. 

—  245,  246,  247,  248,  249,  250,251,  252, 
254,  255,  256,  258. 

BOGNIÈRES.  —  218. 

Bohème  (le  roi  de'.  —  57. 

Boistaillé  (Hureau  de),  ambassadeur 
auprès   de  la  Porte  Ottomane.  —  100. 

Bologne.  —  x,  xx,  43,  64,  80,  133, 
141,  145,  146,  147,  148,  155,  206,  215, 
219,  313. 

Bombardes.  —  161 . 

Bombardiers.  —  161 

Bonifacio.    -  70,  7:,  92. 

Bonnacorsy  de),  secrétaire  du  duc 
de  Ferrare.  —  11,  13,  14,  15,  60. 

Bonnet  [Jules).  —  xi. 

Borghetto    —  187. 

Borgia  (Lucrèce),  mariée  à  Alphon- 
se Ier  d'Esté,  duc  de  Ferrare.  —  3,  96. 

Boucher.  —  82,  83, 114. 

Boucher  (Etienne  ,  abbé  de  Saint- 
Ferme.  -  120,  194,  300. 

Bouchier  (Arnouldj,  secrétaire  de 
l'ambassade  de  Borne.  -  25,  51,  52. 

Bouchot  (Henri).  —  xxvi. 

bouillard  (d.).  —  x,  xxiii. 

Boulets.  —   36,  145,  253,  271.  288. 

Boulogne.  —  102 

Boullogne.  —  Voir  Bologne. 

Bourbon  (maison  de).—  319. 

Bourbon  (Antoine  de),  roi  de  .Na- 
varre. -  4,  118.  159,  160. 

Bourbon  Antoinette  de),  mariée  à 
Claude  Ier  de  Lorraine,  duc  de  Guise.— 7. 

Bourbon  (le  cardinal  Charles  de).  — 
118. 

Bourbon  (Charles  de),  duc  d'Enghien, 
fils  de  François  de  Bourbon.  —  319. 

Bourbon  Charles  de),  duc  de  Ven- 
dôme. —  318. 

Bourbon  (François  de),  duc  d'En- 
ghien, frère  aîné  du  suivant.  —  318. 

Bourbon  (Jean  de),  comte  de  Sois- 
sons,  duc  d'Enghien.  -  263,  318. 

Bourbon  (Jean  de),  duc  d'Enghien, 
pelit-tils  de  François  de  Bourbon.  — 
319. 

Bourbon  (Louis  de),  duc  d'Enghien, 
frère  du  précédent.  —  319. 

Bourbon  (Louis  II  de),  pair  deFrance, 
duc  de  Montpensier.  -  xxi,  263,  310. 

Bourbon  ^Marie  de),  veuve  du  comte 
de  Soissons,  duc  d'Enghien,  remariée 
à  Léonor  d'Orléans,  duc  de  Longue- 
ville.  -  317. 

Bourg  (Claude  du),  trésorier  des  fi- 
nances à  Lyon  et  trésorier  de  l'extra- 
ordinaire dés  guerres.  —  189. 

Bourg-en-Bresse.  —  259. 

Bourges   —  x,  xv,  174. 

Bourgogne.  -  257,  317. 

Boyvin  de  Villiers,  secrétaire  du 
maréchal  de  Brissac  —  21,  25. 


Brandebourc  (marquis  Albert  de).— 
71. 

Brantôme  (Pierre  de  Bourdeilles,  sei- 
gneur de).  —  23,  33,  35,  53,  102,  123, 
160,107,  256,  317. 

Bbesaule,  médecin  de  du  Gabre.—  32. 

BRESCELIiO.  -  20,  24,25.  30,  37,  39, 
40,  41,  43,60,  67,  72.  75,77,80,  135,  169, 
193,  305. 

Brescia.  —  3,  57,  208,  213,  214,  224, 
318. 

Bresse.  -  259 

Bresse.  —  Voir  Brescia. 

Bresseil.  —Voir  Brescello. 

Bbeuil  (Jacques  du).  —  xxm. 

Brézé  (Louise  de),  mariée  à  Claude  II 
de  Lorraine,  duc  d'Aumale.  —  317. 

Bbigantins    —  2  4  4,  257. 

Brissac  (Charles  de  Cossé  ,  maréchal 
deFrance.  —  25.  102.  146.  147.  148. 
153,  156,  161,  218,  220,  223,  226,  236, 
247,  255,  259,  273.  293,  301. 

British  Muséum,  à  Londres    —  xxvi. 

Brosses  [de),  maréchal  de  camp  dans 
l'armée  du  duc  de  Guise    —  315. 

Brunswick  ^Henri  II,  dit  le  Jeune,  duc 
de).  —  101,  263. 

Brutus  (Lucius-Junius).  —  108. 

Bruxelles.  —  217. 

Bucentaure  (le).  —128,166,204,225, 

Burgos.  —  25,  138. 

Burgues  (le  cardinal).  —  Voir  Men- 
doza . 

BURTY   (A).  —  XXIII. 
ÎÎISSIÈRES-BUZET.   —   IX. 

Byasio  (Jean-Marie  de),  prisonnier.— 


Cabassolles  (Antoine  de),  capitaine 
des  galères.  —  56,  59. 

Calais.  —  279. 

Cales.  —  Voir  Calais. 

Calvi   —  76,  81. 

Calvin  (Jean).  —  xiv. 

Cambis  île  sieur  de  .  secrétaire  à 
l'ambassade  de  France  à  Venise,  -  176, 
316. 

Cambray  (Jean-Jacques  de),  vice- 
ambassadeur  auprès  de  la  Porte  Otto- 
mane. —  17  4,  181,  182,  185,  195,  203. 

Camillo  ;  le  sieur  ,  capitaine  italien. 
~  15,  19.  20.  235. 

Cami-li     —  240.  2i2. 

Canons.  —  40,  70,  80.  161,  187,  287. 

Canossa,  évèque  de  Baveux.  —  xv. 

C^piferi  (Jérôme),  cardinal.  —  i.i. 

Capus   famille  de  .  —  ix. 

Carafa  (Alphonsel,  cardinal,  neveu 
du  cardinal  Carlo  Carafa    —  227. 

Carafa  i  Antonio  .  duc  de  Montebello, 
comte  de  Bagny,  neveu  de  Paul  IV  et 
frère  aine  du  cardinal  Carlo.  —  xx, 
122,    129.   141.    112.   176,  178,   187.  216. 

Carafa  Carlo  ,  cardinal,  neveu  de 
Paul  IV.—  XV,  xvi,  \vii,  xviii.  XIX,  43, 
118.  !2ii.  121.  122.  123,  132,  133,  134, 
137,  138,  139,  KO.  143,  I  11.  lin.  117. 
148.  1  l'.i,  160,  163,  168,  170,  171,  172, 
176,  177,  178,  186.   187,    203,    204,    207, 


324 


TABLE    ANALYTIQUE 


208.  209.  210.  212.  213,  214.  215.  216. 
217,  218.  219,  220,  225,  228,  230,  269, 
274.  312,  313 

Carafa  Jean-Jacques  .  comte  de 
Monlorio,  duc  de  Paliano.  neveu  de 
Paul  IV,  frère  du  cardinal  Carlo.  — 
137,  139,  140,  147.  171,  176,  206,  218. 
25G.  307.  308. 

Carcassonne  'sénéchal  de).—  61,  62. 

Carnavalet  François  de  Kernevenoy 
ou  .  chevalier  de  l'ordre  du  Roi.—  229, 
232.  234. 

Carnavalet  (Hôtel  .  à  Caris.  —229. 

Carpi.  -  114,  115,  235. 

Casal  Major    —  166,  226,  228.  245. 

Casa  le    —  105,  135.  150. 

Casoli.  —  99. 

Castelfranco.  —  1 15. 

Castel  Rodrigo.  —  138. 

Castro.  —  187 

Castro  [duc  de).  —  Voir  Farnèse 
(Horace  . 

Castro  duchesse  de).  —  Voir  Diane 
d'Angoulâme. 

Castro   Scipion  de  .  —  156.  226. 

Cateau-Cambrésïs  (paix  de).  —  8,  150, 
279. 

Catherin  Jehan),  maître  de  la  poste 
à  Lyon.  —  i . 

Catherine  d'Angleterre,  mariée  a 
Guillaume  de  Courthenay   —  107 

Catherine  de  Médicis,  reine  de 
France.  _  s.   10.  12.  120.  215,  256,  291. 

Cavalcanti  Lucrèce  .  mariée  au  gé- 
néral del  Bene.       8. 

Cavalerie.  —  51.  135,  1 19,  152,  221. 
242,  305. 

Cavi  le  marquis  de  .  fils  de  Jean  ■ 
Jacques  Carafa.  —  256. 

Ceneda.  —  219. 

Cér isoles    -  x.  «Il  . 

CERVIA.—  121.  212.  21  i.  215,  289. 

Césarin    Julien  .  —  172. 

Ceslos  (monastère  de.  àTolède).  -  136. 

Chambre  apostoliquk  la  .      120,  1 T  i . 

Chambre  des  comptes.  —  292. 

Champ  ac.ne.—  257 

Champdoiseau,  courrier  —  137,  139, 
140. 

Chantereau,  secrétaire  d'Odel  de 
Selve.  —  xvi. 

Chantilly.  —  10.  13. 

Charles  VU  I,  roi  de  Fiance.—   xi. 

Charles  l\,  roi  de  France.  —  9,  317. 

Charles-Quint,    empereur  wi. 

xvii.  xix,  '.  16.  23.  17.  53,  58,  59,  69, 
71.  72.  73,  74,  75,  78,  si.  98,  100,  102, 
105,  110.  112.  US.  126,  127.  129.  111. 
142,  1  il.  150.  157,  171,  172,  176,  L78,  179, 
180,  182  183.  ISS.  L92,  199,  210,239,  240, 
249,  264,  265,266,  282,  287,290,  296,297, 
298,  317.  318, 

Charrière    F. '.—  171.  181. 

Cil  VS'i  ILLON  le  cardinal  de  .  —  Voir 
Colii/iui    Odet  de  . 

Chauchanon        25. 

Chemans  François-Brigilte-Errault, 
sieur  de  .  -  119,  156,  157,  226.  247,248, 
249,  250,  252 


Cherasco.  —  213. 

Chesnay-des-Bois  (La).  —  27. 

Chesneau  (Jean),  secrétaire  de  M. 
d'Aramon.  —  51. 

Chevau-légers.  —  34,  37.  38,  102, 
129,  152,  189,  202.  207,  216,  232,  314. 

Chiaramonte  Annibal  de.  capitaine 
italien  au  service  de  la  France.  -   301. 

Chiaramonte  François  de),  colonel 
italien  au  service  de  la  France.  —  301. 

Chinsi.  —  25. 

CHIOGGIA.  -    128.   134.    145,   197.  199. 

Chiosa.  —  36. 

Civita-Vecchla.  —  XX.  172. 

ClVITELLA.  XXI,  212.  213.216,  217. 
261.  267.  271.  307. 

Clément  VU,  pape.  —  5 

Coghart  [le  baron  Pierre  .  résident  à 
Rasuse.       99.  100.  111.  113 

Codignac  Michel  de  .  ambassadeur 
auprès  la  Porte  Ottomane  -  99.  127. 
lit.  150,  152.  171.  181.  185,203,  233.  249. 

Coi  i  fier  Gilbert  .  lieutenant  général 
en  Italie.  -  196,  198,  200.  2'i. 

Coignet   Mathieu  .  ambassadeur  en 
243. 

-  132,  133,  246. 
François  de  .  —    Voir    .1»- 


Suisse. 

Coire. 

Coligny 
delot. 

Coligny 
France.  — 


Gaspard    de  .   amiral   de 


lis 


Coligny  .odet  de),  cardinal  de   Cha- 
lillon     -   17.  26,  28,  32    194,  279. 
Collège   le  .  à  Venise   —  134. 
COLONNA    famille  .  —  137.  217 
Colonna    Vseanio),  duc  de  Paliano. 

-    171 

Colonna  Marc-Antonio.—  137,171, 
176    261. 

Colonna  Pierre-François),  seigneur 
de  Zagarolo.  —  - 

Colorno.  —  80. 

Commandon  Jean-François  .cardinal, 
secrétaire  «le  Paul  IV.  -  191. 

Commissaires  des   goerres.  —   Voir 
Jacquier,    Paquier,  Tadei     Vin 
etc. 

CompiÈGNE.  —  xiv.  xxii,  293,  291,  308, 

Conciles.  —  Voir  Latran,  Narbonne, 
l'ise,  Trente 
Conclave  lei.  —  xvn. 
Condom.  —  94. 

CO.NEGLl  v\"    —  219. 

CONl.  —  217.  253,  255, 

Conni  i  \t:i.i:  (M.  le  .  —  Voir  Montmo- 
rency   Anne  de  . 

C  i'nsi  il   dbs  l>i\  île  .  à  Venise 

CONS1  wiiMipi  e.  —  20,  51.  100.  107, 
lie.  120,   123,  166,  193    241,  249,  250. 

Com  i  taiNi  (Tomaso),  provéditeur  à 
Venise     -  220. 

Con  iTtni.i  i  '  i  \  .  —  Voir  Lttu- 

glade,  Marcati    Pomaro. 

Coparb.       202. 

Cornbuo,  agenl  à  Venise.  —  B 

CORRBGGIO.  —  234,  255.  231 
256,  . 
Corse.  -  2::.  73, 75.  77,  90,  91. 


TABLE    ANALYTIQUE 


323 


Corso  (San  Pietro  .  colonel  an  service 
de  la  France.  —  301. 
Cotignag.  -  Voir  Codignac. 

COULEUVRINES      -    281  . 

Courriers  —  Voir  Champdoiseau, 
Chemans,  Franchot,  Gassot,  Girault, 
Guërin,  Jacobo,  Jehan  André,  Landes 
{des  ,  Lhome  (Pierre  de),  Losco,  Ma- 
lacrida,  Marseille,  Ncpy,  Perrot,  Petit 

Jean  :   Rau    du  .    liirieie    la  .   Scipion, 

Sigismondi,  Tassin,  Thienne  <ie  . 
Tholomei. 

Courtenay  Edouard  de  .  comte  de 
Devon    —  107,  168,  169 

Courtenay  (Guillaume  de),  comte  de 
Devon    —  107. 

Crémone.—  iO.  17,  166,  172,  285,  303. 

Croce  ,Pompeio  de.        105. 

Croix  (Camille  de  la  ,  agent  de  l'am- 
bassade de  France  à  Venise.  —  316. 

Croix  (Jean-Jacques  de  la),  secrétaire 
de  l'ambassade  de  France  à  Venise.  — 
22,  S8. 

Cujas.  —  XXIV 

Cumedi.no.  —  X. 

CUMIANO.  —   201. 


Dabello,  notaire.  —  ix. 

Dagqs.  —  Voir  Dit.r. 

Dandini  (Jheronimo),  nonce  en  France 
sous  Paul  III,  cardinal.  —  47,  59,  75, 
78,  80. 

Dardois,  secrétaire  du  Connétable.— 
233. 

Dauphin  (le).  —  Voir  François  II. 

Dauphin'É.  —  317. 

Dax  évêque  de).  —  Voir  Noailles 
[François  de,. 

Del'isi.e  (Léopold).  —  xxvn 

Dello  Cùmune    —  259. 

Delvechio.  —  Voir  Vechio  [Thomas 
del). 

Deudoys.  —  Voir  Dardois. 

Desjardins  A    .  —  89.  212. 

Despalato.  —  Voir  Spalato. 

Diane  d'Angoulè.mk.  mariée  à  Horace 
Farnèse,  remariée  à  François  de  Mont- 
morency.   —  203,  317. 

Diane' de  Poitiers,  duchesse  de  Va- 
lentinois.  —  29,  317. 

Dix  (Conseil  des).  -  Voir  Conseil  des 
Dix. 

Doges  de  Venise,  —  Voir  Flabanico, 
Prioli,  Trevigian,  Venieri. 

Doria  (Andréa),  généralissime  des 
galères  de  Charles-Quint.  —  75. 

Dorsudoro  (île  de),  à  Venise.  — 
128. 

Douai-    Mgr  .  —  9.  19. 

Doudet  (le' secrétaire  .  —  259. 

Dragons.  —  287. 

Dragut  ou  Drogui  i .  corsaire  haï  ba- 
resque.  —  69,  7t.  2  15. 

Dreux.  -   310.  313,  317. 

Duke  y    1».  .   -  xwu. 

Uupra  r  Antoine  ,  cardinal,  chance  - 
lier  de  France  sous  François  l\  —  I  s:'.. 

Durûy   Georges).— xvii,  i:;.  106,  lis. 


137.  171,  176,  179,  183,  186.  190,204,  207, 
216  217.  243,  245.  256,266,269,274. 
Dr i hier.  —  Voir  Beauregard. 

Edouard  IV,  roi  d'Angleterre.  —  107. 

Elbe    île  d').  -  68,  69,  92. 

ELBEUF  Jîene  d').  —  Voir  Lorraine 
René  de  . 

Éléonore  d'Autriche,  mariée  à  Guil- 
laume de  Gonzague,  troisième  duc  de 
Mantoue.  -  318. 

Elisabeth  d'ANGLETERRE .  —  vu. 

Emboyse.  —  Voir  Amboisc. 

F.M  BRUN.    —    X. 

Empereur  d'    —Voir  Charles-Quint. 

ënea.  -    Voir  Piccolomini  (Enea). 

Enghien  duc  d').  —  Voir  Bourbon 
Jean  de). 

Enghien  .seigneur  d').  —  319. 

ëpernay  (siège  d').  —  273. 

Erlau.  —  18  i. 

Este    maison  d').  —  xi. 

Este  (Alphonse  I"  d'  .  duc  de  Fer- 
rare.  —  96. 

Este  [Alphonse  II  d'),  duc  de  Fer- 
rare,  tils  aîné  d'Hercule  II.  -  61,  81,  162, 

166,  167,  168    200,  228,  239,  256  239,  297. 
Este  Anned'  ,  fille  aînée  d'Hercule  II, 

mariée  au  duc  de  Guise.  —  83. 

Este  (Eléonore  d';,  abbesse,  demi- 
sœur  d'Hercule  II   —  90. 

Este  (Françoisd'),  frère  d'Hercule  II. 

-  17,  173. 

Este    Hercule  II  d'  ,  duc  de  Ferrare. 

-  VII,   XIII.    XIV,    XVII.    XVIII.  XIX,  XX,  .XXI, 

xxvi.  3.  i.  5,  II.  10.  13.  1  i.  16.  18  à  23, 
2:;.  26.  27.  30,  :;2.  :::;.  36,  \\.  12.  il.  15 
a  18.  50,  31  52,  5  1  a  57,  59  à  63,  66, 
67.  69,  70.  72  73.  7i  76.  78  à  85,  88, 
90,  91,  96,  97,  98.  loi.  103.  106  a  1  IS, 
120.  122  12::.  125,  126.  I2S  a  132,  134, 
135,  1  U.  115.  liii  l  n.  149,  151.  153, 
155,  157,  158,  162,  lui.  165.  167,  169  à 
171,  177.  IsO,  182,  181.  186,  187,  197, 
200,  201,  207,  211,  215.  216.  218  à  222,- 
22 i  à  231,  233  à  238.  211.  212,  211  à 
255,  258  259,  260,  262.  263.  267  à  275, 
278,  281,  282.  284,  283.  288.  289.  290, 
20:;  a  299,  303  à  306.  31  i  à  318. 

Este  Hippolyte  d'),  cardinal,  frère  du 
précédent,  dit  "le  Cardinal  de  Ferrare. 

-  xvi,  xvii,  13,  20,  35.  3C,  il  à  44,  59 
à  61.  67,  70,  71,  73,  75,  77,  81.  91,  93, 
94,  111,112,  115,   118,115,146,147,  166, 

167,  182,  231,  270,  300. 

Este  (Louisd'),  deuxième  tils  d'Her- 
cule II.  —  200. 

Fiais  de  Languedoc.  —  x.  —  Voir 
aussi  Béziers,  Beaucaire,  Pézenas 

Etats  d'Orléans.—  Voir  Orléans. 

Eustochia  Laura  .  deuxième  femme 
,\  Uphonse  I "  d'Esté.  -  or, 

E\  REUX.  —   XV,    l",l  . 


Fan  iouche.  —  Voir  Fantuccio. 
Fanti  ccio     Frédéric  .    audileur    de 

rôle.  -  13.  131,  137,  20:;.  217.  21S. 


26 


326 


TABLE    ANALYTIQUE 


Farges    Louis  .  —xxvii. 

Farnèse  (famille).  -     111.  112. 

Farnèse  Alexandre),  cardinal.  —  148, 
184.  187,  293. 

Farnèse  Constance),  fille  naturelle 
de  Paul  111,  mariée  à  Bosio  Sforza, 
comte  de  Santa  Fiore.  —  X. 

Farnèse  (Horace),  duc  de  Castro.  — 
4,  10,  203,  317. 

Farnèse  (Octave  ,  duc  de  Parme  et 
Plaisance.  34.  37,  47.  93.  148.  177. 
184.  1S6,  188,  194,  209,  230,  274.  278, 
282,  288,  30:;. 

Farnèse  Pierre-Louis  .lils  naturel  de 
Paul  III    -  5,  187. 

Farnèse  le  cardinal).  -  Voir  Far- 
nèse [Alexandre). 

Fauconneaux,  sorles  de  canons.  — 
287 

Favorite  la  .  —  Voir  Diane  de  Poi- 
tiers. 

Ferdinand  Ier  d'Autriche,  roi  des 
Romains.  —  183,  185,  189,  193.  205, 
318. 

Ferdinand,  comte  de  Tyrol.  deuxième 
fils  de  Ferdinand  Ier d'Autriche.  —  189. 

Ferrant  Domp  .  -  Voir  Gonzague 
i  :  ■  dinand  II  de  . 

Ferrure.  y.  vi.  xi.  xiii.  xvh,  51, 
105,  109.  112.  11  i.  116  117.  121.  125,  126, 
129,  131.  131.  137.  139  à  I  i2.  144,  1  V9. 
155.  1112.  105.  I0S  à  171.  17  1.  175.  182, 
186,  187,  188,  195..  196,  202,  203,  206, 
207,  217.  21S.  219,  220,  233.  211.  246, 
21!)  a  252.  251  2(11.  264,  21,7.  271.  272. 
275.  275.  277.  27S,  290,  294,  205.  296, 
5H5.  309    315,  5111. 

Ff.RRARE  le  cardinal  de  .—  Voir  Este 
[Hippolyte  '/" 

Ferr  \hf.    Cour  de}   —  xvi 

Ferrare  le  duc  de).—  Voir  Este 
Hercule  </'  . 

Ferrare  Renée  de  France,  duchesse 
de  .  mariée  à  Hercule  II  d'Esle.  ai.  \i\. 
3.  83    88,  90.  97 

I  i  rrière  Hector  delà.-  4.  89,  120, 
15,1.  160,   197. 

Fiasco    Mexandre  .  -   200,  201,  210. 

252    25  1.  255    258. 

Final  Nelli  Emilia.  —  282. 

FlSQUET.    -    X. 

Flabanico  Donienico  .  doge  de  Ve- 
nise. —  122. 

Flaminio  'le  sieur;.  —  Voir  i  rsini 
FI <i m  ni  m. 

Flandres.  -  39.7  1.  120.  129.  112.  15,1. 
157.   160,  218,  251    25s.  21;:;.  264. 

Florence.  -  il.  13.  1 1.25.  21;.  28.  31, 
5i;.  12.  5:;.  51.  55,  112.  70,  71,  72.  su.  m,. 
90,  91.  95,  MU  155.  159,  161,  184,  222. 
223,  221.  22s    293. 

Florence  duc  de).  —  Voir  Médicis 
fu^iif  de  . 

Foix    Comté  de  .  —  vin 

Fonds  fr  vnçais  Bibliothèque  natio- 
nale) .  —  vu 

Fonds  lai  in    Bibliothèque  nationale). 

—    VI. 

Fontainebleau.—  xiii.  xx.  291,  292 


Forcadel  (Etienne),  jurisconsulte.— 

XXIV. 

Fortifications.  —  72.  134.  148.  282. 

Fossano.         247    257,  258.  259. 

Fourquevaux  (Raymond  de  Beecaria 
de  Pavie.  de  Robert',  1  aron  de),  tréso- 
rier des  finances  en  Italie.—  9.  13,  11. 
21.  23.  24.  25,  27,  49,  56.  7  t.  77,  79,  93. 
lui.  115,  146,  159,  186,  196.  220,  221. 

France  [Renée  de).  -  Voir  Ferrare 
Renée  de  France,  duchesse  de  . 

France  Marguerite  de),  mariée  au 
duc  de  Savoie."—  150. 

Francfort-sur-le-Mein.  —  7. 

Franche  Comté.  —  258. 

Franchot,  courrier.  —  56,  57. 

François  Ier.  roi  de  France.  —  xi. 
XIV,  13,  22.  25.  75.  80,  100,  143,  317,  318. 

François  IL  dauphin,  puis  roi  de 
France.' fils  aine  de  Henri  II.—  53,  284. 

FRKGATES.  —   76.   161. 

FrÉJUS.    —   loi. 

Fricili.   —  Voir  Frioul. 

Frioil    le).   —   219. 

Frotté  le  cavalier),  gentilhomme 
ferrarais    —  166 

Fumel  François,  baron  de),  gentil- 
homme  ordinaire  de  la  Chambre.-  58. 

Gabarra    l'abbé  .  —  193. 

G  vbre.  —  vm. 

Gabre  famille  du  .  —  vin. 

Carre  Arnaud  du  .  receveur  des  ex- 
ploits et  amendes  au  Parlement  de 
Toulouse       ix. 

Gabre   Fabre  du),  consul  à  Gabre.— 

Mil. 

Gabre  (Georges  du  .  conseiller-clerc 
au  Parlement  de  Toulouse,  firère  de 
Dominique  du  Gabre.  —  ix. 

Gabre  Guillaume  «lu  .  neveu  de 
Dominique  du  Cabre.  —  xxiv. 

G  VBRE  Raymond  du  .  neveu  de 
Dominique  du  Gabre  .    -  is  . 

Gadagne  Guillaume  de),  seigneur  de 
Bothéon,  gouverneur  du  Lyonnais,  am- 
i'ur  extraordinaire  à  Venise.  — 
86,  87.  252. 

Gadagne  Thomas  de),  maître  d'hôtel 
de  François  l'r.  -  86. 

Gadagne  Thomas  de),  maître  d'hôtel 
de  Henri  II.        86. 

G.AETE.    -    125.   130. 

Gaignières   Fonds),  à  la  Bibliothèque 

nationale.  —  199. 

G  ULLAC.    —   IX. 

c m  mu  ni  (l'abbé).—  ix.  xxvii. 

Galères  —75.  s:;,  ni.  125.  125,  150, 
152.  156,  157.  166,  172.  1S5.  201,.  207, 
210,  21  1.  22:;.  22(1.  2,1.  2,5.  250.  201. 
262,  312,  315. 

G  \i;c.  \     ilon    Garcia    de  Tolède       — 

Voir  Tolède  [Garcia  -/c  . 

C  \i;n  Guillaume  du  .  commis  de  l'Ex- 
traonlinaire  des  guerres  231,  235, 

236,  248,  25li.  252.  255.  25,.  255     27o    ::  I  | . 

G  \uu   \ntoinc  Escalins  des  Aymards, 

|,aron    de   la  .     dit    le    Capitaine   l'olin.. 
,, encrai  des  galèl  es  de  France.  — 23.  17  i. 


TABLE    ANALYTIQUE 


327 


Garde  iGaucelin  de  lai,  évoque  île 
Lodève.  —  61. 

Garde    lac  de) .   —  276. 

Gasolo  Carlo  de),  capitaine  italien 
au  service  de  Charles-Quint.  —  93 

GASSOT.  courrier.  -  5.  12.  1  4,  16,  17, 
27,  28.  30.  35,  36.  86.  222, 

Gendarmerie.   —  260.   263.   270.   310. 

GÊNES.  -  37  53,  73  75,  91.  92.  127. 
130,148,   137.  192. 

Genève.  —  196. 

Gigliola   Julia  .  -  109.  110. 

Giral'lt,  courrier.  —  212,  214 

Givry   de).     VoîrAnglure    Renéd' 

Gontaut (Armand de  .baron de  Itiron. 
maréchal  de  France.  —  273. 

Gonzague    maison  de).  —  32 

Gonzague  (Éléonore  de),  mariée  à 
François-Marie  Ier  de  la  Rovère,  duc 
dl'rbin.  —  24 

Gonzague  (Ferdinand  de),  vice-roi  de 
Sicile  -  10.  2  4.  25,  *0.  53.  59,  75,  257, 
238,  259. 

Gonzague  François  de.,  deuxième 
duc  de  Mantoue.  —  318. 

Gongague  Frédéric  de  .  premier  duc 
de  Mantoue.  —  318 

Gonzague  (Guillaume  de),  troisième 
duc  de  Mantoue.  —  95.  108,  171,  201, 
318. 

Gonzague  l'Hercule  de  .  évêque  de 
Mantoue.  cardinal.    -  52.201,318. 

Gonzague  (Isabelle  de)  tille  de  Fré- 
déric de  Gonzague.  mariée  à  François- 
Ferdinand  de  Âvalos,  marquis  de  Pes- 
caïre.  —  224. 

Gonzague  Jean-François  de), marquis 
de  Mantoue.  -  10. 

Gonzague  (Louis  de),  seigneur  de 
Bozzolo.  —  53. 

Gonzague  (Pierre  de),  frère  du  pré- 
cédent. —  33 

Gonzague  (Rodolphe  de).    -  57.  79. 

Gonzague  (Sigismond  de).  -  278. 

Gorfalques,  sorte  de  canons.  —  287. 

Grand  Seigneur  le).  —  Voir  Suley- 
man  II. 

Grandselve  (M.  de).  -  308.  319. 

Grandselve  abbaye  de).  —  319. 

Grapello    —  24.  * 

Cli  AVELINES.  —  8. 

Grenade-sur-Garonne.  -  vin,ix  xxiv. 

Grenoble    manuscrit  de).—  xxvn. 

Grisons  îles  .  —  121.215,224,246, 
275,  315. 

Grossetto.  —  95. 

Guadaigne.  —  Voir  Gadagnc . 

Guarin  (le  sieur  Alexandre  .  —  Voir 
Ouërin   Alexandre  . 

GUASTAIXA.  -  10.  242,  233,  236.  258, 
318. 

Guérin  Alexandre',  courrier.  —  85. 
103.  10  4,  110,  112.  222. 

Guiche  (Claude  de  la  .  évêque  de 
Mirepoix,  ambassadeur  en  Portugal  et 
à  Rome.  —  9,  15,  17,  18,  26,  41,  43,  48, 
56. 

Guiche  (Gabriel  de  la),  gouverneur  de 
Bresse.  —  259. 


Guise  (Charles  de),  cardinal,  dit  le 
cardinal  de  Lorraine.  —  xi.  xvn.  xvm, 
xxii.  13.  1  4.  17.  27.  30  16.  77,  78.86  87, 
119  123.  121.  126.  12$,  129  130  131.  133, 
133.  142,  I  13.  I  11.  151,  153,  232.  237.  219, 
252,  269,  27.  .  277,  281.   304,  305,   306. 

Guise  Claude  de  Lorraine,  premier 
duc  de),  père  de  François  de  Guise  — 

7.  83.  318. 

Guise  François  de  Lorraine,  duc  de  . 
—XI, XXI,  7  17.  21,  78.  102.  I  13,  122,  135. 
137,  139,  1  10.  143.  1  15  à  l'.8,  152,  155, 
156,  139  à  162  165,  201  à  203  205,  207, 
210.  211,  211  à  216,  21S.  220,  221.  223  à 
229,  231  à  23  4  237.  238  241  à  252  233, 
256,  238.  261.  264,  267  à  270  277.  279. 
284,  293.  301.  306,  311.  313,  31  1.  315. 


Hainaut.  -  219. 

Harley  imanuscrits  du  fonds  .  au 
British  Muséum         xxvi. 

Haumale     Mr   d    .  Voir    Aumale 

Claude  II  d'). 

Hauteville  (Elisabeth  d'),  mariée  à 
Odel  de  Coligny    -  17. 

Hébrard  (Aloin),  notaire.  -  61. 

Henri  IL  roi  de  France.  —  vi.  xi,  xiu. 
xvn.  xx.  Dépêches  de  Gabre  à  lui.  4. 
5.  7.  11.  17.  22.  34,  15,  G2,  65,  68.  70, 
74,  89,  91.  107.  120,  123,  130.  132.  133, 
144,  147.  155,  156,  175,  178.  185,  190, 
196,  199,  204,  213,  225,  228,  240.  248  274, 
—  Dépèche  à  Noailles,  311.  —  Pro- 
curation à  Gabre,  291. 

Henri  III.  duc  d'Anjou,  puis  roi  de 
France.  —  94    118.  229. 

Henri,  roi  de  Navarre,  puis  Henri  IV, 
roi  de  France     -   118. 

Henri  VIII.  roi  d'Angleterre.  —  xn, 
xiv. 

Hercule  II  d'F.ste.  —  Voir  Este  Her- 
cule '/'  . 

Hesdin.  -  3,  4.  6.  7.  2L.  150 

Hongrie.-  x,  100.  152.  136.  183.  184. 
193.  229. 

Hongrie  (reine  de'    —  Voir  Isabelle. 

Hongrie  (roi  de).  —  Voir  Ladislas, 
Zapoli. 

Horan.—  Voir  Oran. 

Horio   le  comte  .  —  239. 


Ilanz.  —  2  16. 

Innocent   VIII.  pape.  —  75. 

Innocent  X.  pape.  —  187. 

Inquisition    Tribunal  de  11.  —  xiv. 

Isabelle,  tille  du  duc  de  Mantoue.— 
Voir  Gonzague    Isabelle  de  . 

Isabelle  de  Pologne,  reine  de  Hon- 
grie, tille  de  Sigismond-Auguste,  roi 
de  Pologne.  —  176. 

Isée.  -  106. 

Ismael  1er.  empereur  de  la  Perse.  — 
100. 

Jacobo  [Domp  .  courrier.—  28. 
Jacquier  ,de),  commissaire  ordinaire 
des  guerres.  —  228. 


3-28 


TABLE    ANALYTIQUE 


Jehan   André  .  capitaine  et  courrier. 

—  180. 

Jehan.  —  Voir  Byasio  Jehan  Marie 
de). 

JOINVILLE.  —  13. 

Joseph   Lr.   empereur   d'Allemagne. 

—  318. 

Jules  monnaie  romaine).  — 133,  193, 
197. 

Jules  II.  pape.  -  122.  216. 

Jules  III.  pape.  —  xu.  xvi.  33,  36. 
12.  ;-.  18,  53,  58,  70,  71,  84,  85,  03.  95. 
98,  99.  102.  107,   120,  290    296. 

Kaboul.  —  Voir  Kaposvar. 
Kaposvar.  -  193. 

Kheïr-ed-Din-Barberoussé  corsaire 
algérien,  grand  amiral  de  la  Porte  .  — 

69": 

Lacurne  de  Ste-Palaye.  —  126.  294. 

LALii.-L\r-,  roi  de  Hongrie.  —  189. 

Lafayette  iMme  de  la).  —  160. 

La  FÈre.  —  309.  310. 

La  Fontaine    le  trésorier  .  —  81 

Lalala.  —  Voir  Ayala  don  Giovanni  . 

Lalanne  Ludovic  .  —  22.  23.  33.  35. 
53,  102.  123.  160.  161    236. 

Lamoignon  manuscrits  de  M'  île  .  — 
199. 

Landes  [M'  des),  courrier  —  : 

Langeac  Jean  de  .  évêque  d'Avran- 
clies.  ambassadeur  à  Venise.    -  xv. 

Langey    Guillaume  du   Bellay 
gneur  de  .    -  23 
""  Langlmu.  de  .contrôleur  en  Toscane. 

—  130. 

Lansac    Louis    de    Saint-Gelai- 
gneur  de  .  ambassadeur  à  la  Porte  Ot- 
tomane et  à  Rome    —  vu.    17.  15,    16, 
47.  48.  51,  5  '■  63,  82.  83.   3 

S8.  93.  95,    Km.   101.   104    115,    155,  194, 
211.  232.  293    294. 

Lansqueni  9,    lui..   153,  2,2. 

245.  217.  255. 

Laon.  —  310. 

Latotr  Antoine  de  -  igneur  de 
Saint-Vidal,  colonel  d'un  régiment  d'in- 
fanterie en  Toscane 

Latran  (Concile  de  .  —  122 

La  Treilhe  de  Fozières   famille  de  . 

—  .\. 

La  ut  r  Ei  :    —  'i'. 

La  Vigne.   -    Voir  Vigne    lu  . 

Le  Bru.  —  94. 

Lefèvre-Poni  vus   Germain  .  —  168. 

Lenoib    Alexandre  .  —  xxiv. 

Lens.   -  160. 

LÉON  \.  pape.  -  317 . 

LÉRIN-.    —     151. 

Lhome    Pierre  de  .  courrier.  — 
Lignières    le  président  de).  —  220. 
Ltgi  îse.  —  246. 

LiGl  es  suisses.       52. 
Limoges.  —  xv.  55. 
Lisbonne.       :'.■.'. 

Livio  Crotto,  capitaine  siennois. — 
276,  277, 


LIVOURNE    -  95,  285.  317. 

Livres  luthériens.  —  97. 

LOC  1ES.        4. 

Lodève   église  de  .  —  61. 

Lodève  évêques  de").  —  Voir  Garde 
Gaucelin  delà  .  Mandagot  Guillaume 
de) 

Lodrone  Alberico,  comte  de),  com- 
mandant il'uii  corps  allemand.  —  224. 
226 

LOMBARDIE.  -  xxi.  6.  7.  54,  148,  149. 
191.  210.  218  219.  225.  25».  284,  285. 
287.  301,  312.  318 

LOMÉNIE  DE  BrIENNE.   —  290. 

LONATO.   -    lit.  208.  209.  213.  318. 

Longuejoue  Mathieu  de  .  évêque  île 
Soissons.    -  276. 

LoxGUEViLLE  duc  de  .  —  Voir  Or- 
léans  (Françoise'), duc  de  Longueville. 

LONGUEVILLE     duc    de  .    —    Voir  Or- 

léans   Léonor  d'),  'lue  <!*■  Longueville. 
Lorraine   maison  de  .  —  :;  1  s. 
Lorh  une  Claude  de  .  premier  duc  de 

—  Voir  Guise. 
Lorraine    cardinal  de    —  Voir 
Charles  de  . 

Lorraine   François  de),  grand-prieur 
de  France.  —  83 
I.iirr une  guerre  de  .  —  21 . 
Lorhaine  René  de  .  marquis  d'Elbeuf, 
lieutenant  du  duc  de  Guise  en  Italie.— 

21'.. 

Losco    le  capitaine  Nicolo  .  —  9.221, 

Louis  Vit.  roi  de  Fiance     —  cl . 

Louis  XI.  roi  de  France.  —  206. 

Louis  Ml.  roi  de  Fiance.  —  xi.  3. 

I.i  c    famille  du  .  —  îx. 

Lucignano      -    '.J    67,  95. 

Luino.  —  1  lu. 

Lun.a  .  —  Voir  Lonato. 

I.ii.ii  es.   —  95. 

Luxembourg   maison  de  .  —  319. 

Luxembourg  .Marie  de  .  mariée  à 
I  -  de   Bourbon,   comte  de  Ven- 

dôme.  •    319. 

Luzzaro  seigneur  de).  -  Voir  Gon- 
zagûe   Rodolphe  . 

Lye.  —  Voir  Luino 

Lyon.  -  \.  g   21.  2".  51,  56.  I 
66,  70.  si.  82,  ^7    90,  lie;    Ils.  132,   138, 
139,    I  il.    152     loo.    ici.   193.  2e- 
:;12. 


RATA.    -     î 

M  VDRID    l'ait.''  de  .  —   i:; 

Madri  ce     Christophe   .   évéque   de 

Trente.    -    KI7.   121.  127,  130.  19 
212.  21 

Madri  ce   Nicolas  ,  capitaine   général 
au  Tvrol.   -   107. 

—     Noir    Vadruce 
Chi  istophe 

M  vgdi  bourg  (Albert,  marquis  de  .  — 

73. 

MaIREPOIX   (M'  de       —    Voir  SuaViUS. 
M  ILACRIDA    le  capitaine  .  —   98 
Mai.m,  \       Charles    .     directeur    des 

archives  de  l'Étal  à  Venise.  —  icxvi. 


TABLE    ANALYTIQUE 


329 


Malte.  —  68. 

Mandagot  (Guillaume  de),  évêque 
de  Lodève.  -  62. 

Manfredo,  banquier.       31 

Manne  (M.  de).  -  Voir  Bçllier  [Fran- 
çois de). 

Manrïquez  de  Lara  Jean,  marquis  de 
Saria  .  ambassadeur  de  Charles-Quint  à 
Rome.  -  105,  183 

Mans    le).  —  55. 

MANTOUE.  -  5.  37.  146,  201. 

Mantoue  de  cardinal  de).  —  Voir 
Gonzague   Hercule). 

Mantoue  'due  de).  —  Voir  Gonzague 
[Guillaume  de). 

Manuscrits.  —  Voir  Grenoble.  Harley. 
Lamoignon,  etc. 

Marcati,  contrôleur  des  finances.  — 
236. 

Marcel  II,  pape  —  xvi,  i.:i,  ni. 

Marchands.  -  8.  9.  22  27.  64.  66,  68. 
90.  103.  133  161.  193.  1  7.  198,  199  200, 
201,  202,  207    252.  268   270  275 

Marche  d'Ancone.—  Voir  Ancône, 

Maréchaux  de  France.  —  Voir  Bris- 
sac  Gontaut,  M  ont  hic  Montmorency 
[François).  Strozzi.  Saint  André,  Saulx 
(Gaspard  de).  Termes  [de 

Maremme  [la).  -  35.  317. 

Marenne.  —  Voir  Maremme  [la). 

Marguerite     d'Autriche.  Voir 

Autriche  {Marguerite  cT). 

Marguerite  de  France,  mariée  à 
Philibert  de  Savoie.  —  150. 

Marguerite  Paléologue,  duchesse 
douairière  de  Mantoue.  —  Voir  Paléo- 
logue {Marguerite). 

Marie  Tudor.  fille  de  Henri  VIII  et  de 
Catherine  d'Aragon,  reine  d'Angleterre. 
—  260,  297. 

Marienbourg.  —  95,  150. 

Marignan.  —  5,  317. 

Marignan  (marquis  de)  —  Voir  Médù lis 
(Jean-Jacques  de) . 

Marillac  (Charles  de\  archevêque 
de  Vienne,  ambassadeur  auprès  de  la 
Porte  Ottomane.  -  155. 

Marot  (Clément).  —  xiii. 

Marseille.  —  76,  81,  94,  95,  113,  312, 
315. 

Marseille,  courrier.  —  109,  115,  229, 
253. 

Marta.  —  187. 

Martin  (Alonce),  gentilhomme  espa- 
gnol. -    183. 

Martin  (Ernest).  —  x. 

Martin  Jean-Baptiste'',  capitaine.  — 
152 

.Martin  de  Troyes,  receveur  des 
finances.  —  138. 

Martinengo  (Camillo  de  Moretz,  comte 
de),  capitaine  calabrais  au  service  de 
la  France.  -    35.  39. 

Martines  Pierre-Louis  deV  ambas- 
sadeur en  Transvlvanie.  —  175. 

Mas  Latrie  (de).  —  215. 

MATTEOLO(Messer),  maître  des  postes 
du  pape.  —  26,  81. 

Mauguio.  —  v. 


Maurice,  électeur  de  Saxe.  —  73. 

\l  Dticis   maison  de  .  —  52. 

MÉDICIS  Alexandre  de  .  duc  de  Flo- 
rence   -  37. 

Médicis  Catherine  de).  -  Voir  Ca- 
therine de  Médicis. 

Médicis  Cosme  de), duc  de  Florence, 
premier  grand-duc  de  Toscane.  -  3.5, 
S.  11.  12  14,  15.  27  30  31,  ?>■!.  33.  36, 
51  51  55.  61,  62  67  à  72.  80.  89.  92.93, 
98,  125  129.  132,  112  1,9.  155,  160.  165, 
171,  188,  200,  -2-12.  223,  226.  243.  274, 
27 s.  31  I 

Médicis  (François  de)  deuxième  grand- 
duc  de  Toscane.  —  71 

Médicis  Jean  de),  dit  le  Grand  Diable. 

—  3. 

Médicis    Jean-Jacques  ,    marquis  de 
Marignan.  —  53,  09   105,  293. 
Médicis  (Marie  de),  reine  de  France. 

—  72. 

Mendoza  François  de),  archevêque 
de  Burgos.  cardinal.—  25. 

M É HINDOU     —   22. 

Metz.        t,  5,  (î.  7,  150    160,  317. 

Michel  (Jean),  ambassadeur  de  Ve- 
nise à  Partè.  —  .XX  i\ 

Milan.  -  xvi.  10.  38,  53,  108.  121,127, 
130.  147.  1 19,  157,  213,  215  218,  238,  254, 
257,  258. 

.Milan  'château  de)   —  317. 

Milan  'duché  de)  -  59.  285,  317,  318. 

Millet  (Jean),  secrétaire  de  la  cham- 
bre du  roi   —  211. 

Mirandole  (La1.  -  vi.  5.  13.  14,  18, 
19,  24,  40.  51.  56  63  61.  68.  75,  87,  93, 
119,  126,  132,  162,  187,  196,  221,  230, 
271    303. 

Mirandole  ;comte  de  La).—  Voir 
Pico  (Galeotto  II  . 

Mirandole  (Dominique  de  LaV  —  52, 
53. 

Mirepoix  'évèques  de).  —  Voir  Gui- 
che  [Claude  de  la),Suavius  (Jean),  Vil- 
lars  (Pierre  de\ 

MiRON(le  secrétaire;.  -  267,  270.  271, 
311. 

MODÈNE.  —  20,  28,  30,  37,  100,  145, 
228    235,  276.  305. 

Moltn  'le  procureur  du).  —  16. 

MONCONTOUR.    -    317. 
MONDOVI    —  243. 

Monnaies.—  Voir  Jules,  Réals, Testons. 
Montaigne  Michel  de).  —  xxv. 
MONTALCINO.  -  25,  30.  31,  31,  35,  36, 
11,  53.  56,  293,  313. 

MONTALTK      —   187. 

Montanson    M.  de).—  255. 

MONTARGENTORO     —  95. 
MONTARGIS.  —    XI. 
MONTAUBAN.   -   IX. 

Montaut  Jean  de,  baron  de  Navail- 
les  .  -  256    258. 

Montebello  (marquis  de).  -  Voir  Ca- 
rafa  i  intonio  . 

montecatini  —  95. 

Monte  Nkkena.  —  227. 

montepulciano.  —  xî  . 

Montferrand.  —  v. 


330 


TABLE    ANALYTIQUE 


MONTICELLO.  —  18. 

Montluc  Biaise  de),  maréchal  de 
Franco.—  xvi.  3  55,  94,  102,  105,  135. 
149,  258.  293,  313,  314. 

Montmorency  Anne  de  .  connétable 
de  France  et  gouverneur  du  Langue- 
doc, xii,  xiii.  xv.  xxi.  10.  il.  13.  15. 
20.  33,  37.  U  16,  49,  30.  52,  53.  55.  51 
à  60.  63,  67.  73.  75,  77.  82.  83.  88.  89, 
93.  99.  101.  105  lli  119.  123,  136  141. 
143.  1  19.  152  153.  157.  159.  162,  163, 
166.  168.  169.  173.  17  i  175,  181,  182, 
IS5.  186  188.  189.  192.  195.  198,  199, 
203,  208.  222  221  253.  237.  210,  211. 
215.  250.  253,  231.  257.  260.  261.  263. 
264,  288,  293.  295.  299.  300,  309,  310, 
317. 

Montmorency  (François  de),  fils  aîné 
du  Connétable,  maréchal  de  France.  — 

195    203.  230.  231.  317. 

MONTONE   [La  .  —    »5. 

Montpellier.  —  v. 

Montpensier.  —  Voir  Bourbon  [Louis 
Il  de  . 

Montre  des  trolpes.  131,  157.  162. 
226.  230,  235.  273.  275.  276.  277,  285, 
301.302,  305 

MORENGY    M.  de).  —  119,  130.    193. 

Mohone    Pietro  .  cardinal .  -  29. 

Mortiers  —  161. 

Mohvillers  Jean  de  .  évêque  d'Or- 
léans ambassadeur  à  Venise.—  xn.  w, 
281.    291,  296.  300. 

Motte  de  la),  madré  île  camp  de 
l'armée  du  Duc  de  Guise   —  313. 

Mousquets.  -  36,  161. 

muhlberg.—  32. 

Munitions.  —  6,  9,  14.  21.  187.  194 
196,  197.  198.  262.  277.  301. 


Nantoitllet  château  de  .  —  143. 

Naples.  —  xvi.  5.  9  10.  14.  20,  33. 
55,  61,  92,  91.  108.  127.  130.  117.  !  19, 
166,  170.  171,  205,  226,  230,  251.  239, 
215. 

Naples  (royaume  de  .  —  285,  287. 

Naples  ( vice-roi  de  .  —  Voir  Tolède 
don  Pierre  <l>    . 

Narbonne.  —  9. 

Narbonne  (Concile  de  .  —  xi. 

Navailles    de  .  —  Voir  Montant. 

Navarre     mi  de).  —    Voir    Bourbon 

Intoine  de  . 

Naves.  -   215. 

Navires.  —  75. 

Na/.y  (Francesco  .  gentilhomme  flo- 
rentin, commettant  du  général  d'El- 
bène.  -  8.  18,  26.  81,  124,  12ii.  130, 
192.  212.  267.  316. 

Nemours  Jacques  de  Savoie,  duc  de  . 

-  160,  216.  217    51(1. 

Nepy    AscaniO  de),  courrier.  —  67. 

Nîmes.  —  51. 

Nh.ii  i  r,  secrétaire  du  duc  de  Ferrare 

—  23,  43.  48.  60,  62,  63,  67,  73,    74,  76. 
77.  !Ei.  112. 

No  AILLES.   —   XXII. 

Noailles  (François  de),   évêque  de 


Dax,  ambassadeur  à  Venise,  —vu,  xxn. 
181.  193.  276,  277.  278,  279,  308.  309, 
311.  315,  319. 

Noei.    féfedeV  —   204.  261.  26?. 

Nous  de  navires.  —  198. 

NORETTE.   —  306. 

Novare.  -  290. 


OcTwio  le  duc  .  —  Voir  Farnèse 
Octave  ■ 

Odier.  notaire  à  Audi.  —  ix. 

Ognibene  fie  chevalier  Giovanni  ,  di- 
recteur des  Archives  à  Modène.     xxvii. 

Omale  M.  d'  .  —  Voir  Aumale  Claude 
d'). 

O.NEILLE.   —    75. 

Or  ace  de  duc).  —  Voir  Farnèse  Ho- 
race  . 

Oran.  -  231.  232. 

Orléans    Étais  tenus  a  .   —  xv. 

Orléws  évêque  d  .  —  Voir  Monil- 
ler*  Jean  de  . 

Orléans  iFrançois  d';,  duc  de  Lon- 
gueville,  marquis  de  Rothelin.  —  317. 

Orléans  Leonor  d'),  duc  de  Longue- 
ville.  -  XXI,  263.  317. 

Orléans-Longueville  Charlotte  d'), 
mariée  à  Philippe  de  Savoie    —  160. 

Ornano   famille).      301. 

Orsini    Camillo     -  223,  284,  2S 

Orsini    Julio  .  —  205. 

Orsini  de  Ceri  Jean-Paul  .  — 

ORUYBTTE     —    Voir  Un  ieto. 

Orvieto.  —  58.  63. 

(tuY  le  docteur ,  chef  de  l'Inquisition. 
—  xiv,  96. 

OSTIE    —  IX,  53.   118.  312. 

Ottavio  le  due.  —  Voir  Fumese 
Octave  ■ 


Pachecho  de  Cerallo  Franeesco), 
cardinal,  légal  de  Charles-Quint  — 
138,  146. 

PACQUIEB    le  capitaine  .  -  226.  236. 

PAD01  i  .  112.  1%,  197,  219.  226.211. 
255.  256,   257. 

Padoi  i    évêques  de  .  —  Voir  Pisami 

(François  .  Pisani   l.<<tn<  . 
PALKOLOGI  e    Guillaume  VI  .  - 
Paléologue    Marguerite  .   mariée   à 
Frédéric  de  Gonzague,  duchesse  douai- 
rière de  Manloue.  —   ils 

Palia.no  due  de).  —  Voir  Catofa 
Jean  Jacques  ■ 

PAL]  \no  duché  de  .  —  171.  176,  217. 
21,1.  21,7.  268.  27  >    313 

Papes.— Voir  Innocent  17//.  .Iules  //, 
Jules  m.  Marcel  u.  Paul  m.  Paul  II, 
Pie  iv. 

Pâques    fête  de).  -  37. 

Pâques    foire  de  .  —  56 

PAQUIEB    André  Allemand.  >ieur  de  . 

commissaire  de-  guerres.   —    162,  163, 
165. 

Paris.  —  \\i.  xxn,  xxm.  13,  55.  102, 
164,    2».o.    261,    262,   279,   299,    300.    - 

Parlement  de  Paris.  —  w.  155,  245,  292, 


TABLE   ANALYTIQUE 


331 


Parlement.  —Voir  Paris,  Toulouse, 
Rouen. 
Parme.-  vi,  x.  5.  8.  13,  14.  18.  19,20, 

24,  25.  35,  40,  41,  49.  54,  56,  63.  61,  74, 
75,  78,  79.  80,  87,  93,  106,  119,  126,  130. 
132,  148,  181,  186.  187,  188.  190, 193,  194, 
197,  198,  200,  201,202,  288,  300.301, 
303,  30  i,  305.  318. 

Parme    (duc    de).  —    Voir    Farnèse 
{Octave). 
Parme  (duché  de).  —  5,  145. 
Partenay  (Jean  de;.  -    9,  10,  14.  24, 

25,  27,  111,  222.  223. 
Passe- Volant.  -  301,  302. 

Paul  III,  pape.—  x,  xvi,  5,  28,  45,  187. 

Paul  IV,  pape.-  xvu,  xxi,  3.  114,115, 
117,  118,  120  à  123.  125,  {26,  127, 130,  133 
à  136,  139  à  142,  146.  147,  149,  151,  155, 
159,  160,  161.  165,  166.  170,  171,  172.  173 
à  180.  182,  183  184,  187  à  195  200,  202, 
204,206.  207,  208,  210,  211,212,  214  à 
217,  219,  223,  225,  228,  232,  .233,  237, 
248,  250,  253.  258  260.  262,  264,  266  à 
271,  274,  278,  282,  287,  288,  293,  297, 
299,  300,  303,  307,    312,  313,  314. 

Pavie  (bataille  de).  —  94. 

Péguineau  (Jacques',  trésorier  des 
guerres.    -  189. 

Péguineau  (Martin',  ambassadeur  en 
Ecosse.  -   189. 

Pela  (levèque  de).  —  132. 

Pélicier  (Guillaume  ,  évèque  de  Mont- 
pellier, ambassadeur  à  Venise.  —  v,  vi, 
xv. 

Pérouse.  —  8.  58. 

Perrot,  courrier.  —  52,  115,  116 

Pescaire  (François- Ferdinand  de 
Avalos,  marquis  de),  grand  chambellan 
du  rovaume  de  Naples.  —  223,  248,  257, 
258,  259. 

Peste  a  Venise.  -  175,  180,  184,  185. 

188,  195,  197. 

Petk.liano  (Giovanni  Francesco,  Ura- 
no,  comte  de),  gentilhomme  italien  au 
service  de  la  France.  —  22,  48,  93 

Petit  (Jean),  courrier.  —  196,  197, 
251. 

Pkzenas  i  États  tenus  à).  —  xi. 

Philippe  II,  roi  d'Espagne.  —  xxi, 
108,  12  ,  122.  131,  134.  136,  138,  140, 
144,  145  à  148,  152,  156,  176,  182,  186 
187,  188,  191,  192,  194,  195,  199,  200, 
202,  205,  207,  209,  212,  213,  216,  217, 
223,  226,  230,  234,  239,  2  40,  243,  250, 
254,  260,  262  à  267.  274,  278,  297,  298, 
312,  318. 

Philippe-Auguste,  roi  de  France.  — 
61. 

Philippe  VI  de  Valois,  roi  de  France. 
—  318 

Picardie.  —  21,  64.  66,  69,70,  76,  78, 
102.  257,  317. 

Piccolomini  (Enéa),  gentilhomme  sien- 
nois.  -  89. 

Pico  (Galeotto  IF,  comte  de  la  Miran- 
dole.  —   6,  9,  19,  68.  93,   94,    119,  177, 

189,  271,  272,  276.  303. 
Pie  IV,  pape.  —  17. 
Piedmont.  —  Voir  Piémont. 


Piémont.  —  xvi,  12,  15,25,  38,  40,  53, 
54.  55,  73,  75,  117,  146,  149.  150.  151, 
171.  202,  207,  210.  218.  225,226,235, 
236  238,  239,  242,  254,  257,273,297, 
301,  302. 

Pienza     -   12,  18. 

Pierre  (le  seigneur).  —  Voir  Strozzi 
{Pierre). 

Piétro  ;'signor).—  \o\rStrozzi  {Pierre). 

Pins  (Jean  de),  évèque  de  Rieux. 
ambassadeur  à  Venise.  —  xv. 

Piombi.no.  —  69,  317. 

Pisa.ni  (François),  évèque  de  Padoue, 
cardinal.—  193,  196. 

Pisani  (Louis),  neveu  du  précédent, 
évèque  de  Padoue,  puis  cardinal.  — 
193,  196. 

Pise.  -  122,  216,  285. 

Pise  (Concile  de).  -  122. 

Pise  (Jheronimo  de),  colonel  italien 
au  service  de  la  France.  —  11,  44  47, 
80. 

PlSTOLlERS.  —  310. 

Plaisance.—  37,  146.  148.  18i,  186, 
305. 

Pô  (le).  —  166,  318. 

Pologne  (Isabelle  de),  reine  de  Hon- 
grie. —  Voir  Isabelle  de  Pologne. 

Pologne  (roi  de).  —  Voir  Sigismond 
{Auguste). 

Pologne  (reine  de).  —  Voir  Sforza 
Bona. 

Poltrot  (Jean,  seigneur  de  Méré.— 
7. 

Pomaro  (Pierre),  intendant  de  l'am- 
bassade de  Frauce  à  Constantinople, 
puis  contrôleur  général  des  munitions. 
—    14,  20,  94,  108.  196. 

Poropoly.  —  306. 

Port-Hercule.  —  95,  113. 

Poudre  de  guerre. —  36,  145,  161, 
250,  253,  296. 

Pouille  (la).  -  121,  215, 

Pozero.  ■    160. 

Prégay  (le),  conseil  des  Prégadi.  — 
122  215,  216. 

Préséances.  —  192,  240,  249,  264. 

Prévéza. —111. 

Prieur  (grand-prieur  de  France).  — 
Voir  Lorraine  {François  II  de). 

Prioli  (Lorenzo),  doge  de  Venise.  — 
17  1.  175. 

Provence.  —  314. 

Provisions.  —  64,  72,  87,  103,  126. 
200 

Puy  (Etats  tenus  au).  —  xi. 

Puydorphile  (famille  de).  —  ix. 


Quéras.  —  Voir  Cheresco. 


Raguse.  -  99,  123,  150,  206,  214,  220, 
2 il,  244,  257. 

Rambouillet  (le  sieur  de).  —  Voir 
Angenne  {Jacques  d'). 

Haimiindi  (Marc-Antoine).    —  XXVI. 

Rasse  (Monseigneur  de).  —  Voir 
Farnèse  [Horace). 


332 


TABLE   ANALYTIQUE 


RATISBONNE.  —  127. 

Rau  (du),  courrier.  —  257. 

RAVENNE.—  xviii,  45,  58,  83,  121,  122, 
131,  141,  210,  211,  212.  214  à  217.  271. 
273.  289. 

Real  (monnaie).  —  64,  133. 

RÉFORME     I il j  -  —  -XIII. 

REGGIO  —  xx,  37.  72,  197,  218.  232. 
234.  238,  242.  276,  282,  305. 

Reims.  -  13. 

Reine  (de  France).  —  Voir  Catherine 
de  Médicis. 

Renée  de  France.  —  Voir  Ferrure 
Renée  de  France,  duchesse  de  . 

Rhodes  (île  de  .  —  100. 

Rialto  (pont  et  place  du),  à  Venise. 
—  174,  316. 

Ribier  Guillaume).  —  vu.  xxn.  123, 
131,  148,  149,  180.  188,  192.  275.  293. 

Rigoumes.  —  Voir  Ru  y  Gomez  de 
Silva  (don< 

Rimi.ni.  —  227 

Rinaldo  (le  capitaine  .  —   224. 

Rivière  (M*  la  ,  courrier.—  214,  258, 
259. 

Robert  ^Aristide  de).—  vin,  xxvn. 

Robert-Garils  (de).  —  vm. 

Rochvmbeai:  [le  marquis  de;.  —  4. 

Rochelle  (,1a;.  —  317. 

Roddi,  ambassadeur  de  Ferrare  a 
Rome.  —  xxvi. 

Rodez.  -   xv. 

Rodocanachi  (Emmanuel  .  —  xi.  29, 
61.  97,  167,  200,  268,  270,  278,  281,  297, 
318. 

Rodolpho  (le  sieur).—  221 

Rohan  (Françoise  de).  —  160. 

Rohan  (René  de),  père  de  la  précé- 
dente. -    160. 

Roi  d'Angleterre.  —  Voir  Philippe 
H 

Rois   fêle  des).  —  5. 

Romag.ne  Ua  •  -  62.  129.  155.  229,230, 
243,  248. 

Romains  (roi  des).  —  Voir  Ferdinand 
I"  d'Autriche. 

Rome  -  7,  9,  11.  12,  11.  18,  24,  25, 
26,  38,  48,  52,  55,  57.  59,  60,  80.  - 
86,  87  89,  90,  93,  102,  105,  111  à  115, 
117.  118.  120,  122.  124  à  127.  129.  130, 
133,  135,  137,  139  à  143.  145  a  149,  151, 
153,  155,  156,  157,  159,  160,  163.  166, 
167,  168,  176,  177,  178,  182.  183,  181, 
187,  189  à  195,  197,  202  à  207,  209,  210. 
211,  213,  215,  216.  218.  219,  227.  229, 
230  à  234,  248,  253,  261,  266,  267,  269, 
272,  274,  290,  293,  296,  299,  300,  305, 
306,  312,  313,  314. 

Rome  (ambassade  de).  —  xiv. 

Rosset    Alphonse,  coadjuteur,  puis 
évêque  de  Ferrare.  —  37, '77.  98,  260 
Rostan-Pacha.  -  203. 
Rouen   Parlement  de    —  155. 
Ro\  ère    François-Marie  de  la  .  duc 
d'Urbin.  —  24 

iiu\  ère    Guid'Ubaldo    de    la  ,    duc 
d'Urbin    fils  du  précédent.  —  24,  111. 
126,  130,  256,  281 
Rublk  (Alphonse  de  .  —  3. 


Rumeau   m.;.  —  vin. 
Ruy  Gomez  de  Silva  (don,,  tavori  de 
Philippe  II.  -  182. 


Sacres,  sortes  de  canons.  —  287. 

Saint  André  (Jacques  d'Albon.  sei- 
gneur de),  maréchal  de  France.  —  xxi. 
263.  310. 

Saint-Ange  (château),  à  Rome.  —  211. 

Saint-Ciergue  (Antoine  Rohier.  baron 
de  .  général  des  tinances  en  Langue- 
doc. -    11,  16,99.  163,  104.  165.  279. 

Saint-Denis   bataille  de).  —  17.  317. 

Saint-Denis  bourg  d'Italie  .  —  305. 

Sajnt-Didieb  île  chevalier  de).  —  128. 

Saint-Empire  romain.  —  287. 

Saint-Esprit  monastère  du/.  —  128, 
129. 

Saint-Ferme  (abbé  de).  —  Voir  Rou- 
cher  (Etienne  . 

S  \ ini -Florent.  —  29,  91. 

Saint-Gelais  Louis  de),  baron  de 
la  Motte  sainte  Héray,  seigneur  de  Lan- 
sac.  —  Voir  Lansac. 

Saint-Georges  (le  cardinal).  —  Voir 
Capiferi 

Saint-Georges  fêle  de  .  —111. 

Saint-Germain-en-Laye  .  —  10. 

Saint-Germain-des-Prés.  —  XXIII. 

Saint-Jean  (Commanderie  de/.  —  vin. 

Saint-Jean  fêle  de).  -  - 

Saint-Just    monastère  de  .  —265. 

Saint-Luc  de  ).  —  Voir  Valeran 
d'Espinay  de  Saint-Luc. 

Saint-Marc,  à  Venise.  —  99,  316. 

Saint-Martin.  -   21. 

Saint-Martin  (la  Rocque  de).—  1 1">, 

Saint-Michel  ordre  de).  —  206. 

Saint-Omer.  -  51 . 

Saint  Papoul  Monsieur  de).  —  Voir 
Salviati  Bernard  . 

Saint-Quentin.  —  xxi.  130,  260,  261, 
263,  267,  270,  219.  309,  311,  317.  319. 

Saint-Saens  fprieuré  de  .  --  \. 

Sain  i  Sr\  i  eun  A\  meri  .  évéque  d'Ag- 
de  .  -  10. 

Sain  i-Sk\  erin  Jean-Francisco  de  .  — 
■ 

Saint-Vidal.  —  Voir  /.'/  Tour  An- 
le  la  . 

Saintes    —  28. 

Sai.mke     —  95. 

Salpêtre.  —  145. 

Sai.ic.es.  —  8. 

Salviati  Bernard  .  évêque  de  Saint- 
Papou!.  —  256,  257. 

Salviati   Carlo).  -  196,  191. 

San  Francisco  palais  de  .  à  Ferrare. 

—    \IV 

San-Martino.  - 

Santa  Fiore   comte  de  .  —  25 

S.\RIA  (marquis  de).  —  Voir  Minut- 
ie Lara. 

Saulx  Gaspard  de  .  sieur  de  Tavan- 
nes,  maréchal  de  camp  dans  l'armée  du 
duc  de  Guise,  puis  maréchal  de  France. 
-  315. 

Savoie.  —  2'..  249. 


TABLE    ANALYTIQUE 


333 


Savoie     (duc  de).    —    Voir    Savoie 
{Philibert-Emmanuel  de). 
Savoie  (Jacques  do).-  Voir  Nemours. 
Savoie   Philibert-Emmanuel,  duc  de». 

—  150,  ni,  213. 

Savoie    Philippe,  duc  de).  —  160. 

Saxe  (électeurs  de).  —"Voir  Auguste, 
Maurice. 

Scatola.  —  24. 

Scipion  (le  sieur),  courrier.  —  12. 

Sélim  1",  empereur  des  Ottomans.  — 
100 

Selve  (Georges  de),  évêque  de  La- 
vaur,  ambassadeur  à  Venise  et  à  Rome. 

—  XV. 

Selve  'Jean  de),  premier  président 
du  Parlement  de  Paris,  père  du  précé- 
dent    —  XIV. 

Selve  (Jean-Francisque  de',  fils  du 
précédent.  —   xv. 

Selve  Jean-Paul  de),  évêque  de 
Saint-Flour,  frère  du  précédent.—  xv 

Selve  ^Lazare  de),  chargé  de  missions 
en  Suisse,  frère  des  précédents.  —  xv. 

Selve  [Odet  de),  ambassadeur  à  Ve- 
nise et  à  Rome,  frère  des  précédents. 

—  vu,  XIII.  XIV,  XV,  3,  12,  18,  30,  33. 
43,  48,  53,  74,  80,  93,  110.  121,  212,  224, 
225,  246,  253,  256,  257,  271,  291  à  294. 
311. 

Sénéda.  —  Voir  Cériëda. 

Sens    —  143. 

Sens  (le  receveur  de).  —  83. 

Serpentins,  sortes  de  petits  canons. 

—  287. 

Serres  (Mr  de),  trésorier  des  armées 
et  commissaire  des  vivres.  —  17,  21, 
30,  35,  106,  202 

Seurre  (Michel  de),  gentilhomme  de 
la  Chambre  du  roi,  ambassadeur  en 
Angleterre.  —  167,  168. 

Sève  <le  chevalier).  —  Voir  Seurre 
(Michel  de). 

Sforza  (famille).  —  223. 

Sforza  (Roua),  reine  de  Pologne.  — 
166,  183. 

Sforza  (Rosio),  comte  deSanta-Fiore. 

—  x. 

Sforza  (François-Marie),  duc  de 
Milan.  —  318. 

Sforza  ;Guido  Ascanio).  —  x. 

Sforza  (Maximilien),  duc  de  Milan  — 
317. 

Sicile.  —  71. 

Sienne.  —  vi,  xvi,  3,  5  à  15,  18  à  25, 
27,  28,  30  à  33,  35,  36,  38,  42,  43,  45,  47, 
48,  50.  53  à  60,  62,  63,  64,  67  à  72,  75, 
78,  SI,  85,  88  à  94,  98, 101,  102, 105,  106, 
135,  177,  179,  217,  221,  222.  223,  290, 
293. 

SlGETH.   —   100. 

Sigismond  (Auguste),  roi  de  Pologne. 

—  166,  175. 

Sigismondo  (le  sieun,  courrier.—  221. 
Soissons  (évêque  de).  —   Voir   Lon- 
quejoue  (Mathieu  de). 
Somme  (la).  -  318. 
Sophie  (le  .  —  Voir  Thamasp  I". 
SOUBÈS  (le  seigneur  de).  —  x. 


Soubise  (Mr  de:,  gentilhomme  de  la 
Chambre.—  105,  114,  119,152,186,  190. 

Spalato.  —  153,  220. 

Spézia  (la).  —  245. 

Spire   —  7. 

Spire  (diète  de).  —  7. 

Strozzi  (Raptistin  .  gouverneur  de 
Modène.  —  30,   31,  39,  45,  58.  285. 

Strozzi  (Lorenzo),  cardinal,  frère  du 
suivant.  —  227. 

Strozzi  (Pierre),  maréchal  de  France. 

—  22,  23,  35,  42.  45,  46,  47,  49  à  52,54, 
55,  56,  58,  89,  91,  92,  93,  102,  105,  106, 
119.  147,  !48,  151),  176,  214,  243,  256, 
258    293,  301,  307,  308,  314. 

Strozzi  (Robert),  banquier  à  Venise, 
frère  du  précédent.      90. 
Suavius  Jean),  évêiiuc  de    Mirepoix. 

-  223.  278. 
Suisse.  —  312. 

Sui.leyman  II,  empereur  des  Otto- 
mans.— 11,  22,  23.  51,  69,  100,  111, 
117,  119,  120,  127.  152, 153,  156.  157.  184, 
186.  190,193.  203,223,226,  229.  2 il.  261, 
262. 

Syrente.  —  XVI. 


Tadéi  (Vincenso),  gouverneur  d 'An- 
cône,  commissaire  dès  guerres.  -  246. 

Taix  (Jean  de),  gentilhomme  de  la 
Chambre,  grand-maître   de   l'artillerie. 

—  4. 

Talamon  (port  de).  —  314. 

Tanaro  (le).  —  21. 

Tassin  ^de  Luna  ou  Lonato  .  agent 
de  la  France  en  Lotnbardie.  —  59,'  85, 
91,  166,  195,  208.  209,  213,  224,  256,257, 
318 

Tauris.  —  100. 

Tausserat-Radel    Alexandre). —  v, 

XXVII. 

Tavance  (M.  de).—  238. 

Tavannes  (M.  de,.—  Voir  Saulx 
(Gaspard  de) 

Téramo.—  230,  242,  307. 

Termes  (Paul  de  la  Rarthe,  seigneur 
de),  maréchal  de  France.  —  7,  9,  11,  13, 
14,  17,  27,  34,  36,  53,54,  63,  68,  73,76, 
221,  284,  301. 

Térouenne   —  Voir  Thérouanne. 

Testons  (monnaie.  —  64,  81,  133. 

Testu  (François),  contrôleur  des  ban- 
des italiennes  dans  l'armée  du  duc  de 
Guise.  -  271. 

Thaiz  (M.  de).—  Voir  Taix  (Jean  de). 

Thamasp  Ier,   empereur  de  la  Perse. 

—  100. 

Thérouanne.  —  4,  51,  57,  58/61. 
Thienne  (Octaviode  .courrier.—  188. 
Thion  ville.  —  42. 

Tiioloméi  (Raccio),  courrier.  —  272. 
TiBrucE    le  cavalier).  —  303. 
Tolède  (Garcia  de).  —  14. 
Tolède  (Pierre    de),  vice-roi  de  Na- 
ples,  père  du  précédent.  —  7,  10.  12. 
To.miîesy.  —  17. 
Tortone.  -  1 47. 
tohtorette.—  307. 


27 


334 


TABLE    ANALYTIQUE 


Toscane.-  6,  7.  12,  16,  19.  32,  37, 
54,  6!.  87,  91,  114,  125,  126,  130, 
132,  135,  142,  149,  135,  166,  172.  187, 
190,  191,  214,  227,  228,  230,  246,  254, 
267,  268,  271,  273,  284,  285,  287.  301, 
303.  313,  314,  317. 

TOSCANELLO. —     187. 

Toulon  (archevêque  de).  —  Voir 
Trivulce   Antoine). 

Toulouse.—  xxiv,  17,  319.  —  Parle- 
ment, xxiv.  —  Sénéchaussée,  vin.— 
Viguerie,  ix. 

Tour  (haronnie  de  la).  —  291. 

Tour  d'Auvergne  (Madeleine  de  la), 
mère  de  Catherine  de  Médicis.  —  291. 

TOURNON. —  IX 

TÔurnon  (François  de),  cardinal,  mi- 
nistre et  secrétaire  d'Etat.  —  ix,  xiv, 
xvm.  xxin.  12  t6,  70.  86.  96,  118,  129, 
151,  159,  170.  176,177,  17S.  192,  218.221, 
222.   232,  237.    241,    2  il.   257,   277.  300. 

Transylvanir   —  127.  175,  L85. 

Thème.-  106,   148,  133.  183.  224. 

Thème  le  cardinal  de  .  —  Voir  Ma- 
druce   Christophe). 

Trente   Concile  de  .  -  17.  136,  191. 

Trkpoli  [Stéphane  .  —  17  i. 

Trévigian  ..Marc  Antonio),  doge  de 
Venise.  -  109. 

Trévise.  -  219. 

TRIESTE.  -    219,  226. 

Trivulce  [Antoine  .  archevêque  de 
Toulon,  cardinal.  -  xxi,  227.  229,  249, 
312. 

Trois  EvÊCHÉS.  —  7. 

Tronto  [le  .  -  242,  248. 

Tunis.  —  10,  100. 

Turin.  —  21,  218,  247. 

Turin  (Jehan  de),  colonel  au  service 
de  la  France.  —  301 

Tyrol.  —  183. 


Udine.  —  219. 

Urbin  duc  d"  .  —  Voir  Rovère  (Gui 
d'Vbaldo  de  La). 

Urbin  (Etat  d').  —  220,  314. 

Turin  le  palais  d'  ,  à  Venise.  —  123. 
129. 

Ursini  (Flaminio),  capitaine  italien.— 
55,  57. 

Ursini  (Julio;.  —  Voir  Orsini    Julio  . 

I  rsins  Christophe  Jouvenel  des), 
seigneur  de  la  Chapelle  des  Ursins.— 102. 

Ùrsins  Jourdain  des ,  lieutenant-gé- 
néral en  Corse.  —  33,  91. 


Valcolin.  —  82. 

Valence.  —  Voir  Valenza. 

VALENZA  'place  du  Milanais  .  —  117. 
148,  21S,  220,  224. 

Valeran  d'Espinaï  de  Saint-Luc,  ma- 
réchal de  camp  dans  l'armée  du  duc 
de  Cuise.  -  293. 

N'aliénera.  —  238,  240,  242. 

Valfe.nière.  —  Voir  Valfenera. 

Valfenyère.  —  Voir  Valfenera. 

\  \\.\  ion    le  capitaine  .  —  91 . 


Vannes.  —  155. 

Vaquiès   famille  de).  —  \\. 

Vargas  'François  de  .  ambassadeur 
de  Charles-Quint  et  de  Philippe  11  à 
Venise.  —  136,  171,  192.  239,  240,  241, 
243.  219.  263,264,  265,  266,  312. 

Varsovie.  —  191. 

Vatican  (palais  du).  —  xvm. 

Vaucelles  trêve  de  .  —  xv,  xix,  131. 
297. 

Vechio  (Thomas  dcl  ,  aumônier  ordi- 
naire du  roi,  chargé  de  mission  auprès 
du  duc  de  Ferrare.  -  89.  90.  91.  92,  93. 

Venieri  (François  .  doue  de  Venise.— 

14S.  17  4. 

Venise.  —  xiv,  xvi,  xvm,  3.  11,  16, 
17,  18.  22.  23,  26,  27.  29.  30,  32, 

64,  72.  75.  83,  83.  87,  90,   109,  112,  119, 

120,   144,   143,   146.  166.    167.    173,  180, 

182   à    183.    ISS.  197.  19S.   199,  214,  218, 

219,    22n.    2'. 3.    27:!.    279.    2SS.  2  0,  291. 

293,  294,  296,  299,  300,  304,  309  311, 
31S. 

Venise  ambassadeurs  à  Venise  et  de 
Venise  .  Voir  Ambassadeurs;  —  Voir 
aussi  Rialto,  Saint-Marc,  Urbin   Palais 

'/■  ■ 

\  ;  mi  rini,  conservateur  des  Archives 
a  Ferrare.  —  XXVI. 

VERCE1L    —282. 

Vérone.    -   22  4.  226 

Verseil.  —  Voir  Yeiccil. 

Vi  \i.i.\kt  Michel  .  conseiller  du  duc 
de  Cuise  en  Italie.  —  133.   L62,  271. 

Vicenci  .  180,  181,  182,  184,  185, 
186,  188,  189.   190,  219. 

Vidal  Marco  .  maître  des  courrier-. 
;i  Venise.  -    197,  315. 

Vienne    Autriche  .  —  100.   189,  191. 

Vienne  M.  de).  —  Voir  Marillac 
Charles  de  . 

VlGNALE     —   l-"'l>.   13!.    152 
VlGNAUX.   -   XXVII 

\  igné  (Jean  Carcenac,  dit  La  .  ambas- 
sadeur auprès  de  la  Porte  Ottomane.— 

vu.  12:;.  r,:;.  156,  160,  162,  166,  206,  210, 
21  4.  221).  22  :.  226,  227.  22!».  230,  2::2.2:i::, 
210.  211    249,  261,  262. 

Villandri  (Claude  le  Breton  de  .  se- 
crétaire des  finances.— 86,  110,  L27.  244. 

VlLLARS  Pierre  de  ,  évoque  de  Mire- 
poix.  —  223,  27s. 

Villemo.n  i  .  /   de  .  agenl  a  Constanti- 

nople.         120,    111.    137.   168. 

Vll.LEMIR.    —    IX. 

Vini.i.i    Paolo).  —  3 
ViTERBE.        ;:!.  48,  187. 
Vivres  de  GUERRE.  —    12. 
56,  76,  L05,   I  is.   196,  287,  301,  -'^'- 
Volpia.no.  —  119. 


V  miv  \.  dev  d'Alger.  —  245. 
Vousouf,  dej  d  Uger.  —  2  48 
Y\  nr.K    —21. 


Z  a  poli      Jean-Sigismond    .     roi    de 
Hongrie,  -  175. 


ERRATA  335 


ERRATA 


Page  xv,  note,  ligne  4,  au  lieu  de  :  François  de  Selve,  lire  :  Jean-Paul  de  Selve. 

Page  xx,  ligne  29,  au  lieu  de:  il  arriva  lui-même  ,à  Venise,  lire:  Jil  arriva  à 
Venise. 

Page  xxn,  ligne  23,  annuler  le  renvoi  {!)  et  le  placer  à  la  ligne  29  après  le 
mot  :  écus. 

Page  39,  note,  au  lieu  de  :  Camillo  Martinengo,  lire:  Camillo  Orsini. 

Page  100,  note  1,  au  lieu  de  :  Thomasp  I",  lira  Thamasp  Ior. 

Page  114,  note,  au  lieu  de  :  à  20  kil.  de  Brescia,  lire:  à  22  kil.  de  Brescia. 

Page  118,  note  3,  au  lieu  de  :  François  de  Lorraine,  duc  de  Guise,  lire  :  Claude 
de  Lorraine,  duc  d'Aumale. 

Page  135,  ligne  6,  au  lieu  de  :  Prestanza,  lire:  prestanza. 

Page  151,  note  2,  au  lieu  de:  François  de  Bouliers,  lire  :  François  de  Bellier. 

Page  183,  note  4,  ligne  2,  au  lieu  de  :  Alcala  de  Bénarès,  lire  :  Alcala  de 
Hénarès. 

Page  215,  note,  ligne  2,  au  lieu  de  :  lettre  de  du  Gabre  au  roi,  page  144,  lire  : 
page  216. 

Page  223,  note  1,  au  lieu  de  :  Camillo  Orsino,  lire  :  Camillo  Orsini. 

Page  282,  note  2,  au  lieu  de:  Verseil,  lire:  Verceil. 

Page  301,  note  3,  ligne  3,  au  lieu  de  :  Orano,  lire  :  Ornano. 


Montpellier.  —  Imprimerie  Serre  cl  Roumégous,  rue  Vieille-Intendance. 


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University  of  Ottawa 
Date  Due 


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DC  112  t    D    6    3    fl    4  1903 

DU  0    fl    B    R    E    1  DOMINIQUE. 

CORRESPONDANCE  POLITIQ 


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CE  DC   0112 
•D83A4  1903 
COO   DU  GABRE» 
ACC#  1370230 


DO  CORRESPOND 


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